COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 06 JUILLET 2023
N° 2023/530
Rôle N° RG 22/15168 N° Portalis DBVB-V-B7G-BKKHB
S.C.I SOCIÉTÉ NAUTILUS
C/
S.A.S. FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS, AYANT POUR SOC IÉTÉ DE GESTION LA SOCIÉTÉ EQUITIS GESTION
Etablissement TRESOR PUBLIC
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Frédéric KIEFFER
Me Victoria CABAYE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l’exécution de MARSEILLE en date du 25 Octobre 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 21/00098.
APPELANTE
S.C. I SOCIÉTÉ NAUTILUS,
immatriculée au RCS de MARSEILLE sous le n° 492 364 237
prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 5] – [Localité 2]
représentée et plaidant par Me Frédéric KIEFFER de la SELARL KIEFFER – MONASSE & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE, substitué par Me Muriel MANENT, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMÉS
S.A.S. FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS,
ayant pour société de gestion la société EQUITIS GESTION, société par actions simplifiée, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro B 431 252 121, dont le siège social est [Adresse 11] -[Localité 9], et représenté par la société MCS ET ASSOCIES, société par actions simplifiée, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro B 334 537 206, dont le siège social est [Adresse 6] [Localité 10], agissant en qualité de recouvreur, poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Venant aux droits de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, société anonyme, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 552 120 222, dont le siège social est [Adresse 7] [Localité 8]
En vertu d’un bordereau de cession de créances en date du 29 novembre 2019 soumis aux dispositions du Code Monétaire et Financier
assignée à jour fixe le 17/02/2023 à personne habilitée
représentée par Me Victoria CABAYÉ de l’ASSOCIATION ROUSSEL-CABAYE & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON
plaidant par Me Muriel MILLIEN, avocat au barreau de PARIS
Le TRÉSOR PUBLIC
pris en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis Service des Impôts des Particulier des [Localité 1] – [Adresse 4] – [Localité 2]
assigné à jour fixe le 17/02/2023 à personne habilitée,
défaillant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 17 Mai 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Evelyne THOMASSIN, Président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023.
ARRÊT
Réputé Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023,
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Faits, procédure et prétentions des parties :
Le FCT Cedrus venant aux droits de la Société Générale poursuit à l’encontre de la SCI Nautilus, la vente sur saisie immobilière d’un bien lui appartenant situé à [Localité 12], [Adresse 5], selon commandement de payer du 21 janvier 2021 qui n’a pas été suivi d’effet. Il se prévaut d’un acte notarié du 14 décembre 2006, passé en l’étude de Me [E], notaire à [Localité 12], portant sur un prêt de 320 000 euros au taux de 4.36 % l’an qui avait servi à l’acquisition du bien mais dont la déchéance du terme a été prononcée le 19 juin 2014.
Le 2 septembre 2014 a été délivré un commandement de saisie vente.
Un jugement du tribunal de grande instance de Paris, le 24 mars 2016 a rejeté la demande en prescription biennale formée par la SCI Nautilus, retenu le principe d’une prescription quinquennale et l’a écartée. cette décision a été confirmée par la cour d’appel de Paris le 24 novembre 2017.
Le 29 novembre 2019 la Société Générale a cédé sa créance au FCT Cédrus.
Le juge de l’exécution de Marseille, par une décision du 25 octobre 2022 a :
– reçu l’exception d’irrecevabilité de l’action pour défaut de qualité à agir mais l’a rejetée,
– de même pour l’irrecevabilité de l’action pour cause de prescription,
– déclaré irrecevable l’exception de prescription pour invalidité de fond, du commandement de saisie vente du 25 août 2016,
– validé la procédure de saisie immobilière,
– mentionné la créance du FCT Cédrus pour un montant de 476 262.96 euros en principal, intérêts à 4.36 % l’an, accessoires et frais de procédure,
– ordonné la vente forcée des biens,
– organisé les visites, publicité et diagnostics immobiliers,
– dit n’y avoir lieu à frais irrépétibles.
Il retenait que :
– la SCI Nautilus est recevable à critiquer l’acte de cession de créances auquel elle n’était pas partie mais qui lui est opposé,
– la copie à ordre d’un acte notarié n’interdit pas un autre mode de transmission notamment par titrisation,
– la cession de créance est valide et respecte les dispositions de l’article L313-23 du CMF,
– les mentions de la cession sont suffisantes pour individualiser la créance cédée,
– le cessionnaire d’une créance bénéficie de tous les actes antérieurs à cette cession qui ont pu interrompre la prescription et donc un commandement de saisie vente du 25 août 2016, même s’il n’a pas été suivi d’une vente conserve son effet interruptif,
– contester la validité de ce commandement de saisie vente du 25 août 2016 est tardif au regard de l’article 112 du code de procédure civile, puisque la SCI à l’occasion d’une procédure devant le tribunal de Paris a déjà fait valoir ses défenses au fond et que la cour d’appel parisienne a déjà retenu le caractère interruptif de ce commandement.
La signification du jugement a été réalisée le 4 novembre 2022.
La SCI Nautilus a fait appel de la décision par déclaration au greffe le 16 novembre 2022.
Autorisée à assigner à jour fixe par ordonnance du 23 novembre 2022, elle a déposé les assignations ainsi délivrées au greffe de la cour le 12 avril 2023..
Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions du 16 mai 2023, la SCI Nautilus sollicite de la cour :
Vu les articles 1185, 2224 et 2244 du code civil,
Vu les articles 122 à 126, 648, 696 et 700 du code de procédure civil,
Vu les articles L221-1, R 221-1, R311-5, R.311-6 et R.322-20 du code des procédures civiles
d’exécution,
Vu l’article L213-6 du code de l’organisation judiciaire,
Vu l’article 6 de la loi n° 76-519 du 15 juin 1976,
Vu les articles L 214-172, L 313-23 et D 214-227 du code monétaire et financier,
Vu les pièces versées au débat,
– Recevoir l’appelante en son recours,
– Infirmer le jugement rendu par le juge de l’exécution près le tribunal judiciaire de Marseille le 25 octobre 2022 en ce qu’il a déboutée la SCI Nautilus de l’ensemble de ses demandes, et également en ce qu’il a ordonné la vente forcée du bien saisi,
Et statuant à nouveau,
– Recevoir la SCI Nautilus en l’ensemble de ses demandes,
– Prononcer l’irrecevabilité de l’action du FCT Cedrus ayant pour société de gestion la Société Equitis Gestion, et représentée par la Société MCS et associés, pour défaut de qualité à agir en qualité de créancier,
– Prononcer la nullité du commandement du 25 août 2016 délivré par la Société Générale à la SCI Nautilus, dès lors dépourvu d’effet interruptif de la prescription,
– Ordonner la radiation dudit commandement ainsi que celle de tous les actes subséquents,
– Ordonner qu’il soit fait mention de la nullité en marge du commandement valant saisie du 21 janvier 2021 auprès du Service de Publicité foncière de Marseille 3 sous les références 1314P03 2021 S numéro 15,
En tout état de cause,
– Condamner le FCT Cedrus à lui payer une somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles, outre aux entiers dépens.
Elle soutient n’ayant pas été informée de la cession de créance et du changement de l’entité chargée du recouvrement sauf dans la présente instance, le FCT Cedrus, la société Equitis Gestion n’a pas qualité à la poursuivre en paiement au regard de l’article L214-172 du CMF et de l’article L214-180 du CMF (com 17 mai 2017 n°15-25788). La société de recouvrement Equitis Gestion n’établit pas qu’elle ait été mandatée (Cass Com 13 décembre 2017 n°16-19681).
Le FCT Cedrus doit justifier de son existence légale par la production de son règlement, prévu par l’ancien article R214-92 du CMF (com 17 mai 2017 n°15-25788), ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Le montant du prix de cession n’est pas individualisé, il est inconnu de sorte que l’on ne peut établir la qualité de créancier du FCT Cédrus. Il lui revient d’établir l’endossement et de démontrer qu’il a été notifié par LRAR par le notaire qui y a procédé en application de l’article 6 de la loi n°76-519 du 15 juin 1976 (Cass 22 octobre 2020 n°19-19999). L’acte de cession porte des mentions manuscrites illisibles sur les personnes représentant les parties, on ne peut donc vérifier les chaînes de représentation. La créance n’a pas été déterminée dans son montant contrairement aux exigences de l’article D214-227-4° du CMF. Le prix de cession ne figure pas alors que le recours du cessionnaire ne peut excéder le montant de la créance cédée. Le commandement de payer délivré le 25 août 2016, qui serait interruptif de prescription ne peut être invoqué par le FCT car il n’est pas un accessoire de la créance cédée, il est un acte d’exécution ce qui est différent. C’est au seul FCT d’exercer l’exécution, en son nom propre et le premier acte qui lui est dû a été délivré lors de la saisie immobilière, le 20 janvier 2021, il ne peut se prévaloir du commandement de payer de 2016, de sorte qu’à son égard, la créance est prescrite. Le commandement de saisie immobilière délivré en 2021 est nul, car il n’est pas signé par l’huissier de justice, il ne rappelle pas le risque de vente forcée des meubles, au mépris des exigences des articles 648 du code de procédure civile et R221-1-2° du code des procédures civiles d’exécution. L’acte de 2016 qui porte sur les meubles ne peut interrompre la prescription et ouvrir la procédure de saisie vente d’un bien immobilier. Dès lors la prescription quinquenale est acquise au 19 juin 2019 puisque la déchéance du terme est du 20 juin 2014. L’arrêt de la cour d’appel de Paris n’a pas autorité de chose jugée, car il portait sur la prescription biennale et n’était pas rendu à l’égard du FCT mais de la Société Générale. En procédure orale, une exception de procédure soulevée en cours d’audience est recevable au regard de l’article 112 du code de procédure civile.
Le décompte du 21 janvier 2021 comporte en outre des intérêts prescrits car ils sont décomptés depuis le 7 juillet 2009 et ils ne peuvent être réclamés qu’à compter du 21 janvier 2016, de sorte qu’un nouveau décompte de créance est nécessaire.
Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions du 9 mai 2023, le FCT Cedrus demande à la cour de :
Vu l’article R.311-5 du Code des procédures civiles d’exécution,
Vu l’article L.311-2 du Code des procédures civiles d’exécution,
Vu les articles R.322-26 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution,
Vu les articles L.214-169 et D.214-227 du Code monétaire et financier,
Vu les articles 112 et 114 du Code de procédure civile,
Vu l’article L.110-4 du Code de commerce,
-Juger irrecevable les fins de non recevoir pour défaut de qualité à agir fondées sur l’absence d’information du débiteur sur la cession de créance, sur l’absence de mandat exprès du
recouvreur, sur l’absence de production du Règlement du FCT Cedrus,
Subsidiairement,
– débouter la société Nautilus de ces fins de non recevoir,
– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir pour absence d’endossement
de l’acte notarié,
– infirmer le jugement en ce qu’il a jugé recevable la fin de non recevoir pour absence
d’identification des représentants dans l’acte de cession et la juger irrecevable pour défaut de qualité à agir de Nautilus,
Subsidiairement,
– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté cette fin de non recevoir,
– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir pour absence d’individualisation de la créance et indétermination de la créance cédée,
– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir pour prescription de l’action
du FCT fondée sur l’absence de caractère accessoire à la créance du commandement de payer du 25 août 2019,
– confirmer, le cas échéant par substitution de motif, le jugement en ce qu’il a jugé irrecevable
la fin de non recevoir pour prescription de l’action du FCT fondée sur la nullité du commandement de payer du 25 août 2016 et, subsidiairement, débouter la société Nautilus de cette demande,
– confirmer le jugement en ce qu’il a jugé irrecevable la demande de nullité du commandement
de payer du 25 août 2016 et, subsidiairement, débouter la société Nautilus de cette demande,
– confirmer le jugement entrepris pour le surplus.
– débouter la société Nautilus de ses demandes et prétentions,
– renvoyer l’affaire devant le Juge de l’exécution de Marseille aux fins de fixer une date d’adjudication et de fixer les modalités de visite et de publicité de la vente ,
– condamner la société Nautilus à payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au FCT Cedrus,
– Dire que les dépens seront pris en frais privilégiés de vente.
Plusieurs des contestations présentées en appel sont irrecevables au regard de l’article R311-5 du code des procédures civiles d’exécution car nouvelles en appel (non information du changement de recouvreur, absence de mandat exprès à cette fin, non production du règlement FCT, prescription des intérêts ) et de toute façon mal fondées.
N’avaient été soulevées en première instance que défaut de qualité à agir, défaut d’endossement et absence d’identification des signataires. Quoiqu’il en soit la cession faite par voie de bordereau est opposable aux tiers sans autre formalité en application de l’article L214-169 V 1° du code des procédures civiles d’exécution. Le débiteur cédé doit seulement être informé en cas de changement d’entité chargée du recouvrement. Mais l’article L214-172 du CMF le permet par tout moyen y compris acte judiciaire ou extra judiciaire. Ce qui a été fait en l’espèce par LR du 15 janvier 2020. La nécessité d’un mandat exprès de recouvrement n’existe plus depuis la réforme de la loi Pacte entrée en vigueur le 24 mai 2019. Un constat d’huissier de justice justifie de l’existence du règlement concernant le FCT et de son existence juridique. La copie exécutoire qui base la saisie n’est pas une copie exécutoire à ordre, elle n’en comporte pas toutes les mentions et un acte notarié de transmission n’est donc pas nécessaire. La seule remise du bordereau suffit à réaliser la cession de créances. De toute façon, l’article 14 de la loi du 15 juin 1976 permet la cession par un autre moyen que l’endossement et donc par bordereau. N’étant pas partie au contrat de cession, la société Nautilus n’est pas recevable à contester la représentation des parties à l’acte. Les créances doivent être individualisées et désignées, mais les critères invoqués par l’appelante au visa de l’article L214-169 du CMF ne sont donnés qu’à titre d’exemple. Le montant de la dette n’a pas nécessairement à y figurer. L’article L313-23 du CMF se rapporte aux créances Dailly, professionnelles et non aux créances bancaires. L’indication de la nature et du montant de la créance cédée et le nom du débiteur ne constituent pas des mentions devant obligatoirement figurer sur le bordereau et (‘) l’identification de la créance peut intervenir au moyen de références chiffrées (Cass. Com. 25 mai 2022 n° 20-16.042). Ce qui est le cas. L’interruption de la prescription profite au créancier et à ses ayants droit, en particulier au cessionnaire de la créance, le commandement de payer du 25 août 2016 lui bénéficie donc en son effet interruptif de prescription. La nullité de ce commandement est invoquée tardivement au regard de l’article 112 du code de procédure civile, après une défense au fond de la SCI Nautilus devant les juridictions parisiennes étant rappelé que la procédure est écrite en saisie immobilière. Elle se heurte également à l’autorité de chose jugée, car devant la cour d’appel de Paris a été jugé le caractère interruptif du commandement du 25 août 2016 sans que sa régularité ne soit mise en cause. Cette contestation est au demeurant prescrite pour n’avoir pas été développée dans les 5 ans de la délivrance du commandement de payer concerné en application de l’article 2224 du code civil, car il s’agit d’une voie d’action et non d’exception qui serait alors imprescriptible. Si la cour évoque la nullité de l’acte de l’huissier de justice, il convient de retenir un grief (Cass. 2 ème Civ. 15 janvier 2009 n° 08-11.446). La signature de l’officier ministériel ne figure pas sur l’exemplaire du débiteur mais elle existe sur la minute. Selon l’article R221-1 du code des procédures civiles d’exécution, il n’y a pas une formulation imposée pour informer le débiteur du risque de vente forcée de ses biens. Le commandement du 25 août 2016 énonce bien à défaut de paiement dans les 8 jours que les meubles pourront être saisis. Il est valable et aucune saisie n’a eu lieu finalement sur les meubles. De même quant à la référence à l’article R221-5 du code des procédures civiles d’exécution, il n’existe pas de grief démontré. La prescription des intérêts n’est pas acquise, elle a été interrompue par les paiements effectués par la société NAUTILUS en 2013 ainsi que par le commandement de payer signifié le 02 septembre 2014 (pièce 25) et la saisie vente du 03 décembre 2014 (pièce 26), puis par le commandement de payer signifié le 25 août 2016 (pièce 17).
Le Trésor Public, assigné à personne habilitée le 17 février 2023 n’a pas constitué avocat.
MOTIVATION DE LA DÉCISION :
* sur la recevabilité de certaines demandes :
Selon l’article R311-5 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut, sauf dispositions contraires, être formée après l’audience d’orientation prévue à l’article R. 322-15 à moins qu’elle porte sur les actes de procédure postérieurs à celle-ci. Dans ce cas, la contestation ou la demande incidente est formée dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l’acte.
Il résulte des conclusions développées par elle en première instance devant le juge de l’exécution, que la SCI Nautilus a contesté :
* la qualité à agir du FCT et l’opposabilité de la cession de créances pour
– défaut d’endossement de l’acte notarié du 14 décembre 2006,
– précision incomplète sur les personnes représentant les parties à l’acte de cession de créances du 29 novembre 2019,
– identification insuffisante de la créance cédée,
* la recevabilité de l’action pour cause de prescription acquise au 19 juin 2019,
– un commandement de payer du 25 août 2016 ou une voie d’exécution n’étant pas un accessoire de créance, outre les dispositions de l’article R221-5 du code de procédure civile,
– l’irrégularité du commandement du 25 août 2016 au visa de l’article R221-1-2° du code des procédures civiles d’exécution, entraînant sa nullité et son manque d’effet interruptif.
Dès lors les contestations nouvelles ne correspondant pas à celles de première instance, seront déclarées irrecevables. Il s’agit de :
– l’absence de mandat de recouvrement,
– l’absence d’information du débiteur quant à la cession de créances,
– la non production du règlement prévu à l’article R214-92 du code monétaire et financier,
– l’indétermination du montant de la créance cédée, et l’ignorance du prix de cession,
– la prescription quinquennale des intérêts.
* sur la qualité à agir du FCT et l’opposabilité de la cession de créances :
Le titre exécutoire qui sert de base à l’action du FCT Cédrus, acte notarié du 14 décembre 2006, établi par Me [E], notaire à [Localité 12], comporte en ses dernières pages, la formule exécutoire à concurrence du montant de la créance, 320 000 €. Mais il ne s’agit pas là d’une copie exécutoire à ordre, car aucune mention n’est portée en ce sens sur le document en application de l’article 5 de la loi n°76-519 du 15 juin 1976. En conséquence de quoi, comme l’a déjà jugé le premier juge, la cession de créances bénéficiant au FCT Cedrus est tout à fait possible et régulière et il n’y avait pas à mettre en oeuvre le formalisme particulier de l’endossement du titre lui même, comme le soutient la SCI Nautilus.
La SCI Nautilus conteste également la portée de la cession de créances en date du 29 novembre 2019, dans la mesure où ses mentions sont insuffisantes à vérifier la qualité des représentants des parties lors de la signature de l’acte. En effet, sur le document, il est indiqué que la Société Générale a un ‘représentant dûment habilité à l’effet des présentes’ et il en est de même pour le FCT Cedrus et la société Equitis Gestion, puisque le nom des personnes physiques intervenues n’est pas précisé, si ce n’est pour l’une d’elles à l’emplacement des signatures.
Mais, la SCI Nautilus, tiers au contrat, n’est pas recevable à ce titre à contester le pouvoir des signataires ou les conditions de représentation mises en oeuvre pour l’établissement de la cession de créances que seules les parties, donc la Société Générale et le FCT Cedrus, peuvent remettre en cause ou en cas d’irrégularité, décider de ratifier.
Aux termes de l’article D214-227-4° du code monétaire et financier, dans sa version applicable à l’espèce, le bordereau de cession de créances, doit énoncer la désignation ou l’individualisation des créances cédées ou les éléments susceptibles d’y pourvoir, par exemple l’indication du débiteur ou du type de débiteurs, des actes ou des types d’actes dont les créances sont ou seront issues, du lieu de paiement, du montant des créances ou de leur évaluation et, s’il y a lieu, de leur échéance. La désignation ou l’individualisation des créances cédées ou les éléments susceptibles d’y pourvoir peuvent figurer sur un ou des fichiers pouvant le cas échéant prendre la forme électronique, dès lors que ce ou ces fichiers sont remis ou transmis par le cédant au cessionnaire au plus tard le jour de la remise du bordereau et que le bordereau fait référence à ce ou ces fichiers. Ce ou ces fichiers sont alors réputés faire partie intégrante du bordereau.
Il résulte donc des termes de cet article que l’énonciation des mentions destinées à permettre l’identification de la créance n’est pas exhaustive, impérative mais seulement illustrative des différents éléments pouvant permettre l’individualisation de la créance transmise. Et à ce titre, si le montant de la créance, en particulier son montant initial, peut être utile, d’autres critères d’identification sont tout à fait possibles comme la date du contrat, sa référence, complétée éventuellement par l’identité du débiteur principal etc…
Le premier juge a retenu à juste titre que l’acte notarié revêtu de la formule exécutoire, comporte en page de garde, la référence SEX-SCI Nautilus n°806002841762 qui se retrouve sur l’extrait de la liste des créances cédées concernant la société Nautilus, annexé à l’acte de cession du 29 novembre 2019, de sorte que l’identification de la dette est suffisamment établie.
* sur la prescription de l’action :
Il est acquis aux débats, que la Société Générale a fait délivrer le 5 août 2016, et donc antérieurement à la cession de créances sus visée, un commandement de payer aux fins de saisie vente pour la somme de 409 799.72 euros basé sur l’acte notarié de prêt du 14 décembre 2006. Cet acte a été remis à monsieur [Y] [B], gérant de la SCI, se disant habilité tandis que le siège social était confirmé par le nom du destinataire sur la boîte aux lettres, au [Adresse 5] [Localité 3].
La SCI Nautilus ne peut être suivie, lorsque sur la base d’opinions doctrinales, elle soutient que ce commandement n’est pas un accessoire de la créance et qu’il ne peut être transmis, avec ses effets interruptifs au cessionnaire de créance, le FCT Cedrus. En effet, les actions en justice entreprises par le créancier initial, les actes interruptifs de prescription doivent suivre, au titre d’accessoires, en application de l’article 1321 alinéa 3 du code civil, la créance cédée. Décider le contraire serait vider de toute portée la cession d’une créance ancienne, soumise nécessairement au risque de prescription si les actes conservatoires réalisés par le créancier initial, destinés à éviter la prescription ne pouvaient bénéficier au futur acquéreur, par définition, indéterminé et inconnu jusqu’à la vente.
Les dispositions de l’article R221-5 du code des procédures civiles d’exécution, dont les termes sont les suivants : ‘Si, dans un délai de deux ans qui suit le commandement de payer, aucun acte d’exécution n’est intervenu, les poursuites ne peuvent être engagées que sur un nouveau commandement. Toutefois, l’effet interruptif de prescription du commandement demeure’ répondent expressément à la contestation de la SCI Nautilus qui ne peut en ignorer la portée, même si le commandement de saisie vente du 5 août 2016 n’a pas été suivi d’une exécution et de la vente de biens, il est resté interruptif de prescription.
Il ne résulte pas des termes de l’arrêt prononcé par la cour d’appel de Paris le 24 novembre 2017, qu’elle ait eu à se prononcer sur l’effet interruptif et donc la validité, du commandement de payer aux fins de saisie vente délivré le 25 août 2016, cette énonciation figurant en page 4, dans les prétentions de la Société Générale mais n’étant évoquée dans la motivation qu’après avoir admis l’effet interruptif durant 5 ans, d’un protocole d’accord du 4 avril 2013, en ajoutant en termes généraux, qu’un commandement de saisie vente est interruptif, sans viser sa date tandis qu’un autre commandement est cité dans l’instance, du 3 décembre 2014. La cour estime donc ne pouvoir retenir la chose jugée, pas davantage la prescription de ce moyen, qui est opposé dans le cadre d’une défense à une action en saisie immobilière entreprise par le FCT Cedrus. La SCI Nautilus sera donc jugée recevable à ce titre.
La SCI Nautilus sur le fondement de l’article R221-1 du code des procédures civiles d’exécution conteste la validité du commandement de payer valant saisie vente du 25 août 2016 en ce qu’il n’est pas signé, ne vise pas le texte précité, et ne fait pas mention d’une vente forcée qui suivra le non paiement, ce qui priverait l’acte de son effet interruptif puisqu’il serait nul.
L’article R221-1 du code des procédures civiles d’exécution, dispose : ‘Le commandement de payer prévu à l’article L. 221-1 contient à peine de nullité :
1° Mention du titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées avec le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l’indication du taux des intérêts ;
2° Commandement (au débiteur) d’avoir à payer la dette dans un délai de huit jours faute de quoi il peut y être contraint par la vente forcée de ses biens meubles.’
Le commandement critiqué est intitulé ‘commandement aux fins de saisie vente’, il vise le titre exécutoire, à savoir un acte notarié exécutoire reçu le 14 décembre 2006 par Me [E], notaire à [Localité 12] et rappelle que faute d’acquitter les sommes réclamées dans un délai de 8 jours, le débiteur pourrait y être contraint par la saisie de ses biens corporels. Ces mentions sont suffisantes et respectent les exigences de forme rappelées ci dessus.
Il est également justifié par la production de la pièce 22 de l’intimé que ce commandement a été signé par l’huissier de justice, Me [X] [V] avec application du sceau de son étude.
En conséquence de quoi le jugement sera confirmé de ces chefs.
Il est inéquitable de laisser à la charge du FCT Cedrus, les frais irrépétibles engagés dans l’instance, une somme de 2500 euros lui sera allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré, statuant par décision réputée contradictoire, mise à disposition au greffe,
DIT la SCI Nautilus irrecevable en ses contestations sur :
– l’absence de mandat de recouvrement,
– l’absence d’information du débiteur quant à la cession de créances,
– la non production du règlement prévu à l’article R214-92 du code monétaire et financier,
– l’indétermination du montant de la créance cédée, et l’ignorance de son prix de cession,
– la prescription quinquennale des intérêts.
INFIRME le jugement qui a déclaré irrecevable la contestation de la société Nautilus quant à la validité du commandement de saisie vente délivré le 25 août 2016,
Statuant à nouveau, la déclare recevable à ce titre mais non fondée,
CONFIRME le jugement en ses autres dispositions déférées,
Y ajoutant,
CONDAMNE la SCI Nautilus à payer au FCT Cedrus la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
RENVOIE parties devant le premier juge pour reprise des poursuites,
DIT QUE les dépens seront employés en frais privilégiés de vente.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE