Saisine du juge de l’exécution : 4 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/01775

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Saisine du juge de l’exécution : 4 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/01775

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 04 MAI 2023

N° 2023/ 332

Rôle N° RG 19/01775 N° Portalis DBVB-V-B7D-BDWWW

SCI ALEXANDRA II

C/

[H] [U]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Agnès ERMENEUX

Me Patrick LUCIANI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 21 Janvier 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 14/05229.

APPELANTE

SCI ALEXANDRA II

immatriculée au R.C.S. de NICE sous le numéro 418 204 368,

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 3]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Nathalie VINCENT de la SELARL VINCENT-HAURET-MEDINA, avocat au barreau de NICE,

INTIMÉE

Madame [H] [U]

née le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 4] (ALGÉRIE),

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Patrick LUCIANI, avocat au barreau de NICE, substitué par Me Jean-Philippe MONTERO, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 08 Mars 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Pascale POCHIC, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Evelyne THOMASSIN, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2023,

Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure et prétentions des parties

Ainsi qu’énoncé par l’arrêt de sursis à statuer rendu par cette cour le 25 février 2021 :

La SCI Alexandra II gérée par M. [F] [D] a verbalement donné à bail à Mme [H] [U] un garage situé dans une résidence située au [Adresse 3] à [Localité 5] (06).

Invoquant l’absence de restitution d’une télécommande donnant accès à ce garage, qu’elle avait confiée à M. [D] pour réparation, et l’impossibilité de récupérer ses affaires d’une valeur de 1500 euros, entreposées dans ce local, Mme [U] a saisi le tribunal d’instance de Nice, qui par jugement contradictoire, devenu irrévocable, rendu le 7 juin 2005 a, entre autres dispositions :

– condamné la SCI Alexandra II à restituer à Mme [U] la télécommande qui lui a été remise en 15 juillet 2003 ou, à défaut, sa contre-valeur, soit la somme de 143,30 euros, ladite somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 mars 2004,

– condamné cette SCI à restituer l’ensemble des affaires appartenant à Mme [U] se trouvant encore dans le local, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, passé un délai de huit jours à compter de la signification de la décision.

Cette décision a été signifiée à la SCI Alexandra II le 4 août 2005 et par assignation du 2 octobre 2014, Mme [U] a saisi le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Nice aux fins de condamnation de la SCI Alexandra II au paiement d’une somme de 99  900 euros au titre de la liquidation de l’astreinte provisoire prononcée le 7 juin 2005.

Par jugement du 16 mars 2015, à la demande des deux parties, le juge de l’exécution a sursis à statuer sur l’ensemble des demandes dans l’attente de l’issue de plaintes pénales pour faux et usage de faux.

A l’issue des procédures pénales, Mme [U] qui a bénéficié d’une décision de relaxe, a sollicité le réenrôlement de l’affaire et la liquidation de l’astreinte à hauteur de la somme de 140 550 euros, demande à laquelle la SCI Alexandra II s’est opposée, sollicitant un sursis à statuer en raison d’une nouvelle citation directe de Mme [U] devant le tribunal correctionnel pour usage d’attestation ou de certificat inexact ou falsifié, tentative d’escroquerie au jugement et subsidiairement soutenant le rejet des demandes.

Par jugement du 21 janvier 2019 le juge de l’exécution a :

– rejeté la demande de sursis à statuer,

– liquidé l’astreinte ayant couru sur la période du 13 août 2005 au 19 novembre 2018 à la somme de 145 380 euros et condamné la SCI Alexandra II au paiement de cette somme,

– l’a condamnée en outre au paiement de la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,

– rejeté le surplus des demandes.

La SCI Alexandra II a relevé appel de cette décision dans les quinze jours de sa notification par déclaration du 29 janvier 2019.

Par ordonnance rendue le 11 février 2020 par la présidente de cette chambre, les écritures de l’intimée ont été déclarées irrecevables en application de l’article 905-2 alinéa 2 du code de procédure civile.

Par arrêt précité du 25 février 2021 la cour a ordonné le sursis à statuer dans l’attente de l’arrêt de cette cour saisie de l’appel du jugement rendu le 24 novembre 2020 par le tribunal correctionnel de Nice.

La chambre des appels correctionnels de la cour de ce siège, par arrêt du 22 septembre 2022 a confirmé le jugement de première instance qui avait relaxé Mme [U] des fins de la poursuite et débouté la société Alexandra II et [F][D], parties civiles, de leurs demandes.

Par conclusions de reprise d’instance notifiées le 25 octobre 2022, auxquelles il est expressément fait référence pour plus ample exposé de ses moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, l’appelante demande à la cour :

– d’infirmer le jugement entrepris en toutes ces dispositions,

Statuant à nouveau :

A titre principal,

– de déclarer les demandes de Mme [U] irrecevables, au motif que l’action est prescrite,

A titre subsidiaire,

– de constater la particulière mauvaise foi de Mme [U], caractérisant la cause étrangère ayant empêché la société Alexandra II d’exécuter le jugement du tribunal d’instance de Nice de 2005,

En conséquence,

– de supprimer l’astreinte prononcée par ledit jugement,

En tout état de cause,

– de constater le caractère particulièrement abusif de la procédure initiée par Mme [U],

En conséquence,

– de la condamner à verser à la société Alexandra II une somme de 10 000 euros au titre de dommages et intérêts,

– de la condamner à lui verser une somme de 5 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

A l’appui de la fin de non recevoir l’appelante indique que la prescription de l’action peut être soulevée en tout état de cause et même pour la première fois en appel et qu’en l’espèce, en vertu de l’article 2224 du code civil, l’action en liquidation de l’astreinte prononcée par jugement du 7 juin 2005, ayant été engagée par assignation du 2 octobre 2014, est prescrite.

Subsidiairement au fond, la société Alexandra II affirme que Mme [U] qui a attendu plus de huit ans pour faire exécuter le jugement rendu par le tribunal d’instance, a en réalité eu accès au garage qu’elle louait et a pu récupérer ses effets, nonobstant les énonciations d’attestations qui avaient été versées au dossier par son adversaire et dont elle conteste les termes dont certaines ont fait l’objet de sa part d’une citation directe de Mme [U] devant le tribunal correctionnel.

L’appelante invoque par ailleurs l’impossibilité de s’exécuter, sa locataire n’ayant jamais justifié

de la liste des affaires laissées dans le garage.

Elle stigmatise la mauvaise foi de Mme [U] qui a attendu qu’elle se trouve dans l’impossibilité de rapporter la preuve de la restitution de ses affaires pour agir en liquidation de l’astreinte, et obtenir une somme représentant 96 fois la valeur vénale des biens à récupérer, cette attitude et cette volonté de nuire étant constitutives d’une cause étrangère et d’un abus de procédure.

L’intimée n’a pas notifié de nouvelles écritures.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 février 2023.

MOTIVATION DE LA DÉCISION :

L’appelante soulève pour la première fois en cause d’appel la prescription de l’action en liquidation de l’astreinte engagée par Mme [U] ;

L’article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour notamment la prescription.

L’article 123 du même code dispose que les fins de non recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu’il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages et intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.

La prescription qui tend à faire déclarer le créancier irrecevable en sa prétention sans examen au fond, constitue une fin de non-recevoir conformément au premier de ces textes, qui en vertu du second peut être opposée en tout état de cause, même pour la première fois en appel ;

Ainsi que le rappelle l’appelante, l’action en liquidation d’une astreinte, qui tend à une condamnation à une somme d’argent, n’est pas soumise au délai de prescription prévu à l’article L. 111-4 du code des procédures civiles d’exécution applicable à l’exécution des titres exécutoires, mais au délai de prescription des actions personnelles et mobilières prévu à l’article 2224 du code civil , c’est-à-dire à la prescription quinquennale de droit commun (Civ. 2e, 21 mars 2019, n° 17-22.241) ;

Ce délai quinquennal court en vertu de l’article 2224 à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, soit en l’espèce après l’écoulement de délai de huit jours laissé à la SCI Alexandra II de s’exécuter spontanément, après la signification du jugement intervenue le 4 août 2005, soit à compter du 13 août 2005 en sorte que l’action en liquidation de cette astreinte engagée par assignation du 2 octobre 2014, soit au delà du délai de prescription qui expirait le 13 août 2010 est prescrite ;

Il s’ensuit la réformation du jugement entrepris en ce qu’il a fait droit à la demande en liquidation de l’astreinte et l’action sera déclarée irrecevable ;

L’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits ne constituant pas en soi une faute caractérisant un abus du droit d’agir en justice, le rejet de la demande indemnitaire de la SCI Alexandra II pour procédure abusive sera confirmé ;

Enfin il n’est pas contraire à l’équité que chaque partie supporte ses frais irrépétibles de procédure de première instance, le jugement étant infirmé de ce chef, et d’appel, la demande présentée à ce titre par la SCI Alexandra II étant rejetée.

Mme [U] partie perdante supportera les dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement déféré excepté en ce qu’il a rejeté la demande de sursis à statuer et débouté la SCI Alexandra II de sa demande de dommages et intérêts ;

STATUANT à nouveau des chefs infirmés,

DÉCLARE irrecevable comme prescrite l’action en liquidation de l’astreinte engagée par Mme [H] [U] ;

REJETTE les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE Mme [H] [U] aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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