Saisine du juge de l’exécution : 30 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01856

·

·

Saisine du juge de l’exécution : 30 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01856

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

1ère chambre 1ère section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 63B

DU 30 MAI 2023

N° RG 21/01856

N° Portalis DBV3-V-B7F-UMOJ

AFFAIRE :

[Z] [X] divorcée [J]

C/

S.A.S. ID FACTO

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Mars 2019 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 17/04928

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES,

-Me Virginie BADIER- CHARPENTIER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TRENTE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame [Z] [X] divorcée [J]

née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 6] (TUNISIE)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Armelle SIMON substituant Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 2165565

APPELANTE

****************

S.A.S. ID FACTO, venant aux droits de la société [S] [W] ET [Y] (RCS EVRY 494655300)

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 835 200 411

[Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par Me Virginie BADIER-CHARPENTIER, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 509

Me Laurent DEVAUX, avocat – barreau de PARIS, vestiaire : B0522

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 16 Mars 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anna MANES, Présidente chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anna MANES, Présidente,

Madame Pascale CARIOU, Conseiller,

Madame Sixtine DU CREST, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [Z] [X], divorcée [J], a conclu le 22 décembre 2006 avec la société Bati Renov 91 un contrat de construction pour un montant de 250 000 euros toutes taxes comprises sur un terrain situé sur le territoire de la commune de [Localité 7] (Hauts-de-Seine).

Ce contrat prévoyait, en particulier, que les travaux devaient être réalisés dans un délai de 10 mois à compter du 2 janvier 2007 et qu’en cas de retard des pénalités d’un montant de 150 euros par jour calendaire seraient dues. Un référé préventif ayant été nécessaire, le chantier n’a en réalité pu démarrer qu’à compter du 10 juillet 2007, date du dépôt du rapport de l’expert désigné.

À l’issue d’un différend opposant les cocontractants, en particulier sur les délais pris par la société Bati Renov 91 pour exécuter les travaux, ils ont signé un protocole d’accord le 1er février 2012 énumérant les travaux restant à réaliser et prévoyant que la société Bati Renov 91 s’exécuterait avant le 15 mai 2012 et que, par dérogation expresse aux règles fixées dans le marché de travaux, les pénalités de retard seraient dues à compter du 1er juin 2012 à concurrence de 500 euros par jour de retard, sauf retard dû à la force majeure ou au fait d’un tiers. Il précisait également le montant dû par Mme [X] une fois les travaux achevés et la réception prononcée ainsi que le montant des pénalités de retard dû par la société Bati Renov 91 au jour de la signature du protocole (article 4). Les modalités de versements des pénalités par la société Bati Renov 91 et du montant des travaux par Mme [X] (article 5) étaient également envisagées. Des sanctions en cas de non respect du protocole par la société Bati Renov 91 (article 9) étaient énoncées.

Par ordonnance du 23 février 2012, le tribunal de grande instance de Nanterre a rendu ce protocole exécutoire.

Le 12 mai 2014, Mme [X] a saisi la société d’exercice libéral à responsabilité limitée [S] [W] et [Y], aux droits de laquelle vient désormais la société ID Facto (ci-après ainsi désignée), huissier de justice, de l’exécution de ce protocole en indiquant qu’une somme provisoire de 301 500 euros lui était due (soit 500 euros par jour du 1er juin 2012 au 12 mai 2014, donc 771 jours déduction faite de la somme de 54 000 euros déjà versée), montant arrêté provisoirement au 12 mai 2014.

L’huissier de justice a accusé réception de ce dossier le jour même.

Le 13 mai 2014, la société ID Facto a signifié un commandement de payer la somme de 301 500 euros plus les frais à la société Bati Renov 91 (pièce 11 de l’intimée).

Le 15 mai 2014, la société ID Facto a informé Mme [X] de ses diligences et a sollicité les coordonnées du tiers auprès duquel une saisie pouvait être diligentée.

Le 16 mai 2014, Mme [X] lui a adressé les coordonnées de quatre clients de la société Bati Renov 91, en particulier M. [B] [P] (pièce 5 de Mme [X]). Elle l’invitait également à l’informer rapidement du déroulement de son affaire.

Le 16 mai 2014, la société ID Facto a accusé réception de ces informations, a précisé que sa demande de provision ne comportait que les frais pour une saisie et que si elle souhaitait que deux ou trois saisies soient effectuées simultanément, elle devrait lui faire parvenir la somme de 230 euros par saisie et confirmer cette demande par écrit (pièce 6 de l’appelante).

Le 19 mai 2014, Mme [X] a indiqué à la société ID Facto que la société Bati Renov 91 réalisait également quatre pavillons pour la société Architecture et Construction dont le gérant était M. [B] [P] en l’alertant sur des risques de fraude.

Puis, le 21 mai 2014 (pièce 7 de l’appelante), elle lui a confirmé sa demande de saisie envers cette société en lui précisant qu’elle entreprenait des investigations pour les autres clients de la société Bati Renov 91 dont elle avait communiqué les noms. Elle indiquait que la société Architecture et Construction pouvait envisager de se soustraire à cette saisie par le biais d’un paiement anticipé et antidaté à la société Bati Renov 91, voire mettre en place d’autres stratagèmes pour se soustraire à sa demande. Le jour même (pièce 7 bis de l’appelante), elle adressait un second courriel à la société ID Facto lui demandant de procéder à la saisie à l’encontre de la société Architecture et Construction située à [Localité 8], principale débitrice de son propre débiteur. Elle prenait acte de la demande de provision pour les saisies complémentaires.

Le 4 juin 2014, la société ID Facto a mis en oeuvre une saisie attribution entre les mains de la société Architecture et Construction (pièce 11 de l’appelante) et cette saisie-attribution a été dénoncée à la société Bati Renov 91 le 11 juin 2014 (pièce 11 de l’appelante). Cette saisie s’est avérée infructueuse, la société Architecture et Construction ayant indiqué qu’elle ne devait aucune somme à la société Bati Renov 91 (pièce 12 de l’appelante).

Le 15 juillet 2014, Mme [X] a indiqué à la société ID Facto qu’elle doutait de l’efficacité des actions menées jusqu’à présent et de la pertinence de ses conseils pour recouvrer sa créance. Elle lui a reproché de ne pas lui avoir adressé, malgré ses demandes, la facture détaillée des 800 euros adressés au titre de la provision ainsi que la liste des actions entreprises et de ne pas avoir répondu à ses nombreux appels durant les quatre semaines de congés de l’huissier de justice. Elle a affirmé que le temps des vacances de l’huissier de justice et l’abandon de son dossier durant celles-ci ont permis à son débiteur de s’organiser pour se soustraire à ses obligations après que le commandement de payer lui a été délivré. Elle a enfin mis un terme à la mission qui avait été confiée à la société ID Facto et demandé que son entier dossier, récapitulant les diligences et actes accomplis par celle-ci, soit transmis sans délai au conseil qu’elle avait désigné (pièce 8).

Invoquant des manquements de la société ID Facto dans l’exécution du protocole, par acte d’huissier de justice délivré le 7 août 2015, Mme [X] l’a assignée en responsabilité civile professionnelle devant le tribunal de grande instance d’Evry.

Par ordonnance du 23 mars 2017, le juge de la mise en état saisi par la société ID Facto sur le fondement de l’article 47 du code de procédure civile a renvoyé l’affaire devant le tribunal de grande instance de Versailles et réservé les dépens.

Par un jugement contradictoire rendu le 21 mars 2019, le tribunal de grande instance de Versailles :

– Déclare la demande irrecevable en tant que dirigée contre Mes [S], [W] et [Y] individuellement.

– La rejette à l’égard de la SCP [S], [W], [Y].

– Rejette la demande de cette dernière au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– Condamne Mme [Z] [J] aux dépens.

Mme [X] a interjeté appel de ce jugement le 19 mars 2021 à l’encontre de la SAS ID Facto.

Par conclusions notifiées le 17 juin 2021, Mme [X] a demandé au conseiller de la mise en état d’ordonner le sursis à statuer dans l’attente de la décision qui sera rendue par le juge d’instruction saisi de la plainte avec constitution de partie déposée par elle à l’encontre de M. [C], gérant de la société Bati Renov 91 pour des faits de banqueroute, de chantage et menaces sur ses biens et sa personne, pour collusion avec M. [P] gérant de la société Architecture et construction, pour abus de confiance et escroquerie.

Par une ordonnance d’incident rendue le 9 décembre 2021, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Versailles a :

– Déclaré recevable la demande de sursis à statuer de Mme [X] divorcé [J]

– Au fond, la rejeté

– Condamné Mme [X] divorcée [J] aux dépens de l’incident

Par ses dernières conclusions notifiées le 31 janvier 2023, Mme [X], divorcée [J], demande à la cour de :

– La déclarer recevable et fondé en son appel ;

Y faisant droit,

– Infirmer la décision entreprise, et statuant à nouveau,

– Dire que la société ID Facto, venant aux droits de la société [S] [W] et [Y] a commis des fautes et manquements dans l’accomplissement du mandat d’exécution et de recouvrement forcé qui lui a été confié ;

– Dire que ces fautes et manquements ont généré pour elle un préjudice constitué par la perte d’une chance de voir prospérer le recouvrement de tout ou partie de sa créance ainsi qu’un préjudice moral profond ;

Conséquemment,

– Condamner la société ID Facto venant aux droits de la société [S] [W] et

[Y] à lui payer la somme de 540 086 euros au titre de la perte de chance résultant de l’inertie de la société [S] [W] et [Y],

– Condamner la société ID Facto venant aux droits de la société [S] [W] et [Y] à lui payer la somme de 50 000 euros au titre du dommage moral et financier occasionné par les années de procédure ;

– Condamner la société ID Facto venant aux droits la société [S] [W] et [Y] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à raison des frais engagés pour la première et deuxième instance, ainsi

qu’aux entiers dépens de l’instance ;

– Dire que les dépens d’appel pourront être recouvrés directement conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par d’uniques conclusions notifiées le 10 septembre 2021, la société ID Facto demande à la cour de :

– Confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Versailles du 21 mars 2019 en toutes ses dispositions ;

A titre subsidiaire,

– Débouter Mme [X] épouse [J] (sic) de l’ensemble de ses prétentions ;

En toutes hypothèses,

– Condamner Mme [X] veuve [J] (sic) à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700, ainsi qu’en tous les dépens.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 16 février 2023.

SUR CE, LA COUR,

A titre liminaire et sur les limites de l’appel,

La cour rappelle que, conformément aux dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

Par ‘prétention’, il faut entendre, au sens de l’article 4 du code de procédure civile, une demande en justice tendant à ce qu’il soit tranché un point litigieux. Par voie de conséquence, les ‘dire et juger’ ne constituent pas des prétentions, mais en réalité des moyens qui ont leur place dans le corps des écritures, plus précisément dans la partie consacrée à l’examen des griefs formulés contre le jugement et à la discussion des prétentions et moyens, pas dans le dispositif. La cour ne répondra de ce fait à de tels ‘dire et juger’ qu’à condition qu’ils viennent au soutien de la prétention formulée en appel et énoncée au dispositif des dernières conclusions et, en tout état de cause, pas au dispositif de son arrêt, mais dans ses motifs.

Il s’ensuit que les points énoncés par Mme [X] au dispositif de ses dernières écritures tendant à ce que la cour ‘dise’ ne constituent pas des prétentions à trancher au dispositif de l’arrêt mais des moyens au soutien des demandes tendant à obtenir la condamnation de la société ID Facto au titre de sa responsabilité civile professionnelle, en réparation de la perte de chance alléguée, des préjudices moral et financier, en particulier.

Il ressort également du dispositif des conclusions de l’appelante que le jugement en ce qu’il déclare la demande de Mme [X] irrecevable en tant que dirigée contre Mes [S], [W] et [Y] individuellement n’est pas critiqué. Cette disposition est dès lors devenue irrévocable.

Sur la responsabilité de la société ID Facto

Les fautes alléguées

‘ Moyens des parties

Se fondant sur les dispositions des articles L. 122-2, L.117-7, L.152-1 du code des procédures civiles d’exécution, 1191, 1192 du code civil, sur différents arrêts rendus par la Cour de cassation, Mme [X] fait grief au jugement de rejeter ses demandes alors que :

* les silences réitérés des huissiers de justice à ses demandes ont provoqué la perte de confiance de sa part à leur égard alors que les diligences devaient être accomplies très rapidement après la délivrance du commandement de payer à la société Bati Renov 91 ;

* cette inaction de l’huissier de justice pendant deux mois, l’abandon de son dossier durant cette période, est à l’origine de ses préjudices ;

* les huissiers de justice n’ont pas vérifié les termes du protocole et le montant de sa créance alors qu’en leur qualité de professionnel du droit, il leur revenait de vérifier exactement ce qui lui était dû en application du protocole d’accord ;

* les liens d’amitié entre le gérant de la société Bati Renov 91 et celui de la société Architecture et Construction, leur collusion nécessitait une action rapide de la part de l’huissier de justice et si effectivement, la réponse du tiers saisi n’engage pas la responsabilité de ce mandataire, encore aurait-il fallu que la réponse de ce tiers saisi soit parvenue le plus rapidement possible au mandant afin que ce dernier envisage toute autre action et complète ses instructions ;

* la période estivale n’apparaît pas être une justification valable dès lors que l’étude est composée de trois huissiers de justice associés ;

* elle avait indiqué l’existence d’autres tiers saisis dans son courriel du 16 mai 2014 (pièce 5) dont son adversaire n’a tenu aucun compte faisant, selon elle, le strict nécessaire à savoir délivrer un commandement de payer une saisie-attribution et envoyer le dossier à l’avocat de la créancière un mois et demi après, fin août 2014, sans se soucier de l’effectivité de ses diligences ;

* l’huissier de justice n’a pas tenu informé son mandant et ne lui a pas proposé toute action de nature à permettre un recouvrement forcé, en présence d’un acte exécutoire, le commandement n’étant qu’un préalable ;

* la société ID Facto a, selon elle, commis de nombreuses fautes dans l’accomplissement du mandat de recouvrement qu’elle lui avait confié, notamment à son obligation d’information, d’efficacité, de prudence et de diligences, malgré les instructions, les injonctions et les interrogations de sa cliente ;

* l’action qu’elle a intentée contre la société Bati Renov 91 le 22 septembre 2014 pour obtenir du juge de l’exécution d’Evry la liquidation de son astreinte s’est soldée par un échec puisque cette dernière a été placée en liquidation judiciaire le 6 octobre 2014 (pièce 35) ; que la société ID Facto ne lui a pas conseillé une telle action dès le mois de mai 2014 alors qu’en le lui conseillant, elle aurait pu obtenir paiement auprès de la société Bati Renov 91 la privant de la possibilité d’organiser son insolvabilité ;

* la société ID Facto ne lui a pas plus conseillé d’agir au pénal contre le gérant de la société Bati Renov 91 ;

* les manquements au devoir de diligence de l’huissier de justice sont constitués puisqu’il est établi qu’il n’a pas informé son mandant des actions entreprises entre les mains de la société Architecture et construction le 4 juin 2014 de sorte que, ce faisant, il a privé le mandat de la possibilité de recouvrer tout ou partie de sa créance ; un délai de cinq mois s’est écoulé entre la formulation d’informations erronées par M. [P] pour le compte de la société Architecture et construction et le moment où le mandant en a eu pleine connaissance par l’envoi de la copie de la lettre de réponse du tiers saisi du 10 juin 2014 par l’étude [U] (pièces 13 et 13 bis) ; cette inertie l’a privée de la possibilité de mettre en oeuvre les dispositions de l’article R.211-5 du code des procédures civiles d’exécution qui auraient pu l’être puisque le rapport d’expertise (pièce 22) a conclu que les déclarations de la société Architecture et construction étaient frauduleuses et qu’informée trop tardivement, elle n’a pas pu agir puisque la société Architecture et construction avait entre temps transférer la somme de 47 000 euros à la société Bati Renov 91 contre laquelle plus aucune action n’aurait été possible à compter du 6 octobre 2014 du fait de son placement en liquidation judiciaire (pièce 22).

La société ID Facto poursuit la confirmation du jugement en ce qu’il écarte les fautes alléguées par son adversaire à son encontre. Elle relève que trois séries de fautes lui sont reprochées, à savoir, avoir délivré un commandement de payer une saisie attribution visant une astreinte et non des pénalités de retard, de ne pas l’avoir informé suffisamment rapidement des résultats de la saisie attribution et de ne pas avoir diligenté d’autres procédures. Elle observe qu’à hauteur d’appel, Mme [X] lui reproche également d’avoir délivrer une saisie attribution entre les mains de la société Architecture et construction au lieu de la délivrer entre les mains d’un autre tiers potentiel débiteur.

Elle observe n’avoir été en charge des intérêts de Mme [X] que durant deux mois d’été, durant lesquels elle a tenu parfaitement informé cette dernière des actes délivrés et de toutes les informations utiles.

Elle relève que le commandement de payer et la saisie attribution ont été infructueuses de sorte que naturellement elles n’ont pas pu avoir de suites favorables ce dont Mme [X] a été parfaitement et complètement informée. Elle souligne que Mme [X] affirme, sans preuve, qu’une collusion frauduleuse aurait existé entre la société Architecture et construction et la société Bati Renov 91 et qu’au jour des dernières écritures, elle ne démontre toujours pas le bien fondé de ses allégations. Elle ajoute avoir informé Mme [X] de la réponse, négative, du tiers saisi dans un délai parfaitement normal.

Elle s’étonne que Mme [X] lui reproche aujourd’hui de n’avoir tenté la saisie qu’entre les mains de la société Architecture et Construction alors qu’elle lui avait pourtant indiqué que cette société était le plus gros débiteur de la société Bati Renov 91 et donc le tiers susceptible de détenir les sommes les plus importantes pouvant être saisies.

Elle indique que l’erreur de motifs indiqués dans les actes de saisie pratiqués, mentionnant l’astreinte au lieu des pénalités de retard, est sans conséquence puisque les tiers saisis n’ont pas protesté ni contesté la régularité de ces actes.

Elle relève qu’elle n’aurait pu délivrer d’autres actes d’exécution envers d’autres tiers dans la mesure où les informations délivrées par Mme [X] étaient insuffisantes et n’auraient dès lors pas permis à l’huissier de justice d’opérer. En effet, selon l’intimée, la preuve de l’existence de dettes de la part de ces tiers envers la société Bati Renov 91 n’était pas rapportée. Elle souligne que les pièces produites par Mme [X] ne démontrent ni que d’autres tiers seraient débiteurs de la société Bati Renov 91, ni l’existence de factures émises par la société Bati Renov 91 à l’encontre de ces tiers, leur montant, la date de leur émission, le mode de règlement. Au reste, elle insiste sur le fait que durant les deux mois durant lesquels elle a été en charge du recouvrement, rien ne laissait penser que des tiers auraient pu détenir des sommes dues au débiteur.

‘ Appréciation de la cour

Il résulte des productions que, le 12 mai 2014, la société ID Facto a reçu mandat de Mme [X] pour recouvrer une créance qu’elle détenait à l’encontre de la société Bati Renov 91 par application d’un protocole d’accord signé entre les parties le 1er février 2012 et qu’elle a déchargé cette étude d’huissiers de justice de ce mandat le 15 juillet 2014. Il est donc constant que la société ID Facto a été en charge de ce mandat durant deux mois seulement.

Il est encore établi par les productions que :

* dès le 13 mai 2014, la société ID Facto a délivré un commandement de payer la somme de 301 500 euros plus les frais à la société Bati Renov 91 (pièce 11 de l’intimée) ;

* le 15 mai 2014, l’intimée a informé son mandant de ses diligences et a sollicité les coordonnées du tiers auprès duquel une saisie pouvait être diligentée ;

* le 16 mai 2014, Mme [X] lui a adressé les coordonnées de quatre clients de la société Bati Renov 91, en particulier M. [B] [P], message complété par plusieurs autres messages adressés les 16, 19 et 21 mai suivants (pièces 5, 6 et 7, 7bis), confirmant que M. [P], gérant de la société Architecture et Construction s’avérait être le principal débiteur de la société Bati Renov 91 et qu’elle demandait donc la saisie entre les mains de la société Architecture et Construction ; s’agissant des autres tiers, potentiels débiteurs de son propre débiteur, Mme [X] soulignait, le 21 mai 2014, qu’ ‘elle entrepre(nait) les investigations approfondies concernant les clients de la société Bati Renov 91 que je vous ai communiqués afin d’obtenir les précisions recherchées, indispensables au bon déroulement de notre action’ (pièce 7 bis) ;

* le 4 juin 2014, la société ID Facto a mis en oeuvre une saisie attribution entre les mains de la société Architecture et Construction (pièce 11 de l’appelante) et cette saisie-attribution a été dénoncée à la société Bati Renov 91 le 11 juin 2014 (pièce 11 de l’appelante) ; cette saisie s’est avérée infructueuse, la société Architecture et construction ayant indiqué qu’elle ne devait aucune somme à la société Bati Renov 91 (pièce 12 de l’appelante).

Il résulte encore des productions que la société ID Facto a informé Mme [X] de l’accomplissement de ses diligences :

* le 15 mai 2014, s’agissant du commandement de payer entre les mains de la société Bati Renov 91 (pièce 11 de l’appelante) ;

* le 16 mai 2014 en accusant réception de différentes informations transmises par sa mandante (pièces 5 et 6 de l’appelante).

Il apparaît également des pièces versées aux débats que le 10 juin 2014, la société Architecture et Construction avisait l’étude qui avait procédé à la saisie entre ses mains qu’elle ne devait plus rien à la société Bati Renov 91 (pièce 12 de l’appelante). Il ressort également des pièces versées aux débats (courriel de Mme [X] du 15 juillet 2014 pièce 8 de l’appelante) qu’elle a été informée de l’insuccès de cette démarche par la société ID Facto et qu’il lui a été rendu compte des actions menées, de leur déroulement, de leur issue durant la semaine du 7 au 11 juillet 2014. Il ressort encore de ces productions que son interlocuteur au sein de l’étude de l’huissier de justice mandataire avait pris des congés, à compter de la mi juin 2014 pour quatre semaines, et que Mme [X] déplorait que durant ces congés aucune réponse à ses multiples sollicitations n’avait été fournie.

Le 15 juillet 2014, le mandat prenait fin à l’instigation de Mme [X] qui estimait de piètre qualité les diligences de son mandant et que son peu d’entrain à exécuter sa mission avait permis à son débiteur principal d’organiser son insolvabilité.

Le récapitulatif des diligences accomplies par la société ID Facto durant ces deux mois ne permet cependant pas de suivre Mme [X] dans ses griefs à l’encontre de son mandataire qui apparaît au contraire avoir accompli les diligences les plus pertinentes au regard des informations dont il disposait en ce laps de temps très réduit pour agir au mieux des intérêts de celle-ci. En outre, c’est de manière infondée que Mme [X] soutient que la société ID Facto aurait dû agir au plus tôt non seulement contre la société Architecture et Construction, mais encore à l’encontre des autres tiers désignés par elle alors que le 21 mai 2014, elle précisait que des recherches complémentaires devaient être menées avant d’entreprendre des actions contre eux.

Il est en outre démontré que durant ce laps de temps très réduit, la société ID Facto a informé son mandant de l’accomplissement de ses diligences et rien ne permet de retenir que ce délai, très court, a pu participer ou aggraver le préjudice allégué par Mme [X]. Au reste, c’est avec raison que la société ID Facto fait valoir que son adversaire se borne à affirmer sans preuve qu’une collusion frauduleuse existerait entre la société Bati Renov 91 et la société Architecture et Construction, voire que la société Bati Renov 91 aurait organisé son insolvabilité. L’existence de telles allégations n’est nullement démontrée par les productions.

Il s’ensuit que c’est à bon droit que le premier juge a retenu que Mme [X] ne démontrait pas l’existence d’une faute de la part de la société ID Facto dans l’exécution de son mandat et, par voie de conséquence, a rejeté les demandes de l’appelante au titre de la responsabilité civile professionnelle de son mandataire.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [X], partie perdante, supportera les dépens d’appel. Par voie de conséquence, sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

A hauteur d’appel, l’équité commande d’allouer la somme de 3 000 euros à la société ID Facto au titre des frais qu’elle a engagés par assurer sa défense. Mme [X] sera condamnée au paiement de cette somme.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

Dans les limites de l’appel,

CONFIRME le jugement ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme [X] aux dépens d’appel ;

REJETTE la demande de Mme [X] fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [X] à verser la somme de 3 000 euros à la société ID Facto sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

– signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x