Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 6
ARRET DU 31 MAI 2023
(n° , 5 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/04638 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFMO7
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Janvier 2022 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS – RG n° 19/13826
APPELANT
Monsieur [E] [S]
[Adresse 2]
[Localité 4]/France
Représenté par Me Jonathan SOUFFIR de l’AARPI EVY Avocats, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
S.A. CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE-DE-FRANCE
ayant pour numéro unique d’identification : 382 900 942 RCS
prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Dominique FONTANA de la SELARL DREYFUS FONTANA, avocat au barreau de PARIS, toque : K0139
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Marc BAILLY, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M.Marc BAILLY, Président de chambre,
M.Vincent BRAUD, Président,
MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par M.Marc BAILLY, Président de chambre, et par Anaïs DECEBAL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
*
* *
Par acte sous seing privé du 12 septembre 2010 et par acte authentique du 8 mars 2011, la Caisse d’Epargne a consenti à Monsieur [E] [S] et Madame [K] [Y] un prêt immobilier destiné à l’acquisition d’un logement en VEFA en vue de sa location sous le régime de la loi Scellier.
Le crédit d’un montant de 274 170 euros était remboursable en 240 mensualités de 1 679,84 euros, assurance décès-invalidité incluse au taux de 3,65 % l’an.
Le contrat a fait l’objet d’un avenant régularisé le 8 février 2014 modifiant les conditions de remboursement du prêt, à la suite de difficultés rencontrées par les emprunteurs qui ont bénéficié d’un report des échéances durant 12 mois, le taux d’intérêt restant inchangé.
A l’issue de ce moratoire, les mensualités de remboursement étaient fixées à la somme de 1 797,88 euros.
Monsieur [E] [S] a saisi la Commission de surendettement le 31 juillet 2015 et il a été déclaré recevable par décision du 21 septembre 2015, la Caisse d’Epargne a déclaré sa créance.
La plan conventionnel de la commission a été accepté par la banque le 20 novembre 2015 mais elle a poursuivi le paiement à l’égard de Mme [Y] qui n’était pas concernée par la procédure de surendettement.
Après une mise en demeure infructueuse du 16 novembre 2015, la banque a prononcé la déchéance du terme du prêt le 14 décembre 2015 à l’égard de Mme [Y] la mettant en demeure de payer la somme de 294 312,18 euros et le même jour à l’égard de M. [S] lui rappelant qu’il restait devoir la somme de 273 047,49 euros conformément à la déclaration de créance dans la cadre de la procédure de surendettement.
M. [S] a contesté la créance de la banque dans la cadre de cette procédure et le juge de l’exécution, par jugement du 7 mars 2016, a rejeté cette contestation tendant à ne voir reconnaître la créance qu’à hauteur de 75 % des sommes restant dues.
Le plan été homologué par ordonnance du juge d’instance du 11 octobre 2016.
Par arrêt en date du 27 mai 2020, la cour d’appel de Paris a confirmé, sauf sur le quantum, un jugement du 7 avril 2016 ayant condamné Mme [Y] à payer les causes du prêt.
Mme [Y] a été déclarée recevable à une procédure de surendettement le 19 avril 2018 et le plan de surendettement a pris fin le 30 octobre 2021.
Après l’expiration du plan de surendettement de M. [S], la banque a fait délivrée deux commandement aux fins de saisie vente puis a fait délivrée un acte de saisie-attribution des loyers qui a été contesté par mais le juge de l’exécution a rejeté ces contestations par jugement du 20 avril 2022, appel étant relevé par les emprunteurs.
M. [S] et Mme [Y] ont été déclarés irrecevables à une nouvelle demande de surendettement faite le 16 mars 2022 par décision du 28 avril 2022.
Par assignation en date du 17 octobre 2019, M. [E] [S] a attrait la Caisse d’Epargne et de prévoyance d’Ile-de-France devant le tribunal judiciaire de Paris en recherchant sa responsabilité pour avoir manqué à son obligation de mise en garde lors de l’octroi du crédit et à son obligation d’information et de conseil sur la nécessité de souscrire une assurance perte d’emploi.
Par jugement en date du 13 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Paris, aux motifs essentiels que le point de départ du délai de prescription de l’action en manquement à l’obligation de mise en garde était la souscription de l’avenant du 6 février 2014 accordant un moratoire, date à laquelle les emprunteurs ont pu se convaincre des difficultés à rembourser le prêt et celui de l’action pour manquement à l’obligation d’information et de conseil est identique et que cette demande a été formulée pour la première fois le 14 octobre 2020 a déclaré M. [E] [S] irrecevable et l’a condamné aux dépens ainsi qu’à payer à la Caisse d’Epargne la somme de 1 200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
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M. [E] [S] a interjeté appel par déclaration au greffe en date du 25 février 2022.
Par ses seules conclusions en date du 25 mais 2022, M. [E] [S] demande à la cour de :
‘A titre principal :
– CONSTATER que l’action en responsabilité pour manquement de la CAISSE D’EPARGNE à son obligation de mise en garde intentée par Monsieur [S] à n’est pas prescrite, car elle a été engagée dans les 5 ans suivant le premier incident de paiement ;
– CONSTATER que la Banque a manqué à son obligation de mise en garde à l’égard de Monsieur [S] en ce qu’elle ne l’a pas averti du risque de surendettement résultant d’une part de l’âge avancé des emprunteurs, et d’autre part de l’acquisition du bien objet du crédit à un prix largement supérieur au prix du marché ;
En conséquence :
– INFIRMER le jugement du 13 janvier 2022 en ce qu’il a déclaré irrecevable car prescrite l’action de Monsieur [S] ;
Et statuant à nouveau :
– CONDAMNER la CAISSE D’EPARGNE au paiement de la somme de 120.849 euros correspondant à la différence entre la dette de Monsieur [S] et la valeur de sa résidence secondaire d’un montant de 185.000 euros ;
A titre subsidiaire :
-CONSTATER que l’action en responsabilité pour manquement de la CAISSE D’EPARGNE à son obligation d’information et de conseil intentée par Monsieur [S] n’est pas prescrite, car elle a été engagée dans les 5 ans suivant le premier incident de paiement ;
– CONSTATER que la Banque a manqué à son obligation d’information et de conseil à l’égard de Monsieur [S] en ce qu’elle ne l’a pas conseillée sur la nécessité de souscrire à une assurance perte d’emploi ;
En conséquence :
– INFIRMER le jugement du 13 janvier 2022 en ce qu’il a déclaré irrecevable car prescrite l’action de Monsieur [S] pour manquement à son obligation d’information et de conseil ;
Et statuant à nouveau :
– CONDAMNER la CAISSE D’EPARGNE au paiement de la somme de 120.849 euros correspondant à la différence entre la dette de Monsieur [S] et la valeur de sa résidence secondaire d’un montant de 185.00 euros’ ;
Par ses dernières conclusions en date du 19 août 2022, la Caisse d’Epargne et de Prévoyance d’Ile-de-France demande à la cour de :
‘- DECLARER irrecevable Monsieur [E] [S] en ses demandes en raison de la prescription.
CONFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire de PARIS du 13 janvier 2022 en toutes ses dispositions, notamment en ce qu’il a déclaré irrecevable Monsieur [E] [S] en ses demandes de dommages et intérêts au titre d’un manquement au devoir de mise en garde et au titre d’un manquement à l’obligation d’information et de conseil.
Subsidiairement,
DECLARER Monsieur [E] [S] mal fondé en ses demandes.
En conséquence,
L’en DEBOUTER.
Dans tous les cas,
CONFIRMER le jugement en ce qu’il a condamné Monsieur [E] [S] à payer à la CAISSE D’EPARGNE la somme de 1.200 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens.
Y ajoutant,
CONDAMNER Monsieur [E] [S] à payer à la CAISSE D’EPARGNE la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile. ‘
Vu l’ordonnance de clôture rendue le 7 mars 2023 ;
MOTIFS
C’est à bon droit, par des motifs pertinents que la cour adopte alors que M. [S] ne fait valoir aucun moyen ou circonstance nouvelle, que le tribunal, rappelant que le point de départ du délai de la prescription d’une action en responsabilité d’un établissement prêteur de deniers pour manquement à l’obligation de mise en garde à l’égard d’un emprunteur profane court à compter du jour où l’emprunteur a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, a retenu que les difficultés à faire face aux échéances du prêt – qui sont la manifestation du dommage issu du manquement à la mise en garde de ne pas souscrire un crédit excessif eu égard à ses capacités financières – n’ont pu être ignorées par M. [S] lors de l’avenant au contrat du 8 février 2014 dont l’adoption était précisément motivée par les difficultés de remboursement.
Il doit être ajouté qu’il était loisible à M. [S] de faire procéder à une expertise ou à une évaluation du bien dès qu’il en a pris possession soit bien avant les cinq années qui précèdent son assignation, étant observé, mais au surplus, que contrairement à ce qu’il soutient, la banque, en sa qualité de prêteur de deniers, n’est pas tenue à l’égard de l’emprunteur d’une obligation de conseil sur l’opportunité économique de l’opération financée et donc sur la valeur du bien financé.
En conséquence, son action introduite par l’assignation en date du 17 octobre 2019 est prescrite et il y a lieu de confirmer l’ordonnance entreprise, de condamner M. [S] aux dépens ainsi qu’à payer à la Caisse d’Epargne la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
CONDAMNE M. [E] [S] à payer à la Caisse d’Epargne et de prévoyance d’Ile-de-France la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [E] [S] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT