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Notification d’indu d’allocations familialesPar courrier recommandé du 11 octobre 2022, la CAF TOURAINE a informé Monsieur [U] et Madame [T] d’un indu d’allocations familiales d’un montant de 1.130,06 € pour la période de décembre 2020 à septembre 2022. La CAF leur reproche de ne pas avoir déclaré leur résidence aux Émirats Arabes Unis, alors qu’ils affirmaient vivre en France. Pénalité administrative envisagéeLe 21 juin 2023, la directrice de la CAF a notifié à Madame [T] son intention de lui imposer une pénalité administrative de 340 €, lui laissant un mois pour formuler des observations. Cette notification a été accusée de réception le 23 juin 2023. Décision de pénalitéLe 9 février 2024, la directrice de la CAF a décidé de prononcer la pénalité de 340 € à l’encontre de Madame [T], après avis de la commission administrative fraude. Recours au Tribunal JudiciaireLe 5 mars 2024, Madame [T] a saisi le Pôle social du Tribunal Judiciaire de TOURS, contestant la pénalité qu’elle jugeait injustifiée et résultant d’une mauvaise gestion de son dossier par la CAF. Elle a également souligné qu’elle avait toujours fourni les documents requis dans les délais impartis. Audience et contestation de la pénalitéLors de l’audience du 16 septembre 2024, Madame [T] a contesté la pénalité, affirmant vivre en France cinq mois par an et avoir une société en France. Elle a également indiqué avoir réglé l’indu par un échéancier qui s’est terminé en juillet 2023. Arguments de la CAFLa CAF a demandé au tribunal de débouter Madame [T] de son recours et de confirmer la pénalité. Elle a exposé que Madame [T] avait été informée de la perception de revenus à l’étranger et que des fausses déclarations avaient été faites à plusieurs reprises. Productions de preuves par Madame [T]Madame [T] a demandé à produire des justificatifs prouvant sa résidence en France pendant plusieurs mois sur la période concernée. Elle a présenté des factures, mais celles-ci n’ont pas démontré qu’elle et ses enfants vivaient habituellement en France. Évaluation de la bonne foiLe tribunal a rappelé que la bonne foi est présumée, mais a noté que les déclarations de Madame [T] étaient mensongères. Les démarches effectuées pour bénéficier de la caisse des Français de l’étranger ont été reconnues, mais cela n’a pas prouvé sa résidence en France. Conclusion du tribunalLe tribunal a conclu que les fausses déclarations étaient intentionnelles et que la pénalité était proportionnée à la situation financière du couple et à la durée de la fraude. Madame [T] a été déboutée de son recours et condamnée à payer la pénalité de 340 € ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance. Possibilité d’appelLa décision peut être attaquée devant la COUR de CASSATION dans un délai de deux mois à compter de sa notification, accompagnée d’une copie de la décision. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE TOURS
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PÔLE SOCIAL
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JUGEMENT DU 28 OCTOBRE 2024
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DEMANDERESSE
Madame [I] [T]
née le 19 Mai 1977 à [Localité 7], demeurant [Adresse 3]
Comparante en personne
DEFENDERESSE
CAF TOURAINE,
[Adresse 1]
Représentée par Madame [O], audiencière, munie d’un pouvoir ;
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DEBATS ET LORS DU DELIBERE :
Président : Madame P. GIFFARD
Assesseur : Mme M. [K], Assesseur employeur/travailleur indépendant
Assesseur : M. M. JEZY, Assesseur salarié
DÉBATS :
L’affaire ayant été appelée à l’audience publique du 16 septembre 2024, assisté de E. ELYSEYAN, greffier lors des débats et de A.BALLON, faisant fonction de greffier lors du délibéré pour être rendue ce jour, par mise à disposition au greffe de la juridiction ;
Le Tribunal a rendu le jugement suivant :
Par courrier recommandé du 11 octobre 2022, la CAF TOURAINE a notifié à Monsieur [U] et Madame [T] un indu d’allocations familiales pour la période de décembre 2020 à septembre 2022, d’un montant de 1.130,06 €, leur reprochant de ne pas avoir déclaré qu’ils résidaient aux Emirats Arables Unis alors qu’ils déclaraient vivre en France.
Par courrier recommandé du 21 juin 2023 (accusé de réception du 23 juin 2023), la directrice de la CAF a notifié à Madame [I] [T] qu’ elle envisageait de prononcer à son encontre une pénalité administrative de 340 €. Elle l’a informée de la possibilité de formuler des observations dans le délai d’un mois.
Par courrier recommandé du 9 février 2024 (accusé de réception du 23 février 2024), la directrice de la CAF, après avis de la commission administrative fraude, a décidé de notifier une pénalité de 340 € à Madame [T].
Par courrier recommandé du 5 mars 2024, Madame [T] a saisi le Pôle social du Tribunal Judiciaire de TOURS, indiquant que la pénalité est « injustifiée et résulte d’une incapacité de la CAF à suivre correctement mon dossier » et qu’elle a toujours fourni les documents requis dans les délais impartis : elle considère que le suivi de son dossier a été défaillant, que la pénalité réclamée est « outrancière par rapport à la situation réelle de mon dossier » et que « la pénalité devrait être appliquée à la CAF ».
Les parties ont été convoquées à l’audience du 24 juin 2024 : Madame [T] a sollicité le renvoi n’étant pas en France à cette période.
A l’audience du 16 septembre 2024, Madame [T] conteste la pénalité qui lui a été notifiée, indiquant vivre en France cinq mois par an et avoir une société en France. Elle déclare avoir réglé l’indu par la mise en place d’un échéancier qui a pris fin en juillet 2023.
Elle indique qu’elle est de bonne foi, que les échanges avec la CAF ont été violents, que son compte CAF est bloqué. Elle reconnaît que ses enfants sont scolarisés aux Emirats Arabes Unis depuis la rentrée de septembre 2019.
La CAF demande au tribunal de débouter Madame [T] de son recours et de confirmer la pénalité de 340 €.
Elle expose avoir été informée, d’une part, par les services fiscaux de la perception de revenus à l’étranger et d’autre part, par la CPAM que Monsieur [U] et les enfants dépendaient de la Caisse des Français de l’étranger depuis le 27 mai 2019 et Madame [T] depuis le 3 septembre 2019.
Elle indique que Madame [T] a déclaré son mariage à la CAF mais pas sa nouvelle adresse, et que la pénalité a été notifiée au regard de la répétition des fausses déclarations. Elle précise que l’indu aurait pu être plus élevé, Madame [T] n’ayant pas davantage informé la CAF du Val d’Oise de son départ de France.
Elle ajoute que la directrice de la CAF pouvait fixer une pénalité financière allant jusqu’à 14.664 € et que la pénalité notifiée est adaptée au regard de la durée de la fraude et de la situation financière du couple (pour Monsieur 86.820 € de revenus fonciers et 120.000 € de salaire ; pour Madame ; 86.820 € de revenus fonciers).
Madame [T] a sollicité de pouvoir produire en cours de délibéré des justificatifs démontrant qu’elle résidait en France plusieurs mois dans l’année sur la période litigieuse.
En cours de délibéré, Madame [T] a produit des factures [5] (ne faisant état d’aucune communications téléphonique) et des factures [4].
La CAF a adressé une note en délibéré également.
Il sera rappelé à titre liminaire qu’en application de l’article L 512-1 du Code de la sécurité sociale, les allocations familiales sont versées aux personnes qui résident en France et qui ont à leur charge plusieurs enfants résidant en France.
– sur la pénalité administrative
Aux termes de l’article L.114-17 du code de la sécurité sociale, « I.-Peuvent faire l’objet d’un avertissement ou d’une pénalité prononcée par le directeur de l’organisme chargé de la gestion des prestations familiales ou des prestations d’assurance vieillesse, au titre de toute prestation servie par l’organisme concerné:
1° L’inexactitude ou le caractère incomplet des déclarations faites pour le service des prestations ;
2° L’absence de déclaration d’un changement dans la situation justifiant le service des prestations ;
3° L’exercice d’un travail dissimulé, constaté dans les conditions prévues à l’article L. 114-15, par le bénéficiaire de prestations versées sous conditions de ressources ou de cessation d’activité ;
4° Les agissements visant à obtenir ou à tenter de faire obtenir le versement indu de prestations servies par un organisme mentionné au premier alinéa, même sans en être le bénéficiaire ;
5° Les actions ou omissions ayant pour objet de faire obstacle ou de se soustraire aux opérations de contrôle exercées, en application de l’article L. 114-10 du présent code et de l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, par les agents mentionnés au présent article (…)
II Lorsque l’intention de frauder est établie, le montant de la pénalité ne peut être inférieur à un trentième du plafond mensuel de la sécurité sociale. En outre la limite du montant de la pénalité prévue au I est portée à quatre fois le plafond mensuel de la sécurité sociale (…)».
Il appartient au juge du contentieux de la sécurité sociale saisi d’un recours formé contre la pénalité prononcée de vérifier la matérialité, la qualification et la gravité des faits reprochés à la personne concernée ainsi que l’adéquation du montant de la pénalité à l’importance de l’infraction commise par cette dernière.
Il convient également de rappeler que la bonne foi est présumée.
En 2023, le plafond mensuel de la sécurité sociale était fixée à 3.666 €. Dès lors, la CAF pouvait prononcer une pénalité allant jusqu’à un montant de 14.664 €.
En l’espèce, Madame [T] met en avant sa bonne foi et le droit à l’erreur. Elle conteste le caractère intentionnel des fausses déclarations et indique avoir réglé l’indu.
Si Madame [T] a effectivement réglé l’indu notifié le 11 octobre 2022 par un échéancier (soldé au 10 juillet 2023), sa bonne foi (présumée) s’apprécie au moment des déclarations et sur la période concernée par l’indu notifié par la CAF Touraine (période de décembre 2020 à septembre 2022).
il ressort des pièces produites par la CAF que le couple [T] – [U] bénéficiait précédemment d’allocations familiales versées par la CAF du Val d’Oise.
Toutefois le 25 novembre 2020, Madame [T] a effectué une démarche en ligne auprès de la CAF indiquant s’être mariée le 16 avril 2019 et avoir emménagé au [Adresse 2] à [Localité 8] le 1er août 2019.
Le 26 décembre 2021, elle effectuait une modification en ligne, modifiant son adresse, laquelle était désormais : [Adresse 3] à [Localité 8] (« date d’emménagement dans le nouveau logement »)
Il n’est pas contesté (rapport de l’agent enquêteur et déclarations à l’audience) qu’elle a fait des démarches pour que ses enfants bénéficient de la caisse des Français de l’étranger depuis le 27 mai 2019 (et pour elle même le 3 septembre 2019).
Madame [T] indique avoir une société en France et y venir 5 mois par an. Il s’agit effectivement d’une SCI [6] dont le siège social est situé au [Adresse 2] à [Localité 8].
Madame [T] produit des factures [4] faisant mention d’un « bâtiment A – résidence secondaire [Adresse 3] » adressées à la SCI [6], qui témoignent d’une occupation, sans que la juridiction constate qu’il s’agit de celle de Madame [T] et de ses enfants (au regard des revenus fonciers perçus par le couple).
Elle produit également une facture [5] du 2 avril 2022 faisant état de 14 appels nationaux d’une durée de 1 heure et 16 minutes.
Si la juridiction ne nie pas que Madame [T] peut se rendre en France à plusieurs reprises pour les besoins de la SCI en rapport avec les revenus fonciers perçus par le couple [T] [U] (172.000 € en 2022), il n’est nullement démontré au regard des pièces produites que Madame [T] et ses enfants (nés en 2005 et 2009) y vivent habituellement, puisque ces derniers sont scolarisés aux Emirats Arabes Unis depuis la fin de l’été 2019.
Le fait éventuel qu’ils reviennent en France durant les vacances scolaires ne s’assimile pas davantage en une résidence en France.
Madame [T] est mal fondée à prétendre à l’audience qu’elle réside en France alors qu’elle avait sollicité le renvoi de l’examen du dossier (prévu initialement le 24 juin 2024 – convocation par courrier du 11 mars 2024) indiquant qu’elle devait « accompagner son fils expatrié pour ses examens » et qu’elle « ne pourrait être en France simultanément ».
Si Madame [T] produit un courrier daté du 14 octobre 2022 indiquant « j’ai déclaré en temps utile un changement d’adresse, ainsi que stipulé sur vos services et ne me suis jamais cachée de ma nouvelle résidence fiscale (…) l’ensemble des administrations a été dûment informé, vous ne pourriez y voir une tentative de fraude, absurde », force est de constater qu’elle ne démontre aucunement avoir avisé la CAF de ce qu’elle résidait avec ses enfants aux Emirats Arabes Unis depuis l’été 2019.
Il est donc démontré que les déclarations en ligne faites à la CAF les 25 novembre 2020 (pièce 6) et 26 décembre 2021 (pièce 8) sont mensongères et que Madame [T] n’a pas davantage déclaré son changement de résidence au cours de l’année 2022 à la CAF.
Chaque assuré doit informer la CAF des changements de situation le concernant et la mention d’un départ à l’étranger d’une famille n’est pas une information anodine dont Madame [T] pouvait se dispenser.
Le caractère intentionnel de la fausse déclaration est donc établi, au regard des déclarations erronées effectuées à deux reprises en 2021 et de l’abstention fautive s’agissant de 2022.
La pénalité a vocation à sanctionner les fausses déclarations des assurés et ne doit pas être d’un montant symbolique, afin de dissuader toute récidive.
La situation de précarité du couple [T] – [U] n’est nullement démontrée voire alléguée.
Aucun indu n’a été réclamé sur la période de septembre 2019 à novembre 2020. La pénalité est proportionnée à la situation financière du couple et à la durée de la fraude.
En conséquence, Madame [T] sera déboutée de son recours et condamnée aux entiers dépens de l’instance.
Le tribunal, statuant par décision contradictoire, par mise à disposition au greffe et rendue en dernier ressort,
CONDAMNE Madame [I] [T] à payer à la CAF TOURAINE une pénalité financière de 340 €;
CONDAMNE Madame [I] [T] aux entiers dépens.
ET DIT que conformément aux dispositions des articles 605 et 612 du code de procédure civile, la présente décision peut être attaquée devant la COUR de CASSATION par ministère d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation, dans le délai de DEUX MOIS à compter du jour de notification de la présente décision.
Elle devra être accompagnée d’une copie de la décision.
Ainsi fait et jugé au Tribunal judiciaire de TOURS, le 28 Octobre 2024.
A.BALLON P.GIFFARD
Faisant fonction de greffier Présidente