ARRET
N°
[Z]
C/
S.A. CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE
PB/VB
COUR D’APPEL D’AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU TRENTE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS
Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : N° RG 22/05351 – N° Portalis DBV4-V-B7G-IT46
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU JUGE DE L’EXECUTION D’AMIENS DU VINGT SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [T] [Z]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me DECRAMER substituant Me Marcel DOYEN de la SCP MONTIGNY DOYEN, avocats au barreau d’AMIENS
APPELANT
ET
S.A. CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Sibylle DUMOULIN de la SCP DUMOULIN-CHARTRELLE-ABIVEN, avocat au barreau d’AMIENS
Plaidant par Me Hugo DAUSTER substituant Me Valérie DESFORGES, avocats au barreau de PARIS
INTIMEE
DÉBATS & DÉLIBÉRÉ :
L’affaire est venue à l’audience publique du 28 mars 2023 devant la cour composée de M. Pascal BRILLET, Président de chambre, M. Vincent ADRIAN et Mme Myriam SEGOND, Conseillers, qui en ont ensuite délibéré conformément à la loi.
A l’audience, la cour était assistée de Mme Vitalienne BALOCCO, greffier.
Sur le rapport de M. Pascal BRILLET et à l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré et le président a avisé les parties de ce que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 mai 2023, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
PRONONCÉ :
Le 30 mai 2023, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. Pascal BRILLET, Président de chambre et Mme Vitalienne BALOCCO, greffier.
*
* *
DECISION :
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte notarié du 30 juin 2006, suivant une offre du 19 mai précédent, la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France (la banque) a consenti à M. [T] [Z] deux prêts destinés au financement de l’acquisition d’un ensemble immobilier situé [Adresse 1] à [Localité 9] et des travaux, soit :
– prêt n° 10608839, renuméroté 2002350, d’un montant de 154 000 euros, remboursable en 300 mensualités au taux annuel de 3,40 %,
– prêt n° 10608840, renuméroté 8516634 d’un montant de 174 413 euros, remboursable en 300 mensualités au taux annuel de 3,40 %, avec un différé de 6 mois.
Un contentieux est né entre les parties concernant le déblocage des fonds correspondants ces deux prêts, sanctionné par un arrêt de la cour d’appel Paris le 23 juin 2011.
Des mensualités de ces prêts étant restées impayées, la banque a mis en demeure M. [Z] par courriers recommandés AR en date du 14 mars 2013.
Un arrêt de cette cour en date du 20 mars 2014, rendu sur l’appel d’une ordonnance du 22 juillet 2013 ayant rétracté une ordonnance d’un tribunal d’instance en date du 28 mars 2013 précédent qui avait, à la demande de M. [Z], suspendu pour une durée de deux ans le paiement des prêts n°10608839 et n°10608840, a déclaré la requête en ce sens de M. [Z] irrecevable.
La banque a de nouveau mis en demeure M. [Z] par courriers recommandés AR en date du 11 février 2015.
En l’absence de régularisation, la banque a prononcé la déchéance du terme de chacun des prêts précités en date du 4 mars 2015.
Un arrêt rendu le 17 septembre 2015 par la cour d’appel de Paris a confirmé un jugement du tribunal de grande instance de Paris du 5 juin 2014 ayant débouté M. [Z] de sa demande de condamnation de la banque à lui rembourser des sommes versées au titre des échéances de son prêt et à l’indemniser au titre d’un manque à gagner des loyers.
Par acte du 25 octobre 2021, la Banque a fait signifier à M. [Z] un commandement afin de saisie immobilière portant sur un ensemble immobilier dans un ancien corps de ferme lui appartenant situé [Adresse 1] à [Localité 9], cadastré section G numéros [Cadastre 5] et [Cadastre 7] d’une superficie de 22 ares et 86 centiares le 25 octobre 2021, commandement ayant été publié au service de la publicité foncière d'[Localité 8] le 15 novembre 2021.
Le 11 janvier 2022, la banque a fait assigner M. [Z] à l’audience d’orientation du juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Amiens aux fins de voir fixer sa créance et ordonner la vente forcée de l’immeuble.
Par jugement du 27 septembre 2022, auquel la cour renvoie pour une présentation plus complète des faits et de la procédure antérieure, le juge de l’exécution a pour l’essentiel :
– débouté M. [Z] de ses exceptions de nullité du commandement aux fins de saisie immobilière et de l’assignation,
– déclaré valable et régulière la procédure de saisie immobilière diligentée par la banque,
– débouté M. [Z] de son exception de prescription biennale en ce qui concerne le capital restant des prêts et y a fait droit en ce qui concerne l’arriéré antérieur au 01 mars 2015,
– dit que la créance restant due par M. [Z] à la banque est retenue pour la somme totale de 132 450,25 euros, outre intérêts à 0,80 % l’an sur la somme principale de 124 329,14 euros à compter du 05 juillet 2022, au titre du solde du prêt de 154 000 euros et pour la somme totale de 176 014,46 euros comprenant la somme principale de 164 845,92 euros outre intérêts à 0,80 % l’an sur la somme principale à compter du 05 juillet 2022 au titre du prêt de 174 413 euros, outre une indemnité de résiliation de 22 242,25 euros,
– taxé les frais de poursuite à la somme actuelle de 3 798,67 euros TTC au 05 juillet 2022 sans préjudice des frais postérieurs,
– débouté les parties du surplus de leurs contestations,
– ordonné la vente forcée aux enchères publiques de l’immeuble saisi appartenant à M. [Z], précisé les modalités préalables de cette vente et fixé sa date,
– dit que les dépens de l’instance seront compris dans les frais de la vente.
M. [Z] a interjeté appel du jugement par déclaration d’appel en date du 7 décembre 2022.
Autorisé par ordonnance en date du 16 décembre 2022, faisant suite à sa requête à fin d’être autorisé à assigner à jour fixe déposée le 7 décembre 2022, M. [Z] a fait assigner la banque à l’audience de la cour du mardi 28 mars 2023 par acte d’huissier de justice en date du 23 décembre 2022 (à personne habilitée).
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions récapitulatives de M. [Z] transmises et notifiées par la voie électronique le 23 mars 2023 aux termes desquelles il demande à la cour de :
– infirmer le jugement,
– annuler le commandement de payer valant saisie immobilière que lui a délivré la banque le 25 octobre 2021 et l’assignation du 11 janvier 2022,
– dire prescrite, notamment par application des dispositions de l’article L.218-2 du code de la consommation, la créance revendiquée par la banque à son encontre,
– dire la banque irrecevable et en tout cas mal fondée en l’ensemble de ses demandes et l’en débouter, ainsi que de son appel incident.
– dire excessives les demandes de la banque, et les réduire dans une notable proportion compte tenu de la prescription des échéances impayées, et du caractère excessif et non justifié des indemnités réclamées.
– ordonner la levée des hypothèques inscrites par la banque pour garantir les prêts n° 8516634 et n° 22350 qui lui ont été consentis,
– condamner la banque à lui payer une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.
– condamner la banque à lui payer une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la banque aux dépens dont distraction est requise au profit de la SCP Montigny-Doyen, par application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions récapitulatives de la banque notifiées par voie électronique le 15 mars 2023 aux termes desquelles elle demande à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [Z] de l’ensemble de ses contestations, fins et demandes et valable la procédure de saisie immobilière poursuivie à son encontre,
– infirmer le jugement en ce qu’il a retenu sa créance pour un montant de 132 450,25 euros outre intérêts au taux de 0,80 % l’an sur la somme principale de 124 329,14 euros à compter du 5 juillet 2022 au titre du solde du prêt de 154 000 euros, et pour la somme de 176 014,66 euros comprenant la somme principale de 164 845,92 euros outre intérêts à 0,80 % l’an sur la somme principale à compter du 5 juillet 2022 au titre du prêt de 174 413 euros, outre une indemnité de résiliation de 22 242,25 euros,
Statuant à nouveau sur ce point,
– retenir ses créances en qualité de créancier poursuivant pour les montants suivants :
– contrat de prêt P.Habitat 2002350 (ex n°106088390000),
36 échéances impayées du 16/06/2012 au 16 février 2015 : 22 135,70 euros
Capital restant dû au 03 mars 2015 : 137 629,08 euros
Intérêts courus du 17 février 2015 au 03 mars 2015 : 51,99 euros
Accessoires courus du 17 février 2015 au 03 mars 2015 : 43,63 euros
Intérêts de retard et frais à la déchéance : 1 106,69 euros
Intérêts de retard à compter du 03 mars 2015 : 10 325,68 euros
Frais de Procédure : 5 719,11 euros
Indemnité de déchéance du terme : 9 634,03 euros
Intérêts postérieurs : Mémoire
Total sauf mémoire, erreur ou omission : 186 645,91 euros
– contrat de prêt P. Habitat 8516634 (ex n°10608840000)
échéances impayées du 16 juillet 2013 au 16 février 2015 : 32*823,05 euros 27 091,77 euros
Capital restant dû au 03 mars 2015 : 176 839,37 euros
Intérêts courus du 17 février 2015 au 03 mars 2015 : 66,81 euros
Accessoires courus du 17 février 2015 au 03 mars 2015 : 49,42 euros
Intérêts de retard et frais à la déchéance : 1 430,77 euros
Intérêts de retard à compter du 03 mars 2015 : 13 179,78 euros
Indemnité de déchéance du terme : 12 378,75 euros
Intérêts postérieurs : Mémoire
Total sauf mémoire, erreur ou omission : 231 036,67 euros
– condamner M. [Z] au paiement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens qui seront recouvrés par maître Sibylle Dumoulin, avocate, dans les conditions posées par l’article 696 du Code de procédure civile.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s’agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.
MOTIFS
1. Sur la demande de nullité du commandement et de l’assignation.
1.1 M. [Z] prétend que le commandement du 25 octobre 2021 et l’assignation du 11 janvier 2022 sont entachés de nullité. Les délégations et subdélégations consenties à M. [B] [F], directeur adjoint, agissant pour la banque, ne sont pas annexées à ces actes. Les délégations de pouvoir produites en cours d’instance ont un caractère général et ne visent pas l’exercice d’une procédure de saisie immobilière à son encontre. M. [B] [F] ne justifie pas être habilité à agir au nom de la banque.
1.2 M. [Z] reprend devant la cour une argumentation que le premier juge a justement rejetée, sa critique du jugement étant inopérante.
En premier lieu, il n’est justifié d’aucune disposition légale ou réglementaire imposant d’annexer au commandement de payer valant saisi immobilière puis à l’assignation du débiteur saisi à l’audience d’orientation du juge de l’exécution les délégations donnant pouvoir au représentant de la banque créancière pour agir en ce sens.
En l’espèce, conformément à l’article 648 du code de procédure civile, auxquels renvoie l’article R. 321’3 du code des procédures civiles d’exécution, le commandement de payer valant saisie immobilière mentionne bien que la banque est représentée par M. [B] [F], directeur adjoint en charge du recouvrement banque de détail, procédures civiles d’exécution, clients et comptes et détails les différentes délégations et subdélégations de pouvoir, ce qui est suffisant.
Conformément aux articles 54 et 56 du code de procédure civile, auxquels renvoie l’article R. 322-5 du code des procédures civiles d’exécution, les mêmes et suffisantes mentions figurent dans l’assignation du 11 janvier 2022.
En outre, en toute hypothèse, ce défaut d’annexe ne constituerait qu’une irrégularité de forme au sens des articles 114 et suivants du code de procédure civile imposant, pour entraîner la nullité de l’acte concerné, la démonstration d’un grief concrètement éprouvé de la part de celui qui s’en prévaut.
En l’espèce, les délégations de pouvoir ont été produites en cours d’instance devant le premier juge en sorte que M. [Z] a été placé, avant que le juge ne statue, en situation de vérifier la réalité des délégations de pouvoir alléguées par la banque et, le cas échéant, d’en contester l’efficacité.
En second lieu, M. [Z] ne justifie d’aucune disposition légale ou réglementaire imposant le caractère nécessairement spécial des délégations de pouvoir.
En l’espèce, en exécution des délégations et subdélégations de pouvoir à M. [P] [E] et à Mme [W] [O], M. [B] [F] disposait, au jour des actes litigieux, du pouvoir et des responsabilités y afférentes, de représenter la banque s’agissant notamment des activités de recouvrement judiciaire des particuliers et des procédures civiles d’exécution.
Le jugement est confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de nullité de M. [Z].
2. Sur la prescription
Il résulte des articles L. 137’2 du code de la consommation, devenu L. 218’2 du même code à compter du 1er juillet 2016, 2224 et 2233 du code civil, qu’à l’égard d’une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives, l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité, y compris en cas de décès de l’emprunteur (1re Civ., 20 octobre 2021, pourvoi n° 20-13.661).
2.1 sur la prescription du capital restant dû
2.1.1 M. [Z] prétend que, pour la jurisprudence, l’action en paiement du capital restant dû, et des intérêts qui en découlent, se prescrit à compter du prononcé de la déchéance du terme qui emporte leur exigibilité. Il affirme que l’action a été engagée par la banque après expiration du délai de deux ans prévu par l’article L.218-2 du code de la consommation. Il conteste que le délai de prescription ait pu être interrompu par des commandements délivrés le 1er mars 2017, le 28 février 2019, le 1er février 2021 et le 6 janvier 2022. Il fait valoir qu’il n’a pas reçu et n’a pas été informé de celui en date du 28 février 2019. Il ajoute qu’en tout état de cause, c’est commandement n’ont aucun effet interruptif faute d’avoir été publié au fichier immobilier dans un délai de deux mois à compter de leur signification. En l’absence de publication, ces commandements sont frappés de caducité, et par suite, dépourvus de tout effet interruptif. Enfin, il s’agit de commandements aux fins de saisie vantent et non pas aux fins de saisie immobilière. Ils n’ont donc pas d’effet interruptif de prescription à l’égard de la créance immobilière.
2.1.2 Cependant, le commandement aux fins de saisie-vente qui, sans être un acte d’exécution forcée, engage la mesure d’exécution forcée, interrompt la prescription de la créance qu’elle tend à recouvrer (2e Civ., 13 mai 2015, pourvoi n° 14-16.025, Bull. 2015, II, n° 113).
En l’espèce, la banque a prononcé la déchéance du terme de chacun des prêts litigieux en date du 4 mars 2015.
Elle produit aux débats des commandements aux fins de saisie vente en date du 26 mars 2015, du 1er mars 2017, du 28 février 2019 et du 1er février 2021 visant tous les deux prêts litigieux et dont la nullité n’est pas demandée par M. [Z].
Aucune disposition légale ou réglementaire n’imposait la publication de ces commandements dans un délai de deux mois suivant leur signification à peine de caducité, ni à peine d’absence de caractère interruptif de prescription.
De même, s’agissant de ce caractère interruptif, il importe peu que tel ou tel commandement n’ait pas été signifié à la personne de M. [Z]. La copie du commandement aux fins de saisie vente du 28 février 2019 comprenant l’acte de signification à domicile de M. [Z] est produite aux débats. Cet acte existe donc bien jusqu’à inscription de faux nonobstant les allégations inopérantes de M. [Z].
Enfin, la banque a fait signifier son commandement de payer valant saisie immobilière en date du 25 octobre 2021 puis a fait assigner M. [Z] devant le juge de l’exécution le 11 janvier 2022, ces deux actes ayant de nouveau interrompu la prescription.
La prescription du capital restant dû n’est pas acquise. Le jugement est confirmé sur ce point également.
2.2 sur la prescription des échéances arriérées.
La banque forme appel incident du jugement en ce qu’il a considéré que sa créance au titre des échéances du premier prêt échues du 16 juin 2012 au 16 février 2015 et celle au titre des échéances du second prêt échues du 16 juillet 2012 au 16 février 2015 sont prescrites, comme étant antérieures de plus de 2 ans au premier acte interactif du 1er mars 2017.
2.2.1 La banque produit au débat un commandement aux fins de saisie vente en date du 26 mars 2015 visant les deux prêts litigieux.
Conformément aux énonciations précédentes, un tel commandement régulièrement signifié a eu un effet interruptif de prescription.
Il importe peu que cette pièce ne soit produite qu’en cause d’appel.
Certes, aux termes de l’article R.311-5 du code des procédures civiles d’exécution, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut, sauf disposition contraire, être formée après l’audience d’orientation, à moins qu’elle porte sur les actes de procédure postérieurs à celle-ci. Toutefois, et sauf à vider l’appel de son effectivité, aucune disposition n’interdit à une partie appelante du jugement d’orientation, même à titre incident, de soutenir et de produire devant la cour des éléments de nature à conduire au rejet d’une contestation admise par le juge de l’exécution.
Les échéances des prêts échues postérieurement au 26 mars 2013 ne sont donc pas prescrites.
2.2.2 Aux termes de l’article 2240 du code civil, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription.
La banque justifie que par requête du 27 mars 2013, M. [Z] a demandé au tribunal d’instance de Beauvais de suspendre pour une durée de 2 ans le paiement des prêts litigieux sur le fondement de l’article L. 313’12 du code de la consommation dans sa rédaction alors applicable.
Dans sa requête, M. [Z] a repris l’historique des deux prêts. Il a notamment fait valoir diverses difficultés l’ayant privé des revenus locatifs nécessaires pour financer leur remboursement. Il a indiqué que par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 14 mars 2013, la banque lui avait adressé de mise en demeure d’avoir à régulariser les impayés sur les 2 prêts d’un montant respectif de 7465,34 euros et 6564,35 euros, la visant qu’à défaut de règlement sous quinzaine elle serait contrainte de prononcer la déchéance du terme. Il a affirmé être donc bien fondé, en application des dispositions l’article L. 313’12 du code de la consommation, a demandé la suspension du remboursement des échéances de ces 2 prêts pour une durée de deux ans et à obtenir pendant ce délai suspension du cours des intérêts.
Dans cette requête, M. [Z] s’est donc reconnu débiteur d’une manière nette et univoque des divers impayés au titre des deux prêts visés notamment dans la mise en demeure du 14 mars 2013.
Une telle reconnaissance dans une requête formée en application de l’article L. 313’12 du code de la consommation a en l’espèce interrompu le cours de la prescription extinctive concernant les échéances de remboursement des prêts non régularisées antérieures de moins de deux ans (1re Civ., 11 mars 2020, pourvoi n° 19-11.309).
Il importe peu que l’ordonnance en date du 28 mars 2013 ayant fait droit à cette requête a été finalement infirmée par un arrêt de cette cour du 20 mars 2014, cette décision ayant déclaré la requête de M. [Z] irrecevable.
En effet, l’effet interruptif de prescription ne procédait pas de cette ordonnance infirmée mais du contenu de la requête préalable de M. [Z] valant reconnaissance de la créance de la banque.
Pour le surplus les commandements aux fins de saisie vente, commandement de payer valant saisie immobilière et assignation devant le juge d’exécution précités ayant interrompu la prescription du capital restant dû ont par hypothèse également interrompu la prescription des échéances des prêts non régularisées.
Dès lors, il suit de tout ce qui précède que c’est à tort que le juge de l’exécution a retenu la prescription des échéances des deux prêts postérieures au 16 juin ou 16 juillet 2012.
Le jugement est infirmé en ce sens. L’exception de prescription de la créance de la banque doit être rejetée pour le tout.
2.2.3 Des décomptes des sommes dues sont annexés aux deux lettres de déchéance du terme du 4 mars 2015.
Ces deux courriers visaient très clairement les références des prêts reprises précédemment dans les lettres de mise en demeure du 11 février 2015 mais aussi du 4 mars 2013.
M. [Z] avait parfaitement compris l’objet de la mise en demeure du 4 mars 2013, à savoir les échéances impayées des deux prêts notariés de la banque du 30 juin 2006 de 154 000 euros et de 174 413 euros puisqu’il a été précédemment indiqué qu’il a saisi le juge d’instance de Senlis d’une demande de suspension de ces prêts en suite directe de la réception de cette première mise en demeure du 4 mars 2013.
Visant les mêmes références, il doit en être raisonnablement déduit qu’il a parfaitement compris les termes et le sens des mises en demeure suivantes du 11 février 2015 et des deux lettres de déchéance du terme.
Les décomptes annexés n’ont pas été contestés, en toute hypothèse utilement, s’agissant des sommes réclamées.
Les décomptes produits par la banque devant la cour, comptes arrêtés au 28 mars 2023, ne sont que la reprise et l’actualisation des décomptes joints aux courriers de déchéance du terme, s’agissant notamment des intérêts échus depuis cette déchéance.
Si, s’agissant spécialement du capital restant dû au jour de la déchéance du terme, le premier juge a fustigé la banque pour s’être contentée de produire les tableaux d’amortissement annexés aux contrats de prêt notariés ne correspondant pas à la réalité contractuelle effective, celle-ci verse désormais les tableaux d’amortissement réel des deux prêts.
Le jugement ne peut donc être confirmé en ce qu’il n’a pas retenu les montants réclamés par la banque au titre du capital restant dû au jour de la déchéance du terme. La banque justifie suffisamment les montants allégués.
M. [Z] soutient que ces comptes sont erronés sans toutefois justifier autrement ses allégations. Alors même que pèse sur lui l’obligation de faire la preuve de sa libération, il ne produit strictement aucun élément en ce sens. Il ne verse aucun justificatif de ses paiements. Rien ne démontre le règlement des échéances arriérées ni davantage le capital restant dû au jour de la déchéance du terme. Le cours des intérêts de retard n’est pas autrement discuté.
Il sera toutefois fait exception pour le décompte du prêt habitat numéro 2002350. Celui-ci vise nouvellement des frais de procédure pour un montant de 5 719,11 euros. Comme le fait remarquer M. [Z], ce poste n’est pas autrement justifié par la banque, ce d’autant que celle-ci réclame par ailleurs une somme conséquente au titre de ses frais irrépétibles et que les frais taxables de la saisie sont pris en compte par ailleurs.
Les autres sommes incluses dans les deux décomptes sont toutes de nature contractuelle et, contrairement à ce que soutient M. [Z], ne présentent aucun caractère manifestement excessif justifiant leur réduction par application des dispositions des articles 1231-5 du Code civil, L.313-51 et R.313-28 du Code de la consommation. Les indemnités de déchéance du terme réclamées par la banque (9 634,03 euros et 12 378,75 euros) correspondent précisément à 7 % du capital restant dus au jour de la déchéance du terme. Ces montants contractuellement prévus et réglementairement admissibles ne sont en rien abusifs en l’espèce.
Dès lors, il sera fait droit à la demande de la banque s’agissant de la fixation de ses deux créances pour un total de 180 926,80 euros s’agissant du prêt de 154 000 euros et 231 036,67 euros s’agissant du prêt de 174 413 euros, selon détails précisés dans le dispositif.
Le jugement est infirmé en ce sens.
3. Demande de levée des hypothèques
Le rejet de ses demandes de nullité et de prescription justifie le rejet de cette demande formée par M. [Z].
Le jugement est confirmé sur ce point.
4. Sur la demande indemnitaire de M. [Z].
L’action de la banque étant fondée en son principe, M. [Z] a été justement débouté de sa demande indemnitaire fondée sur le caractère prétendument abusif de cette action.
5. M. [Z], appelant principal qui échoue devant la cour en toutes ses contestations du jugement, est condamné aux dépens.
Il est par ailleurs condamné à payer à la banque la somme de 2 000 euros en application l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, après débats publics, en dernier ressort,
Confirme le jugement, sauf en ce qu’il a dit que la créance restant due par M. [Z] à la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France était retenue pour la somme totale de 132 450,25 euros, outre intérêts à 0,80 % l’an sur la somme principale de 124 329,14 euros à compter du 05 juillet 2022, au titre du solde du prêt de 154 000 euros et pour la somme totale de 176 014,46 euros comprenant la somme principale de 164 845,92 euros outre intérêts à 0,80 % l’an sur la somme principale à compter du 05 juillet 2022 au titre du prêt de 174 413 euros, outre une indemnité de résiliation de 22 242,25 euros,
Statuant à nouveau de ce seul chef,
Dit que la créance de la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France à l’égard de M. [Z] est égale aux sommes suivantes, compte arrêté au 28 mars 2023 :
-1. contrat de prêt habitat prêt n° 10608839, renuméroté 2002350, d’un montant de 154 000 euros : total de 180 926,80 euros, se détaillant comme suit :
– échéances impayées du 16 juin 2012 au 16 février 2015 : 22 135,70 euros
– capital restant dû au 03 mars 2015 : 137 629,08 euros
– intérêts courus du 17 février 2015 au 03 mars 2015 : 51,99 euros
– accessoires courus du 17 février 2015 au 03 mars 2015 : 43,63 euros
– intérêts de retard et frais à la déchéance 1 106,69 euros
– intérêts de retard à compter du 03 mars 2015 : 10 325,68 euros
– indemnité de déchéance du terme : 9 634,03 euros
– intérêts postérieurs : mémoire,
-2. contrat de prêt habitat n° 10608840, renuméroté 8516634 d’un montant de 174 413 euros : total de 231 036,67 euros, se détaillant comme suit :
– échéances impayées du 16 juillet 2013 au 16 février 2015 : 27 091,77 euros
– capital restant dû au 03 mars 2015 : 176 839,37 euros
– intérêts courus du 17 février 2015 au 03 mars 2015 : 66,81 euros
– accessoires courus du 17 février 2015 au 03 mars 2015 : 49,42 euros
– intérêts de retard et frais à la déchéance : 1 430,77 euros
– intérêts de retard à compter du 03 mars 2015 : 13 179,78 euros
– indemnité de déchéance du terme : 12 378,75 euros
– intérêts postérieurs : mémoire,
Condamne M. [Z] à payer à la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France la somme de 2 000 euros en application l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [Z] aux dépens de l’instance d’appel, maître Sibylle Dumoulin, avocate, disposant du droit de recouvrement direct dans les conditions prévues par l’article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT