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Se porter caution, auprès d’une banque, pour la production d’un film d’animation, ne laisse que peu de possibilités de contester son engagement. Toutefois, en cas de manquement de la banque à son obligation annuelle d’information, celle-ci est déchue de son droit au paiement des intérêts échus, ainsi que des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la signature du contrat, et les paiements imputés en priorité sur le capital.
Aux termes des articles 1109 et 1110 du code civil, en leur version applicable au litige, il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a été donné que par erreur. L’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet. L’erreur sur la substance s’entend non seulement de celle qui porte sur la matière même de la chose, mais aussi de celle qui a trait aux qualités substantielles en considération desquelles les parties ont contracté.
En l’occurrence, si les engagements de caution portaient effectivement sur un montant supérieur à celui stipulé au prêt, il n’en demeurait pas moins qu’ils ont été expressément acceptés par les cautions, étant observé que le formalisme imposé par les articles L341-2 et L341-3 anciens du code de la consommation a été parfaitement respecté.
Au surplus, les cautions ont renoncé expressément :
— au bénéfice de division prévu par l’article 2303 du code civil, reconnaissait devoir s’acquitter des sommes dues sans pouvoir exiger que le prêteur engage de quelconques poursuites préalables à l’encontre d’autres personnes s’étant portées le cas échéant caution de la société (Butterfly Animation) ;
— au bénéfice de l’article 2310 du code civil à l’égard des organismes de caution mutuelle agissant en qualité de co-cautions, selon lequel, en cas de pluralité de cautions, la caution qui a payé la dette a recours contre les autres cautions, chacune pour sa part et portion.
Les cautions ne rapportant aucune preuve d’une erreur sur la substance de la chose ayant vicié leurs engagements de caution, elles ont été déboutées de leur demande d’annulation des actes de cautionnement.
Aux termes de l’article L. 341-4 du code de la consommation, devenu depuis l’ordonnance du 14 mars 2016 l’article L 332-1 du code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Selon ce texte, la proportionnalité de l’engagement de la caution au regard de ses facultés contributives est évaluée en deux temps : au jour de la conclusion du contrat de cautionnement et, à supposer l’existence d’une disproportion à cette date, au jour de son exécution, la caution pouvant revenir à meilleure fortune.
C’est la situation financière globale de la caution, c’est-à-dire ses ‘facultés contributives’, qui doit être appréhendée au jour de l’engagement. L’exigence de proportionnalité impose au créancier de s’informer sur la situation patrimoniale de la caution, c’est-à-dire l’état de ses ressources, de son endettement, et de son patrimoine, ainsi que de sa situation personnelle (régime matrimonial).
La disproportion s’apprécie lors de la conclusion du contrat de cautionnement au regard du montant de l’engagement souscrit et des biens et revenus de chaque caution, et en prenant en considération son endettement global, y compris celui résultant d’engagements de caution.
Au sens de ce texte et de la jurisprudence subséquente, une disproportion manifeste au regard des facultés contributives de la caution, est une ‘disproportion flagrante et évidente pour un professionnel normalement diligent’ entre les engagements de la caution et ses biens et revenus.
Le contrôle de l’établissement de crédit repose sur les informations communiquées par les cautions sur une fiche de renseignement, étant précisé que la charge de la preuve pèse sur le débiteur. A noter que l’établissement bancaire n’est pas tenu de vérifier, en l’absence d’anomalies apparentes, l’exactitude des informations contenues dans la fiche de renseignement. La communication des informations repose sur le principe de bonne foi, à charge pour les cautions de supporter les conséquences d’un comportement déloyal.
Il appartient à la caution qui entend opposer à la caisse créancière les dispositions de l’article L. 332-1 du code de la consommation, de rapporter la preuve du caractère disproportionné de son engagement par rapport à ses biens et revenus au jour de celui-ci.
C’est au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion d’établir qu’au moment où il l’appelle le patrimoine de la caution lui permet de faire face à son obligation. Le caractère averti ou non du dirigeant est indifférent pour l’application de l’article L. 332-1 du code de la consommation.
En l’espèce, les cautions n’ont fait état d’aucun patrimoine alors qu’ils avaient conclu avec le Crédit du Nord, un prêt immobilier de près de 300 000 euros. Les juges n’ont pas tenu compte de cette charge supérieure à celle déclarée, compte tenu du principe de bonne foi auquel ils étaient tenus.
L’article 1147 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part. Le banquier est débiteur d’une obligation de mise en garde à l’égard de la caution non avertie.
Le caractère averti de la caution s’évalue au regard des aptitudes de celle-ci à comprendre la portée de son engagement, à apprécier le risque inhérent à l’engagement et de son expérience dans les affaires, mais aussi en fonction du niveau d’information sur la situation financière du débiteur principal.
La banque ne peut se décharger de son obligation de mise en garde par une clause contractuelle.
La banque, dans le cadre de son obligation de mise en garde est soumise à une double obligation, à savoir, d’une part, attirer l’attention de la caution sur le risque d’endettement né de l’octroi des prêts au débiteur principal, notamment le risque de défaillance de l’emprunteur, d’autre part, lui exposer les risques de l’opération en tenant compte de ses propres facultés contributives.
Le banquier n’est débiteur de l’obligation de mise en garde qu’à l’égard des cautions non averties et si l’opération envisagée comporte un risque pour celle-ci. Celui qui se prévaut d’un manquement doit d’abord prouver que l’opération présentait un risque.
La faute d’un établissement bancaire consistant à avoir manqué à son obligation de mise en garde constitue une perte de chance, pour la caution non avertie, de ne pas conclure le contrat et le préjudice résultant de cette faute ne peut être évalué à l’intégralité des sommes engagées.
Le caractère averti de la caution s’évalue au regard des aptitudes de celle-ci à comprendre la portée de son engagement, à apprécier le risque inhérent à l’engagement et de son expérience dans les affaires, mais aussi en fonction du niveau d’information sur la situation financière du débiteur principal. Il appartient au banquier de démontrer que la caution était avertie.
En l’espèce, les cautions ont été considérées comme des profanes mais les deux prêts conclus consistaient en des prêts classiques destinés à financer du matériel professionnel. Il ne s’agissait donc pas d’opérations complexes.
Par ailleurs, aucune disproportion des cautionnements lors des engagements souscrits n’a été retenue, et il n’était donc pas établi l’existence d’un risque d’endettement des cautions au vu de leurs propres facultés contributives.
Aux termes des dispositions de l’article L.313-22 du code monétaire et financier, les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l’engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.
Le défaut d’accomplissement de la formalité prévue à l’alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l’établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu’à la date de la communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal, sont réputés, dans les rapports entre la caution et l’établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.
Aux termes des dispositions de l’article L341-6 ancien du code de la consommation, en sa rédaction applicable au présent litige, le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement. Si l’engagement est à durée indéterminée, il rappelle la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. A défaut, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information. L’information donnée à la caution postérieurement à cette date ne satisfait pas aux exigences légales. Elle est due jusqu’à l’extinction de la dette. Toutefois aucune forme n’est imposée pour porter à la connaissance de la caution les informations exigées. La charge de la preuve du respect de cette obligation pèse sur le banquier.
L’information est un fait juridique qui peut être prouvée par tout moyen, le plus souvent par la production d’un document écrit. Une lettre simple est suffisante du moment qu’il est démontré que celle-ci contenait les informations exigées par la loi. En revanche, il n’incombe pas à l’établissement de crédit d’apporter la preuve que la caution a effectivement reçu l’information envoyée. En l’espèce, la banque ne justifiant pas de l’accomplissement de son obligation d’information annuelle des cautions, a été déchue de son droit aux intérêts. Télécharger la décision