Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 3
ARRÊT DU 31 MAI 2023
(n° , 14 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/03349 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBP3O
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Janvier 2020 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS – RG n° 16/04090
APPELANTE
SAS ATFB – RCS de PARIS sous le n° 809.141.302, prise en la personne de ses représentants légaux, dont le siège social est situé:
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Eric ALLERIT de la SELEURL TBA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241
Assistée de Me Alexandra BOURGEOT, avocat au barreau de PARIS, toque : R221
INTIMEES
Mme [S] [X] née [G]
demeurant:
Chez SARL GESTIONA
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Anne FITOUSSI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0958
SARL GESTIONA RCS de PARIS sous le n° 498.844.166, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège social:
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Anne FITOUSSI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0958
Syndic. de copro. CABINET MINARD SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU [Adresse 1] enregistré au RCS de Paris sous le n°672 031 218 prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège social:
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Aurélie CAGNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : D2102
PARTIE INTERVENANTE :
Monsieur [T] [D]
demeurant:
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Aurélie CAGNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : D2102
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 21 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Nathalie RECOULES, Présidente de chambre
Douglas BERTHE, Conseiller rapporteur
Emmanuelle LEBÉE, Magistrate à titre honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Laurène BLANCO
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Nathalie Mme RECOULES, Présidente de chambre et par Mme Laurène BLANCO, greffier présent lors de la mise à disposition.
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [S] [X] née [G] est propriétaire d’un local commercial au rez-de-chaussée sur [Adresse 1] pour lequel elle a, le 31 décembre 2014, donné mandat de gérer et d’administrer à la société Gestiona.
La société Gestiona l’a donné à bail commercial à effet du 1er février 2015 à la société ATFB pour une activité d’« épicerie fine, caviste, salon de thé, bar, petite restauration sans extraction » sous l’enseigne « la Bringue » moyennant un loyer annuel de 30.000 euros, et une provision mensuelle pour charges de 150 euros. Le montant du dépôt de garantie versé à la signature était de 5.000 euros.
À la suite de la réception, le 9 décembre 2015, par la bailleresse, d’un courrier recommandé du syndic de la copropriété, lui indiquant que des occupants de l’immeuble se plaignaient de nuisances sonores et olfactives et d’une occupation illicite du trottoir, la société Gestiona, a, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 23 décembre 2015, mis en demeure la société AFTB de faire cesser ces troubles.
Par acte extrajudiciaire du 11 février 2016, elle lui a fait délivrer un commandement visant la clause résolutoire d’avoir à se conformer au bail et à faire cesser les troubles de voisinage.
Par acte extrajudiciaire du 1er mars 2016 la société ATFB a assigné la bailleresse devant le président du tribunal de grande instance de Paris statuant en matière de référé, en demande d’expertise judiciaire.
Le même jour, elle l’a assignée devant le tribunal de grande instance de Paris en nullité du commandement et en demande de dommages et intérêts.
Par ordonnance de référé du 13 avril 2016, M. [L], a été désigné en qualité d’expert, avec mission, principalement, de rechercher l’origine, l’étendue et la cause des nuisances, de caractériser d’éventuels manquements aux prescriptions législatives, réglementaires ou aux règles de l’art pouvant avoir un lien avec les désordres allégués, de fournir tous éléments permettant de déterminer si ceux-ci sont de nature à constituer un trouble anormal de voisinage et de donner son avis sur la nature des éventuels travaux ou actions nécessaires à la correction de la situation.
Par ordonnance du 15 décembre 2016, le président du tribunal de grande instance de Paris a rendu cette ordonnance commune à Mme [R] et M. [H] ès-qualités de liquidateur de la société JK Renov.
Par acte extrajudiciaire des 20 et 24 avril 2017, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic, le cabinet Minard, ci-après le Syndicat des copropriétaires a assigné la société Gestiona, Mme [X], la société ATFB, Mme [R] et la société JK Renov représentée par son liquidateur judiciaire M. [H], devant le président du tribunal de grande instance de Paris statuant en matière de référé aux fins de voir déclarer recevable son intervention volontaire, dire que les opérations d’expertise se poursuivront au contradictoire du Syndicat des copropriétaires représenté par son syndic, et déclarer commune et opposable au Syndicat des copropriétaires l’ordonnance de référé du 13 avril 2016.
Par ordonnance du 20 juin 2017, le président du tribunal de grande instance de Paris statuant en référé a fait droit à ces demandes.
Par acte extrajudiciaire du 12 mai 2017, Mme [X] a fait délivrer à la société ATFB un nouveau commandement visant la clause résolutoire d’avoir à payer le solde de l’avis d’échéance du mois de mars ainsi que ceux d’avril et mai 2017 et une facture de remboursement de recherche de fuite privative, pour un montant en principal de 7.147,40 euros outre 714,40 euros à titre de clause pénale et 205,31 euros de frais.
Par acte extrajudiciaire du 17 octobre 2017, Mme [X] a fait délivrer à la société ATFB un nouveau commandement visant la clause résolutoire d’avoir à payer le solde de l’avis d’échéance du mois d’août ainsi que ceux de septembre et octobre 2017 soit un montant en principal de 5.352,39 euros et 171,79 euros de frais.
Par ordonnance du 15 novembre 2018, le juge de la mise en état a rejeté la demande du Syndicat des copropriétaires visant à constater le trouble anormal de voisinage et à ordonner la fermeture provisoire de l’établissement.
Un rapport d’expertise en l’état a été déposé le 2 mars 2018 par M. [L] concluant à l’existence d’un trouble anormal de voisinage.
Par acte extrajudiciaire du 26 avril 2018, Mme [X] a fait délivrer à la société ATFB un nouveau commandement visant la clause résolutoire d’avoir à payer le solde de l’avis d’échéance du mois de février ainsi que ceux de mars et avril 2018 soit un montant en principal de 5.428,75 euros et 172,06 euros de frais.
Par ordonnance du 28 septembre 2018 le président du tribunal de grande instance de Paris statuant en matière de référé, saisi par la bailleresse, a rejeté sa demande provisionnelle en paiement de loyer et renvoyé les parties à se pourvoir sur le fond du litige.
Par jugement du 21 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Paris a :
– déclaré recevable et régulière l’intervention volontaire du Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 1] ;
– constaté l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation depuis le 11 mars 2016 du bail du 1er février 2015 liant Mme [X] et la société ATFB et portant sur les locaux sis [Adresse 1] à [Localité 7] ;
– ordonné l’expulsion de la société ATFB et de tous occupants de son chef, en cas de non restitution volontaire des lieux trois mois après un commandement de quitter les lieux, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier si besoin est ;
– dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désignée par elle et qu’à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l’exécution, ce conformément aux dispositions légales ;
– condamné la société ATFB au paiement d’une indemnité d’occupation de 2.702,06 euros par mois à compter du 11 mars 2016 et jusqu’à libération effective des lieux par remise des clés ;
– dit et jugé qu’il convient de réduire comme manifestement excessives les indemnités contractuelles prévues à la clause pénale résultant de l’article 5 du contrat de bail ;
– condamné la société ATFB à payer à Mme [X] la somme de 500 euros au titre de la clause pénale résultant de l’article 5 du bail ;
– rejeté le surplus des demandes au titre de la clause pénale ;
– dit et jugé que l’exploitation dans les locaux loués d’une activité d’ « épicerie fine, caviste, salon de thé, bar, petite restauration sans extraction » ne constitue pas un changement de destination contraire aux dispositions du règlement de copropriété ;
– débouté en conséquence, le Syndicat des copropriétaires de sa demande de condamnation de la société ATFB, de Mme [X] et de la société Gestiona à restituer au local sa destination d’origine ;
– débouté le Syndicat des copropriétaires de sa demande de fermeture de l’établissement en cause sous astreinte ;
– condamné in solidum la société ATFB et Mme [X] à payer au Syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 euros au titre du préjudice subi du fait de leur résistance abusive à faire cesser le trouble de voisinage ;
– débouté le Syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts à l’encontre de la société Gestiona ;
– condamné la société ATFB à garantir Mme [X] de la condamnation au paiement de 1.000 euros au Syndicat des copropriétaires prononcée à son encontre ;
– condamné la société ATFB à payer le Syndicat des copropriétaires la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté les parties des autres demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;
– rejeté les autres demandes ;
– condamné la société ATFB aux entiers dépens de l’instance ;
– ordonné l’exécution provisoire.
Par déclaration du 14 février 2020, la société ATFB a interjeté appel total du jugement.
Par conclusions déposées le 05 août 2020, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, le cabinet Minard, a interjeté appel incident partiel du jugement.
Par ordonnance du 16 janvier 2023, le conseiller de la mise en état :
– s’est déclaré incompétent au profit de la cour d’appel de Paris sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir du syndicat du [Adresse 1],
– s’est déclaré incompétent au profit de la cour d’appel de Paris sur la fin de non-recevoir tirée de l’article 564 du code de procédure civile (demande nouvelle du syndicat du [Adresse 1]),
– s’est déclaré compétent sur la fin de non-recevoir relative à l’intervention volontaire de M. [T] [D] ;
– a rejeté la fin de non-recevoir relative à l’intervention volontaire de M. [T] [D],
– a rejeté toute autre demande,
– dit n’y avoir lieu à indemnisation des parties au titre de l’article 700,
– a condamné la société ATFB aux dépens de l’incident et autorise Maître Aurélie Cagnard à recouvrer directement ceux dont il a été fait l’avance sans recevoir de provision en application de l’article 699 du code de procédure civile.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Vu les conclusions déposées le 2 décembre 2022, par lesquelles la société ATFB, appelante, demande à la Cour de :
– déclarer recevable l’appel de la Société ATFB, l’y déclarer bien fondée,
À titre liminaire,
– dire et juger que le SDC du [Adresse 1] est irrecevable pour défaut de qualité pour agir à former les demandes tendant à voir :
– condamner solidairement les défenderesses à restituer au local loué à la société ATFB sa destination d’origine,
– condamner solidairement les défenderesses à fermer l’établissement, ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, à compter de la signification du jugement à intervenir,
– ordonner l’expulsion de la société ATFB et de tous occupants de son chef des locaux loués, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision intervenir,
– condamner solidairement la société Gestiona et Mme [X] à verser ladite astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, étant ici rappelé qu’il lui appartient de diligenter ladite expulsion,
– dire et juger que le SDC du [Adresse 1] est irrecevable à demander la somme de 150.000 euros en ce que ces demandes sont nouvelles,
– dire et juger irrecevable l’intervention volontaire de Monsieur [T] [D],
Sur le fond,
– infirmer le jugement entrepris,
– dire et juger n’y avoir lieu ni à acquisition de la clause résolutoire, ni à résiliation du bail, ni à expulsion de la Société ATFB,
– dire et juger que la société ATFB pourra, à bon droit, continuer à occuper et exploiter les lieux, en qualité de locataire légitime,
– dire et juger n’y avoir lieu à condamnation de ATFB ni au bénéfice de Madame [X], ni à celui du Syndicat des copropriétaires,
– déclarer le Syndicat mal fondé en son appel incident,
– débouter le Syndicat de toutes ses demandes,
– débouter Monsieur [D] de toutes ses demandes,
– condamner le Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7] à verser la somme de 20.000 euros à la société ATFB au titre de la réparation de son préjudice,
– condamner le Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7] à verser la somme de 5 000 euros à la société ATFB au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [D] à verser la somme de 1.500 euros à la société ATFB au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner le Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] et Monsieur [D] aux entiers dépens de première instance et d’appel dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Laurence Taze-Bernard conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Vu les conclusions déposées le 05 décembre 2022, par lesquelles Mme [S] [X] née [G] et la société Gestiona, intimées, demandent à la Cour de :
– déclarer la société Gestiona en sa qualité de mandataire et Mme [X] en sa qualité de bailleresse, recevables et bien fondés en leur conclusions, et demandes ;
À titre liminaire,
– dire et juger le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, le cabinet Minard, irrecevable à demander la somme de 150.000 euros, s’agissant d’une prétention nouvelle, et l’en débouter,
– dire et juger irrecevable l’intervention volontaire de M. [D], et l’en débouter,
Sur le fond,
– dire et juger le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, le cabinet Minard mal fondés en son appel incident et ses demandes, et l’en débouter,
– dire et juger M. [D] [T] mal fondé en son intervention volontaire et ses demandes, et l’en débouter,
En conséquence,
– confirmer le jugement rendu le 21 janvier 2020 par le tribunal judiciaire de Paris en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu’il a débouté le Syndicat des Copropriétaires de sa demande indemnitaire d’un montant de 100.000 euros en réparation d’un trouble de voisinage, en ce qu’il a fixé le montant du préjudice subi à la somme de 1000 euros et en ce qu’il a accueilli la demande de garantie formulée par Mme [X] à l’égard de la société AFTB pour la condamnation de Mme [X] à payer in solidum la somme de 1.000 euros,
– dire et juger que la société Gestiona en sa qualité de mandataire et Mme [X] en sa qualité de bailleresse ne formulent aucune demande à l’encontre de la société AFTB,
– débouter le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, le cabinet Minard de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– débouter M. [T] [D] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
En tout état de cause,
– condamner le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, le cabinet Minard à payer à la société Gestiona et à Mme [X] la somme de 4.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [T] [D] à payer à la société Gestiona et à Mme [X] la somme de 1.500 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner le Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, le cabinet Minard aux entiers dépens de première instance et d’appel dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Anne Fitoussi conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Vu les conclusions déposées le 29 novembre 2022, par lesquelles le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, le cabinet Minard, et M. [T] [D], intimés à titre principal et appelants à titre incident, demandent à la Cour de :
– recevoir le syndicat des copropriétaires en sa constitution d’intimé et en son appel incident et le déclarer bien fondé,
– recevoir M. [T] [D] en son intervention volontaire et le déclarer bien fondé en ses demandes, fins et conclusions,
– débouter la société ATFB – La Bringue de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– débouter Mme [X] et la société Gestiona de toutes ses demandes contraires,
– INFIRMER le jugement du 21 janvier 2020 en ce qu’il a :
– dit et jugé que l’exploitation dans les locaux loués d’une activité d’épicerie fine, caviste, salon de thé, bar, petite restauration sans extraction » ne constitue pas un changement de destination contraire au règlement de copropriété,
– débouté en conséquence le syndicat des copropriétaires de sa demande de condamnation de la société ATFB, de Mme [X] et de la société Gestiona à restituer au local sa destination d’origine ;
– débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de fermeture de l’établissement en cause sous astreinte ;
– condamné in solidum la société ATFB et Mme [X] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 euros au titre du préjudice subi du fait de leur résistance abusive à faire cesser le trouble de voisinage ;
– débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts à l’encontre de la société Gestiona ;
– condamné la société ATFB à garantir Mme [X] de la condamnation au paiement de 1.000 euros au syndicat des copropriétaires prononcé à son encontre ;
– CONFIRMER le jugement du 21 janvier 2020 en ce qu’il a :
– déclaré recevable et régulière l’intervention volontaire du syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 1] ;
– constaté l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation depuis le 11 mars 2016 du bail du 1er février 2015 liant Mme [X] et la société ATFB et portant sur les locaux sis [Adresse 1] à [Localité 7] ;
– ordonné l’expulsion de la société ATFB et de tous occupants de son chef, en cas de non restitution volontaire des lieux trois mois après un commandement de quitter les lieux, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier si besoin est ;
– dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu’à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l’exécution, ce conformément aux dispositions légales ;
– rejeté les demandes des société ATFB, Gestiona et de Mme [X] contraires aux intérêts du syndicat des copropriétaires ;
– ordonné l’exécution provisoire ;
Statuer à nouveau et :
– dire et juger l’intervention volontaire du syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, le cabinet Minard parfaitement recevable,
– le recevoir en ses demandes, fins et conclusions et le déclarer bien fondé,
– constater l’absence d’autorisation préalable de l’assemblée générale des copropriétaires,
– constater que le changement de destination entrepris contrevient au règlement de copropriété, à la destination de l’immeuble et a généré de nouvelles sujétions de voisinage,
– condamner solidairement les défenderesses à restituer au local loué à la société ATFB sa destination d’origine,
– condamner solidairement les défenderesses à fermer l’établissement, ce sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, à compter de la signification du jugement à intervenir,
– ordonner l’expulsion de la société ATFB et de tous occupants de son chef des locaux loués, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision intervenir,
– condamner solidairement la société Gestiona et madame [X] à verser ladite astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, étant ici rappelé qu’il lui appartient de diligenter ladite expulsion,
– constater le trouble anormal du voisinage généré par la société ATFB,
– condamner solidairement les défenderesses à verser 150 000 euros au syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic, le cabinet Minard en réparation du préjudice subi par les copropriétaires du fait de ce trouble anormal, de leur résistance abusive et de leur intention de nuire,
– condamner solidairement [S] [X], la société Gestiona et la société ATFB à verser 50.000 euros à M. [T] [D] en réparation de son préjudice subi du fait de ce trouble anormal, de leur résistance abusive et de leur intention de nuire,
– les condamner solidairement au paiement de la somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Me Cagnard.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties. Cependant, pour une meilleure compréhension du présent arrêt, leur position sera synthétisée.
In limine litis,
Sur la qualité à agir du Syndicat,
La société ATFB, appelante, expose :
sur l’irrecevabilité des demandes du Syndicat, qu’une fin de non recevoir tirée du défaut de qualité pour agir du Syndicat peut être soulevée, que l’action oblique est irrecevable en ce que Mme [X] et la société Gestiona, débitrices, ont réalisé des diligences en mettant en demeure la société ATFB en décembre 2015 et en lui notifiant un commandement visant la clause résolutoire le 11 février 2016,
sur l’action oblique, qu’il ressort d’une jurisprudence constante qu’il est nécessaire d’établir l’inaction du débiteur et que la justification de diligences réalisées par le débiteur prive de tout fondement le recours à l’action oblique du créancier (Cass. Civ. 1Ère, 5 avr. 2005, n°02-21.011), que le syndicat ne rapporte pas la preuve d’une créance liquide et exigible à l’égard du bailleur, étant précisé que toutes les sommes lui ont été réglées en première instance, que le respect des obligations autres que monétaires n’entre pas dans le champ d’application des créances de nature à justifier une action oblique, que Mme [X] et la société Gestiona ont bien mis en demeure la concluante en décembre 2015, lui notifiant par ailleurs un commandement visant la clause résolutoire le 11 février 2016, que ce faisant, celles-ci ont accompli des diligences nécessaires excluant la carence du bailleur, que les bailleresses ont renoncé à l’acquisition de la clause résolutoire dès lors que la concluante s’est mise en conformité avec les exigences du bail, a payé les loyers appelés et qu’un avenant au contrat de bail a été signé entre les parties, que le bailleur reste maître des droits dont il dispose, que pour ces raisons, Mme [X] née [G] et la SARL GESTIONA ne formulent plus aucune demande à l’égard de la société ATFB, que la bailleresse renonce à l’acquisition de la clause résolutoire.
Mme [S] [X] née [G] et la société Gestiona, intimées, exposent :
sur le défaut de qualité pour agir du Syndicat, qu’elles s’en rapportent à justice s’agissant du droit à agir du Syndicat pour solliciter la fermeture de l’établissement exploité par la société ATFB et son expulsion, qu’elles contestent toutefois l’allégation du Syndicat selon laquelle celui-ci agirait en raison de leur carence, que le Syndic n’a transmis à la société GESTIONA aucune plainte, ni réclamation de la part de la copropriété de 2019 à 2022, que la société Gestiona a mis en demeure la preneuse le 23 décembre 2015 de cesser toute nuisance et troubles à l’égard de la copropriété et lui a fait délivrer le 11 février 2016 un commandement visant la clause résolutoire.
Sur l’irrecevabilité des demandes nouvelles su Syndicat,
La société ATFB, appelante, expose que le SDC demande désormais la somme de 150.000 euros en réparation du préjudice subi alors que ses demandes étaient de 100.000 euros en première instance.
Mme [S] [X] née [G] et la société Gestiona, intimées, exposent que le Syndicat a augmenté le montant du préjudice sollicité à hauteur de 150.000 euros au lieu de 100.000 euros en première instance ; que cette demande est une demande nouvelle en cause d’appel qui doit être considérée comme irrecevable, que le SDC ne détaille pas les chefs de préjudices, ni ne les rattache à tel ou tel copropriétaire, de sorte que la Cour ne sera donc pas en mesure apprécier s’il s’agit de nouveaux chefs de préjudices, liés ou non à des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, fondés ou non sur le même fait générateur, que la Cour de cassation a retenu que la demande de réparation de nouveaux postes de préjudices en appel est irrecevable car la demande est nouvelle (Cass. 2ème civ. 30 juin 2011, n° 10-23.537).
Le Syndicat des copropriétaires ne répond pas à ces fin de non-recevoir dans ses conclusions au fond.
Sur la recevabilité de l’intervention volontaire de M. [D],
L’appelante expose que M. [D] n’est pas intervenu en première instance et qu’il ne se justifie pas de cette absence ; qu’il ressort d’une jurisprudence constante et ancienne que doit être déclarée irrecevable l’intervention volontaire en cause d’appel si elle a pour objet de présenter des demandes de condamnations personnelles qui n’ont pas fait l’objet d’un examen en première instance (Cass. Com., 22 octobre 1996 – n° 94-10.365.
Le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et M. [T] [D], intimés, exposent que ce dernier a intérêt à intervenir à l’instance dès lors qu’il habite au-dessus de l’établissement bruyant.
Mme [S] [X] née [G] et la société Gestiona, intimées, exposent que M. [D] est irrecevable à agir en cause d’appel dès lors que l’intervention volontaire ne peut pas permettre à un intervenant de soumettre un nouveau litige et de présenter des demandes de condamnations personnelles qui n’ont pas fait l’objet d’un examen en première instance (Cass. civ 2e., 2 juillet 2009, n°08-14.156 – CA Versailles, 12ème Chambre, Section 2, 15 mars 2016, n°15/01484 ‘ CA Paris, Pôle 4, Chambre 2, 14 février 2018, n°16/17912) ; que M. [D] n’est jamais intervenu en première instance et n’a formulé aucune demande en dommages et intérêts en réparation de son éventuel préjudice personnel.
Sur le fond,
Sur la conformité au règlement de copropriété de l’activité prévue au bail,
L’appelante expose que l’activité de petite restauration ou de bar est autorisée par le règlement de copropriété et ne constitue aucunement un changement de destination du lot ;
Le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et M. [T] [D], intimés, exposent que les stipulations du règlement de copropriété sont obligatoires pour les copropriétaires et leurs locataires, que la bailleresse et son mandataire ont délivré un bail dont la destination était interdite par le règlement de copropriété de l’immeuble, lequel interdit de nuire aux droits des autres copropriétaires, que les propriétaires et occupants devront veiller à ce que la tranquillité de l’immeuble ne soit à aucun moment troublée par leur fait, celui des personnes de leur famille, leurs invités ou les gens à leur service, qu’il ne pourra être exploité dans ces locaux de commerce qui puisse gêner, soit par le bruit, soit par l’odeur les autres copropriétaires, notamment boucherie, poissonnerie et triperie, que l’état descriptif de division fait état d’une attribution de « boutique » au lot loué, que le changement de destination du lot appartenant à Madame [S] [X] est contraire à la destination de l’immeuble, que Mme [X] n’a pas effectué suffisamment de diligences et a fait preuve d’une résistance abusive constitutive d’une intention de nuire à la copropriété ;
Mme [S] [X] née [G] et la société Gestiona, intimées, exposent que l’article 10.1 du bail stipule que « si des nuisances, notamment des bruits, odeurs ou trépidations étaient causées par le preneur, sa clientèle ou des appareils lui appartenant, et plus généralement du fait de son occupation des locaux loués et que celle-ci entraîneraient des réclamations par les autres occupants de l’immeuble, les voisins ou les tiers, le preneur devrait alors en faire son affaire personnelle à ses risques, périls et frais, sans que le bailleur ne puisse jamais être inquiété ni recherché à ce sujet », que les parties ont accepté de modifier, par avenant, la destination du local commercial pour limiter les problèmes de voisinage, l’activité commerciale dans les locaux après minuit étant désormais interdite.
Sur les troubles anormaux du voisinage subis depuis février 2015,
L’appelante expose qu’elle a effectué les démarches nécessaires dès 2015 afin de réduire au maximum la gêne occasionnée, qu’elle a fait réaliser de nouveaux travaux, par l’installation de régulateurs sonores, permettant d’augmenter l’isolation entre le commerce et l’appartement du premier en suivant les recommandations de l’expert judiciaire, qu’elle n’est pas à l’origine d’un trouble lié à des nuisances olfactives dès lors que le bail autorisait à l’origine le service de plats chauds et prohibait leur cuisson dans les locaux, ce qu’elle a toujours respecté, que les nuisances sonores ne peuvent lui être imputées en ce que les données relatives au rapport d’expertise sont erronées, qu’en tout état de cause, le Syndicat ne démontre pas l’existence d’un préjudice direct et personnel tiré de l’existence d’un trouble du voisinage, qu’en effet le Syndicat n’a pas qualité pour demander réparation des préjudices personnels des copropriétaires.
Le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] et M. [T] [D], intimés, exposent que la preneuse exploite un véritable restaurant, avec terrasse, midi et soir, organisant des soirées bruyantes, jusqu’à des heures tardives, avec des attroupements sur le trottoir devant la porte d’entrée de l’immeuble et en bas des fenêtres des copropriétaires ; que le gérant de la société ATFB a eu une attitude agressive à l’endroit des copropriétaires, que des aliments ont été stockés dans les parties communes, que des nuisances olfactives résultent de l’activité de restauration, précisant que des aliments nécessitant une cuisson y ont été servis et que la cuisine est équipée pour la cuisson, que des nuisances sonores proviennent de la salle de l’établissement ainsi que de la terrasse et des tables installées sur la terrasse ouverte de l’établissement, que l’autorisation de terrasse n’est pas respectée.
Mme [S] [X] née [G] et la société Gestiona, intimées, exposent qu’il n’est pas établi que les nuisances olfactives persistent ou demeurent imputables à la société ATFB, les nuisances olfactives pouvant être issues d’autres sources, qu’aucun autre copropriétaire que M. [D] ne s’est plaint en cours d’expertise de nuisances sonores, que les documents versés aux débats attestant de nuisances n’ont pas été établis de manière contradictoire, que le Syndicat ne rapporte pas la preuve d’un préjudice direct, certain et propre, différent du préjudice subi personnellement et éventuellement par chacun des copropriétaires, qu’elles ont accompli des diligences en ce que la société Gestiona a mis en demeure la preneuse le 23 décembre 2015 et lui a fait délivrer un commandement visant la clause résolutoire le 11 février 2016, que certaines pièces versées aux débats n’ont pas été portées à leur connaissance, faisant ainsi preuve de mauvaise foi et de déloyauté, que M. [D] n’apporte aucun élément objectif permettant de chiffrer son préjudice personnel.
Motifs de l’arrêt :
Sur la recevabilité des demandes du SDC du [Adresse 1] :
Il résulte de l’article 325 du code civil que l’intervention n’est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.
Les 11 février 2016, la bailleresse a fait délivrer à la société ATFB un commandement visant la clause résolutoire d’avoir à se mettre en conformité avec la législation en ce qui concerne le volume de ses émissions sonores, la suppression de toute cuisson, la justification d’une autorisation de la commune de [Localité 7] pour l’utilisation de la terrasse ; le bail concernant notamment une activité de petite restauration sans extraction et faisant obligation au preneur d’éviter toute activité bruyante ou insalubre, de se conformer au règlement de copropriété ainsi qu’ à la réglementation et aux prescription administratives.
Le 1er mars 2016, la société ATFB a assigné la bailleresse en nullité du commandement et en demande de dommages et intérêts. La bailleresse sollicitait pour sa part la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire et l’expulsion du preneur.
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] est intervenu volontairement à l’instance pour demander notamment la fermeture de l’établissement, que le local loué soit restitué à sa destination d’origine, constater le trouble anormal de voisinage au préjudice des copropriétaires et demander réparation aux motifs que le preneur avait mis en place un véritable restaurant avec cuissons générant des odeurs incommodantes, avec une terrasse, organisait des fêtes bruyantes et tardives et ce faisant, violait la destination de son lot au mépris tant du règlement de copropriété que du bail.
Il convient donc de constater que les demandes du bailleur et du syndicat des copropriétaires tendaient notamment à la même fin d’éviction du preneur sur les mêmes motifs d’irrespect de la destination des locaux fixé tant par le bail que par le règlement de copropriété. Dès lors, les demandes du syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] se rattachent aux prétentions des parties par un lien suffisant et sont recevables. Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.
Sur l’irrecevabilité de l’intervention volontaire de Monsieur [T] [D] :
À l’audience, la S.A.S.U. ATFB, Mme [X] et la SARL GESTIONA ne soutiennent plus cette prétention résultant du dispositif de leurs conclusions récapitulatives. Toutefois, la cour rappellera que cette question a été définitivement tranchée par l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 16 janvier 2023 qui a rejeté la fin de non-recevoir relative à l’intervention volontaire de M. [T] [D]. Cette ordonnance n’a pas fait l’objet d’un recours et revêt l’autorité de la chose jugée.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la nouveauté de la demande du SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES :
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] sollicitait en première instance la condamnation solidaire des défenderesses à lui verser 100.000 euros en réparation du préjudice subi par les copropriétaires « du fait de ce trouble anormal, de leur résistance abusive et de leur intention de nuire ». À hauteur d’appel, il sollicite la condamnation solidaire des défenderesses à lui verser 150.000 euros en réparation du préjudice subi par les copropriétaires toujours « du fait de ce trouble anormal, de leur résistance abusive et de leur intention de nuire ». Il y a lieu de constater que la prétention formée en appel se rattache aux mêmes chefs de préjudices et aux mêmes fondements qu’en première instance et que seule l’appréciation du quantum faite par le syndicat des copropriétaires de son préjudice allégué a été modifiée, l’évaluation du préjudice étant une question de fond.
La fin de non-recevoir tirée du caractère nouveau de la demande sera donc rejetée.
Sur le changement de destination du local en violation du règlement de copropriété :
Le règlement de copropriété ne prohibe pas l’exercice du commerce au sein de la copropriété et l’état descriptif de division indique que le lot loué à la S.A.S.U. ATFB est à usage de boutique. Le règlement de copropriété stipule cependant que les locaux de commerce ne doivent pas gêner les copropriétaires par le bruit ou l’odeur, notamment boucherie, poissonnerie et triperie.
La S.A.S.U. ATFB justifie avoir fait réaliser des travaux d’isolation acoustique dans les locaux loués et produit des rapports du bureau d’études acoustiques « acoustics solutions » concluant que les gains d’isolement obtenus correspondent désormais aux préconisations faites par l’expert judiciaire. Elle justifie également d’une autorisation de terrasse de la ville de [Localité 7].
Le nouvel avenant au bail du 28 juillet 2020 stipule que les parties, dans le but de limiter les problèmes de voisinage et de mettre fin aux plaintes des occupants de l’immeuble, ont accepté de modifier la destination du local commercial pour la limiter aux seules activités suivantes :
épicerie fine, caviste, salon de thé, bar, vente à emporter de petite restauration sans extraction ;
vente sur place uniquement de plats froids ne nécessitant aucune cuisson tels que salades, carpaccios, ceviches, tartares, charcuteries, fromages, sandwichs, le seul moyen de cuisson permis sur place étant le four à micro-ondes ;
boutique de vente au détail d’article de vêtement et d’équipement de la personne.
Il a également été convenu qu’aucune activité commerciale n’est permise dans les locaux la nuit après minuit.
La locataire produit ses nouvelles carte de menus conformes à la destination susvisée ainsi que le constat de Me [N], huissier de justice, du 5 juin 2019 faisant apparaître que les plaques de cuisson et l’extraction dans la cuisine avaient été déposées.
Ainsi, les activités prévues au bail ne peuvent être considérées par nature comme impliquant l’émission de bruits ou d’odeurs gênantes et ne constituent pas une modification de la destination du lot sans autorisation de la copropriété, contrevenant aux dispositions du règlement de copropriété. Le jugement entrepris sera ainsi confirmé sur ce point.
Dès lors, il n’y a pas lieu de condamner solidairement la bailleresse et sa locataire à restituer au local loué à la société ATFB sa destination d’origine ni d’ordonner la fermeture de l’établissement.
Sur l’acquisition de la clause résolutoire et ses conséquences :
Il résulte des articles 1341-1 du code civil que « lorsque la carence du débiteur dans l’exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement rattachés à sa personne ». En outre, l’article 2059 code civil dispose que toutes personnes peuvent compromettre sur les droits dont elles ont la libre disposition. Enfin, selon l’article 12 code de procédure civile le juge est lié par l’accord exprès des parties portant sur les droits dont elles ont la libre disposition.
En l’espèce, le syndicat des copropriétaires n’allègue ni ne démontre l’existence d’une créance certaine, liquide et exigible d’un montant déterminé à l’encontre de Mme [X] et ne conteste pas que toutes les sommes étant dues par cette dernière lui ont été réglées. En outre, la bailleresse avait mis en demeure la société ATFB, par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 décembre 2015, délivré quatre commandements les 11 février 2016, 12 mai 2017, 17 octobre 2017 et 26 avril 2018 à sa locataire afin qu’elle se conforme à ses obligations. Elle a ensuite notamment sollicité en première instance le constat par le tribunal de l’acquisition de la clause résolutoire, l’expulsion de la société ATFB et une indemnité d’occupation. Depuis, il n’est pas contesté que la société ATFB s’est acquittée de l’ensemble des sommes dues à la bailleresse. Il ne saurait donc être fait grief à Mme [X] de sa carence dans l’exercice de ses droits patrimoniaux. Dès lors, le syndicat des copropriétaires n’est pas fondé à solliciter le constat de l’acquisition de la clause résolutoire et l’expulsion de la locataire.
Après le prononcé du jugement de première instance du 21 janvier 2020, Mme [X] et la S.A.S.U. ATFB ont mis fin à leur différend par un protocole du 28 juillet 2020 et ont établi un avenant au bail qui conserve ainsi ses effets, la bailleresse renonçant par ailleurs expressément à hauteur d’appel à ses demandes aux fins de résolution du bail et d’expulsion.
Ainsi, l’acquisition de la clause résolutoire n’a pas à être constatée dans la mesure où cette demande n’est plus soutenue à hauteur d’appel et qu’il est au contraire demandé la réformation du jugement entrepris sur ce point aux vus de l’accord des parties.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ses dispositions relatives à l’acquisition de la clause résolutoire et ses conséquences, à savoir l’expulsion de la locataire, le sort des meubles et l’indemnité d’occupation. En outre, la cour constate que la résiliation judiciaire n’est sollicitée par aucune partie.
Sur la demande de réparation du préjudice subi par les copropriétaires :
Le premier juge a relevé à juste titre que le préjudice des copropriétaires est distinct de celui du syndicat, lequel ne peut demander réparation du préjudice subi personnellement par chaque copropriétaire à raison du trouble anormal de voisinage. Le preneur, la bailleresse et son mandataire ont été amenés à faire valoir légitimement leurs droits dans le cadre de la présente procédure. Ils ont modifié le bail de sorte à s’assurer de sa parfaite conformité au règlement intérieur. Les mesures nécessaires ont été prises pour réduire le volume des émissions sonores de l’établissement ainsi que supprimer la cuisson à l’exception du réchauffage. Le preneur justifie également d’une autorisation de la commune de [Localité 7] pour l’utilisation de la terrasse. Il ne saurait donc être inféré de ces éléments la caractérisation d’un résistance abusive ou d’une intention de nuire et le syndicat des copropriétaires sera dès lors débouté de sa demande.
Sur la demande de réparation du préjudice de M. [D] :
Il résulte de l’article 1240 du code civil que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il ressort :
– du rapport d’enquête de l’inspecteur de salubrité de la ville de [Localité 7] du 28 juillet 2015 et du 12 octobre 2015, la diffusion de musique amplifiée dans l’établissement, porte et devanture ouvertes en été et fermées en hiver ;
– du rapport d’enquête de l’inspecteur de salubrité de la ville de [Localité 7] du 21 décembre 2015 que la cuisine du restaurant était équipée à l’époque de deux plaques de cuisson et d’un four et que l’air vicié était rejeté dans la cour intérieure par la porte et la fenêtre de la cuisine ;
– du procès-verbal de constat établi par Me [C], huissier de justice, le 8 octobre 2016 entre 22h et 23h qu’à l’extérieur des clients sont amassés devant le restaurant en train de discuter, de rire et de se faire servir des boissons et du vin, et qu’à l’intérieur des clients sont attablés et consomment un plat de pâtes gratinées et des bricks, lesquels nécessitent une cuisson et impliquent donc l’installation d’une extraction si l’on veut éviter les odeurs ;
– du rapport de l’expert judiciaire, M.[L] du 2 mars 2018 que la cuisine était équipée, outre des deux micro-ondes, d’un four et d’une plaque chauffante, ainsi que d’un système d’extraction en état de marche, que l’isolement entre les locaux loués et l’appartement du 1er étage occupé par M. [D] était insuffisant et que le limiteur de bruit qui a été installé n’était pas conforme aux dispositions réglementaire en matière de locaux recevant du public. En outre, l’expert a constaté que les bruits nocturnes en terrasse présentaient un niveau de 70 db(A), perçues dans la chambre de M. [D], fenêtres en double vitrage fermées à 31 dB, soit 3 db au-dessus du seuil de tolérance réglementaire, ce qui caractérise selon l’expert un trouble anormal de voisinage ;
– du procès-verbal de constat établi par Me [J], huissier de justice, le 13 juin 2019 à 22h40, que de nombreuses personnes se trouvaient debout dans la rue, un verre à la main, certaines devant la porte cochère de l'[Adresse 1], que dans l’appartement du 1er étage occupé par M. [D], les nuisances sonores étaient très importantes résultant de voix, de cris, de rires, et que même après avoir fermé les fenêtres à double vitrage, qu’on entend clairement les discussions, que le restaurant proposait, notamment, des brochettes de poulet, des croque-monsieur et du confit de canard, tous plats qui supposent une cuisson générant des nuisances olfactives.
Les troubles ci-dessus décrits et qui ne sont pas conformes à la destination du bail résultent du fait exclusif de la S.A.S.U. ATFB, sans qu’il ne puisse être reproché à la bailleresse ou à sa mandataire une carence ou une négligence comme déjà considéré.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que sur une période de quatre années M. [D] a subi un trouble persistant et particulièrement intense. Il conviendra donc de condamner la S.A.S.U. ATFB à lui verser la somme de 30.000 € en réparation de son préjudice.
Sur la demande de dommages-intérêts formée à l’encontre du Syndicat des Copropriétaires :
S’il est exact que le préjudice de chaque copropriétaire est distinct de celui du syndicat, lequel ne pouvait utilement demander réparation du préjudice causé par le trouble anormal de voisinage ou se substituer au bailleur, la saisine de la justice ne constitue pas pour autant un abus de droit ou ne relève pas manifestement d’une intention malveillante en ce que les nuisances reprochées à la preneuse sont par ailleurs avérées.
La S.A.S.U. ATFB sera donc déboutée de sa demande.
Sur les demandes de « constater », « juger » et « dire » :
Par application de l’article 954 du code de procédure civile , la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions. Il n’y a donc pas lieu de statuer sur les demandes tendant à voir « constater », « dire » ou « juger » qui ne constituent pas des prétentions mais ne sont en réalité que le rappel de moyens invoqués.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
La décision de première instance sera confirmée en ses dispositions sur les dépens et la S.A.S.U. ATFB sera en outre condamnée à supporter les dépens de l’appel en application de l’article 696 du code de procédure civile. En outre, il apparaît équitable de laisser aux parties la charge de leurs frais irrépétibles de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
REJETTE la fin d »irrecevabilité portant sur l’intervention volontaire de M. [T] [D] ;
REJETTE la fin de non-recevoir tirée de la nouveauté de la demande du Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] ;
INFIRME le jugement du 21 janvier 2020 du tribunal judiciaire de Paris sauf en ce qu’il a :
déclaré recevable et régulière l’intervention volontaire du Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 1] ;
dit et jugé que l’exploitation dans les locaux loués d’une activité d’ « épicerie fine, caviste, salon de thé, bar, petite restauration sans extraction » ne constitue pas un changement de destination contraire aux dispositions du règlement de copropriété ;
débouté en conséquence, le Syndicat des copropriétaires de sa demande de condamnation de la société ATFB, de Mme [X] et de la société Gestiona à restituer au local sa destination d’origine ;
débouté le Syndicat des copropriétaires de sa demande de fermeture de l’établissement en cause sous astreinte ;
débouté le Syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts à l’encontre de la société Gestiona ;
condamné la société ATFB aux entiers dépens de l’instance.
Statuant à nouveau,
DIT n’y avoir lieu ni à constater l’acquisition de la clause résolutoire ;
DÉBOUTE le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] de sa demande de dommages-intérêts formée contre la S.A.S.U. ATFB, Mme [S] [X] née [G] et la SARL Gestiona ;
CONDAMNE la S.A.S.U. ATFB à payer à M. [T] [D] la somme de 30.000 € en indemnisation de son préjudice ;
DÉBOUTE la S.A.S.U. ATFB de sa demande de dommages-intérêts formée à l’encontre du Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] ;
Y ajoutant,
CONDAMNE la société ATFB aux entiers dépens de l’appel ;
LAISSE aux parties la charge de leurs frais irrépétibles de première instance et d’appel ;
REJETTE les autres demandes.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE