Sommaire
Associé caution solidaire
Les associés d’une société se sont constitués caution solidaire en garantie du remboursement d’un concours bancaire à concurrence de 23 202 euros correspondant à 25% de l’obligation garantie majoré d’un montant forfaitaire pour les intérêts, accessoires et indemnité de résiliation, ce pour une durée de 6 ans.
Déclaration de sa créance de la banque
La liquidation judiciaire de la société a été prononcée par jugement du tribunal de commerce. La SA SOCIETE GENERALE a procédé à la déclaration de sa créance pour la somme globale de 48 410,48 euros au titre du prêt, et la clôture des opérations de liquidation pour insuffisance d’actif est intervenue peu après.
Par lettres recommandées avec accusés de réception – proposant alors la mise en place d’un échéancier durant une année à raison d’un règlement mensuel de 200 euros – la SA SOCIETE GENERALE a mis chacune des cautions en demeure de s’acquitter des sommes dues au titre des prêts dans la limite de leur engagement.
Ces démarches étant restées vaines, la SA SOCIETE GENERALE a fait assigner les associés aux mêmes fins devant le tribunal de commerce qui selon jugement contradictoire a dit les cautionnements des associés valides, dit l’action de la SOCIETE GENERALE non prescrite, dit la créance certaine.
Sort de la caution en cas de liquidation
Le placement en liquidation judiciaire de la société débitrice n’est pas une cause d’exigibilité anticipée immédiate du prêt, cette circonstance ne fait pas courir le délai de prescription de la garantie de caution.
L’effet interruptif de prescription attaché à la déclaration de créance dans le cadre d’une procédure collective s’applique également à la caution (Cass. com. 10 février 2015 n°13-21953, Cass. Com. 23 oct 2019 n°17-25656).
Disproportion de l’engagement de caution
En application des dispositions de l’article L. 341-4 ancien du code de la consommation devenu l’article L. 332-1 du même code, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Il appartient à la caution poursuivie de démontrer la disproportion qu’elle invoque, laquelle s’interprète restrictivement comme impliquant l’impossibilité manifeste de faire face à l’engagement en cause à la date de sa souscription compte tenu de ses revenus et patrimoine ainsi que de son endettement global incluant les engagements antérieurs ou concomitants.
La banque n’est pas tenue de vérifier les déclarations qui lui sont faites à sa demande par les personnes se proposant d’apporter leur cautionnement, sauf s’il en résulte des anomalies apparentes. En revanche, la caution n’ayant déclaré aucun élément sur sa situation patrimoniale à l’occasion de son engagement est libre de démontrer la réalité de sa situation financière à cette date de référence.
En l’occurrence, au titre de l’année de souscription du cautionnement litigieux, l’associé a déclaré un revenu de 13 634 euros. Si aucune fiche de renseignements sur la situation des cautions n’est versée aux débats, le fait que l’associé ne détienne pas de patrimoine au moment de son engagement n’est pas discuté. Dans ces conditions et même en l’absence de charges fixes déclarées, la somme garantie représentait près de deux années de salaires ce qui à défaut de capital mobilisable, ne réservait pas à l’appelant un niveau de ressources nécessaires aux besoins de la vie courante de sorte que l’engagement litigieux a été jugé comme manifestement disproportionné lors de sa souscription.
Appréciation des ressources de la caution à la date de référence
Il revient dès lors à la banque de démontrer que la caution était en mesure de faire face à son obligation à la date à laquelle elle est appelée en paiement, ce qui conduit à examiner sa situation lorsqu’elle a été assignée à cette fin soit en l’espèce, au mois de décembre 2018 et non comme le suggère la SOCIETE GENERALE, au moment où celle-ci a fait pratiquer avec succès une saisie-attribution sur le compte de l’associé le 4 août 2020 soit plus de 18 mois après la date de référence (Cass. com. 9 juillet 2019 n°17-31346).
La SOCIETE GENERALE a été déclarée mal fondée à se prévaloir de l’engagement de caution de l’associé.
Devoir de mise en garde de la banque
La banque dispensatrice de crédit est tenue, à l’égard d’une caution non avertie, à une obligation de mise en garde qui est constituée si l’engagement de celle-ci n’est pas adapté à ses capacités financières ou s’il existe d’emblée un risque d’endettement né de l’octroi du prêt qui s’analyse au regard du risque de défaillance caractérisé du débiteur principal.
Lorsque la caution est avertie, ce qu’il appartient à la banque de démontrer en présence de l’une des hypothèses précitées, l’établissement de crédit n’est débiteur d’une telle obligation que si au moment de l’octroi du prêt, il a sur les revenus et le patrimoine de la caution ou sur ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles des informations que celle-ci ignorait.
La caution avertie est celle disposant des compétences nécessaires lui permettant de mesurer le contenu, la portée et les risques liés à son engagement, lesquelles ne dépendent pas forcément de sa qualité de professionnel et sont appréciées notamment au regard de ses capacités de discernement, de son expérience dans le secteur considéré et de son habitude des affaires. Il est également tenu compte des caractéristiques de l’opération.
Dès lors que la caution ne peut se voir opposer les termes de son engagement jugé disproportionné et la preuve d’éventuelles facultés contributives suffisantes à la date de l’appel en paiement n’est pas rapportée, elle ne peut se prévaloir d’aucun préjudice. La demande indemnitaire présentée de ce chef doit en conséquence être rejetée.
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 5 – Chambre 6 ARRET DU 14 SEPTEMBRE 2022 Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/08527 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB657 Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Mars 2020 -Tribunal de Commerce de PARIS –RG n° 2018068184 APPELANT Monsieur [T] [U] Né le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 9] (95), de nationalité française [Adresse 4] [Localité 7] Représenté par Me Paul MARIANI, avocat au barreau de PARIS, toque : R091 INTIMES Monsieur [Z] [E] né le [Date naissance 2] 1986, de nationalité française [Adresse 3] [Localité 8] Représenté par Me Max ARNAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : R146 S.A. SOCIETE GENERALE [Adresse 5] [Localité 6] Représentée par Me Christophe EDON de la SELEURL CHRISTOPHE EDON CONSEIL – C.E.C, avocat au barreau de PARIS, toque : B0472 COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Florence BUTIN,Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de : M. Marc BAILLY, Président de chambre, Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère Mme Florence BUTIN, Conseillère Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL ARRET : — CONTRADICTOIRE — par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. — signé par Marc BAILLY, Président de chambre, et par Anaïs DECEBAL, Greffière , présente lors de la mise à disposition. * * * La SARL OVATIO, immatriculée le 25 mars 2009 et cogérée par [Z] [E] et [T] [U], avait pour activité la production de films publicitaires. Selon une offre émise le 9 juin 2011 et acceptée le 28 suivant, elle s’est vue consentir par la SA SOCIETE GENERALE un prêt d’un montant de 71 395 euros remboursable sur 4 années au moyen de 48 mensualités égales et consécutives de 1 621,63 euros et au taux de 4,30% l’an, destiné à l’achat de matériel informatique. Par acte du 22 juin 2011, [Z] [E] et [T] [U] se sont constitués caution solidaire de la société OVATIO en garantie du remboursement de ce concours à concurrence de 23 202 euros correspondant à 25% de l’obligation garantie majoré d’un montant forfaitaire pour les intérêts, accessoires et indemnité de résiliation, ce pour une durée de 6 ans. La liquidation judiciaire de la SARL OVATIO a été prononcée par jugement du tribunal de commerce de PARIS rendu le 18 juillet 2013 avec une date de cessation des paiements fixée au 5 juillet 2013. La SA SOCIETE GENERALE a procédé à la déclaration de sa créance le 23 juillet 2013 pour la somme globale de 48 410,48 euros au titre du prêt, et la clôture des opérations de liquidation pour insuffisance d’actif est intervenue le 3 mars 2015. Par lettres recommandées avec accusés de réception en date des 17 juillet 2013 et 23 juillet 2013, 23 décembre 2013, 28 janvier 2014 – proposant alors la mise en place d’un échéancier durant une année à raison d’un règlement mensuel de 200 euros – et enfin 27 mars 2018, la SA SOCIETE GENERALE a mis chacune des cautions en demeure de s’acquitter des sommes dues au titre des prêts dans la limite de leur engagement, ce qui représentait 16 688,57 euros sur la base du décompte arrêté pour la période du 28 octobre 2012 au 27 mars 2018. Ces démarches étant restées vaines, la SA SOCIETE GENERALE a par acte du 4 décembre 2018 fait assigner [Z] [E] et [T] [U] aux mêmes fins devant le tribunal de commerce de PARIS qui selon jugement contradictoire rendu le 12 mars 2020, a : — dit les cautionnements de [Z] [E] et [T] [U] valides, — dit l’action de la SOCIETE GENERALE non prescrite, — dit la créance certaine, — dit que la SOCIETE GENERALE ne pouvait se prévaloir du contrat de cautionné conclu par [Z] [E] du fait de son caractère disproportionné, — condamné [T] [U] à payer à la SOCIETE GENERALE la somme de 11 746,05 euros augmentée des taux d’intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2012, au titre de son acte de cautionnement et dans la limite de son engagement, et a débouté [T] [U] de sa demande d’appel en garantie de [Z] [E]. — ordonné l’exécution provisoire, — condamné la SOCIETE GENERALE à payer à [Z] [E] la somme de 1 000 euros, et [T] [U] à payer à la SOCIETE GENERALE la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, déboutant les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires, et a condamné [T] [U] aux dépens. Ce, aux motifs que : — concernant la caducité invoquée des actes de cautionnement : l’obligation de règlement perdure sauf disposition contractuelle spécifique – absente en l’espèce – au-delà de l’obligation de couverture éteinte le 22 juin 2017 ; — concernant la prescription extinctive alléguée : la déclaration de sa créance par la SOCIETE GENERALE auprès du liquidateur en date du 23 juillet 2013 a interrompu la prescription jusqu’au jugement prononçant la clôture pour insuffisance d’actifs du 3 mars 2015, un nouveau délai commençant donc à courir à compter du 4 mars 2015, or les assignations en paiement sont délivrées en décembre 2018 ; — concernant le caractère certain de la créance : il n’est pas démontré que la créance chirographaire déclarée le 23 juillet 2013 ait fait l’objet d’une contestation voire ait été rejetée, et les cautions solidaires informées du retard de paiement de la société OVATIO et mis en demeure de s’acquitter de leur engagement n’ont alors pas formé d’objection sur le principe et le quantum des demandes ; — concernant la disproportion des engagements souscrits par [Z] [E] : la banque ne produit aucune fiche de renseignement le concernant et ne conteste pas les affirmations de ce dernier selon lesquelles il ne possédait aucun patrimoine au moment de la signature de l’acte de cautionnement, l’engagement représentait 2,5 fois son revenu moyen au vu des avis d’imposition produits pour les années 2009, 2010 et 2011, par ailleurs la SOCIETE GENERALE ne rapporte pas la preuve de ce que le patrimoine de [Z] [E] au moment de l’appel en paiement lui permettait de faire face à ses obligations ; — concernant le défaut de mise en garde : [T] [U] ne démontre aucun manquement de la banque à cet égard ; — concernant l’information de la caution : les courriers produits par la SOCIETE GENERALE ne comprennent pas les années 2012 et 2013, et ceux ultérieurs ne respectent pas le formalisme requis ; — concernant la mauvaise foi reprochée à la banque : la première mise en demeure de [T] [U] envoyée le 23 juillet 2013 est restée sans effet, la caution est le premier responsable de la poursuite de la procédure ; — concernant l’appel en garantie de [Z] [E] : l’engagement de caution étant manifestement disproportionné, le contrat de cautionnement se voit privé d’effet à l’égard des cofidéjusseurs qui entendraient exercer une action récursoire. **** Par déclaration en date du 3 juillet 2020, [T] [U] a formé appel de ce jugement en critiquant chacun de ses chefs. Par ordonnance du 23 mars 2021, le magistrat en charge de la mise en état a débouté la SA SOCIETE GENERALE de sa demande incidente tendant à faire constater la caducité de la déclaration d’appel de [T] [U] au motif que ses conclusions invoquaient notamment la forclusion du droit d’action et la prescription sans avoir énoncé, dans le dispositif de ces écritures, les fins de non-recevoir que ces moyens sous-tendent, estimant qu’il appartiendra à la cour de juger de l’étendue des prétentions dont elle est saisie qui est déterminée par l’article 954 du code de procédure civile et notamment son alinéa 3 disposant que « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion ». Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 24 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens qui y sont développés, [T] [U] demande à la cour de : Vu l’article 2313 du code civil, ensemble l’article 2224 du même code ; Vu l’article L. 341-2 du code la consommation, ensemble les articles L. 312-14 et L. 312-16 du même code ; Vu l’article L. 341-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au moment du litige ; Vu l’article L. 313-22 du code monétaire et financier ; Vu les articles 1231 et suivants, 2310 du code civil, ensemble l’article 2309 du même code; Vu l’article 9 du code de procédure civile ; REFORMER le jugement du 12 mars 2020 en ce qu’il a condamné [T] [U] à payer une somme de 11 746,05 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2012 et en ce qu’il l’a condamné à payer une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens ; Statuant à nouveau, REJETER toutes les demandes de la SOCIETE GENERALE comme étant entachées d’irrecevabilité ou comme étant à tout le moins infondées ; Subsidiairement : REFORMER le jugement du 12 mars 2020 en ce qu’il a mis [Z] [E] hors de cause, en ce qu’il a rejeté l’appel en garantie formé par [T] [U] à l’encontre de [Z] [E] et en ce qu’il a rejeté la demande reconventionnelle en dommages et intérêts formée par [T] [U] à l’encontre de la SOCIETE GENERALE ; Statuant à nouveau, CONDAMNER [Z] [E] à relever et garantir [T] [U] de la moitié des sommes au paiement desquelles il aura été condamné au bénéfice de la banque en principal, intérêts, frais et accessoires ; CONDAMNER la SOCIETE GENERALE au paiement d’une somme de 15 258,56 euros à titre de dommages et intérêts ; CONDAMNER tout succombant aux entiers dépens de la première instance et d’appel, outre au paiement d’une somme de 9 200 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. faisant valoir pour l’essentiel que : Sur la forclusion ou en tout état de cause la prescription de l’action de la SOCIETE GENERALE, la durée d’engagement de 6 années était expirée à la date de l’assignation, l’acte qui doit être interprété strictement ne précise pas si cette durée se rapporte à l’obligation de couverture ou de paiement, l’article 13 du contrat de prêt stipule une clause d’exigibilité de plein droit du montant total de l’emprunt restant dû en cas de liquidation judiciaire de la société OVATIO qui a été prononcée par jugement en date du 18 juillet 2013, or l’assignation introductive d’instance n’a été signifiée qu’au mois de décembre 2018, dès lors la demande de condamnation de la banque se heurte à une fin de non-recevoir tirée de la prescription extinctive, en outre la déclaration de créance en date du 23 juillet 2013 a été effectuée par une personne ne disposant d’aucun pouvoir spécial pour y procéder, enfin s’il devait être considéré que cette déclaration est régulière, la durée pendant laquelle le délai est interrompu ne saurait concerner la caution solidaire en ce que l’effet interruptif d’une demande en justice ne peut concerner que les parties à l’instance qui est ainsi engagée mais en aucun cas les tiers à celle-ci, le délai pour agir a donc expiré le 24 juillet 2018 ; Sur l’absence de créance certaine, la décision dont appel a inversé la charge de la preuve en jugeant qu’il n’est pas démontré que la créance déclarée le 23 juillet 2013 ait fait l’objet d’une contestation sérieuse voire ait été rejetée, en outre les suites de cette déclaration effectuée par une personne ne disposant d’aucun pouvoir spécial à ce titre sont inconnues, enfin les dirigeants d’une société sont dessaisis à l’occasion de l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire et en conséquence n’avaient pas la possibilité de contester la déclaration de créance litigieuse ; Sur la disproportion des engagements de caution de [T] [U] ce moyen tend à justifier et fonder sa prétention visant à la remise en cause du principe même de son obligation de caution, au moment de la souscription de l’acte litigieux ses revenus annuels étaient de 12 348,35 euros et il ne disposait d’aucun patrimoine, enfin au moment de l’appel en paiement la banque ne démontre pas que sa situation lui permettait effectivement de faire face à son engagement étant relevé qu’à partir de l’année 2013 qui est celle de la mise en demeure de la caution, ses revenus annuels étaient de 1 946,59 euros, il n’est pas plus établi qu’il était en mesure de s’acquitter de la dette en 2018 lorsqu’il a été assigné ; Sur l’appel en garantie à l’encontre de [Z] [E], ce dernier et [T] [U] avaient sensiblement le même niveau de revenus, et s’il devait être estimé que les engagements de caution du second n’étaient pas disproportionnés il y aurait lieu de censurer le jugement entrepris en ce qu’il a mis hors de cause l’autre cogérant et d’accueillir ainsi l’appel en garantie formé à son encontre ; Sur les demandes indemnitaires, la banque a manqué à ses obligations issues des articles L. 312-14 et L. 312-16 du code de la consommation et ne peut prétendre au paiement des intérêts de la créance alléguée, corrélativement aucune capitalisation des intérêts ne peut intervenir, en outre le devoir de mise en garde n’a pas été respecté à l’égard de [T] [U] qui est une caution profane ayant souscrit un engagement disproportionné, la perte de chance peut raisonnablement être évaluée au montant correspondant à la différence entre le total revendiqué et le niveau de revenus dont il est justifié par [T] [U] au cours de l’année 2013 soit 15 258,56 euros, enfin la banque a fait preuve de mauvaise foi en attendant la fin de l’année 2018 pour saisir la justice d’une demande visant à obtenir le paiement d’une dette rendue exigible dès le 18 juillet 2013, laissant ainsi courir les intérêts conventionnels au taux de 8,0% s’ajoutant aux pénalités et autres majorations de retard. Aux termes de ses dernières conclusions notifiées les 24 décembre 2020 puis 30 mai 2022, la SA SOCIETE GENERALE demande à la cour de : DECLARER l’appel de [T] [U] du jugement du 12 mars 2020, tant irrecevable que mal fondé ; DEBOUTER [T] [U] de l’ensemble de ses demandes ; DECLARER l’appel incident de [Z] [E] du jugement du 12 mars 2020 irrecevable; Subsidiairement : DECLARER l’appel incident de [Z] [E] du jugement du 12 mars 2020 mal fondé, et l’en débouter ; CONFIRMER ledit jugement en ce qu’il a : — jugé l’action de la SOCIETE GENERALE recevable et non prescrite ; — jugé la créance de la SOCIETE GENERALE fondée en son principe et son montant ; — jugé valides les engagements de caution de [Z] [E] et [T] [U] ; — condamné [T] [U] à payer à la SOCIETE GENERALE au titre de son acte de cautionnement et dans la limite de cet engagement la somme de 11 746,05 euros augmentés des intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2012 ; — condamné [T] [U] à payer à la SOCIETE GENERALE la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; Y ajoutant : CONDAMNER solidairement [T] [U] et [Z] [E] à payer à la SOCIETE GENERALE la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; CONDAMNER les mêmes solidairement en tous les dépens. faisant valoir pour l’essentiel que : Sur la recevabilité de l’action de la SOCIETE GENERALE et plus précisément l’absence de forclusion, [T] [U] et [Z] [E] opèrent une confusion entre l’étendue de l’engagement dans le temps et le délai de mise en ‘uvre de la garantie, l’action en paiement dirigée contre les cautions visant une dette constituée antérieurement à l’arrivée du terme soit le solde de prêt souscrit le 9 juin 2011 ; Sur la prescription invoquée, le point de départ du délai pour agir contre la caution n’est pas à compter du jour de la déclaration de créance au passif, ce délai étant interrompu pendant la durée de la procédure collective jusqu’à sa date de clôture soit le 3 mars 2015; Sur la déclaration de créance, la banque a régulièrement déclaré sa créance le 23 juillet 2013 à titre chirographaire et les cogérants avaient la possibilité de contester cet acte devant le juge commissaire ; Sur l’information annuelle, la banque produit aux débats les lettres adressées aux cautions depuis 2013 ; Sur l’absence de devoir de mise en garde, les cautions en leur qualité de cogérants ne peuvent sérieusement alléguer qu’ils étaient ignorants des affaires et du crédit consenti à la SARL OVATIO, en outre ils ne rapportent pas la preuve de l’existence d’un crédit ou engagement excessif ; Sur la disproportion du cautionnement de [T] [U], en première instance celui-ci ne l’a pas invoquée de sorte que sa demande est irrecevable, en effet elle ne tend pas à l’irrecevabilité de la demande de la banque mais à son rejet, et sur le fond [T] [U] ne démontre pas la disproportion manifeste, enfin la SOCIETE GENERALE établit qu’au moment de l’appel en paiement il était en mesure de faire face à son engagement, une saisie-attribution ayant été opérée entre les mains du CREDIT MUTUEL pour un montant de 15 325,79 euros le 4 août 2020 ; Sur la perte de chance invoquée par [T] [U], celui-ci n’établit pas la faute de la banque ni l’existence d’un préjudice direct en relation avec la faute invoquée ; Sur l’irrecevabilité des conclusions d’intimé de [Z] [E], dès lors que la banque n’a pas formé d’appel incident à l’encontre du dispositif du jugement selon lequel celle-ci ne pouvait se prévaloir du contrat de cautionnement conclu par [Z] [E] motif pris de sa disproportion, ce dernier ne peut soumettre à la cour l’examen d’un moyen pour lequel il a obtenu satisfaction et qui ne fait l’objet d’aucune critique de la part de la banque. Aux termes de ses dernières conclusions en date du 8 avril 2022, [Z] [E] demande à la cour de : A titre principal : CONFIRMER le jugement du 12 mars 2020 dans toutes ses dispositions ; CONDAMNER la SOCIETE GENERALE ou tout autre succombant à payer à [Z] [E] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ; A titre subsidiaire : DECLARER irrecevables et mal fondés en leurs demandes la SOCIETE GENERALE et [T] [U] ; En conséquence, DEBOUTER toutes les parties de l’ensemble de leurs demandes à l’égard de [Z] [E] ; CONDAMNER à titre principal la SOCIETE GENERALE à payer à [Z] [E] la somme de 17 205,15 euros au titre de la perte de chance d’avoir été mis à même de ne pas conclure le contrat de prêt préjudiciable en rapport de causalité direct avec le manquement de la banque à son obligation d’information, de conseil et de mise en garde sauf pour la cour, dans le cadre de son appréciation souveraine, à retenir un coefficient de perte de chance plus faible ; PRONONCER en toute hypothèse la déchéance du droit aux intérêts de la SOCIETE GENERALE et, en conséquence, limiter l’éventuelle condamnation de [Z] [E] à la somme de 12 093,27 euros ; ORDONNER le cas échéant la compensation entre les créances réciproques des parties ; CONDAMNER en toute hypothèse [T] [U] à relever garantir [Z] [E] du paiement de la moitié des sommes au paiement desquelles lui-même aura été condamné au bénéfice de la SOCIETE GENERALE en principal, intérêts, frais et accessoires ; CONDAMNER tout succombant à payer à [Z] [E] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens. Faisant valoir pour l’essentiel que : Sur la disproportion des engagements de caution de [Z] [E], la banque ne produit aucune fiche de renseignement à l’appui de son assignation, or lors de la souscription de l’acte de cautionnement en 2011 il ne disposait d’aucune épargne ni patrimoine hormis la moitié des parts de la société OVATIO à valorisation faible et incertaine, et percevait des revenus annuels de 7 660 euros en 2011, ainsi le caractère disproportionné de l’engagement est manifeste, en outre il n’est pas démontré qu’au moment de l’appel en paiement il était en mesure de faire face à son obligation, enfin la SOCIETE GENERALE n’a pas critiqué ce chef de la décision attaquée ; Sur l’absence de créance certaine, la banque ne justifie ni de l’admission de sa créance par le liquidateur judiciaire, ni le cas échéant de son irrecouvrabilité sur la société débitrice principale ; Sur la forclusion du droit d’agir, faute de précision sur la nature de la durée de 6 ans dans l’acte de cautionnement signé le 22 juin 2011, celle-ci s’interprète en faveur du débiteur, en outre [Z] [E] alors âgé de 25 ans était une caution non avertie ayant exercé une activité salariée puis indépendante dans le domaine de la direction artistique. Sur la prescription de l’action de la banque, le premier défaut de paiement fondant le point de départ du droit se situe au 28 octobre 2012 ou au mieux au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire soit le 18 juillet 2013, or l’assignation est datée du 4 décembre 2018; Sur le manquement allégué aux obligations de conseil et de mise en garde, [Z] [E] était une caution non avertie ne disposant d’aucune connaissance dans le domaine bancaire, et au vu de sa situation patrimoniale il s’exposait à un risque important de surendettement, aussi il aurait refusé de s’engager et sa perte de chance de ne pas contracter doit être évaluée à 100% des sommes réclamées, enfin la banque n’a pas respecté ses obligations au titre des articles L. 312-14 et L. 312-16 du code de la consommation et doit être déchue du droit aux intérêts ; Sur le manquement aux obligations légales d’information, la SOCIETE GENERALE a envoyé un courrier en date du 23 décembre où la somme due par la caution était de 12 504,91 euros puis un courrier en date du 27 mars 2018 où la somme due par la caution était de 16 688,57 euros en application du taux d’intérêt de 8,30% annuels, elle ne saurait en aucun cas être admise pour une créance à hauteur d’un montant de 17 205,15 euros mais de 12 093,27 euros, la banque a tardé à réclamer le paiement de la créance en faisant artificiellement gonfler la dette à un taux exorbitant. Sur la solidarité des cautions et l’appel en garantie, si un seul des deux actes de cautionnement était jugé disproportionné, le cofidéjusseur n’a aucun recours contre la caution déchargée pour ce motif, si par extraordinaire aucun de deux actes de cautionnement n’était jugé disproportionné, [Z] [E] serait fondé à réclamer la garantie de [T] [U] au paiement de la moitié de l’ensemble des condamnations. L’ordonnance de clôture a été rendue le 31 mai 2022. [T] [U] a notifié de nouvelles conclusions le 9 juin 2022 tendant à voir écarter des débats les conclusions de la SOCIETE GENERALE en date du 30 mai 2022 au visa des articles 15 et 16 du code de procédure civile, ensemble de l’article 906 du code de procédure civile, exposant que la teneur du nouvel argumentaire proposé par la banque et relatif à la consistance du patrimoine de l’appelant au moment de la souscription de l’acte de cautionnement litigieux était intrinsèquement de nature à appeler une réplique de sa part, voire la production de documents complémentaires qu’il lui est précisément reproché de ne pas communiquer, à savoir, certains documents comptables et sociaux qui auraient permis de renseigner sur la valeur des parts sociales détenues par l’intéressé au sein de la société OVATIO au moment de la souscription de l’acte de cautionnement litigieux. MOTIFS DE LA DECISION : 1- sur la demande tendant à voir écarter des débats les conclusions notifiées le 30 mai 2022 et la pièce 19 de la SOCIETE GENERALE : En application de l’article 15 du code de procédure civile, « les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense ». Et selon l’article 16 du même code, « le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ». Dans le cas d’espèce, les dernières conclusions récapitulatives de l’appelant ont été notifiées le 24 mars 2022 alors que la clôture devait initialement être prononcée le 12 avril 2022 et à cette date, la SOCIETE GENERALE s’est vu accorder un délai pour répliquer aux arguments adverses. Elle a notifié ses nouvelles écritures le 30 mai 2022, soit la veille de la nouvelle date à laquelle l’affaire devait être clôturée en raison du report sollicité par la banque. Dans les dites conclusions, celle-ci complète son argumentaire sur la prescription alléguée et la recevabilité de la demande fondée sur la disproportion du cautionnement, et s’agissant du fond sur ce point, fait valoir que [T] [U] – qui détenait avec [Z] [E] 50% du capital social de la société OVATIO – s’abstient d’en produire les bilans au moment de la conclusion de son engagement qui auraient permis d’établir la valeur de cette participation qui constitue un élément de son patrimoine devant être examiné à l’aune de la disproportion qu’il invoque. Il s’en déduit que la SOCIETE GENERALE, qui disposait initialement encore d’un délai de 3 semaines pour conclure entre les dernières écritures en demande et la première date à laquelle l’affaire devait être clôturée, a adressé ses dernières conclusions le 30 mai 2022 – veille de la clôture selon le calendrier modifié – en privant ainsi de fait son adversaire de la possibilité d’y répondre alors que comme le fait observer à juste titre [T] [U], il lui était – outre l’évocation de points déjà débattus, ce sur quoi il n’est fait état d’aucune difficulté – reproché de ne pas avoir fourni certains éléments de nature à étayer son argumentation. Or si cette carence probatoire à la supposer avérée pouvait en tout état de cause être relevée à l’initiative de la cour, il reste que l’appelant a été empêché de se défendre sur des éléments de contexte qui ne lui avaient auparavant pas été opposés comme susceptibles de conditionner l’issue du litige. Le respect du principe du contradictoire justifie en conséquence d’écarter des débats les conclusions notifiées par la SOCIETE GENERALE le 30 mai 2020 et de se référer aux seuls arguments développés dans celles en date du 24 décembre 2020. Il n’existe en revanche aucun motif d’écarter la pièce 19 produite par la banque, qui est un certificat d’irrecouvrabilité établi 30 mai 2022 révélant un état de fait nécessairement connu des gérants, et produit en réponse aux moyens opposés par la caution contestant la régularité de la déclaration de créance et son admission. 2- sur la forclusion invoquée et la prescription de l’action en paiement de la SOCIETE GENERALE : 1°-moyen tiré de la forclusion : L’acte en cause indique en première page « DUREE DU CAUTIONNEMENT : 6 années à compter de la date des présentes » et ensuite sous le paragraphe « I ‘ PORTEE DU CAUTIONNEMENT SOLIDAIRE » que « la caution reste tenue du présent engagement, sans possibilité de le révoquer, pendant la durée portée dans l’encadré ‘durée du cautionnement’ » ce qui selon [T] [U] devrait être interprété comme se rattachant à l’obligation de règlement et non de couverture. Ce raisonnement se heurte cependant au principe suivant lequel à défaut de stipulation expresse contraire, exigée au regard du caractère inhabituel d’un tel engagement, l’effet extinctif du terme vise la seule obligation de couverture de la dette garantie. 2°-moyen tiré de la prescription : [T] [U] fait en second lieu valoir que le placement en liquidation judiciaire de la société débitrice en date du 18 juillet 2013 étant une cause d’exigibilité anticipée immédiate du prêt, cette circonstance a fait courir le délai de prescription qui a donc pris fin le 19 juillet 2018. Il est cependant constant que l’effet interruptif de prescription attaché à la déclaration de créance dans le cadre d’une procédure collective, dont les appelants ne contestent pas le principe et ne discutent pas utilement la régularité en présence d’un certificat d’irrecouvrabilité justifiant de ce qu’elle a été admise, s’applique également à la caution (Cass. com. 10 février 2015 n°13-21953, Cass. Com. 23 oct 2019 n°17-25656). Aucune des fins de non recevoir opposée à la demande en paiement formée par la SOCIETE GENERALE ne peut en conséquence être accueillie. 3- sur la disproportion alléguée de l’engagement de caution de [T] [U] (recevabilité et bien fondé) : En application de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande sans examen au fond pour défaut de droit d’agir tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. Les articles 564 et 565 du même code disposent respectivement qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait, et que les prétentions ne sont pas nouvelles « dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ». Le moyen tiré de la disproportion étant invoqué par [T] [U] au soutien d’une même demande tendant à se voir déchargé de son obligation de règlement, la SOCIETE GENERALE ne peut y opposer une fin de non recevoir au motif qu’il s’agirait d’une prétention nouvelle en cause d’appel. Elle énonce d’ailleurs elle-même dans ses conclusions du 24 décembre 2020 qu’ « en première instance, [T] [U] n’a pas invoqué le moyen de disproportion ». Ensuite sur le fond, [T] [U] s’est pour rappel constitué avec [Z] [E] par acte du 22 juin 2011, caution solidaire de la société OVATIO en garantie du remboursement du prêt en cause à concurrence de 23 202 euros correspondant à 25% de l’obligation garantie majoré d’un montant forfaitaire pour les intérêts, accessoires et indemnité de résiliation. En application des dispositions de l’article L. 341-4 ancien du code de la consommation devenu l’article L. 332-1 du même code, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. Il appartient à la caution poursuivie de démontrer la disproportion qu’elle invoque, laquelle s’interprète restrictivement comme impliquant l’impossibilité manifeste de faire face à l’engagement en cause à la date de sa souscription compte tenu de ses revenus et patrimoine ainsi que de son endettement global incluant les engagements antérieurs ou concomitants. La banque n’est pas tenue de vérifier les déclarations qui lui sont faites à sa demande par les personnes se proposant d’apporter leur cautionnement, sauf s’il en résulte des anomalies apparentes. En revanche, la caution n’ayant déclaré aucun élément sur sa situation patrimoniale à l’occasion de son engagement est libre de démontrer la réalité de sa situation financière à cette date de référence. Au titre de l’année 2011 qui est celle de la souscription du cautionnement litigieux, [T] [U] a déclaré un revenu de 13 634 euros (pièce MG 3). Il est observé que si aucune fiche de renseignements sur la situation des cautions n’est versée aux débats, le fait que [T] [U] ne détienne pas de patrimoine au moment de son engagement n’est pas discuté. Dans ces conditions et même en l’absence de charges fixes déclarées, la somme garantie représentait près de deux années de salaires ce qui à défaut de capital mobilisable, ne réservait pas à l’appelant un niveau de ressources nécessaires aux besoins de la vie courante de sorte que l’engagement litigieux doit être jugé comme manifestement disproportionné lors de sa souscription. Il revient dès lors à la banque de démontrer que la caution était en mesure de faire face à son obligation à la date à laquelle elle est appelée en paiement, ce qui conduit à examiner sa situation lorsqu’elle a été assignée à cette fin soit en l’espèce, au mois de décembre 2018 et non comme le suggère la SOCIETE GENERALE, au moment où celle-ci a fait pratiquer avec succès une saisie-attribution sur le compte de [T] [U] le 4 août 2020 soit plus de 18 mois après la date de référence (Cass. com. 9 juillet 2019 n°17-31346). Il se déduit de l’ensemble de ce qui précède que la SOCIETE GENERALE doit être déclarée mal fondée à se prévaloir de l’engagement de caution de [T] [U] souscrit le 22 juin 2011. 4- sur la demande de [T] [U] au titre du devoir de mise en garde de la banque : La banque dispensatrice de crédit est tenue, à l’égard d’une caution non avertie, à une obligation de mise en garde qui est constituée si l’engagement de celle-ci n’est pas adapté à ses capacités financières ou s’il existe d’emblée un risque d’endettement né de l’octroi du prêt qui s’analyse au regard du risque de défaillance caractérisé du débiteur principal. Lorsque la caution est avertie, ce qu’il appartient à la banque de démontrer en présence de l’une des hypothèses précitées, l’établissement de crédit n’est débiteur d’une telle obligation que si au moment de l’octroi du prêt, il a sur les revenus et le patrimoine de la caution ou sur ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles des informations que celle-ci ignorait. La caution avertie est celle disposant des compétences nécessaires lui permettant de mesurer le contenu, la portée et les risques liés à son engagement, lesquelles ne dépendent pas forcément de sa qualité de professionnel et sont appréciées notamment au regard de ses capacités de discernement, de son expérience dans le secteur considéré et de son habitude des affaires. Il est également tenu compte des caractéristiques de l’opération. Dès lors que la caution ne peut se voir opposer les termes de son engagement jugé disproportionné et que la preuve d’éventuelles facultés contributives suffisantes à la date de l’appel en paiement n’est pas rapportée, elle ne peut se prévaloir d’aucun préjudice. La demande indemnitaire présentée de ce chef doit en conséquence être rejetée. 5- sur la demande de [Z] [E] au titre du devoir de mise en garde de la banque (recevabilité et bien fondé) : En l’absence d’appel incident formé par la SOCIETE GENERALE sur les dispositions du jugement l’ayant déboutée de ses demandes dirigées contre [Z] [E], c’est à bon droit qu’elle conclut à l’irrecevabilité des demandes de ce chef qui sont sans lien suffisant avec le litige déféré à la cour. Il est au surplus permis d’ajouter que cette demande, pour les raisons exposées plus haut, se heurterait également sur le fond à une absence de préjudice en relation avec un éventuel comportement fautif de la banque à supposer qu’il soit constitué. Les demandes présentées au titre des différents appels en garantie – devenus sans objet au regard de la solution du litige – n’ont pas lieu d’être examinées. Le jugement du 12 mars 2020 doit en conséquence de ce qui précède être réformé en ce qu’il a condamné [T] [U] à payer une somme de 11 746,05 euros outre intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2012, et en ce qu’il l’a condamné à payer une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens, et confirmé pour le surplus notamment en ce qui concerne ses dispositions visant [Z] [E]. 6- dépens et frais irrépétibles : La SA SOCIETE GENERALE qui succombe supportera la charge des dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. Elle sera également condamnée à payer à [T] [U], qui a dû exposer des frais irrépétibles, une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à 4 000 euros. [T] [U] sera condamné à payer de ce même chef une somme de 1 000 euros à [Z] [E]. PAR CES MOTIFS La cour, Statuant publiquement et contradictoirement, INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a : — condamné [T] [U] à payer une somme de 11 746,05 euros outre intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2012, — condamné [T] [U] à payer une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens, Statuant à nouveau de ces chefs, DIT recevable la demande de [T] [U] en ce qu’il invoque la disproportion de l’engagement souscrit le 22 juin 2011 ; DEBOUTE la SA SOCIETE GENERALE de ses demandes formées à l’encontre de [T] [U] au titre de l’engagement de caution en date du 22 juin 2011 ; CONFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ; Y ajoutant, DIT irrecevable la demande formée en cause d’appel par [Z] [E] au titre du manquement au devoir de mise en garde ; CONDAMNE la SA SOCIETE GENERALE aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, CONDAMNE la SA SOCIETE GENERALE à payer à [T] [U] la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ; CONDAMNE [T] [U] à payer à [Z] [E] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile. LE GREFFIER LE PRESIDENT | |