SB/IC
S.A.R.L. CAP IMMOBILIER
C/
LE COMPTABLE DU POLE DE RECOUVREMENT SPECIALISE DE COTE D’OR
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D’APPEL DE DIJON
1ère chambre civile
ARRÊT DU 09 MAI 2023
N° RG 22/01311 – N° Portalis DBVF-V-B7G-GBTL
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : jugement du 11 octobre 2022,
rendu par le juge de l’exécution près le tribunal judiciaire de Dijon – RG : 21/02003
APPELANTE :
S.A.R.L. CAP IMMOBILIER agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège :
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par Me Christophe BALLORIN, membre de la SELARL BALLORIN-BAUDRY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 9
INTIMÉ :
LE COMPTABLE DU POLE DE RECOUVREMENT SPECIALISE DE COTE D’OR Centre des Finances Publiques
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 28 février 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre,
Sophie BAILLY, Conseiller, qui a fait le rapport sur désignation du Président,
Leslie CHARBONNIER, Conseiller,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Aurore VUILLEMOT, Greffier
DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 02 Mai 2023 pour être prorogée au 09 Mai 2023,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et par Aurore VUILLEMOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
La SASU Action TP a fait l’objet de deux contrôles fiscaux, en matière de TVA pour les périodes de 2013 à 2015 et de 2015 à 2018.
Le montant total de la créance alléguée par les services fiscaux était de 380 501, 95 euros, se décomposant en un principal de 271 449, 95 euros et en des accessoires pour un montant de 109 052 euros.
Les contrôles fiscaux ont été contestés par la SASU Action TP dont les différentes réclamations n’ont été que partiellement acceptées.
Suite à l’exercice de ses droits de communication à l’égard de la Banque Populaire Bourgogne Franche-Comté, auprès de laquelle la SASU Action TP est titulaire d’un compte, l’administration fiscale a estimé qu’elle était en relation d’affaires avec la SARL Cap Immobilier, les services fiscaux ayant constaté l’existence de flux financiers entre les deux entreprises du 5 janvier 2021 au 12 avril 2021 et du 1er juin 2021 au 4 août 2021 : 17 encaissements pour un total de 50 681,22 euros en provenance de la SARL Cap Immobilier, puis 24 virements pour 77 770 euros correspondant à des ‘factures SARL Cap Immobilier’.
Pour le recouvrement des impôts susmentionnés, le comptable du pôle de recouvrement spécialisé de Côte-d’Or a diligenté une saisie administrative à tiers détenteur (SADT), notifiée à la SARL Cap Immobilier le 28 avril 2021 pour un montant de 114 257, 28 euros en sa qualité de tiers saisi, mesure qu’il a notifiée à la SASU Action TP, le même jour.
A défaut de réponse et de versements de la part de la SARL Cap Immobilier, une mise en demeure lui a été vainement notifiée le 12 juin 2021.
Par acte du 24 septembre 2021, le comptable public responsable du pôle de recouvrement spécialisé de Côte-d’Or a saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Dijon aux fins d’obtenir la condamnation de la SARL Cap Immobilier à lui payer, sur le fondement des articles L 262, L263, et L 263-0 A du livre des procédures fiscales et de l’article R 211-19 du code des procédures civiles d’exécution, la somme de 114 257, 28 euros correspondant au montant de la SATD du 28 avril 2021, outre 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La SARL Cap Immobilier s’est opposée à ces demandes au motif qu’elle n’était pas débitrice de la SASU Action TP.
Par jugement du 11 octobre 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Dijon a :
– délivré un titre exécutoire, à la demande du comptable public du pôle de recouvrement spécialisé de [Localité 4], à l’encontre de la SARL Cap Immobilier qui, débitrice, a refusé de déclarer l’étendue de ses obligations à l’égard de la SASU Action TP, dans le cadre de la saisie administrative à tiers détenteur émise le 28 avril 2021, et notifiée à la SARL Cap Immobilier, pour la somme de 114 257, 28 euros,
En conséquence,
– condamné la SARL Cap Immobilier à payer directement au comptable public du pôle de recouvrement spécialisé de [Localité 4] :
* en deniers ou quittances, la somme de 114 257, 28 euros,
* la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SARL Cap Immobilier aux dépens,
– rappelé que la décision est exécutoire de plein droit.
Le jugement a été notifié le 11 octobre 2022.
La Sarl Cap Imobilier en a interjeté appel par déclaration reçue au greffe le 21 octobre 2022.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 12 décembre 2022, la SARL Cap Immobilier demande à la cour, au visa de l’article L.211-2 alinéa 1er du code des procédures civiles d’exécution et de l’article L. 262 du livre des procédures fiscales, de :
– infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
– débouter le comptable du pôle de recouvrement spécialisé de la Côte-d’Or de l’intégralité de ses demandes,
– condamner le comptable du pôle de recouvrement spécialisé de la Côte-d’Or à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Par conclusions notifiées le 12 décembre 2022, le comptable public du pôle de recouvrement spécialisé de [Localité 4] demande à la cour de :
– confirmer le jugement dont appel,
Y ajoutant,
– condamner la SARL Cap Immobilier à lui verser la somme de 1 500 euros conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens d’appel,
– rejeter la demande de condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est référé pour l’exposé des moyens des parties à leurs conclusions visées ci-dessus.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 février 2023.
MOTIVATION
Au soutien de son appel, l’appelante prétend que :
– la SASU Action TP et elle sont des sociétés s’urs appartenant et dirigées, l’une et l’autre, par M. [K] [V],
– si des flux financiers ont bien eu lieu entre elles, c’est à raison de prêts de trésorerie temporaires qu’elle a consentis de juin à décembre 2021, pour soutenir la SASU Action TP,
– elle n’est donc absolument pas débitrice de la SASU Action TP. C’est le contraire, car la SASU Action TP devra rembourser ces prêts de trésorerie temporaires.
L’intimée fait valoir que :
– la SARL Cap Immobilier n’apporte aucun élément de preuve de ses affirmations par la production du contrat de prêt ou convention de trésorerie liant les deux sociétés,
– seule une convention de trésorerie soumise à des conditions légales spécifiques permettrait notamment de justifier d’un intérêt économique, social ou financier commun entre les deux sociétés,
– les factures produites semblent avoir été établies pour les besoins de la cause, dès lors notamment que la TVA collectée n’apparaît pas dans les déclarations de TVA de l’appelante,
– en toute hypothèse, si une telle convention existe, elle fait naître une obligation de la SARL Cap Immobilier envers la SASU Action TP. Ainsi les créances résultant de l’exécution de cette convention auraient dû être appréhendées par la SATD à compter de sa notification.
La saisie administrative à tiers détenteur est régie par l’article L. 262 du livre des procédures fiscales, dont les dispositions du § 3 sont, depuis le 1er janvier 2019, les suivantes, la cour mettant en exergue les deux derniers alinéas du texte :
Sous peine de se voir réclamer les sommes saisies majorées du taux d’intérêt légal, le tiers saisi, destinataire de la saisie administrative à tiers détenteur, est tenu de verser, aux lieu et place du redevable, dans les trente jours suivant la réception de la saisie, les fonds qu’il détient ou qu’il doit, à concurrence des sommes dues par ce dernier.
Pour les créances conditionnelles ou à terme, le tiers saisi est tenu de verser immédiatement les fonds lorsque ces créances deviennent exigibles.
Le tiers saisi est tenu de déclarer immédiatement par tous moyens l’étendue de ses obligations à l’égard du redevable dans les conditions prévues à l’article L 211-3 du code des procédures civiles d’exécution.
Le tiers saisi qui s’abstient, sans motif légitime, de faire cette déclaration ou fait une déclaration inexacte ou mensongère peut être condamné, à la demande du créancier, au paiement des sommes dues à ce dernier, sans préjudice d’une condamnation à des dommages et intérêts.’
‘
En l’espèce, la cour relève que la SARL Cap Immobilier ne démontre, ni même n’allègue, avoir déclaré quoi que ce soit à l’administration fiscale, pas même lui avoir signifié qu’elle n’avait aucune obligation à l’égard de la SASU Action TP, alors qu’il est établi que le pôle recouvrement spécialisé de la Côte-d’Or de la direction générale des finances publiques lui avait notifié une saisie administrative à tiers détenteur (SADT), le 28 avril 2021 pour un montant de 114 257, 28 euros en sa qualité de tiers saisi, l’accusé de réception étant signé par elle le 4 mai 2021 selon la pièce versée aux débats par l’intimée. L’appelante ne s’est pas davantage acquitté a minima de son obligation déclarative, le cas échéant pour élever une contestation sur sa qualité de tiers saisi, après la mise en demeure qui lui a été notifiée par l’administration le 12 juin 2021 dont elle a accusé réception le 5 juillet 2021, selon pièce communiquée aux débats, ladite mise en demeure lui rappelant les termes de la SATD précédemment notifiée.
Contrairement à ce qu’elle soutient, il résulte clairement des dispositions rappelées ci-dessus que le seul manquement de la SARL Cap Immobilier à son obligation déclarative ouvre droit à une action à son encontre aux fins qu’elle soit tenue au paiement de la dette fiscale de la SASU Action TP.
La SARL Cap Immobilier ne peut toutefois être condamnée à payer la somme due par la SASU Action TP que si elle est effectivement débitrice à l’égard de cette société.
Ainsi que l’a justement rappelé le premier juge, dans la mesure où la SARL Cap Immobilier a manqué à son obligation déclarative et n’a formé aucune contestation, il lui incombe d’établir la preuve qu’elle n’a aucune dette à l’égard de la SASU Action TP ou que le montant de sa dette est inférieur au montant des impôts dus.
En l’espèce, la SARL Cap Immobilier soutient qu’elle est créancière de la SASU Action TP au titre de prêts temporaires dont elle soutient justifier par un ensemble de factures émises par la société ‘Action TP’ à son encontre, lesdites factures portant toutes sous la rubrique «’Désignation’», la mention «’prêt trésorerie temporaire’», pour diverses sommes TTC, la TVA étant de 20 % ; il ressort des propres écritures de l’appelante que ces factures comportent a minima une erreur dès lors que les prêts de trésorerie ne sont pas soumis à TVA.
Ces éléments sont insuffisants à rapporter la preuve que la SARL Cap Immobilier n’est pas débitrice de la SASU Action TP.
Par ailleurs, c’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a relevé que :
– d’une part, les opérations bancaires du compte de la SASU Action TP, supposément bénéficiaire des prêts allégués, révèlent par leur intitulé qu’elles sont vraisemblablement relatives à des prestations facturées et payées (et non à l’existence de «’prêts de trésorerie’») ce qui conforte la présomption résultant de l’absence de toute déclaration et contestation de la part de l’appelante,
– d’autre part, les relations d’affaires entre la SARL Cap Immobilier et la SAS Action TP sont constantes si bien que la créance détenue par la seconde sur la première est à exécution successive.
En conséquence, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a délivré un titre exécutoire à l’administration fiscale et condamné la SARL Cap Immobilier à payer directement au comptable public du pôle de recouvrement spécialisé de [Localité 4], en deniers ou quittances, la somme de 114 257, 28 euros.
Le jugement déféré doit également être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens de première instance et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.
Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la SARL Cap Immobilier est condamnée aux dépens d’appel.
Il est équitable de la condamner à payer au comptable du pôle recouvrement spécialisé de la Côte-d’Or la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
‘
PAR CES MOTIFS
‘
La cour,
‘
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 11 octobre 2022 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Dijon,
‘
Y ajoutant,
Condamne la SARL Cap Immobilier’ aux dépens d’appel,
‘
Condamne la SARL Cap Immobilier’à payer au comptable public du pôle de recouvrement spécialisé de Côte-d’Or la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
‘
‘
Le Greffier, Le Président,