8 novembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n°
16-15.584
SOC.
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 8 novembre 2017
Cassation partielle
M. X…, président
Arrêt n° 2404 FS-P+B
(1er moyen et 2nd moyen
Pourvoi n° V 16-15.584 pris en ses 1ere et 3ème branches)
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. Y….
Admission du bureau d’aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 18 février 2016.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par M. Omar Y…, domicilié […],
contre l’arrêt rendu le 24 juin 2015 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l’opposant à l’association Croix rouge française, dont le siège est […],
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les six moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 4 octobre 2017, où étaient présents : M. X…, président, Mme Z…, conseiller référendaire rapporteur, Mme Goasguen, conseiller doyen, Mmes Aubert-Monpeyssen, Schmeitzky-Lhuillery, M. Schamber, Mme Cavrois, conseillers, Mmes Ducloz, Sabotier, M. Belfanti, Mme Prieur-Leterme, conseillers référendaires, M. A…, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Z…, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de M. Y…, de Me B…, avocat de l’association Croix-Rouge française, l’avis de M. A…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. Y… a été engagé le 13 octobre 2003 par l’association Croix-Rouge française en qualité d’animateur socio-éducatif à la permanence d’accueil d’urgence humanitaire sur le site de l’aéroport de Roissy- Charles de Gaulle ; qu’au dernier état de la relation contractuelle, il occupait un poste de médiateur interprète -catégorie technicien qualifié, coefficient 435- de la convention collective du personnel salarié de la Croix-Rouge française du 3 juillet 2003 modifiée par avenant du 9 décembre 2003 ; qu’il a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes se rapportant à l’exécution de son contrat de travail ;
Sur le deuxième moyen pris en ses deux premières branches :
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande indemnitaire pour recours au travail de nuit alors, selon le moyen :
1°/ que selon l’article L. 3122-32 du code du travail interprété à la lumière de la directive 93/104 du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, le recours au travail de nuit est exceptionnel ; qu’il prend en compte les impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et est justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale ; qu’il en résulte que le travail de nuit ne peut pas être le mode d’organisation normal du travail au sein d’une entreprise et qu’il ne doit être mis en oeuvre que lorsqu’il est indispensable à son fonctionnement ce qu’il appartient à l’employeur d’établir ; qu’en l’espèce, M. Y… faisait valoir que l’instauration d’un travail de nuit par l’association Croix-Rouge française procédait non pas d’une nécessité mais d’un simple choix de l’employeur d’assumer des fonctions nocturnes ressortissant normalement à la compétence de l’Etat ; qu’en jugeant que l’association Croix-Rouge française était autorisée à recourir au travail de nuit en vertu des normes qui lui étaient applicables, sans constater que cet aménagement du travail était justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3122-32 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, interprété à la lumière de la directive 93/104 du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail ;
2°/ que tenus de motiver leur décision, les juges du fond ne peuvent procéder par voie de simple affirmation sans indiquer l’origine de leurs constatations ; qu’en se bornant à retenir, dans ses motifs relatifs au dépassement des durées maximales hebdomadaires de travail légale et conventionnelle, que le mode d’organisation du travail institué au sein de l’association Croix-Rouge française apparaissait comme une nécessité au sein de la structure qui fonctionnait avec une permanence d’accueil d’urgence humanitaire 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, ce que le salarié contestait, sans préciser sur quelle pièce elle se fondait pour admettre cette supposée nécessité, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu’il résulte du préambule de l’accord de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif visant à mettre en place le travail de nuit du 17 avril 2002 étendu, applicable à l’association la Croix-Rouge française, que le recours au travail de nuit est justifié par la prise en charge continue des usagers ; que la cour d’appel ayant relevé que l’association était autorisée au travail de nuit en vertu des normes applicables et constaté, sans qu’il lui soit nécessaire de préciser les pièces qu’elle décidait d’écarter ou de retenir, que la structure fonctionnait avec une permanence d’accueil d’urgence humanitaire 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, a légalement justifié sa décision ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande indemnitaire pour recours au travail de nuit alors, selon le moyen que, doivent être informés et consultés, préalablement à la mise en place ou la modification de l’organisation du travail de nuit, le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel ainsi que le CHSCT ; que tout manquement à cette obligation rend inopposable au salarié l’organisation du travail de nuit mise en place dans l’entreprise ; qu’en jugeant que l’absence d’information et de consultation des représentants élus du personnel préalablement à la mise en oeuvre du travail de nuit ne constituait pas en soi un manquement de nature à faire obstacle à celui-ci, la cour d’appel a violé les articles L. 2323-27 et L. 4612-8 code du travail, dans leur rédaction applicable au litige ;