Sanction pour faillite personnelle et gestion défaillante

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Sanction pour faillite personnelle et gestion défaillante

1. Il est impératif de présenter l’ensemble de ses prétentions sur le fond dès les premières conclusions déposées, sous peine d’irrecevabilité. Il est également essentiel de formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée, conformément aux dispositions du code de procédure civile.

2. L’appel tend à la réformation ou à l’annulation du jugement rendu en première instance. Il est donc essentiel de critiquer le jugement et de formuler des demandes de réformation ou d’annulation claires dans les conclusions d’appel, en respectant les règles de forme énoncées dans le code de procédure civile.

3. En cas de faute de gestion ayant contribué à une insuffisance d’actif, les dirigeants peuvent être tenus responsables, en tout ou en partie, du montant de cette insuffisance d’actif. Il est donc primordial pour les dirigeants de respecter leurs obligations fiscales, sociales et comptables, sous peine de voir leur responsabilité engagée et de devoir supporter financièrement les conséquences de leurs fautes de gestion.

Résumé de l’affaire

Mme [E] [S] a fondé la société Prisme Guardian System Security (PGSS) spécialisée dans la sécurité privée le 7 novembre 2017. Suite à une créance impayée de 162.169,57 euros envers l’Urssaf Rhône-Alpes, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte le 25 septembre 2019 par le tribunal de commerce de Lyon, qui a également désigné la Selarl Alliance MJ comme liquidateur judiciaire. La cessation des paiements a été fixée au 1er janvier 2019.

Le 12 octobre 2020, la Selarl [G] [R], succédant à la Selarl Alliance MJ, a assigné Mme [S] en justice pour insuffisance d’actif et demandé une sanction commerciale contre elle. Le tribunal a jugé Mme [S] responsable de fautes de gestion le 17 novembre 2022, l’a condamnée à payer 285.269,79 euros pour couvrir l’insuffisance d’actifs de PGSS, et a prononcé une faillite personnelle à son encontre pour une durée de douze ans.

Mme [S] a fait appel de cette décision le 1er décembre 2022. Dans son appel, elle conteste les accusations de fautes de gestion et la responsabilité qui lui est attribuée pour l’insuffisance d’actifs, et demande l’annulation des sanctions prises à son encontre.

La Selarl [G] [R], en réponse, soutient le jugement initial et demande à la cour de confirmer les décisions prises, y compris la faillite personnelle et la condamnation au paiement de 285.269,79 euros. Elle propose également, de manière subsidiaire, une interdiction de gestion de 15 ans contre Mme [S].

Le ministère public a recommandé la confirmation du jugement initial. Les débats sont prévus pour le 7 décembre 2023.

Les points essentiels

Sur la recevabilité de l’appel incident de la Selarl Marie [R]

Mme [S] conteste la recevabilité de l’appel incident de l’intimée, arguant que ses conclusions sont un copier-coller des premières instances sans critique du jugement. De plus, elle souligne que l’intimée n’a pas demandé la réformation du jugement initial, rendant sa demande irrecevable. La Selarl [G] [R] ne présente pas de moyen sur ce point, mais ses conclusions ont évolué vers une demande subsidiaire de faillite personnelle de quinze ans. En vertu des dispositions du code de procédure civile, l’appelant doit présenter l’ensemble de ses prétentions dès les premières conclusions, ce qui n’a pas été respecté en l’espèce.

Sur l’insuffisance d’actif

L’article L 651-2 du code de commerce permet au tribunal de décider que l’insuffisance d’actif d’une personne morale sera supportée par les dirigeants en cas de faute de gestion. En l’espèce, l’insuffisance d’actif s’élève à 285.269,79 euros, et les fautes de gestion reprochées à Mme [S] concernent principalement l’absence de tenue de comptabilité, le non-respect des obligations fiscales et sociales, et le retard dans la déclaration de cessation des paiements. La Selarl [G] [R] soutient que ces fautes ont contribué à l’insuffisance d’actif, ce qui est confirmé par les éléments du dossier.

Sur la sanction pécuniaire

Mme [S] conteste le montant de l’insuffisance d’actif qui lui est imputé, arguant de sa situation financière complexe. La Selarl [G] [R] demande la confirmation du jugement initial qui la condamne à payer la totalité de l’insuffisance d’actif. Après examen, la cour fixe le montant à 180.000 euros, en tenant compte des fautes commises et de la situation de l’appelante. Il est donc décidé de réformer le jugement sur le quantum de la condamnation.

Sur la sanction commerciale

Mme [S] conteste la durée de la faillite personnelle de 12 ans prononcée à son encontre, arguant d’un manque de lien de causalité entre les fautes de gestion et l’insuffisance d’actif. La Selarl [G] [R] soutient que les fautes commises justifient cette sanction, voire une interdiction de gérer pour quinze ans. Après examen, la cour décide de condamner Mme [S] à une faillite personnelle de 10 ans, proportionnée aux fautes commises. La peine d’interdiction de gérer n’est pas retenue.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Mme [S] est condamnée aux dépens d’appel, mais aucune indemnité n’est allouée en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Les montants alloués dans cette affaire: – Selarl [G] [R] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Prisme Guardian system security: 180.000 euros
– Mme [E] [S]: 0 euros
– Mme [S]: 0 euros
– Dépens d’appel: montant non spécifié
– Article 700 du code de procédure civile: montant non spécifié

Réglementation applicable

– Code de commerce
– Article L. 651-2
– Article L. 653-5
– Article L. 653-8
– Article L. 653-11
– Article R. 661-1
– Code de procédure civile
– Article 700
– Code de procédure civile
– Article 455

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Jérémy BENSAHKOUN
– Me Aurélien BARRIE
– Me SLITI BITAM
– Olivier NAGABBO

Mots clefs associés & définitions

– Assignation en responsabilité pour insuffisance d’actif
– Fautes de gestion
– Insuffisance d’actif de 285.269,79 euros
– Faillite personnelle de douze ans
– Appel de Mme [S]
– Articles L. 651-2, L. 653-5, L. 653-8, L.653-11 et R. 661-1 du code de commerce
– Demande de réformation du jugement
– Responsabilité pour insuffisance d’actif
– Sanction commerciale
– Article 700 du code de procédure civile
– Ministère public
– Confirmation du jugement
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

8 février 2024
Cour d’appel de Lyon
RG
22/08017
N° RG 22/08017 – N° Portalis DBVX-V-B7G-OURA

Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 17 novembre 2022

RG : 2020f02680

[S]

C/

S.E.L.A.R.L. [G] [R]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 08 Février 2024

APPELANTE :

Mme [E] [S]

née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 6]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Jérémy BENSAHKOUN, avocat au barreau de LYON, toque : 2339

INTIMEE :

S.E.L.A.R.L. [G] [R] au capital de 1.000 €, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LYON sous le n°901 604 736, représentée par maître [G] [R], venant aux droits de

la SELARL ALLIANCE MJ suivant jugement du tribunal de commerce de LYON du 3 août 2021, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société PRISME GUARDIAN SYSTEM SECURITY désignée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de LYON du 25 septembre 2019

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Aurélien BARRIE de la SELARL POLDER AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : T 1470 susbtitué par Me SLITI BITAM, avocat au barreau de LYON

En présence du Ministère Public, en la personne d’Olivier NAGABBO, avocat général

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 28 Novembre 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 07 Décembre 2023

Date de mise à disposition : 08 Février 2024

Audience tenue par Patricia GONZALEZ, présidente, et Viviane LE GALL, conseillère, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

– Patricia GONZALEZ, présidente

– Aurore JULLIEN, conseillère

– Viviane LE GALL, conseillère

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [E] [S] a créé la société Prisme Guardian System Security (PGSS) le 7 novembre 2017. Cette société est spécialisée dans le secteur de la sécurité privée.

Par jugement du 25 septembre 2019, sur assignation de l’Urssaf Rhône-Alpes en raison d’une créance de 162.169,57 euros, le tribunal de commerce de Lyon a ouvert une procédure de liquidation judiciaire au bénéfice de la société PGSS, a désigné la Selarl Alliance MJ, représentée par Me [G] [R] en qualité de liquidateur judiciaire, et a fixé la date de cessation des paiements au 1er janvier 2019.

Par acte du 12 octobre 2020, la Selarl [G] [R], venant aux droits de la Selarl Alliance MJ et en qualité de liquidateur judiciaire de la société PGSS, a assigné Mme [S] devant le tribunal de commerce de Lyon en responsabilité pour insuffisance d’actif et aux fins de voir prononcer une sanction commerciale.

Par jugement contradictoire du 17 novembre 2022, le tribunal de commerce de Lyon a :

– pris acte que par jugement en date du 3 août 2021, le tribunal a désigné la Selarl [G] [R] représentée par Me [R] en qualité de liquidateur judiciaire de la société PGSS en remplacement de la Selarl Alliance MJ, précédemment désignée,

– constaté que Mme [S] était dirigeante de droit de la société PGSS,

– déclaré les fautes de gestion de Mme [S] constituées,

– dit que les fautes de gestion entraînent la responsabilité de Mme [S],

– dit que l’insuffisance d’actif de la société PGSS s’élève à la somme de 285.269,79 euros,

– condamné Mme [S] au paiement de la somme de 285.269,79 euros, à la Selarl [G] [R] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société PGSS,

– dit qu’il n’y a pas lieu à statuer à titre provisionnel, l’insuffisance d’actifs étant fixée au jour de la demande,

– prononcé une mesure de faillite personnelle à l’encontre de Mme [S] d’une durée de douze ans,

– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision nonobstant appel et sans caution,

– condamné Mme [S] à verser la somme de 2.000 euros à la Selarl [G] [R] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société PGSS, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– rejeté comme non fondés tous autres moyens fins et conclusions contraires des parties,

– condamné Madame [S] aux entiers dépens de l’instance.

Mme [S] a interjeté appel par acte du 1er décembre 2022.

*

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 16 octobre 2023 fondées sur les articles L. 651-2, L. 653-5, L. 653-8, L.653-11 et R. 661-1 du code de commerce, Mme [S] demande à la cour de :

– déclarer irrecevable l’appel incident de la Selarl [G] [R],

– constater qu’elle n’est pas saisie de l’appel incident de la Selarl [G] [R],

– déclarer recevable et bien fondé son appel à l’encontre du jugement du jugement déféré,

– réformer le jugement déféré, en ce qu’il a statué en ces termes :

constaté qu’elle était dirigeante de droit de la société PGSS,

déclaré ses fautes de gestion constituées,

dit que les fautes de gestion entraînent sa responsabilité,

dit que l’insuffisance d’actif de la société PGSS s’élève à la somme de 285.269,79 euros,

l’a condamné au paiement de la somme de 285.269,79 euros, à la Selarl [G] [R] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société PGSS,

dit qu’il n’y a pas lieu à statuer à titre provisionnel, l’insuffisance d’actifs étant fixée au jour de la demande,

prononcé une mesure de faillite personnelle à son encontre d’une durée de douze ans,

ordonné l’exécution provisoire de la présente décision nonobstant appel et sans caution,

l’a condamné à verser la somme de 2.000 euros à la Selarl [G] [R] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société PGSS, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

rejeté comme non fondés tous autres moyens fins et conclusions contraires des parties,

l’a condamné aux entiers dépens de l’instance,

et statuant à nouveau,

à titre principal,

– constater qu’aucun élément ne permet de réunir les conditions de la responsabilité de la défenderesse pour insuffisance d’actifs,

– constater qu’aucun élément ne permet de retenir l’application d’une faillite personnelle ou d’une mesure d’interdiction de gérer,

en conséquence,

– juger qu’il n’y a pas lieu de retenir sa responsabilité pour insuffisance d’actif,

– juger qu’il n’y a pas lieu de prononcer une sanction commerciale à son encontre,

– débouter la Selarl [G] [R] de l’intégralité de ses demandes,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour entrait en voie de condamnation et retenait l’application d’une responsabilité pour insuffisance d’actif ou d’une sanction commerciale,

– juger que sa contribution au passif en vertu de la responsabilité pour insuffisance d’actif, sera ramenée à de plus justes proportions,

– juger que la sanction commerciale prononcée à son encontre sera ramenée à de plus justes proportions,

en tout état de cause,

– débouter la Selarl [G] [R] de toutes ses demandes,

– condamner la Selarl [G] [R] à lui payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

*

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 31 mars 2023 fondées sur les articles L. 651-2 et L. 653-5 et L. 653-8 du code de commerce, la Selarl [G] [R], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société PGSS, demande à la cour de, rejetant toutes demandes, fins, moyens et conclusions contraires,

à titre principal,

– juger que Mme [S] a été le dirigeant de droit de la société PGSS,

– juger que Mme [S] a commis des fautes de gestion l’engagement de sa responsabilité,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné Mme [S] à lui payer la somme de 285.269,79 euros,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé une mesure de faillite personnelle à l’encontre de Mme [S] d’une durée de douze ans,

à titre subsidiaire,

– juger Mme [S] a été le dirigeant de droit de la société PGSS,

– juger que Mme [S] a commis des fautes de gestion entraînant l’engagement de sa responsabilité,

– prononcer une mesure d’interdiction de gérer à l’encontre de Mme [S] d’une durée de 15 années,

en tout état de cause

– condamner Mme [S] à lui payer 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [S] aux entiers dépens de l’instance.

Le ministère public, par avis du 20 septembre 2023 communiqué contradictoirement aux parties le 10 octobre 2023, a requis la confirmation du jugement

La procédure a été clôturée par ordonnance du 28 novembre 2023, les débats étant fixés au 7 décembre 2023.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l’appel incident de la Selarl Marie [R]

Mme [S] fait valoir que :

– les conclusions de l’intimée sont un copier-coller de ses conclusions de première instance, sans ajout ni critique du jugement, lequel a prononcé à son encontre une mesure de faillite personnelle d’une durée de douze ans,

– l’intimée sollicite une mesure de faillite personnelle de quinze ans ou une interdiction de gérer de quinze ans, sans demander ni réformation ni annulation du jugement ; la demande est donc irrecevable,

– l’intimée n’a pas répondu sur ce point et s’est contentée de reformuler son dispositif avec une demande subsidiaire de réformation du jugement, alors qu’elle est forclose pour formuler une telle demande qui ne peut pas être étudiée par la cour d’appel.

La Selarl [G] [R], ès-qualités ne fait pas valoir de moyen sur ce point. Ses dernières conclusions ne comportent plus en principal la demande d’une faillite personnelle de quinze ans à titre principal, mais la confirmation de la faillite personnelle de douze ans et la demande litigieuse est présentée seulement à titre subsidiaire.

Sur ce,

Il est rappelé que selon l’article 910-4 du code de procédure civile, ‘A peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures’.

Selon l’article 542 du code de procédure civile, ‘L’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel’.

Enfin, selon l’article 954 du code de procédure civile, ‘Les conclusions d’appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l’article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.

Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

La partie qui conclut à l’infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu’elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance.

La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Il résulte de ces dispositions combinées que lorsque l’appelant ne demande dans le dispositif de ses premières conclusions, ni l’infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il demande l’anéantissement, ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement.

Force est de constater en l’espèce que dans ses premières conclusions déposées dans le délai de l’article 905-2, l’intimée a sollicité le prononcé d’une peine de faillite de 15 ans et subsidiairement d’interdiction de gérer sans demander l’infirmation du jugement, reprenant manifestement ses conclusions de première instance.

Dans ses secondes conclusions, elle a seulement demandé à titre subsidiaire une peine de 15 ans d’interdiction de gérer mais hors le délai de l’article 909 du code de procédure civile.

En application des dispositions susvisées, la cour n’est donc pas saisie valablement d’un appel incident de l’intimée, ce qu’il convient de constater.

Sur l’insuffisance d’actif

Aux termes de l’article L 651-2 du code de commerce dans sa version applicable à la cause, ‘lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée’.

En l’espèce, il n’est pas contesté par l’appelante que le montant de l’insuffisance d’actif s’est élevé à la somme de 285.269,79 euros (soit un passif définitif de 290.873,39 euros pour un actif recouvré de 5.603,60 euros) de sorte que l’article susvisé a vocation à s’appliquer.

Sur les fautes de gestion

Mme [S] fait valoir que :

– les développements au sujet de son frère ne la concerne pas ; elle n’est pas une ‘habituée des procédures collectives’ ; de surcroît, aucune prétention n’est sollicitée à ce titre ; le prétendu détournement de clientèle entre leurs sociétés n’est pas démontré par le moindre élément ; ces développements sont calomnieux,

– elle n’a pas été en mesure de produire les éléments de comptabilité, mais l’absence de tenue de comptabilité n’est pas à l’origine des difficultés de la société, elle n’a eu aucune influence sur l’appréciation de la date à laquelle elle devait déclarer l’état de cessation des paiements,

– le caractère volontaire et délibéré de l’omission de déclaration de l’état de cessation des paiements n’est pas démontré,

– une proposition de rectification par l’administration fiscale n’est pas constitutive d’une faute de gestion et les montants avancés par celle-ci sont sans importance, les créances au titre de l’impôt sur les sociétés et de la TVA ont été déclarées à titre provisionnel et ne peuvent donc pas être constitutives d’une faute de gestion pour non-respect des obligations fiscales et sociales,

– elle a tenté de gagner de nouveaux marchés, pour assurer la pérennité de son entreprise, mais surtout pour sauvegarder les emplois, dans un secteur concurrentiel ou les prix sont en baisse ; elle n’a pas réussi à obtenir des résultats bénéficiaires ; il ressort de l’état du passif qu’elle a payé les salaires au mépris des charges sociales et fiscales ; il ne s’agit pas d’une faute délibérée ; la faute de gestion de non-respect des obligations sociales ne peut pas être retenue,

– elle n’a pas affirmé avoir souscrit des marchés à perte,

– les majorations des cotisations dues à l’URSSAF sont dues à une erreur de calcul de celle-ci.

La Selarl [G] [R], ès-qualités réplique que :

– l’appelante est l’associée unique et le président de la société PGSS ; elle est dirigeante de droit,

– il est néanmoins probable qu’étant journaliste, elle n’ait pas dirigé seule au quotidien sa société sans le concours de son frère ; ils ont de concert organisé le détournement des actifs, soit la clientèle, et se sont abstenus de payer les créanciers par créations successives de sociétés commerciales dans le secteur du gardiennage et de la surveillance ; elle a cumulé 3 liquidations judiciaires,

– l’appelante a commis une faute de gestion en ne tenant pas de comptabilité et en ne remettant aucune pièce comptable au liquidateur ; elle ne pouvait pas ignorer cette obligation eu égard à ses précédentes procédures collectives ; cette faute est grave car elle permet de dissimuler les exactions commises par le dirigeant,

– l’absence de tenue de la comptabilité a entravé la mission de l’administration fiscale et du liquidateur judiciaire,

– l’absence de tenue de comptabilité a été commise volontairement et sciemment pour éluder le paiement de la TVA et de l’impôt sur les sociétés ; elle a en outre permis d’éviter des impayés qui auraient précipité la défaillance de la société,

– l’appelante a commis une faute de gestion en ne respectant pas les obligations fiscales,

– l’appelante a commis une faute de gestion en ne respectant pas les obligations sociales, alors qu’elle a été dirigeante de la société Protection Gardiennage Sécurité Privée qui avait également été assignée en liquidation judiciaire par l’URSSAF ; cette dernière a déclaré dans le présent litige une créance totale de 205.856,37 euros, et l’APICIL a déclaré une créance de 57.027,13 euros,

– la récurrence démontre le caractère délibéré de la faute de gestion de non-respect des obligations sociales et fiscales ; l’appelante a ainsi reçu 11 contraintes de l’URSSAF,

– l’appelante affirme dans ses conclusions qu’elle a souscrit des marchés à perte, ce qui est une faute de gestion,

– l’appelante a commis une faute en ne déclarant pas la cessation des paiements dans le délai légal de 45 jours ; l’URSSAF a initié la procédure ; le tribunal de commerce de Lyon a fixé la date de cessation des paiements 9 mois avant le jugement d’ouverture ; l’origine de cette faute réside dans l’absence de tenue de comptabilité,

– il n’est pas nécessaire de démontrer que la cessation des paiements n’a pas été déclarée sciemment pour justifier la condamnation pour insuffisance d’actif, et en tout état de cause, l’appelante a sciemment omis de déclarer l’état de cessation des paiements.

Sur ce,

Il n’est pas contestable que Mme [S] était la dirigeante de droit de la société PGSS (associée unique et présidente) de sorte que les dispositions de l’article L 651-2 du code de commerce lui sont bien applicables, même si du fait de sa profession de journaliste, elle a probablement pu ne pas diriger seule la société au quotidien mais avec l’aide de son frère [J] [S].

Le liquidateur judiciaire met ensuite en exergue un contexte frauduleux à l’origine de la création de la société PGSS en rappelant la liquidation judiciaire de M. [J] [S] qui exploitait une entreprise de sécurité privée dénommée PGSP Protection gardiennage et surveillance privée intervenue le 13 octobre 2015, (M. [S] ayant été sanctionné d’une interdiction de gérer de 15 ans), la création deux jours après le 15 octobre 2015 d’une nouvelle société PGSP (Protection gardiennage sécurité privée) par sa soeur [E] [S] avec la même activité, le même siège social, le même sigle et les mêmes salariés, la liquidation judiciaire de la société PGSP le 8 novembre 2017 sur demande de l’Urssaf en raison de précomptes salariaux impayés et l’homologation en cours d’instance en prononcé d’une sanction commerciale d’un accord des consorts [S] à régler la totalité du passif, la création de la société PGSS par Mme [S] le 7 novembre 2017 avec, toujours, la poursuite de la même activité, le même siège social et un sigle quasi identique, enfin, la liquidation judiciaire de la société PGSS le 5 septembre 2019 après assignation de l’Urssaf pour non paiement des cotisations patronales et salariales.

Il convient cependant dans un premier temps d’examiner les fautes de gestion reprochées à Mme [S] se rapportant à la seule société PGSS, l’attitude antérieure de la dirigeante pouvant par contre rentrer en ligne de compte dans le prononcé éventuel d’une sanction.

Il convient de reprendre successivement les fautes de gestion reprochées à l’appelante.

– l’absence de tenue d’une comptabilité

En droit, constitue une faute de gestion le fait de ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font l’obligation, ou d’avoir tenu une comptabilité fictive, incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables.

En l’espèce, Mme [S] n’a pas remis au liquidateur judiciaire les comptes sociaux, les grands livres et les pièces comptables. Il résulte d’ailleurs de la pièce 18 de l’intimée que dans le cadre d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale a établi un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité et qu’elle a au titre de l’exercice clos au 31 décembre 2018 reconstitué le chiffre d’affaires de la société PGSS après obtention de la communication des relevés bancaires.

L’absence fautive de comptabilité est donc indéniable et cette faute ne permet pas au dirigeant d’avoir la lisibilité de l’état de la société et la réalité de ses capacités financières. Cette faute de gestion qui ne constitue pas une simple négligence est donc retenue.

– le non respect des obligations fiscales et sociales

Ces agissements constituent en principe des fautes de gestion.

En l’espèce, les productions établissent le non paiement des charges fiscales en ce que le 19 novembre 2019, l’administration fiscale a déclaré une créance à titre définitif de 15.027 euros et à titre provisionnel de 380.400 euros puis une proposition de rectification de comptabilité pour la TVA (112.302 euros dont30.565 euros de majorations et amendes) et l’impôt sur les sociétés (81.299 euros dont 23.228 euros d’intérêts, majorations et amendes).

S’agissant des charges sociales, c’est l’Urssaf qui a assigné en liquidation judiciaire la société PGSS et a fait valoir une créance particulièrement conséquente de 205.856,37 euros dont la somme de 96.688,68 euros correspondant à la part salariale après avoir délivré 11 contraintes. L’APICIL a également déclaré un total de 57.027,13 euros.

Il en découle que les obligations fiscales et sociales n’ont pas été respectées.

Mme [S] fait valoir l’absence de faute délibérée, s’agissant d’une conséquence de son activité déficitaire liée au prix du marché et à la concurrence. Ainsi que justement relevé par son adversaire, Mme [S] a ainsi volontairement conclu des marchés à marge négative ou à perte (faute de gestion) et le non paiement des charges sociales et fiscales n’a pu qu’être délibéré, s’agissant notamment d’un comportement récurrent.

Cette faute de gestion, qui n’est pas une simple négligence, est en conséquence retenue.

– absence de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal de 45 jours

Mme [S] n’a pas spontanément déclaré la cessation des paiements, attendant une assignation de l’Urssaf et le tribunal de commerce a fait remonter la date de cessation des paiements à 9 mois avant le jugement d’ouverture, cette date étant définitive.

Il est dès lors évident que la cessation des paiements n’a pas été déclarée dans le délai légal.

C’est par ailleurs à tort que Mme [S] prétend que le liquidateur aurait dû démontrer que cette absence de déclaration avait été faite sciemment, cette démonstration n’étant exigée que pour le prononcé d’une sanction professionnelle d’interdiction de gérer mais non dans le cadre d’une faute de gestion susceptible d’entraîner une condamnation pour insuffisance d’actif.

Mais en tout état de cause, Mme [S] n’ignorait pas le non paiement des impôts et charges sociales et a continué sciemment son activité, avant l’action de l’Urssaf alors qu’elle était en état de cessation des paiements.

Sur le lien de causalité

Mme [S] fait valoir que :

– aucun lien de causalité entre les fautes de gestion et l’insuffisance d’actif n’est démontré,

– les charges de la société PGSS sont essentiellement liées à sa masse salariale ; l’absence de tenue d’une comptabilité n’a aucune incidence sur la constitution et l’accroissement des dettes fiscales et sociales, et donc sur le passif de la société ; le lien de causalité n’est pas établi,

– concernant l’administration fiscale, seules les créances déclarées au passif de la procédure collective doivent être prises en compte, soit 15.027 euros ; les créances au titre de l’impôt sur les sociétés et de la TVA ont été déclarées à titre provisionnel et ne peuvent donc pas être retenues, ni rattachées à une faute de gestion pour défaut de comptabilité ; le préjudice est incertain,

– en dehors des dettes générées par la masse salariale et les charges fiscales, aucun autre passif n’a été constitué postérieurement à la date de l’état de cessation des paiements retenue par le tribunal de commerce de Lyon ; le lien de causalité nécessaire entre le retard de la déclaration de cessation des paiements et l’insuffisance d’actifs n’est pas caractérisé.

La Selarl [G] [R], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société PGSS réplique que :

– le préjudice subi par la collectivité des créanciers correspond à la totalité de l’insuffisance d’actif, soit 285.269,79 euros,

– l’absence de comptabilité a permis d’éluder le règlement des charges et impôts permettant la poursuite de l’activité et conduit l’administration fiscale à appliquer des majorations, contribuant au préjudice,

– le non-respect des obligations fiscales et sociales a contribué à l’insuffisance d’actif par le montant total des charges sociales impayées, et par l’application de pénalités, intérêts et majorations,

– l’absence de déclaration de l’état de cessation des paiements est à l’origine de la création d’un passif important durant la période suspecte, contribuant au préjudice.

Sur ce,

En droit, la faute de gestion retenue à l’encontre du dirigeant doit avoir contribué à l’insuffisance d’actif.

L’absence de tenue d’une comptabilité a contribué à cette insuffisance d’actif puisqu’elle a empêché le calcul de l’impôt sur les sociétés et les déclarations de TVA correspondant au chiffre d’affaires réalisé d’où la nécessité pour l’administration de reconstituer la comptabilité faisant apparaître de grosses dettes fiscales notamment.

Or, la tenue d’une comptabilité régulière aurait alerté la dirigeante sur le mauvais état financier de la société et l’aurait contrainte de procéder régulièrement aux déclarations et au paiement des sommes dus à l’administration fiscale de sorte que les impayés seraient apparus plus tôt et auraient alerté les créanciers qui auraient pu agir plus vite alors que le fait de ne pas payer les charges et impôt a permis la poursuite à perte de l’activité.

Par ailleurs, le non respect des obligations sociales et fiscales a généré l’application de pénalités, intérêts et majorations comme indiqué supra, ce qui a contribué à l’insuffisance d’actif.

L’absence de déclaration de la date de cessation des paiements dans le délai légal a enfin permis l’aggravation du passif pendant la période suspecte et notamment les dettes sociales.

Sur la sanction pécuniaire

Mme [S] fait valoir à titre subsidiaire que :

– la cour peut faire peser seulement une partie de l’insuffisance d’actif sur le dirigeant ayant commis une faute de gestion,

– elle ne s’est pas enrichie au moyen de cette société et il serait en inéquitable et infondé de lui faire supporter la totalité du passif de la société alors que le non-respect des obligations sociales et fiscales ne résulte pas d’une faute délibérée de sa part, mais des suites d’une activité qui ne s’est pas révélée suffisamment rentable,

– elle est dans une situation financière particulièrement complexe, ne dispose d’aucun bien immobilier et ses faibles revenus suffisent seulement pour les besoins courants ; elle est poursuivie à titre personnel par l’administration fiscale qui sollicite de sa part 65.142 euros ; la sanction de l’insuffisance d’actif doit être modérée en raison de ses facultés contributives,

La Selarl [G] [R], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société PGSS demande la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné l’appelante à lui payer la somme de 285.269,79 euros et ne fait pas valoir de moyen sur ce point.

Sur ce,

Le tribunal de commerce a condamné Mme [S] au paiement de la totalité de l’insuffisance d’actif.

Mme [S] verse uniquement aux débats un avis d’impôt personnel sur les revenus 2018 après redressement fiscal (65.142 euros à payer le 15 décembre 2020 au plus tard) sans actualisation. Cette pièce révélait de faibles salaires mais d’importants revenus de capitaux mobiliers et Mme [S] reste très taisante sur la réalité de sa situation et de son patrimoine, ne produisant pas d’autres pièces sur sa situation.

Au regard de ce qui précède, il convient de fixer à la somme de 180.000 euros le montant de l’insuffisance d’actif à la charge de Mme [S], ce montant étant proportionné aux fautes commises et à la situation de l’appelante. Le jugement est donc réformé sur le quantum de la condamnation.

Sur la sanction commerciale

Mme [S] fait valoir que :

– la sanction de faillite personnelle de 12 ans ordonnée par le tribunal tenant au défaut de comptabilité est trop importante eu égard à l’absence de lien de causalité, aux faits et aux éléments du dossier,

– l’appel incident étant irrecevable, la cour ne pourra aller au-delà des termes du jugement et devra au contraire réduire la durée de la sanction pour faillite personnelle,

– le tribunal de commerce de Lyon ne s’est pas prononcé sur l’interdiction de gérer.

La Selarl [G] [R], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société PGSS réplique que :

– l’appelante a commis des fautes d’une particulière gravité, dont l’absence de tenue de comptabilité pour dissimuler ses exactions voire celles de son frère et aggravant les difficultés de la société, qui justifie de prononcer une mesure de faillite personnelle de 12 ans,

– subsidiairement, outre l’absence de tenue de comptabilité, l’appelante a sciemment et délibérément omis de déclarer l’état de cessation des paiements de la société alors qu’ ayant reçu 11 contraintes de l’URSSAF, elle avait connaissance de la situation ; elle est de plus habituée des procédures collectives ; une interdiction de gérer toute entreprise commerciale et artisanale pour une durée de quinze ans est donc justifiée.

Sur ce,

Aux termes de l’article L 653-5 du code de commerce, ‘Le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l’article L. 653-1 contre laquelle a été relevé l’un des faits ci-après : (…)

6° Avoir fait disparaître des documents comptables, ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables’.

Selon l’article L 653-8 du code de commerce, ‘Dans les cas prévus aux articles L. 653-3 à L. 653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci. Dans les cas prévus aux articles L. 653-3 à L. 653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci.’

Mme [S] au vu de ce qui précède encourt les peines de la faillite.

Le tribunal de commerce n’a pas motivé la sanction prononcée à ce titre.

La faute de gestion liée à l’absence de tenue d’une comptabilité est particulièrement grave : la comptabilité est une obligation de base pour un dirigeant, ce que Mme [S] ne pouvait ignorer alors qu’elle a déjà dirigé au moins une société auparavant et avait été confrontée à une procédure collective (aucune pièce de l’intimée ne démontre une seconde procédure collective) de sorte qu’elle aurait dû redoubler de vigilance et de prudence.

S’il est par ailleurs constant que Mme [S] n’a pas fait l’objet de sanctions personnelles dans le cadre de la direction d’une précédente société, force est néanmoins de constater qu’elle éprouve des difficultés récurrentes à occuper cette fonction puisque deux sociétés gérées par elle sur de courtes périodes ont fait l’objet de procédures collective, ce, de manière très rapprochée avec à chaque fois, notamment, un passif social important.

Compte tenu de ces éléments qui démontrent ses carences récurrentes et son incapacité à gérer une société, il convient de condamner Mme [S] à la peine de 10 ans de faillite, sanction proportionnée à sa situation et aux fautes commises et le jugement est donc réformé sur le quantum de la sanction.

La peine de faillite étant retenue, il n’y a donc pas lieu de se prononcer sur une peine d’interdiction de gérer.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Mme [S] qui succombe sur le principe des condamnations a la charge des dépens d’appel.

Il est équitable de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de l’appel,

Constate que la cour n’est pas saisie d’un appel incident de la Selarl [G]-[R] ès-qualités.

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a condamné Mme [E] [S] à payer à la Selarl [G] [R] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Prisme Guardian system security la somme de 285.269,79 euros au titre de l’insuffisance d’actif et prononcé une mesure de faillite personnelle d’une durée de douze ans à son encontre.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne Mme [S] au paiement de la somme de 180.000 euros, à la Selarl [G] [R] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Prisme Guardian system security.

Prononce une mesure de faillite personnelle à l’encontre de Mme [S] d’une durée de dix ans.

Condamne Mme [E] [S] aux dépens d’appel.

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


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