HP/SL
COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
Chambre civile – Première section
Arrêt du Mardi 04 Juillet 2023
N° RG 21/00956 – N° Portalis DBVY-V-B7F-GWEQ
Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BONNEVILLE en date du 05 Mars 2021
Appelante
Mme [R] [Y]
née le 03 Février 1974 à [Localité 6] (Italie), demeurant [Adresse 2] – ROYAUME UNI
Représentée par Me Clarisse DORMEVAL, avocat postulant au barreau de CHAMBERY
Représentée par la SCP CABINET BOUVARD, avocats plaidants au barreau de BONNEVILLE
Intimés
Syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice, dont le siège social est situé [Adresse 1]
Représenté par la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocats postulants au barreau de CHAMBERY
Représenté par la SELARL STRAT AVOCATS, avocats plaidants au barreau de LYON
S.A.S. FONCIA MONT BLANC dont le siège social est situé [Adresse 3]
Représentée par la SCP PIANTA & ASSOCIES, avocats au barreau de THONON-LES-BAINS
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Date de l’ordonnance de clôture : 03 Avril 2023
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 25 avril 2023
Date de mise à disposition : 04 juillet 2023
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Composition de la cour :
Audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, par Mme Hélène PIRAT, Présidente de Chambre, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Mme Myriam REAIDY, Conseillère, avec l’assistance de Sylvie DURAND, Greffier,
Et lors du délibéré, par :
– Mme Hélène PIRAT, Présidente,
– Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseillère,
– Mme Myriam REAIDY, Conseillère,
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Faits et Procédure
Par acte notarié en date du 19 décembre 2006, la société Italian brokerages & transportations, (sarl), acquérait deux appartements, l’un dénommé « [Adresse 4] », lot n°19, et l’autre « [Adresse 5] », lot n°38, au sein de la copropriété [Adresse 7] à [Localité 8].
Invoquant la réalisation de travaux effectués en 2004 sans autorisation, le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 7] (ci-après nommé le syndicat des copropriétaires), par acte d’huissier du 8 février 2008, faisait citer la société Italian brokerages & transportations devant le tribunal de grande instance de Bonneville aux fins de voir ordonner la démolition des travaux réalisés en violation des dispositions du règlement de copropriété et ordonner la remise en état à l’identique aux frais exclusifs de la société Italian brokerages & transportations.
Par jugement réputé contradictoire du 23 janvier 2009, le tribunal, notamment :
– ordonnait la démolition des travaux réalisés en violation des dispositions du règlement de copropriété de 1’immeuble [Adresse 7] et affectant les appartement [Adresse 4] et [Adresse 5] (couverture de balcon de l’appartement [Adresse 5], plancher extérieur (terrasse) en façade de l’appartement [Adresse 4], ainsi que la réalisation postérieure d’un appentis avec pose de toit (couverture balcon), un chéneau, fenêtre et volets appartement);
– ordonnait la remise en état à l’identique sous le contrôle d’un architecte choisi par la copropriété et aux frais exclusifs de la société Italian brokerages & transportations ;
Sur l’appel formé par la société Italian brokerages & transportations, la cour d’appe1 de Chambéry, par arrêt en date du 1er juin 2010, confirmait le jugement déféré.
Sur 1e pourvoi formé par la société Italian brokerages & transportations, la cour de cassation, par arrêt du 19 septembre 2012, cassait et annulait en toutes ses dispositions l’arrét rendu le 1er juin 2010 et renvoyait la cause et les parties devant la cour d’appe1 de Grenoble. La Cour de cassation avait relevé que, pour ordonner la démolition des travaux et la remise en état des lieux, la cour de Chambéry avait estimé qu’il ne ressortait pas à l’évidence du procès-verbal d’assemblée générale du 28 mai 2014 que les travaux eussent été en tout ou en partie autorisés et qu’à supposer qu’ils l’eussent, l’accord a posteriori donné par la copropriété était subordonné à l’accomplissement de travaux d’intérêt commun dans les parties communes et qu’il n’était pas établi que ceux-ci eussent été effectivement exécutés de sorte que l’accord était devenu caduc, mais le syndicat n’ayant pas soulevé le fait que les travaux n’avaient pas été exécutés, la cour d’appel avait modifié l’objet du litige, d’où la cassation.
La cour d’appel de renvoi, saisie par la société Italian brokerages & transportations le 12 mars 2013, était amenée à statuer au fond, malgré une assemblée générale du 23 juillet 2013 de la copropriété qui décidait de ne pas poursuivre la procédure et d’autoriser le désistement d’instance et d’action avec prise en charge des frais par le syndicat des copropriétaires et malgré un jugement du tribunal de bonneville en date du 30 mars 2015 qui avait refusé d’annuler les délibérations concernant ce chef, dès lors que le syndic ne s’était pas désisté.
Par arrêt rendu le 10 mai 2016, la cour d’appel de Grenoble confirmait le jugement du tribunal de grande instance de Bonneville du 23 janvier 2009, sauf en ce qui concernait la demande en suppression du plancher en façade (terrasse) de l’appartement [Adresse 4] du syndicat des copropriétaires de la [Adresse 7].
Cette décision devenait définitive après rejet du pourvoi formé par la société Italian brokerages & transportations par arrêt de la cour de cassation en date du 21 décembre 2017.
Parallèlement, la société Italian brokerages & transportations vendait, par actes authentiques en dates des 11 et 17 juillet 2012, à Mme [R] [Y] les appartements « [Adresse 4] », lot n°19, et [Adresse 5], lot n° 38, sis dans la copropriété « [Adresse 7] ».
L’assemblée générale du 27 février 2019 décidait, à la majorité simple, de l’exécution des travaux de suppression de la couverture du balcon de l’appartement « [Adresse 5] », lot n°38, au sein de la copropriété [Adresse 7] aux frais avancés du syndicat des copropriétaires.
Par jugement rendu le 05 mars 2021, sur assignation de Mme [Y] délivrée le 02 mai 2019 à l’encontre du syndicat des copropriétaires de la résidence « [Adresse 7] » et les sociétés de gestion immobilière des Alpes (SGIA), le tribunal judicaire de Bonneville, avec le bénéfice de l’exécution provisoire :
– Déclarait nulle la délibération n°11 de l’assemblée générale du 27 février 2019 ;
– Déboutait Mme [Y] de sa demande de dommages-intérêts ;
– Condamnait Mme [Y] à remettre en l’état à l’identique l’appartement « [Adresse 5] » situé dans la [Adresse 7] et par conséquent à la démolition des travaux de couverture du balcon de l’appartement « [Adresse 5] » sous le contrôle d’un architecte choisi par la copropriété de l’ensemble de la [Adresse 7] et ce sous astreinte de 400 euros par jour de retard,
– Déboutait le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 7] de sa demande de dommages-intérêts .
– Disait que chacune des parties conservait la charge de ses propres dépens,
– Disait n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration au greffe en date du 03 mai 2021, Mme [Y] interjetait appel de ce jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il avait annulé la résolution n°11 de l’assemblée générale du 27 février 2019 et rejeté la demande de dommages-intérêts du syndicat des copropriétaires.
Par ordonnance en date du 9 novembre 2021, sur assignation de Mme [Y], la première Présidente de la cour d’appel de Chambéry déclarait recevable la demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement dont appel mais elle la rejetait.
Prétentions des parties
Par dernières écritures en date du 24 Décembre 2021, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, Mme [Y] sollicite l’infirmation du jugement déféré et demande à la cour de :
– Juger Mme [Y] recevable et fondée en son appel ;
– Rejeter l’appel incident formé par le syndicat des copropriétaires « [Adresse 7] » ;
– Rejeter les demandes dudit syndicat relatives à la liquidation et à la fixation de l’astreinte ;
– Confirmer le jugement du 5 mars 2021 en ce qu’il a annulé la délibération n°11 du procès-verbal de l’assemblée générale du 27 février 2019 et en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formulée contre Mme [Y] par le syndicat des copropriétaires « [Adresse 7] » ;
– Réformer le jugement du 5 mars 2021 en ce qu’il a fait droit à la demande de remise en état de l’appartement formulée par le syndicat des copropriétaires « [Adresse 7] », et en ce qu’il a rejeté les demandes de dommages-intérêts, d’article 700 du code de procédure civile et dépens, formulées par Mme [Y] ;
– Retenir la responsabilité de la société Foncia Mont-Blanc, société anonyme simplifiée, venant aux droits de la société de gestion immobilière des Alpes, société anonyme simplifiée, ès-qualité de syndic ;
– La condamner au paiement d’une somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts ;
– Juger que, conformément à l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, Mme [Y] sera dispensée de toute participation financière au titre des dépens, frais et honoraires exposés par le syndicat des copropriétaires « [Adresse 7] » dans la présente instance ;
– Débouter le syndicat des copropriétaires « [Adresse 7] », et la société Foncia Mont-Blanc, venant aux droits de la société de gestion immobilière des Alpes de l’ensemble de leurs demandes dirigées contre Mme [Y] ;
– Condamner in solidum le syndicat des copropriétaires « [Adresse 7] » et la société Foncia Mont-Blanc venant aux droits de la société de gestion immobilière des Alpes au paiement d’une somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner in solidum le syndicat des copropriétaires « [Adresse 7] » et la société Foncia Mont-Blanc venant aux droits de la société de gestion immobilière des Alpes aux entiers dépens, tant de première instance que d’appel, dont distraction pour ces derniers au profit de Me Clarisse Dormeval, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, Mme [Y] fait notamment valoir que :
Les conditions essentielles des contrats et devis qui devaient être approuvées lors de l’assemblée générale du 27 février 2019 ne lui ont été transmis que par courriel du 15 février 2019, soit après la communication de l’ordre du jour ce qui était une cause de nullité de la délibération n° 11.
La majorité simple de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 s’applique aux décisions de gestion courante de la copropriété et à celles qui concernaient la réalisation de travaux d’entretien, ce qui n’est pas le cas des travaux de démolition, ces travaux étant des travaux de transformation ;
Selon procès-verbal du 23 juillet 2013, l’assemblée générale de la copropriété a décidé de ne plus poursuivre la procédure contre la société Italian Brokerages & Transportations en démolition des travaux réalisés sans autorisation et à autoriser le désistement d’instance et d’action, délibération validée par jugement en date du 30 mars 2015, de sorte qu’elle est victime d’un abus de majorité.
Par dernières écritures en date du 09 mars 2023, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, le syndicat des copropriétaires « [Adresse 7] » sollicite de la cour de :
– Dire l’appel principal interjeté par Mme [Y] mal fondé ;
– Recevoir l’appel incident interjeté par le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 7] et le dire bien fonde ;
– En conséquence, infirmer partiellement le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bonneville le 5 mars 2021, en ce qu’il a déclaré nulle la délibération n°11 de l’assemblée générale du 27 février 2019 et a débouté le syndicat des copropriétaires « [Adresse 7] » de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et dilatoire ;
Et statuant à nouveau,
– Déclarer valide la délibération n°11 de l’assemblée générale du 27 février 2019 ;
– Condamner Mme [Y] au paiement, au profit du syndicat des copropriétaires de la [Adresse 7], de la somme de 50 000 euros au titre d’une procédure dilatoire et abusive ;
– Confirmer le jugement entrepris pour le surplus ;
Y ajoutant,
– Liquider l’astreinte de 400 euros par jour de retard à compter de la déclaration d’appel du 3 mai 2021 et du délai de préavis de six mois, soit à compter du 3 novembre 2021 jusqu’à la décision à intervenir ;
– Fixer une nouvelle astreinte de 1 000 euros par jour de retard dans l’obligation de Mme [Y] de réaliser les travaux de démolition et de remise en état, à compter de la décision à intervenir et jusqu’à parfaite exécution de son obligation ;
– Condamner Mme [Y] au paiement d’une somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, de première instance et d’appel.
Au soutien de ses prétentions, le syndicat des copropriétaires « [Adresse 7] » fait notamment valoir que :
Les conditions essentielles des marchés figurent expressément dans la notification de l’ordre du jour conformément aux exigences posées par l’article 11 I- 3° du décret n°67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
Les travaux de remise en état d’origine sont des travaux d’entretien, si bien que la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965, à savoir la majorité de droit commun, s’applique en dehors de tout texte spécial.
Il n’existe pas d’abus de majorité en ce que l’accord amiable de 2004 ne concernait pas les travaux du balcon de l’appartement « [Adresse 5] », que la délibération du 28 mai 2013 n’est pas une ratification en ce qu’elle ne remplit pas la condition de non équivocité ; que la remise en état conforme est constitutive d’un motif légitime si bien que l’appelante ne démontre pas que la délibération n°11 de l’assemblée générale du 27 janvier 2019 avait pour seul objectif de lui nuire ;
Mme [Y] a acquis l’appartement « [Adresse 5] » et est donc subrogée dans les obligations de son vendeur, la société Italian Brokerages & Transportations vis-à-vis de la copropriété [Adresse 7].
La société Foncia Montblanc venant aux droits des sociétés SGIA a constitué avocat mais n’a pas conclu.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l’audience ainsi qu’à la décision entreprise.
Une ordonnance en date du 3 avril 2023 clôture l’instruction de la procédure. L’affaire a été plaidée à l’audience du 25 avril 2023.
MOTIFS ET DÉCISION
I – Sur les demandes de Mme [R] [Y]
A – Sur la nullité de la résolution n°11 du procès-verbal d’assemblée générale en date du 27 février 2019
Aux termes de l’article 11 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, dans son premier alinéa, Paragraphe I, 3° ‘Sont notifiés au plus tard en même temps que l’ordre du jour :
I.-Pour la validité de la décision :
…….
3° Les conditions essentielles du contrat ou, en cas d’appel à la concurrence, des contrats proposés, lorsque l’assemblée est appelée à approuver un contrat, un devis ou un marché, notamment pour la réalisation de travaux ainsi que les conditions générales et particulières du projet de contrat et la proposition d’engagement de caution mentionné au deuxième alinéa de l’article 26-7 de la loi du 10 juillet 1965 lorsque le contrat proposé a pour objet la souscription d’un prêt bancaire au nom du syndicat dans les conditions prévues à l’article 26-4 de cette loi
….’.
En outre, l’article 13 du même décret précise dans son alinéa 1 : ‘L’assemblée générale ne prend de décision valide que sur les questions inscrites à l’ordre du jour et dans la mesure où les notifications ont été faites conformément aux dispositions des articles 9 à 11-I.’
Il est de jurisprudence constante d’une part, qu’en l’absence de notification des documents nécessaires, la décision prise par l’assemblée générale est sans valeur (Cass 3°, 15 mars 2006 n°04-19.919), d’autre part que pour être valable, la notification doit se faire au plus tard en même temps que l’ordre du jour, et enfin, qu’il n’est pas nécessaire pour le copropriétaire qui invoque la nullité de la résolution de démontrer l’existence d’un grief.
Lors de l’assemblée générale du 27 février 2019, les copropriétaires ont voté la résolution n°11 suivante :
‘RÉALISATION DES TRAVAUX DE SUPPRESSION DE LA COUVERTURE DU BALCON DE L’APPARTEMENT « [Adresse 5] » A FRAIS AVANCES DU SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRE.
Majorité nécessaire : Article 24
Proposition [O][E] : 2 160 euros ttc
devis entreprise : Ipabois 8 195 euros ttc
Assurance Dommage Ouvrage Verspieren : 1 050 euros.
Projet de résolution :
L’assemblée générale décide de l’exécution des travaux de suppression de la couverture du balcon de l’appartement « [Adresse 5] » aux frais avancés du syndicat des copropriétaires (comme autorisé par le jugement de la Cour d’Appel de Grnoble de 2016) selon le descriptif joint à la convocation.
L’assemblée générale vote, pour ce faire, un budget s’élevant à 11 405 euros ttc, compris le coût de l’assurance dommages ouvrages obligatoire, elle confie la réalisation de ces travaux à l’entreprise Ipabois avec un suivi des travaux par M. [E], architecte.
L’assemblée générale décide de répartir le montant des travaux ainsi voté en charges communes générales par appels de provisions exigibles aux dates suivantes : le 1 octobre 2019 pour 100 %.
Date de réalisation des travaux : automne 2019
L’assemblée prend acte que le plan de financement tel qu’il vient d’être adopté, ne permet pas de placement de fonds au profit du syndicat des copropriétaires, mais seulement le paiement des situations de travaux au fur et à mesure de leur échéance. »
Or, il résulte de la convocation que le syndic a adressé aux copropriétaires en vue de cette assemblée générale que le projet n°11 de la résolution était ainsi libellé dans sa première partie, sans être accompagné d’aucun document :
» RÉALISATION DES TRAVAUX DE SUPPRESSION DE LA COUVERTURE DU BALCON DE L’APPARTEMENT « [Adresse 5] » A FRAIS AVANCES DU SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRE.
Majorité nécessaire : Article 24
Conditions essentielles des marchés :
Proposition [O][E] : en attente
Devis entreprise : en attente
Assurance Dommage Ouvrage Verspieren
Projet de résolution :
L’assemblée générale décide de l’exécution des travaux de suppression de la couverture du balcon de l’appartement « [Adresse 5] » aux frais avancés du syndicat des copropriétaires (comme autorisé par le jugement de la Cour d’Appel de GRENOBLE de 2016) selon le descriptif joint à la convocation’.
D’ailleurs, par courriel en date du 15 février 2019, le syndic adressait aux copropriétaires ‘les éléments manquants lors de l’envoi de la convocation’ à l’assemblée générale soit :
– le devis Ipabois des travaux de démolition ;
– la proposition des honoraires de la mîtrise d’oeuvre ;
– une simulation du coût total des travaux avec l’assurance par copropriétaire.
S’il n’est pas contestable que les copropriétaires ont reçu ces éléments plusieurs jours avant l’assemblée générale, ceux-ci n’étaient pas joints à la convocation ou envoyés le même jour que la convocation par pli séparé comme l’article 11 du décret précité le prévoit et, contrairement à ce que soutient le syndicat des copropriétaires, les conditions essentielles du marché ne figuraient pas dans la notification de l’ordre du jour puisque le montant prévisible des travaux n’était pas indiqué, que les travaux prévus n’étaient pas détaillés comme ils le sont dans le devis d’Ipabois.
En conséquence, c’est à bon droit que le premier juge a annulé la résolution n°11 du procès-verbal d’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] en date du 27 février 2019, sans qu’il soit besoin d’examiner les deux autres causes de nullité soulevées par l’appelante ( majorité requise et abus de majorité)
B – sur la demande de dommages-intérêts formée par Mme [R] [Y] contre le syndic
Mme [R] [Y] fonde sa demande sur un procès-verbal d’assemblée générale en date du 23 juillet 2013 et plus particulièrement sur les résolutions n°5 et 6 qui prévoyaient le désistement d’instance et d’action diligentées contre la société Italian brokerages & transportations pour la démolition des travaux non autorisés, résolutions que le syndic n’avait pas respectées puisqu’il avait poursuivi la procédure devant la cour d’appel de renvoi.
Cependant, Mme [R] [Y] n’était pas partie à la procédure concernée, elle n’est pas intervenue à cette procédure, bien qu’en cours d’instance, elle ait acquis les biens concernés par les travaux litigieux. En outre et surtout, l’existence de cette délibération du 23 juillet 2023 avait été expressément soumise à la cour de cassation par la société Italian brokerages & transportations dans son second moyen (‘ sans rechercher si cette habilitation n’avait pas été révoque par l’assemblée générale des copropriétaires tenue le 23 juillet 2013 et régulièrement communiquée par la société Italian brokerages & transportations..’. Or, la cour de cassation, dans son second arrêt en date du 21 décembre 2017, saisie du pourvoi contre l’arrêt rendu par la cour d’appel de Grenoble en date du 10 mai 2016, a estimé que ‘les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation’. En conséquence, Mme [R] [Y] ne saurait se prévaloir de la continuation de la procédure par les sociétés SGIA, syndics alors que l’assemblée générale avait autorisé le désistement, étant au surplus précisé qu’il s’agissait d’une autorisation et non d’un ordre et qu’en outre, elle avait été parfaitement informée de l’existence de la procédure au moment de l’achat par la société venderesse gérée par son propre père.
En conséquence, le jugement entrepris sera également confirmé de ce chef.
II – Sur les demandes du syndicat des copropriétaires
A – sur la demande de remise en l’état de l’appartement [Adresse 5]
Comme l’a justement motivé le premier juge qui a cité la clause figurant dans le contrat de vente entre la société Italian brokerages & transportations et Mme [R] [Y], cette dernière était parfaitement informée du litige en cours opposant la venderesse au syndicat en vue de la démolition de travaux non autorisés. Malgré la décision définitive de la cour d’appel de Grenoble survenue en 2016, Mme [R] [Y] n’a jamais procédé à la démolition des travaux litigieux (couverture du balcon et appentis), alors même qu’elle est tenue des obligations qui pesaient sur la venderesse, nonobstant le fait que dans leurs rapports entre eux, la société Italian brokerages & transportations avait convenu de conserver à sa charge l’ensemble des frais afférents au litige et le coût de l’éventuelle démolition et Mme [R] [Y] ne saurait se prévaloir de l’assemblée générale ayant autorisé le syndic à se désister pour les motifs sus-exposés.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a fait droit à la demande du syndicat des copropriétaires de condamner Mme [R] [Y] à supprimer la couverture du balcon et l’appentis (avec toit, chenaux, volets, fenêtres) de l’appartement [Adresse 5] sous le contrôle d’un architecte choisi par le syndicat des copropriétaires aux frais exclusifs de Mme [R] [Y].
L’astreinte prononcée en première instance, par jugement exécutoire de plein droit et dont l’exécution n’a pas été suspendue par la juridiction de la première présidente, sera confirmée, mais toutefois limitée dans sa durée à trois ans, mais il n’appartient pas à la cour de liquider cette astreinte, dès lors que le premier juge n’est pas resté saisi de l’affaire et ne s’est pas réservé le pourvoir se statuer sur la liquidation de l’astreinte (cass 2ème civil 21 mars 2022 n°00-18832), seul le juge de l’exécution dispose de ce pouvoir juridictionnel (article L131-3 du CPCE). Par ailleurs, il n’y a pas lieu à prononcer une nouvelle astreinte compte tenu de l’astreinte encore en cours prononcée en première instance.
B – sur la demande de dommages-intérêts du syndicat des copropriétaires pour procédure abusive
C’est à l’issue d’une analyse pertinente, exhaustive, exempte d’insuffisance que le premier juge a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive. En conséquence, le jugement entrepris sera également confirmé de ce chef.
III – Sur les mesures accessoires
La décision entreprise sera confirmée sur les mesures accessoires.
Succombant, Mme [R] [Y] sera tenue aux dépens de l’instance d’appel et sa demande d’indemnité procédurale sera rejetée. La demande de Mme [R] [Y] tendant à se voir dispenser de toute participation financière aux frais et honoraires exposés pour la procédure d’appel sera rejetée en vertu de l’équité, dès lors qu’elle succombe dans son appel principal.
L’équité commande de faire droit à la demande d’indemnité procédurale du syndicat des copropriétaires et de lui allouer la somme de 4 000 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions sauf sur l’absence de limitation de la durée de l’astreinte,
Dit que l’astreinte ordonnée en première instance sera limitée à une durée de trois ans,
Y ajoutant,
Déclare irrecevable devant la cour la demande du syndicat des copropriétaires en liquidation de l’astreinte prononcée en première instance,
Déboute le syndicat des copropriétaires de sa demande de nouvelle astreinte,
Déboute Mme [R] [Y] de sa demande fondée sur l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 tendant à se voir dispenser de toute participation financière aux frais et honoraires exposés pour la procédure d’appel et de sa demande au titre de l’indemnité procédurale,
Condamne Mme [R] [Y] aux dépens de l’instance d’appel,
Condamne Mme [R] [Y] à payer au syndicat des copropriétaires une indemnité procédurale en appel de 4 000 euros.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.
Le Greffier, La Présidente,
Copie délivrée le 04 juillet 2023
à
Me Clarisse DORMEVAL
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY
Copie exécutoire délivrée le 04 juillet 2023
à
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY