Saisine du juge de l’exécution : 8 juin 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/10676

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Saisine du juge de l’exécution : 8 juin 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/10676

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 08 JUIN 2023

N° 2023/ 423

Rôle N° RG 22/10676 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJZ2H

S.A.R.L. AGENCE DV AUTOS

C/

S.A.R.L. AGCM

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Franck MILOUDI

Me Paul GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l’exécution de Grasse en date du 01 Juillet 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 21/04735.

APPELANTE

S.A.R.L. AGENCE DV AUTOS

inscrite au RCS de GRASSE sous le n°438 767 469

prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 3]

représentée et assistée par Me Farouk MILOUDI de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de NICE

INTIMÉE

S.A.R.L. AGCM

inscrite au RCS de NICE sous le numéro 502 679 491

siège social [Adresse 2]

prise en la personne de son liquidateur amiable M. [Z] [I] domicilié [Adresse 1]

représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ – MONTERO – DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Alexia CASTROVINCI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Avril 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Pascale POCHIC, Conseiller, et Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller.

Madame Pascale POCHIC, Conseiller, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Evelyne THOMASSIN, Président (rédactrice)

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023,

Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure et prétentions des parties :

La société AGCM avait acquis en novembre 2017 auprès de la société Agence DV Autos un véhicule de marque Audi Q7, dont il s’est avéré par la suite qu’il était placé sous scellés à la suite d’un vol perpétré en Italie.

Le tribunal de commerce de Grasse, constatant une éviction totale de ses droits par l’acquéreur, le 21 septembre 2021 a condamné la société DV Autos au remboursement du prix de vente de l’automobile, soit la somme de 59 990 euros et la restitution de celle ci par la société AGCM, outre 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en ordonnant l’exécution provisoire de la décision.

Par acte du 21 décembre 2021, la société AGCM a saisi le juge de l’exécution pour obtenir fixation d’une astreinte afin que la société venderesse soit contrainte de reprendre possession du véhicule et l’indemnise des conséquences de sa résistance abusive à le faire.

Le Juge de l’exécution de Grasse, le 1er juillet 2022 a :

– rejeté des demandes de nullité de l’assignation ainsi délivrée et d’une signification du 5 octobre 2021,

– fixé une astreinte de 5 000 euros pour chaque refus de restitution du véhicule Audi Q7 immatriculé WW978LC effectuée pour le compte de la SARL AGCM, commençant à courir 15 jours après la notification du jugement par le greffe ou sa signification à la diligence des parties,

– condamné la société DV Autos à payer à la société AGCM la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 1240 du code civil, et celle de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de procédure.

Le magistrat écartait la nullité de l’assignation le saisissant au motif que le liquidateur amiable de la SARL AGCM avait toujours qualité pour agir en son nom au vu du Kbis, ce tant que la liquidation se poursuivrait.Il retenait que la société DV Autos avait effectivement le 14 octobre 2021, refusé de reprendre le véhicule ce qui était constitutif d’une faute, et avait créé un préjudice à la société AGCM qui avait eu recours à un remorquage dont le coût lui était resté à charge.

La décision ainsi rendue a été notifiée par le greffe et la SARL DV Autos en a accusé réception le 8 juillet 2022 par la signature de l’accusé de réception postal. Elle en a fait appel par déclaration au greffe de la cour le 22 juillet 2022.

Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions du 7 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé la SARL Agence DV Autos demande à la cour de :

Vu l’article L.237-21 du Code de commerce,

Vu les articles 502 et 503 du Code de procédure civile,

Vu les jurisprudences citées,

Vu les pièces versées au débat,

– Reformer le jugement querellé ;

– Prononcer la nullité de l’assignation délivrée le 21 octobre 2021 ;

– Prononcer la nullité de la signification du jugement intervenue le 5 octobre 2021 ;

– Debouter la société AGCM de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause,

– Condamner la société AGCM à verser à la société DV autos la somme de 3 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Sur le fondement de l’article L237-21 du code de commerce, la SARL DV Autos soutient que le mandat du liquidateur amiable de son adversaire procédural est arrivé à terme après trois ans, le 28 août 2021, de sorte qu’il n’a plus qualité à agir. Il n’est pas justifié de son renouvellement dans ses fonctions, ce que l’immatriculation Kbis est insuffisante à établir (Cass 18 décembre 2012 n°12-10136). Pas davantage, la notification du jugement par acte du 5 octobre 2021 n’a été valablement réalisée, la société AGCM étant alors dépourvue de représentant légal. La société AGCM ne peut donc se prévaloir du jugement du 21 septembre 2021. Elle ajoute que la restitution du véhicule est juridiquement impossible, elle n’est pas propriétaire du véhicule car le tribunal de commerce n’a pas résolu la vente, ce qui la place dans une situation inextricable. Les documents administratifs ne pourront être modifiés. La décision du tribunal de commerce ne peut être exécutée.

Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions du 3 novembre 2022 auxquelles il est renvoyé, la SARL AGCM demande à la cour de :

Vu les dispositions de l’article L 121-1 alinéa 2 du Code des procédures civiles d’exécution,

– Vu les dispositions des articles 4 et 954 du Code de procédure civile,

– Vu l’article R123-131 du Code de commerce,

– Vu la jurisprudence précitée,

– Vu le jugement rendu par le tribunal de commerce de Grasse le 13 septembre 2021,

– confirmer le jugement rendu par le juge de l’exécution de Grasse le 1er juillet 2022 en toutes ses dispositions,

– condamner la SARL agence DV Autos à payer à la SARL AGCM prise en la personne de son liquidateur amiable la somme de 3.500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens d’appel, ces derniers distraits au profit de la SCP Cohen GuedJ ‘ Montero ‘ Daval guedj sur son offre de droit.

C’est une mésentente entre associés qui est à l’origine de la liquidation amiable, mais elle n’est pas en cessation de paiements. La liquidation se poursuit. Elle a tenté la restitution du véhicule le 13 octobre 2021, mais monsieur [S], gérant de la société appelante s’y est opposé. Ceci a répercuté sur elle de manière excessive, le coût du remorquage, et la garde de l’automobile dont elle n’est pas propriétaire. Elle rappelle que la cour n’est tenue de statuer que sur les prétentions exposées au dispositif de la décision et qu’aucune critique de son adversaire n’a été faite au titre de l’astreinte et des dommages et intérêts. De plus, la restitution de l’automobile a finalement été réalisée, le 19 juillet 2022, de sorte que la société Agence DV Autos a consenti à l’exécution, après notification de la décision mais avant signification et que l’astreinte ait pu commencer à courir. Elle justifie par le Kbis que le liquidateur amiable a vu sa mission prorogée et pour la dernière fois, à compter du 1er septembre 2022.Elle observe que jamais le véhicule n’a pu être immatriculé à son nom, et que la restitution s’est finalement réalisée, elle n’était donc pas impossible. Le préjudice subi et l’indemnisation fixée en premiere instance méritent confirmation.

L’ordonnance de cloture a été prononcée le 7 mars 2023.

MOTIVATION DE LA DÉCISION :

* sur la qualité à agir du liquidateur amiable :

Selon l’article L. 237-21 du code de commerce :

‘La durée du mandat du liquidateur ne peut excéder trois ans. Toutefois, ce mandat peut être renouvelé par les associés ou par le président du tribunal de commerce, selon que le liquidateur a été nommé par les associés ou par décision de justice’.

Comme le soutient l’appelante, tandis que pour les sociétés civiles, il est admis que le liquidateur amiable poursuive son mandat durant le temps nécessaire à la liquidation, il n’en est pas de même pour une société commerciale, ce qu’est la SARL AGCM, en raison de sa forme, en présence d’une disposition légale spécifique, dont les termes rappelés ci dessus, exigent au delà de trois ans, que la mission du liquidateur soit prorogée soit par les associés soit par une décision de justice. Le texte ne distingue pas selon que la liquidation amiable a pour origine des difficultés financières ou des problèmes de mésentente entre associés. Il n’y a donc pas lieu de distinguer à ce titre selon les causes de la liquidation décidée.

La Cour de cassation dans un arrêt de la chambre commerciale du 3 mai 2016 n°14-25213, maintenait une telle analyse alors que les statuts de la société autorisaient pourtant le mandataire liquidateur à poursuivre sa mission ‘le temps nécessaire à la liquidation’. Cette jurisprudence exige au delà de trois années une durée précise du terme du mandat, qui peut être renouvelé éventuellement, alors qu’on observe souvent des liquidations de durée trop excessive, condamnées par la cour européenne des droits de l’homme, laquelle se réfère régulièrement à un délai raisonnable.

Les mentions du Kbis, invoquées par monsieur [I], liquidateur amiable de la société AGCM sont insuffisantes à justifier de sa qualité à agir pour le compte de cette société, et il ne produit, ni décision de justice, ni décision des associés pour lui maintenir capacité. Cette difficulté procédurale est une nullité de fond au sens de l’article 117 du code de procédure civile.

En conséquence de quoi, il convient effectivement de dire nulles l’assignation délivrée le 21 octobre 2021 devant le juge de l’exécution et la signification du jugement faite le 5 octobre 2021.

* sur les autres demandes :

Il n’est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles engagés dans l’instance. Il ne sera pas fait application de l’article 700 du code de procédure civile,

La partie perdante supporte les dépens, ils seront à la charge de la société AGCM qui succombe en ses prétentions.

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré, statuant par décision contradictoire, mise à disposition au greffe,

INFIRME la décision déférée,

Statuant à nouveau,

DECLARE nulles l’assignation délivrée au nom de la société AGCM le 21 octobre 2021 devant le juge de l’exécution de Grasse et la signification du jugement du tribunal de commerce de Grasse du 13 septembre 2021 faite le 5 octobre 2021,

DIT n’y avoir lieu à frais irrépétibles,

CONDAMNE la société AGCM à supporter les dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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