République Française
Au nom du peuple français
————————————
Cour d’appel de Nancy
Chambre de l’Exécution – JEX
Arrêt n° /23 du 06 JUILLET 2023
Numéro d’inscription au répertoire général :
RG n° 22/02715 – N° Portalis : DBVR-V-B7G-FCXR
Décision déférée à la Cour :
jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’EPINAL, R.G n° 22/00253, en date du 18 novembre 2022,
APPELANT :
Monsieur [C] [T]
né le 06 Mars 1954 à [Localité 3] (Haute-Savoie), retraité, domicilié [Adresse 2]
Représenté par Me Frédérique MOREL, avocat au barreau de NANCY et plaidant par Me Pierre ANDRE BABEL avocat au barreau d’EPINAL
INTIME :
Monsieur [E] [R]
né le 07 Avril 1950 à [Localité 4] (37), retraité, domicilié [Adresse 1]
Représenté par Me Violaine GUIDOT de la SELARL BGBJ, avocat au barreau d’EPINAL
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 08 Juin 2023, en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Francis MARTIN, président de chambre, chargé du rapport
Madame Nathalie ABEL, conseillère,
Madame Fabienne GIRARDOT conseillère,
qui en ont délibéré ;
Greffier, lors des débats : Monsieur Ali ADJAL ;
ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement le 06 juillet 2023 date indiquée à l’issue des débats, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile ;
signé par Monsieur Francis MARTIN président de chambre, et par Christelle CLABAUX DUWIQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire ;
————————————————————————————————————–
Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
————————————————————————————————————–
EXPOSE DU LITIGE
Par arrêt rendu le 22 septembre 2020, la cour d’appel de Nancy a, dans un litige opposant M. [E] [R] et M. [C] [T] :
– dit que le mur qui sépare les deux fonds appartenant à M. [R] et M. [T] est un mur mitoyen,
– condamné M. [T] à rétablir ce mur de manière à ce qu’il soit de la même hauteur sur toute sa longueur, y compris la partie à laquelle est adossée la grange de M. [R],
– condamné M. [T] soit à rétablir entre son garage et le mur mitoyen, un espace suffisant pour dresser un échafaudage permettant de remettre en état et d’entretenir ce mur aux frais partagés des deux copropriétaires, soit à adosser son garage à ce mur mitoyen de manière à protéger celui-ci des intempéries et à supprimer le mur qui fait obstacle à son entretien, la toiture de son garage venant alors en continuité de la toiture de la grange de M. [R],
– dit que M. [T] devrait faire effectuer les travaux mis à sa charge dans un délai de six mois à compter de la signification de la présente décision, délai à l’issue duquel commencera à courir, pendant six mois, une astreinte provisoire de 80 euros par jour de retard,
– débouté M. [R] de ses autres demandes,
– dit que les parties devraient, à leurs frais partagés, faire poser un drain à la base du mur mitoyen, ainsi qu’une barrière étanche sous forme d’écran hydrofuge, conformément aux préconisations de l’expert judiciaire,
– débouté M. [T] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [T] à payer à M. [R] la somme de 2000 euros à titre d’indemnité de procédure,
– condamné M. [T] aux entiers dépens, avec distraction au profit de la SELARL Welzer & Associés.
Par acte délivré le 27 janvier 2022, M. [R] a fait assigner M. [T] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Epinal, afin de voir liquider l’astreinte ordonnée par la cour d’appel.
M. [R] a demandé au juge de l’exécution de condamner M. [T] à lui verser la somme de 14 720 euros, soit 80 euros par jour durant six mois du 15 juillet 2021 au 15 janvier 2022, au titre de l’astreinte provisoire, et de prononcer une astreinte définitive de 150 euros par jour de retard passé un délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir et jusqu’à la réalisation effective et conforme des travaux.
M. [T] a demandé au juge de l’exécution de débouter M. [R] de l’ensemble de ses demandes.
Par jugement du 18 novembre 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Epinal a :
– liquidé l’astreinte provisoire fixée par l’arrêt du 22 septembre 2020 par la cour d’appel de Nancy au montant de 5 520 euros,
– condamné en conséquence M. [T] à verser à M. [R] la somme de 5 520 euros au titre de la liquidation de l’astreinte provisoire,
– assortit le parfait achèvement des travaux mis à la charge de M. [T] par la cour d’appel de Nancy dans son arrêt du 22 septembre 2020 d’une nouvelle astreinte provisoire d’un montant de 50 euros par jour de retard, laquelle courra après un délai de quatre mois suivant la signification du présent jugement et pendant une nouvelle période de quatre mois,
– condamné M. [T] à verser à M. [R] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté M. [T] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [T] aux dépens, en ce compris le coût du constat d’huissier du 23 août 2021.
Par déclaration enregistrée le 1er décembre 2022, M. [T] a interjeté appel du jugement précité, en toutes ses dispositions.
Par conclusions déposées le 7 mars 2023, M. [T] demande à la cour de :
– dire recevable et bien fondé l’appel interjeté par lui,
– dire recevable mais mal fondé l’appel incident de M. [R],
– infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
– débouter M. [R] de l’intégralité de ses demandes,
– condamner M. [R] à payer à M. [T] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [R] aux entiers dépens de première instance et d’appel qui comprendront les frais du procès verbal de constat des 26 décembre 2022 et 3 janvier 2023.
A l’appui de son appel, M. [T] expose :
– que la cour d’appel lui laissait le choix soit de laisser entre son garage et le mur mitoyen un espace suffisant pour permettre l’entretien de ce dernier, soit d’adosser son garage au mur mitoyen de manière à protéger ce dernier des intempéries,
– qu’il a fait le choix d’adosser son garage au mur mitoyen,
– que le premier juge lui reproche de ne pas avoir posé un solin pour assurer l’étanchéité entre son garage et le mur mitoyen, alors que l’arrêt de la cour d’appel n’a jamais exigé la pose de solin,
– que la pose d’un tel solin est impossible et inutile car l’étanchéité du mur de M. [R] est assurée par la toiture de son garage,
– qu’il ressort d’un PV de M. [N], commissaire de justice, que malgré les fortes pluies aucune coulure n’est visible sur le mur litigieux,
– que le PV de M. [D] que lui oppose M. [R] n’a aucune force probante car il a été effectué depuis l’extérieur de la propriété.
Par conclusions déposées le 1er février 2023, M. [R] demande à la cour de :
– réformer le jugement entrepris,
– condamner M. [T] à verser à M. [R] la somme de 14 720 euros (soit 80 euros par jour durant six mois du 15 juillet 2021 au 15 janvier 2022, soit 184 jours) au titre de l’astreinte provisoire,
– prononcer une astreinte provisoire de 150 euros par jour de retard passé un délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir et jusqu’à la réalisation effective et conforme des travaux,
– déclarer M. [T] mal fondé en ses demandes,
L’en débouter,
– condamner M. [T] à verser à M. [R] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et celle de 3 500 euros sur le même fondement au titre de la procédure d’appel,
– le condamner aux entiers dépens de la procédure de première instance et de la procédure d’appel, en ce compris le coût des constats d’Huissier en date des 23 août 2021 et 18 janvier 2023.
M. [R] fait valoir notamment :
– qu’au vu du PV de constat de M. [D] en date du 23 août 2021, M. [T] a ‘quasiment mais pas complètement adossé son garage au mur mitoyen’ et ‘l’existence de l’espace laissé entre le mur et le garage laisse le mur mitoyen sans protection’,
– que M. [T] s’est contenté de remplir l’espace vide entre le mur mitoyen et son garage avec des matériaux de bric et de broc, ce qui n’est pas conforme à l’arrêt de la cour d’appel,
– que les tôles plastiques posées par M. [T] ne viennent pas jusqu’à l’extrémité de la toiture et il n’existe aucun dispositif de type solin au niveau de ces tôles plastiques et la maçonnerie du mur mitoyen, de sorte que ce dernier n’est toujours pas protégé des intempéries.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l’exécution de l’arrêt du 22 septembre 2020
L’arrêt du 22 septembre 2020 a condamné M. [T] :
– soit à rétablir entre son garage et le mur mitoyen, un espace suffisant pour dresser un échafaudage permettant de remettre en état et d’entretenir ce mur aux frais partagés des deux copropriétaires,
– soit à adosser son garage à ce mur mitoyen de manière à protéger celui-ci des intempéries et à supprimer le mur qui fait obstacle à son entretien, la toiture de son garage venant alors en continuité de la toiture de la grange de M. [R].
M. [T] a opté pour la deuxième branche de cette alternative, à savoir adosser son garage au mur mitoyen de manière à protéger celui-ci des intempéries et supprimer le mur qui fait obstacle à son entretien, la toiture de son garage venant alors en continuité de la toiture de la grange de M. [R].
M. [T] produit le PV de constat qu’il a fait réaliser par M. [N], commissaire de justice, les 26 décembre 2022 et 3 janvier 2023.
Il en ressort que M. [T] a bien supprimé le mur de son garage qui longeait le mur mitoyen et qui empêchait d’entretenir ce dernier. Il en ressort également que M. [T] a prolongé la toiture de son garage, côté mur mitoyen et tout le long de ce mur mitoyen, par des tôles translucides venant s’insérer sous le chéneau d’évacuation des eaux pluviales de la toiture de la grange e M. [R]. Il est exact que ces tôles translucides ne sont pas forcément jointives avec le mur mitoyen, mais toutes sont situées juste en dessous du chéneau, ce qui fait qu’avec la pente du toit du garage toutes les eaux s’écoulant sur ce dernier sont évacuées vers la gouttière du garage et ne peuvent s’écouler à l’intérieur du garage de M. [T] le long du mur mitoyen.
Le PV de constat rédigé par M. [N] illustre que la façon dont les tôles viennent s’encastrer sous le chéneau assure une bonne protection du mur mitoyen contre les intempéries. D’ailleurs, M. [N] a effectué son constat un jour de pluie et il n’a constaté aucune coulure d’eau sur le mur mitoyen (on n’en constate effectivement aucune sur les nombreux clichés photographiques qu’il a pris).
S’il est exact que M. [T] n’a fait poser aucun solin d’abergement entre la toiture de la grange de M. [R] et la toiture de son garage, il ne peut lui en être fait grief, d’une part parce que la pose d’un tel solin était techniquement impossible (ce qui est attesté par la société 3F Bâtiment), d’autre part parce que la cour d’appel ne l’exigeait pas : elle s’est bornée à fixer à M. [T] une obligation de résultat, à savoir protéger le mur mitoyen des intempéries, but manifestement atteint par les aménagements que M. [T] a réalisés.
Par conséquent, il convient de constater que M. [T] a pleinement exécuté l’obligation que la cour d’appel lui avait impartie sous peine d’astreinte. Aussi M. [R] sera-t-il débouté de ses demandes de liquidation d’astreinte et de fixation d’une nouvelle astreinte et le jugement déféré sera-t-il infirmé en toutes ses dispositions.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
M. [R], qui est la partie perdante, supportera les dépens de première instance et d’appel et il sera débouté de sa demande de remboursement de ses frais de justice irrépétibles. En outre, il est équitable qu’il soit condamné à payer à M. [T] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
DECLARE l’appel recevable,
INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
DEBOUTE M. [R] de ses demandes de liquidation d’astreinte, de paiement de l’astreinte liquidée et de fixation d’une nouvelle astreinte,
DEBOUTE M. [R] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE M. [R] à payer à M. [T] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE M. [R] aux dépens de première instance et d’appel, en ce compris le coût du PV de constat de M. [N] en date des 26 décembre 2022 et 3 janvier 2023.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur MARTIN, président de chambre à la Cour d’Appel de NANCY, et par Madame Christelle CLABAUX-DUWIQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Minute en six pages.