1ère Chambre
ARRÊT N°168/2023
N° RG 22/05917 – N° Portalis DBVL-V-B7G-TFNY
S.A.R.L. BCH
C/
M. [C] [M]
M. [R] [H]
M. [A] [D]
CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D'[Localité 19]
S.C.I. PAIN-BARBEDIENNE
S.A.S. [F] GOIC & ASSOCIES
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 06 JUIN 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 20 mars 2023 devant Madame Véronique VEILLARD, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
rendu par défaut, prononcé publiquement le 06 juin 2023 par mise à disposition au greffe après prorogation du délibéré annoncé au 31 mai 2023 à l’issue des débats
****
APPELANTE :
La S.A.R.L. BCH, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 16]
[Localité 13]
Représentée par Me Jean-Paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Denis BRACKA, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉS :
La CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D'[Localité 19], société coopérative de crédit à capital variable, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Saint-Brieuc sous le n°309.517.670, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Localité 8]
Représentée par Me Caroline DUFFIN de la SELARL RAVET & ASSOCIÉS, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
La S.C.I. PAIN-BARBEDIENNE, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Saint-Malo sous le n°482.982.782, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 18]
[Localité 7]
Représentée par Me Stéphane BARON de la SCP BARON WEEGER AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
La S.A.S. [F] GOIC & ASSOCIES, prise en la personne de Me [Z] [F], agissant en qualité de mandataire judiciaire de la SCI PAIN-BARDEDIENNE
[Adresse 22]
[Adresse 17]
[Localité 14]
Représentée par Me Stéphane BARON de la SCP BARON WEEGER AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
Monsieur [C] [M]
né le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 23]
[Adresse 15]
[Localité 21]
Régulièrement assigné par acte d’huissier délivré le 4 novembre 2022 en l’étude, n’a pas constitué
Monsieur [R] [H]
né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 20]
[Adresse 5]
[Localité 10]
Régulièrement assigné par acte d’huissier délivré le 4 novembre 2022 en l’étude, n’a pas constitué
Monsieur [A] [D]
né le [Date naissance 12] 1967 à [Localité 21]
[Adresse 11]
[Localité 9]
Régulièrement assigné par acte d’huissier délivré le 4 novembre 2022 en l’étude, n’a pas constitué
FAITS ET PROCÉDURE
Par jugement d’adjudication du 1er mars 2022, un bâtiment à usage industriel situé [Adresse 4] cadastré section n° B [Cadastre 6], abritant une activité de forge marine et appartenant à la sci Pain-Barbedienne, débitrice poursuivie par le Crédit mutuel d'[Localité 19] dans le cadre d’une saisie-immobilière, a été adjugé au prix de 170.000 € à la sarl BCH.
Le 11 mars 2022, MM. [V] [M], [R] [H] et [A] [D] ont formé surenchère au greffe du tribunal judiciaire.
Le 28 mars 2022, la sarl BCH a formé une contestation de cette déclaration de surenchère.
Le 8 avril 2022, la sci Pain-Barbedienne, débitrice saisie, a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal judiciaire de Saint-Malo.
Par conclusions signifiées pour l’audience du 3 mai 2022, le Crédit mutuel d'[Localité 19] a sollicité l’arrêt de la procédure de saisie immobilière en application de l’article L.622-21 II du code de commerce, demande à laquelle s’est associée la sci Pain-Barbedienne tandis que la sarl BCH a conclu à la nullité de la surenchère et au caractère définitif de l’adjudication ordonnée le 1er mars 2022 à son profit.
Par jugement du 6 septembre 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc a retenu que l’adjudication du 1er mars 2022 n’était pas devenue définitive avant le jugement du 8 avril 2022 puisqu’une déclaration de surenchère était intervenue au greffe le 11 mars 2022 et que la procédure faisant suite à la surenchère n’était donc pas terminée, ajoutant que le fait que la surenchère était contestée par la sarl BCH ne pouvait avoir pour effet, s’il était fait droit à cette contestation et aux demandes, de rendre l’adjudication définitive avec effet rétroactif au 1er mars 2022.
Le juge de l’exécution a :
– constaté l’ouverture par jugement du 8 avril 2022 d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la sci Pain-Barbedienne,
– ordonné l’arrêt de la procédure de saisie immobilière engagée à son encontre,
– ordonné la mention du jugement à intervenir en marge de la copie du commandement signifié à la sci Pain-Barbedienne publié au service de la publicité foncière de Saint-Brieuc le 25 mai 2021 Volume 2021 S n° 10,
– rappelé que la procédure de saisie immobilière pourra être reprise par conclusions à l’issue de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l’encontre de la sci Pain-Barbedienne ou, en cas de conversion en liquidation judiciaire, par subrogation du mandataire liquidateur,
– dit que les dépens seront employés en frais préalables de la vente.
Par déclaration du 7 octobre 2022, la société BCH a interjeté appel de l’ensemble des chefs du jugement.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
La sarl BCH, adjudicataire, expose ses demandes et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 3 novembre 2022 (et le 8 novembre 2022 à la sci Pain-Barbedienne) auxquelles il est renvoyé.
Elle demande à la cour de :
– réformer la décision dont appel en ce qu’elle a constaté l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire et ordonné l’arrêt de la procédure de saisie immobilière engagée à l’encontre de la sci Pain-Barbedienne,
– juger que la contestation de la déclaration de surenchère du 28 mars 2022 a été formée avant le jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire du 8 avril 2022,
– juger que la nullité de la déclaration de surenchère remet les parties dans le même état où elles se trouvaient avant ladite déclaration,
– juger que la déclaration de non-condamnation en vertu de l’article
R. 322-411 du code des procédures civiles d’exécution n’a pas été jointe à la déclaration de surenchères,
– juger que la déclaration de surenchère ne permet pas de savoir dans quelles conditions et quelles proportions les personnes physiques surenchérisseuses puissent être poursuivies,
– prononcer la nullité de la surenchère,
– juger en conséquence définitive l’adjudication intervenue le 1er mars 2022 au prix de 170.000 euros à son profit,
– condamner solidairement MM. [M], [H] et [D] à lui régler la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 et aux dépens.
La Caisse de Crédit mutuel d'[Localité 19], créancière poursuivante, expose ses demandes et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 2 décembre 2022 auxquelles il est renvoyé.
Elle demande à la cour de lui donner acte de ce qu’elle s’en rapporte à justice concernant la recevabilité et le bien fondé des demandes formées par la sarl BCH. Elle ne soutient pas sa demande du 3 mai 2022 d’arrêt de la procédure de saisie immobilière en application de l’article L. 622-21 II du code de commerce.
La sci Pain-Barbedienne, débitrice saisie, et son mandataire judiciaire la sas [F]-Goïc et associés, exposent leurs demandes et moyens dans leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 28 novembre 2022 auxquelles il est renvoyé.
Elles demandent à la cour de :
– confirmer le jugement du 6 septembre 2022,
– débouter la société BCH de ses demandes,
– en application de l’article L. 622-21 II du code de commerce,
– juger que la procédure de saisie-immobilière engagée à la requête de la Caisse de Crédit mutuel d'[Localité 19] contre elle est arrêtée,
– condamner la sarl BCH à lui payer et à la sas [F]-Goïc et associés, son mandataire judiciaire, la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la sarl BCH aux dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile.
MM. [M], [H] et [D] n’ont pas constitué avocat.
MOTIFS DE L’ARRÊT
À titre liminaire, il convient de rappeler que l’office de la cour d’appel est de trancher le litige et non de donner suite à des demandes de ‘constater’, ‘dire’ ou ‘dire et juger’ qui, hors les cas prévus par la loi, ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile lorsqu’elles sont seulement la reprise des moyens censés les fonder.
1) Sur la suspension des poursuites et le sort de la surenchère
L’article 1.622-21 Il du code de commerce dispose que ‘Sans préjudice des droits des créanciers dont la créance est mentionnée au I de l’article L. 622-17, le jugement d’ouverture arrête ou interdit toute procédure d’exécution tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n’ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d’ouverture.’
Il est de jurisprudence constante qu’en l’absence d’adjudication définitive de l’immeuble saisi avant un jugement d’ouverture d’un redressement judiciaire du débiteur poursuivi, la procédure de saisie immobilière en cours à son encontre est arrêtée (Cass. Com. 4 mars 2014, n° 13-10.534 et 13-17.216).
Par ailleurs, en application de l’article R. 322-55 du code des procédures civiles d’exécution, la surenchère est une reprise des enchères et si elle n’est pas couverte, le surenchérisseur est déclaré adjudicataire. Il faut donc, en cas de surenchère, attendre l’issue des nouvelles enchères pour connaître l’identité de l’adjudicataire définitif.
En l’espèce, ainsi que l’a justement retenu le juge de l’exécution, l’adjudication du bien immobilier, propriété de la sci Pain-Barbedienne, saisi à la requête du Crédit mutuel d'[Localité 19], est intervenue le 1er mars 2022 au profit de la sarl BCH.
Cette adjudication n’est pas devenue définitive avant le jugement du 8 avril 2022 puisqu’une déclaration de surenchère est intervenue au greffe le 1er mars 2022 et que la procédure faisant suite à cette surenchère n’est pas tranchée.
Le fait que la surenchère soit contestée ne peut avoir pour effet, s’il était fait droit à la contestation, de rendre l’adjudication définitive avec effet rétroactif puisque seule la décision définitive statuant sur la surenchère déterminera l’adjudicataire définitif.
Le jugement qui a constaté l’arrêt de la procédure de saisie-immobilière sera confirmé. La procédure relative à la contestation de la surenchère, relevant de cette procédure de saisie-immobilière, s’en trouve par voie de conséquence pareillement arrêtée.
2) Sur les dépens et les frais irrépétibles
Succombant, la sarl BCH supportera les dépens d’appel.
Le jugement sera confirmé s’agissant des dépens de première instance qui resteront employés en frais préalables de la vente.
Enfin, eu égard aux circonstances de l’affaire, il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles exposés par elles en appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc du 6 septembre 2022,
Condamne la sarl BCH aux dépens d’appel,
Rejette les demandes au titre des frais irrépétibles,
Rejette le surplus des demandes.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE