Saisine du juge de l’exécution : 31 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/05011

·

·

Saisine du juge de l’exécution : 31 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/05011

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 6

ARRET DU 31 MAI 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/05011 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFNRT

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 17 Février 2022 -Juge de la mise en état de PARIS – RG n° 20/12477

APPELANTES

Madame [X] [O]

[Adresse 5]

[Localité 4]/ IRAK

Madame [L] [O] épouse [N]

[Adresse 5]

[Localité 4]/ IRAK

Madame [M] [C] VEUVE [O]

[Adresse 5]

[Localité 4]/ IRAK

Représentées par Me Aouatif ABIDA, avocat au barreau de PARIS, toque : E0622

INTIMEE

Société CREDIT LOGEMENT

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Denis LANCEREAU de l’AARPI Cabinet TOCQUEVILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : R050

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère, et M.Vincent BRAUD, Président.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

M.Marc BAILLY, Président de chambre,

M.Vincent BRAUD, Président,chargé du rapport

MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par M.Vincent BRAUD, Président, et par Mme Anaïs DECEBAL,Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*

* *

Par offres acceptées les 2, 3 et 5 novembre 2008, la société Bnp PARIBAS a consenti à M. [Y] [O] trois prêts de 43 000 euros pour financer l’acquisition d’un bien immobilier, tous garantis par le cautionnement de la société Crédit Logement.

[Y] [O] est décédé le [Date décès 1] 2016.

La société Crédit Logement a réglé trois fois la somme de 23 361,66 euros au titre du prêt en date du 5 avril 2018.

Le 4 mars 2020, le juge des requêtes du tribunal judiciaire de Paris a désigné le service des Domaines en qualité de curateur à succession vacante.

La société Crédit Logement a obtenu du juge de l’exécution l’autorisation d’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire par ordonnance du 14 mai suivant et elle a demandé au service de la publicité foncière une régularisation à raison de discordances et inexactitudes et en ce que le bien était indiqué comme appartenant aux héritiers, la requête étant rejetée par le service le 28 juillet 2020.

Le 16 novembre 2020, le juge de l’exécution a autorisé la même inscription dénoncée le 27 novembre suivants aux héritiers.

La société Crédit Logement a fait assigner les héritiers, Mme [X] [O], Mme [L] [O] épouse [N] et Mme [M] [C] veuve [O] devant le tribunal judiciaire de Paris par acte en date du 30 novembre 2020 aux fins d’obtenir leur condamnation à lui payer trois fois la somme de 23 361,66 euros outre intérêts.

Sur la saisine des héritiers qui faisaient valoir la prescription de l’action de la société Crédit Logement, le juge de la mise en état, par ordonnance en date du 17 février 2022 a notamment rejeté cette fin de non recevoir, renvoyé l’examen de l’affaire à la mise en état et dit n’y avoir lieu à condamnation en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration au greffe en date du 4 mars 2022, Mme [X] [O], Mme [L] [O] épouse [N] et Mme [M] [C] veuve [O] ont interjeté appel de l’ordonnance.

A l’audience du 3 avril 2013, les parties ont convenu de la nécessité de rétracter l’ordonnance de clôture du 13 mars et l’affaire a été clôturée à nouveau, avec leur accord.

Par leurs conclusions en date du 14 mars 2023, Mme [X] [O], Mme [L] [O] épouse [N] et Mme [M] [C] veuve [O] font valoir :

– que par acte en date du 1er février 2018, un acte de notoriété a été établi à leur demande, que la déclaration de succession a été faite le 17 janvier 2019 et le transfert des biens publié au service de la publicité foncière avec mention de la dévolution successorale,

– que la Société Crédit Logement ne soutient que pour les besoins de la cause qu’elle ignorait la dévolution successorale jusqu’à la publication de l’attestation du 25 janvier 2019 alors que les courriers entre la société Bnp PARIBAS, la société d’assurance du prêt Cardif et le notaire montrent qu’elle ne l’ignorait pas alors qu’elle pouvait prendre contact avec le notaire ou le service des Domaines,

– que le délai de prescription de l’action en recouvrement de la caution court, en vertu des articles 2305 du code civil et L 137-2 devenu L 218-2 du code civil, à compter de son paiement, en l’espèce du 5 avril 2018,

– que la prescription court contre toute personne selon l’article 2251 du code civil sous les seules exceptions des articles 2252 à 2258 et 2278 du code civil, que le point de départ ne saurait en être différé, que l’ordonnance qui a retenu comme point de départ la publication de l’attestation immobilière retraçant la succession de [Y] [O] doit donc être infirmée, qu’il est considéré par la jurisprudence que si, quoi qu’empêché temporairement d’agir pendant le délai, le créancier dispose encore, à l’issue de l’empêchement, du temps nécessaire pour agir en vertu du délai de prescription, l’article 2234 du code civil ne s’applique pas, que si la prescription de l’action en nullité ne court pas contre celui qui est dans l’impossibilité d’agir par suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure, cette règle ne s’applique pas lorsque le titulaire de l’action disposait encore du temps nécessaire pour agir avant l’expiration du délai de prescription au moment où l’empêchement a pris fin, que le point de départ du délai n’a donc pas été décalé au 25 janvier 2019,

– que l’impossibilité d’agir avait cessée plusieurs mois avant l’expiration du délai pour agir fixée au 5 avril 2020 et reporté, à raison de l’état d’urgence sanitaire, au 23 août 2020, de sorte que l’action est prescrite et qu’ils demandent à la cour d’infirmer l’ordonnance et :

‘Jugeant à nouveau:

– Juger l’action de la SA CREDIT LOGEMENT purement et simplement prescrite;

– Condamner la SA CREDIT LOGEMENT à la somme de 3500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens’.

Par ses dernières conclusions en date du 31 mars 2023, la société Crédit Logement poursuit la confirmation de l’ordonnance et l’obtention d’une somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en faisant valoir :

– que les nouvelles pièces récemment produites aux débats ne sont pas de nature à établir sa connaissance de la dévolution successorale dès lors qu’il s’agit de courriers échangés avec la Bnp PARIBAS et la société d’assurance Cardif qui sont, elles-mêmes, deux personnes morales distinctes, d’autant qu’elle n’a été appelée en paiement que postérieurement à ces échanges, et ce, alors que l’acte de propriété du 1er février 2018 établi par la notaire n’a jamais été porté à sa connaissance,

– qu’elle avait bien invoqué la règle de l’article 2234 et que le délai de prescription n’avait pu commencer à courir qu’à compter de sa connaissance de l’identité des héritiers, le 10 juillet 2020, date à laquelle elle a appris l’existence de la dévolution successorale, ou, dans l’hypothèse la plus favorable aux héritiers, la date du la publication de cette dévolution le 17 janvier 2019, qui constituent les faits lui permettant d’exercer son action au sens de l’article 2224 du code civil, que le point de départ du délai n’a pu être la date de son paiement en raison d’un empêchement légitime qui existait dès l’origine, l’adage actioni non natae non praescribitur s’appliquant, que le décès étant antérieur à son paiement elle était empêchée dès l’origine,

– subsidiairement, sur le fondement de l’article 2234 du code civil, qu’elle s’est trouvée dans l’impossibilité d’agir dès l’origine et que le point de départ n’a donc commencé à courir, en vertu de l’article 2224 du code civil, que lorsqu’elle a eu connaissance du nom des héritiers,

– que contrairement à ce que soutiennent les appelants le juge de la mise en état n’a pas statué ultra petita puisqu’elle avait expliqué que la prescription ne pouvait courir avant la naissance de son droit d’agir et qu’il n’avait débuté qu’au moment où elle avait eu connaissance des héritiers,

– que les articles 2251 à 2254 qui concernent l’aménagement conventionnel de la prescription ne sont pas applicables, non plus que l’article 2258 qui est relatif à la prescription acquisitive d’un bien ou d’un droit,

– que les appelants confondent interruption et prescription alors que, comme elle était dans l’impossibilité d’agir ab initio, lors de son paiement, le délai n’avait jamais couru.

MOTIFS

Les parties s’accordent, dès lors que le cautionnement fourni par la société Crédit Logement constitue un service fourni aux emprunteurs consommateurs, sur la soumission du recours personnel de la caution professionnelle contre les débiteurs, sur le fondement de l’article 2305 du code civil, à la prescription biennale de l’article devenu L218-2 du code de la consommation.

Le point de départ du délai de prescription de la caution qui a payé et exerce son recours personnel de l’article 2305 du code civil contre le débiteur est la date à laquelle elle a payé la dette, soit en l’espèce le 5 avril 2018, de sorte que le délai de prescription expire, en principe, le 5 avril 2020, ce délai ayant été reporté à raison de l’état d’urgence sanitaire et de la période juridiquement protégée en vertu des ordonnances des 25 mars 2020 et13 mai 2020, au 24 août 2020.

Les pièces nouvelle produites par les consort [O] et qui consistent en des échanges entre l’office notarial avec la société Bnp PARIBAS et la société d’assurance-vie Cardif n’établissement pas que la société Crédit Logement aurait eu connaissance de la dévolution successorale de [Y] [O] avant sa publication, intervenue le 17 janvier 2019.

Mais s’il est exact que l’article 2234 du code civil, figurant dans la section intitulée ‘des causes de report du point de départ ou de suspension de la prescription’, dispose que ‘la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l’impossibilité d’agir par suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure’, il est de jurisprudence constante, y compris après l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription, que le règle selon laquelle la prescription ne court pas contre celui qui est empêché ne s’applique pas lorsque le titulaire de l’action, disposait encore, à la cessation de l’empêchement, du temps nécessaire pour agir avant l’expiration du délai de prescription.

Or en l’espèce, il résulte des faits rapportés ci-dessus que lorsque l’empêchement – constitué de la méconnaissance de la dévolution successorale du débiteur – a cessé le 17 janvier 2019, la caution disposait encore du temps nécessaire pour agir puisque le délai de prescription n’expirait que le 24 août 2020, de sorte que son action, intentée le 30 novembre 2020, doit être déclarée prescrite.

Il y a donc lieu de réformer l’ordonnance entreprise en conséquence, de condamner la société Crédit Logement aux entiers dépens, l’équité commandant de ne pas prononcer de condamnation en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

INFIRME l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

DÉCLARE prescrit le recours de la société Crédit Logement à l’encontre de Mme [X] [O], Mme [L] [O] épouse [N] et Mme [M] [C] veuve [O] ès qualités d’héritières de [Y] [O] ;

DIT n’y avoir lieu au prononcé d’une condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Crédit Logement aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x