COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 06 Juillet 2023
N° RG 21/01327 – N° Portalis DBVY-V-B7F-GXSI
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d’ALBERTVILLE en date du 28 Mai 2021, RG 20/00030
Appelante
S.A.S. CUPIDATEM dont le siège social est sis [Adresse 3] prise en la personne de son représentant légal
Représentée par Me Maîta POLYCARPE, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELAS AGN AVOCATS REIMS CHALONS, avocat postulant au barreau de REIMS
Intimée
S.C.I. CAP SAYAN dont le siège social est sis [Adresse 4] prise en la personne de son représentant légal
Représentée par Me Caroline FOUACHE, avocat au barreau d’ALBERTVILLE
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l’audience publique des débats, tenue le 09 mai 2023 avec l’assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,
Et lors du délibéré, par :
– Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente
– Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
– Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
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EXPOSÉ DU LITIGE
La SCI CAP Sayan était propriétaire d’un tènement immobilier dénommé [Adresse 2] sis à [Localité 1] comprenant notamment un hôtel de dix chambres, une véranda orangerie, deux salles de restaurant, une piscine, un spa, un appartement de fonction et des dépendances dans un parc arboré de 4 hectares avec bassins.
Par acte authentique du 14 décembre 2018, la SCI CAP Sayan a cédé l’ensemble du tènement immobilier à la SAS Cupidatem contre un prix de 1 045 000 euros. Par acte séparé, la SAS Cupidatem a acquis de la SAS SYC International le fonds de commerce d’hôtellerie restauration exploité au sein du domaine.
Postérieurement, la SAS Cupidatem a constaté différents désordres concernant notamment la fuite d’une douche, le fonctionnement de la pompe à bulle du SPA, des remontées capillaires sur le mur d’entrée, une déformation du mur d’enceinte ainsi que la présence d’un essaim d’abeilles dans le conduit de la cheminée.
Après expertises amiables, l’assureur de la société Cupidatem a mis en demeure la SCI CAP Sayan, par courrier du 12 août 2019, de lui adresser une proposition de prise en charge des travaux dont le montant était évalué dans une fourchette comprise entre 30 000 et 50 000 euros.
Faute de proposition, la société Cupidatem a pris l’initiative de faire réaliser les travaux en vue de la réouverture de l’établissement en septembre 2019.
Postérieurement, par acte du 23 décembre 2019, la société Cupidatem a fait assigner la société CAP Sayan sur le fondement des articles 1641 et suivants puis, subsidiairement, 1112-1 et 1240 du code civil, aux fins de condamnation de cette dernière à lui payer différentes sommes en indemnisation de son préjudice.
Par jugement contradictoire du 28 mai 2021, le tribunal judiciaire d’Albertville a :
– écarté la clause d’exclusion de garantie,
– constaté que la SCI CAP Sayan a failli à son obligation d’information précontractuelle en n’alertant pas l’acheteur de la fuite de la douche sous l’appartement,
– condamné la SCI CAP Sayan à payer à la SAS Cupidatem :
la somme de 8 514 euros HT en indemnisation des préjudices subis, outre intérêts au taux légal à compter de la décision,
la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit n’y avoir lieu à astreinte,
– condamné la SCI CAP Sayan aux dépens de l’instance,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision,
– dit n’y avoir lieu à la consignation du montant des condamnations auprès de la Caisse de dépôts et consignation ou de la CARPA.
Par déclaration du 24 juin 2021, la SAS Cupidatem a interjeté appel du jugement.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 5 avril 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la SAS Cupidatem demande à la cour de :
– dire et juger recevable et bien fondé son appel,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a constaté que la société CAP Sayan a failli à son obligation d’information précontractuelle en n’alertant pas l’acheteur de la fuite de la douche sous l’appartement et condamné en conséquence la société CAP Sayan à lui payer la somme de 8 514 euros HT en indemnisation des préjudices subis,
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné la société CAP Sayan à lui régler la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée du surplus de ses demandes,
Statuant à nouveau,
– juger que la société CAP Sayan a failli à son obligation d’information précontractuelle en n’alertant pas l’acheteur de la panne de la pompe à bulle du SPA,
– juger que la société CAP Sayan a failli à son obligation d’information précontractuelle en n’alertant pas l’acheteur de la présence de remontées capillaires sur le mur d’entrée,
– juger que la société CAP Sayan a failli à son obligation d’information précontractuelle en n’alertant pas l’acheteur de la déformation du mur d’enceinte,
– juger que la société CAP Sayan a failli à son obligation d’information précontractuelle en n’alertant pas l’acheteur sur la présence d’un essaim dans le conduit de la cheminée,
En conséquence,
– condamner la société CAP Sayan sur le fondement de l’article 1112-1 et 1240 du code civil à lui régler, avec intérêts au taux légal à compter du 12 août 2019, la somme de 26 127,14 euros HT au titre du préjudice matériel et décomposé comme suit :
– 314,25 euros HT pour le remplacement de la pompe à bulle du SPA,
– 7 474 euros HT pour les travaux entrepris pour mettre un terme aux remontées capillaires,
– 16 308,89 euros HT pour les travaux de renforcement du mur d’enceinte et reprise du captage de la source,
– 2 030 euros HT pour les travaux de réfection du conduit de la cheminée,
– condamner la société CAP Sayan à lui régler la somme de 10 000 euros en indemnisation du préjudice moral constitué par la perte de temps consacrée aux différentes démarches qu’elle a dû entreprendre pour faire reconnaître ses droits,
– condamner la société CAP Sayan à lui régler la somme de 8 100 euros HT au titre des frais irrépétibles de première instance,
– condamner la société CAP Sayan à lui régler la somme de 8 000 euros HT au titre des frais irrépétibles exposés pour la présente procédure d’appel,
– condamner la société CAP Sayan aux entiers dépens de la procédure d’appel, avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Polycarpe,
– assortir toute condamnation pécuniaire prononcée à l’encontre de la société CAP Sayan d’une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d’un délai d’un mois suivant la signification de l’arrêt à venir,
– confirmer le jugement du 28 mai 2021 en toutes ses autres dispositions,
– rejeter l’intégralité des demandes de la société CAP Sayan.
En réplique, dans ses conclusions adressées par voie électronique le 16 mars 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la SCI CAP Sayan demande à la cour de :
Rejetant toutes demandes, fins et conclusions contraires,
Au titre de l’appel incident,
– la déclarer recevable et fondée en ses demandes et en son appel incident formé,
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
écarté la clause d’exclusion de garantie des vices cachés,
constaté que la SCI CAP Sayan a failli à son obligation d’information précontractuelle en n’alertant pas l’acheteur de la fuite de la douche sous l’appartement,
condamné la SCI CAP Sayan à payer à la SAS Cupidatem :
la somme de 8 514 euros HT en indemnisation des préjudices subis, outre intérêt au taux légal à compter de la décision,
la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
condamné la SCI CAP Sayan aux dépens de l’instance,
Et, statuant à nouveau,
– constater sa bonne foi,
– juger valable et applicable la clause d’exclusion de garantie des vices cachés,
– dire que la survenance de la fuite de la douche est postérieure à la vente et qu’elle ne pouvait par conséquent être connue d’elle, et qu’elle se trouvait dans l’incapacité de délivrer une information dont elle ne disposait pas,
– dire et juger qu’elle n’a pas failli à son obligation précontractuelle d’information s’agissant d’une fuite de la douche survenue postérieurement à la vente,
– débouter la société Cupidatem de l’intégralité de ses demandes au titre d’une fuite de la douche de l’appartement de fonction,
– ordonner la restitution de la somme de 9 901,91 euros réglée par elle à la société Cupidatem en exécution de la décision de première instance,
Si la cour devait confirmer le jugement déféré et la condamner à indemniser la société Cupidatem de ses préjudices, il est demandé à la cour de :
– limiter l’indemnisation due à la société Cupidatem aux prestations strictement nécessaires pour mettre fin à la fuite de la douche,
En conséquence,
– limiter l’éventuelle indemnisation du préjudice en lien direct avec la fuite de la douche à la somme globale de 1 455,48 euros HT (730 euros HT pour la recherche de fuite + 575,48 euros HT pour la fourniture et la pose du bac et de la bonde + 150 euros pour le scellement),
Au titre de l’appel principal,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société Cupidatem du surplus de ses demandes et dit n’y avoir lieu à astreinte,
En conséquence,
– dire et juger qu’elle n’a pas failli à son obligation précontractuelle d’information,
– dire et juger que la société Cupidatem ne rapporte pas la preuve d’un préjudice moral particulier,
– débouter la société Cupidatem de l’intégralité de ses prétentions,
– débouter la société Cupidatem de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance,
Si le jugement de première instance devait être réformé et qu’il était fait droit aux demandes formées par la société Cupidatem, elle entend voir :
au titre du dysfonctionnement de la pompe à bulle :
– débouter en conséquence la société Cupidatem de sa demande indemnitaire,
au titre des remontées d’humidité sur le mur de l’entrée :
– débouter la société Cupidatem de ses demandes indemnitaires,
au titre de l’affaissement du mur mitoyen :
– débouter la société Cupidatem de ses demandes indemnitaires,
au titre de la présence de l’essaim d’abeille dans l’une des cheminées :
– débouter la société Cupidatem de sa demande indemnitaire,
En tout état de cause,
– débouter la société Cupidatem de sa demande au titre des frais irrépétibles d’appel,
– condamner la société Cupidatem à lui payer la somme de 8 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Cupidatem aux entiers dépens de la présente procédure d’appel.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 avril 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’action en responsabilité dirigée contre la SCI CAP Sayan pour manquement à son obligation d’information précontractuelle
Sur le fondement des articles 1112-1 et 1240 du code civil, et sans reprendre à hauteur d’appel le fondement principal de ses demandes de première instance concernant la garantie des vices cachés, la SAS Cupidatem revendique, au titre d’une faute pré-contractuelle, le paiement de travaux de réparation concernant :
une fuite de la douche sous l’appartement,
une panne de la pompe à bulle du SPA,
la présence de remontées capillaires sur le mur d’entrée,
la déformation du mur d’enceinte,
la présence d’un essaim d’abeilles dans le conduit de la cheminée.
Selon l’article 1112-1 du code civil, celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation. Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties. Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie. Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir. Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.
L’article 1240 du code civil prévoit en outre que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il est en l’espèce constant que la SCI CAP Sayan et la SAS Cupidatem ont convenu, par acte notarié du 14 décembre 2018, de la vente d’une bâtisse du XIVème siècle et du terrain attenant affectés à l’exploitation d’un hôtel restaurant.
Il est en outre établi que les parties se sont accordées sur la chose et le prix (lequel a été réduit de 75 000 euros) après visites et pourparlers au cours desquels le candidat acquéreur s’est transporté à plusieurs reprises sur les lieux, accompagné pour certaines visites de professionnels avertis du bâtiment ou spécialisés dans le fonctionnement des spas, afin d’évaluer la consistance et la qualité du bien qu’il projetait d’acquérir, étant rappelé que ce dernier, de part son âge et sa conception, possède un caractère historique qui ne pouvait être ignoré de la SAS Cupidatem quand bien même des travaux de rénovation ou d’amélioration ont pu se succéder au fil des siècles par les propriétaires successifs.
Ainsi, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur la clause d’exclusion des vices cachés en ce que cette demande s’avère sans objet à défaut de mobilisation de cette garantie par l’acquéreur, il importe de vérifier, pour chaque désordre allégué, l’existence d’un défaut d’information déterminant du consentement ou d’une faute susceptible d’engager la responsabilité de la SCI venderesse.
Concernant la fuite de la douche de l’appartement de fonction
Il est acquis aux débats que l’utilisation de la douche de l’appartement de fonction a engendré, dès le transfert de propriété et la prise de possession, une voie d’eau d’importance au niveau du plafond situé sous l’équipement défectueux.
Les travaux de recherche de fuite et de réfection réalisés par la SAS Cupidatem ont démontré, au regard des attestations, constat d’huissier et rapport d’expertise amiable versés aux débats, et de par l’état de dégradation des murs, sol et boiseries, la préexistence à la vente de cette fuite ancienne rendant la douche impropre à son utilisation.
Les travaux de reprise attestent de l’ampleur de la réfection à réaliser pour assainir cette partie du bâti de sorte qu’il a légitimement été retenu par le premier juge que le défaut d’information du vendeur sur la défectuosité de cet équipement et les dégradations subséquentes dans la structure de l’immeuble constituait une faute, au sens de l’article 1112-1 précité, engageant la responsabilité de la SCI CAP Sayan, en ce que le consentement de l’acquéreur, auquel on ne peut reprocher d’avoir tester chacun des points d’eau du domaine, portait sur un bien exempt de défauts majeurs tels que la défectuosité de la pièce d’eau de l’appartement de fonction.
Le préjudice retenu, à hauteur de 4 014 euros HT pour la recherche de fuite puis la réfection de la douche et de 4 500 euros HT pour la réfection des murs et des sols est contesté par l’intimée qui offre, à titre subsidiaire, une indemnisation limitée à la somme de 730 euros HT pour la recherche de fuite, 575,48 euros HT pour la fourniture et la pose du receveur ainsi que 150 euros HT pour son scellement.
Il doit néanmoins être observé que, non sans contradiction, la SCI intimée verse aux débats pour pondérer le chiffrage adverse un devis de 4 066,20 euros HT concernant le remplacement d’une cabine de douche par une douche traditionnelle carrelée, sans mentionner le coût d’une recherche de fuite ni le coût de dépose et de remplacement des revêtement de sol et de murs endommagés.
Il en résulte que, après pondération et déduction faite du coût de remplacement à neuf de certains équipements qui ne sont pas en lien avec la fuite (fourniture et pose d’une colonne de douche chromée, pose d’un déshumidificateur), la réparation de l’entier préjudice subi par l’acquéreur doit être évaluée, au regard des devis et factures versées aux débats par les parties, à la somme de totale de 6 130 euros HT incluant le coût de recherche de fuite et de réparation, la fourniture d’un bac à douche de dimension standard (90 x 90, faute d’élément contraire pour une dimension de 90 x 180) et son scellement, la dépose des revêtements des sols et murs endommagés, la fourniture et la pose de faïence ainsi que le coût de déplacement et d’évacuation des déchets.
En ce sens, le jugement déféré sera réformé sur ce point.
Concernant la panne de la pompe à bulle du SPA
Il a été exactement rappelé par le premier juge que la valeur des réparations relatives à la pompe à bulle du spa (314,25 euros HT), pièce d’usure appelant un remplacement cyclique, ne saurait permettre à la SAS Cupidatem d’exciper du fait que le défaut d’information de son dysfonctionnement revêt une importance déterminante quant à son consentement, étant rappelé que la transaction globale porte sur un domaine de 4 hectares exploitant un hôtel restaurant pour un montant total supérieur à 1 million d’euros.
Dès lors, faute de démontrer le caractère déterminant que revêtait pour elle le fonctionnement de cette pompe, la SAS Cupidatem ne peut qu’être déboutée de sa demande, étant au surplus rappelé que l’acquéreur, accompagné d’un professionnel de l’art lors de l’une de ses visites, ne s’est pas assuré du bon fonctionnement de l’installation avant la signature de l’acte authentique alors-même qu’il aurait suffit de remettre en eau le spa si cette information s’avérait essentielle la concernant.
Concernant les remontées capillaires sur le mur du hall d’entrée
Le constat d’huissier du 9 avril 2019 ainsi que les différentes photographies versées aux débats objectivent l’existence de remontées capillaires au droit du mur d’entrée de la bâtisse.
Il doit néanmoins être observé que ces remontées sont en lien avec la structure et la conception du bâtiment lesquelles emportent des défauts inhérents aux biens historiques qu’il appartenait à l’acquéreur de vérifier au stade des visites et pourparlers s’il estimait que ce type de défaut s’avérait potentiellement déterminant de son consentement pour l’achat qu’il projetait d’effectuer.
Plus avant, il a été justement rappelé par le premier juge que, s’agissant du mur du hall d’entrée, l’humidité de celui-ci était parfaitement perceptible, du fait de signes extérieurs (terre très humide, presque boueuse par comparaison à celle si situant quelques mètres plus loin, enduit décollé et prêt à tomber, moisissures dans le bas du mur, humidité présente des deux côtés de l’angle près de la porte, décollement des carrelages du sol, etc…), à la simple visite du bien de sorte que le caractère légitime de l’ignorance ne peut être retenu en l’espèce au regard de l’obligation de se renseigner incombant à l’acquéreur.
Aussi, la SAS Cupidatem doit être déboutée de sa demande.
Concernant la déformation du mur d’enceinte
Il importe en premier lieu de rappeler que le caractère mitoyen du mur n’est étayé par aucun élément tangible alors-même qu’il résulte du témoignage du voisin concerné, Monsieur [V], puis de l’analyse du géomètre mandaté par l’appelante, que le mur en cause est situé, en son intégralité, sur le fonds cédé par la SCI CAP Sayan.
Par ailleurs, il est communément admis par ce même voisin, l’expert amiable et l’huissier intervenu à la demande de la SAS Cupidatem que la déformation et les fissures du mur d’enceinte, édifié entre la propriété cédée et celle de Monsieur [V], n’étaient pas perceptibles depuis le fonds proposé à la vente en ce que la végétation existante, composée notamment d’une haie de bambous relativement dense, empêchait le candidat acquéreur de se rendre compte du défaut de stabilité et des risques subséquents sans se déplacer sur le fonds voisin.
Il est encore établi au moyen du témoignage du voisin que les défauts de déformation et de stabilité du mur sont apparus en 2017 et avaient été portés à la connaissance des dirigeants de la SCI CAP Sayan, à plusieurs reprises et avant le 14 décembre 2018, Monsieur [V] pointant une fuite dans le captage d’une source inondant les fondations et causant un affaissement des sols, cette analyse étant par ailleurs corroborée par le constat d’huissier et le rapport d’expertise amiable.
En ce sens, la SCI CAP Sayan ne saurait valablement exciper d’un défaut inhérent à l’ancienneté du bien ou à sa conception, perceptible à l’oeil nu lors des visites, alors-même qu’il était en possession d’une information déterminante sur la solidité de l’ouvrage et qu’il s’est abstenu d’en faire part au candidat acquéreur lequel ne pouvait, compte tenu de la végétation existante, s’en convaincre par lui-même.
Dans ces conditions, déduction faite des doublons existants (arrachage des végétaux) entre les devis des sociétés sollicitées, la SCI CAP Sayan est condamnée à verser à la SAS Cupidatem la somme de 15 286,19 euros HT correspondant d’une part, au coût de reprise du captage de la source à l’origine du dommage et d’autre part au coût de renforcement du mur d’enceinte.
Concernant la présence d’un essaim d’abeilles dans le conduit de la cheminée
Enfin, il est établi, d’une part, que la SCI venderesse a informé l’acquéreur de la préexistence d’un essaim d’abeilles, en 2018, dans le conduit de cheminée de la bâtisse puis, d’autre part, que cette cheminée a été scellée et demeurait inutilisée depuis plusieurs années au jour de la vente de sorte que la SAS Cupidatem ne peut légitiment prétendre, sauf à retenir sa propre négligence dans les vérifications qu’il lui appartenait de réaliser, qu’elle ignorait la possibilité d’une colonisation des abeilles à cet endroit.
Dans ces conditions, la SAS Cupidatem ne peut qu’être déboutée de sa demande.
Sur la demande indemnitaire présentée par la SAS Cupidatem au titre du préjudice moral
Le préjudice moral d’une société commerciale consiste en une atteinte à son image ou à sa réputation et il appartient à la SAS Cupidatem de démontrer la faute de la SCI CAP Sayan puis de justifier du préjudice qui en résulterait.
En l’espèce, la SAS Cupidatem valorise son préjudice à 10 000 euros sans toutefois démontrer l’existence d’une atteinte à son image ou à sa réputation, du fait de la SCI intimée.
Dans ces conditions, la SAS Cupidatem doit être déboutée de sa demande.
Sur les demandes accessoires
Concernant le prononcé d’une astreinte
Il échet de rappeler que la présente condamnation s’entend d’une condamnation à paiement d’un montant en principal de 21 416,19 euros HT pour laquelle aucun élément de l’espèce ne permet d’envisager un refus d’exécution, étant au surplus rappelé qu’il n’est pas contesté que la SCI CAP Sayan a volontairement réglé la condamnation de première instance d’un montant de 9 901,91 euros.
En tout état de cause, il demeure possible pour la SAS Cupidatem, dans l’hypothèse où la Sci CAP Sayan s’opposerait à tout paiement volontaire, de saisir le juge de l’exécution en vue d’obtenir, au regard d’éléments nouvellement portés à la connaissance de la juridiction, le bénéfice d’une astreinte.
Aussi, en l’état, la SAS Cupidatem doit être déboutée de cette demande.
Sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance et d’appel
Sans produire la convention ou les notes d’honoraires correspondant à ses frais irrépétibles, la SAS Cupidatem revendique une meilleure évaluation de la somme allouée par le première juge au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Aussi, faute d’élément concret étayant le coût effectivement acquitté par elle, la somme retenue par le premier juge sera confirmée.
A hauteur d’appel, la SAS Cupidatem a été partiellement reçue en ses prétentions tandis que la SCI CAP Sayan a été déboutée de son appel incident. En conséquence, il y a lieu de condamner la SCI intimée aux dépens d’appel, avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Polycarpe, puis de la condamner à verser à la SAS Cupidatem la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Confirme la décision déférée sauf en ce qu’elle a condamné la SCI CAP Sayan à payer à la SAS Cupidatem la somme de 8 514 euros HT en indemnisation du coût des travaux relatif à la fuite de la douche de l’appartement de fonction et en ce qu’elle a débouté la SAS Cupidatem de sa demande d’indemnisation au titre de la réfection du mur d’enceinte,
Statuant à nouveau,
Condamne la SCI CAP Sayan à payer à la SAS Cupidatem la somme de 6 130 euros HT au titre des travaux concernant la fuite de la douche de l’appartement de fonction, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
Condamne la SCI CAP Sayan à payer à la SAS Cupidatem la somme de 15 286,19 euros HT au titre des travaux de renforcement du mur d’enceinte et de reprise du captage de la source, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
Y ajoutant,
Condamne la SCI CAP Sayan aux dépens d’appel dont distraction au profit de Maître Polycarpe s’agissant des frais dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision,
Condamne la SCI CAP Sayan à payer la somme de 2 500 euros à la SAS Cupidatem au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi prononcé publiquement le 06 juillet 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente