N° RG 22/01621 – N° Portalis DBV2-V-B7G-JCQS
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITE
ARRET DU 29 JUIN 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
22/01442
Jugement du juge de l’execution tribunal judiciaire de rouen du 11 mai 2022
APPELANTE :
Madame [P] [T]
née le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 6] (76)
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée et assistée par Me Julien DETTORI, avocat au barreau de ROUEN
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/005154 du 02/11/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Rouen)
INTIMEE :
HABITAT 76 OFFICE PUBLIC DE L’HABITAT
DU DEPARTEMENT DE LA SEINE MARITIME
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée et assistée par Me Jacqueline BONUTTO-BECAVIN, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 27 avril 2023 sans opposition des avocats devant Madame TILLIEZ, rapporteur.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Madame GOUARIN, Présidente
Madame TILLIEZ, Conseillère
Madame GERMAIN, Conseillère
DEBATS :
Madame DUPONT greffière
A l’audience publique du 27 avril 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 29 juin 2023
ARRET :
Contradictoire
Prononcé publiquement le 29 juin 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame GOUARIN, Présidente et par Madame DUPONT, Greffière lors de la mise à disposition.
Exposé des faits et de la procédure
Suivant acte sous seing privé du 28 mars 2011, Mme [P] [T], née le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 6], a signé un bail d’habitation avec l’Office Public de l’Habitat 76 concernant un logement situé [Adresse 3]), pour un loyer fixé à la somme de 285,75 euros par mois, outre 136,75 euros au titre des charges.
Le loyer a été actualisé et porté en dernier lieu, à la somme mensuelle de 308,82 euros, outre les charges.
Le 18 octobre 2021, Mme [T] et l’Office Public de l’Habitat 76 ont signé un procès-verbal de conciliation en matière d’expulsion revêtu de la formule exécutoire, mettant en place un échéancier de paiement des arriérés dus au titre des loyers, indemnités et charges en plus du loyer courant, dont le non-respect entraînerait résiliation du bail et expulsion.
Après mise en demeure infructueuse de s’acquitter des sommes dues, le bailleur s’est prévalu le 26 janvier 2022 de la résiliation du bail.
Le procès-verbal de conciliation rendu par le tribunal judiciaire de Rouen ainsi qu’un commandement de quitter les lieux ont été signifiés à Mme [T] par acte d’huissier du 04 février 2022 remis à étude.
Sur requête de Mme [T] et suivant jugement du 11 mai 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Rouen lui a accordé un délai de trois mois pour quitter le logement occupé à compter de la notification de la décision, dit qu’à défaut du paiement d’une seule indemnité mensuelle d’occupation à son échéance, la suspension de la procédure d’expulsion cesserait de produire ses effets, l’a condamnée aux entiers dépens et a rappelé que la décision était de droit exécutoire à titre provisoire.
Par déclaration électronique du 16 mai 2022, Mme [P] [T] a interjeté appel de cette décision.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 avril 2023.
Exposé des prétentions des parties
Dans ses dernières conclusions communiquées par RPVA le 14 janvier 2023, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé des motifs,
Mme [P] [T] demande à la cour d’appel, de :
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il lui a attribué un délai pour quitter son logement,
– l’infirmer en ce qu’il lui a fixé un délai trop court de trois mois pour qu’elle quitte son logement,
– statuant à nouveau, lui accorder un délai de 36 mois pour quitter le logement qu’elle occupe,
– laisser les dépens à la charge des parties.
Dans ses dernières conclusions communiquées par RPVA le 31 janvier 2023, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé des motifs, l’Office Public de l’Habitat 76 demande à la cour d’appel, de :
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a été attribué un délai de trois mois à Mme [T] pour quitter son logement,
– débouter Mme [T] de sa demande de délai à hauteur de 36 mois,
– à titre infiniment subsidiaire si la cour accordait un délai supplémentaire à Mme [T], condamner celle-ci au paiement du terme résiduel accompagné d’un acompte, assortir d’une clause de déchéance du terme en cas de non-paiement des échéances courantes et de l’acompte et ordonner la suppression de la suspension de la procédure d’expulsion,
– ordonner la participation de Mme [T] aux rendez-vous avec les partenaires sociaux et également aux démarches administratives,
– en tout état de cause, condamner Mme [P] [T] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la durée du délai pour quitter les lieux
Au termes de l’article L.412-3 alinéa 1 du code des procédures civiles d’exécution, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d’un titre à l’origine de l’occupation.
L’article L.412-4 du code des procédures civiles d’exécution dispose en outre que la durée des délais prévus à l’article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l’habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.
La cour n’est pas saisie de l’octroi d’un délai à Mme [T] pour quitter le logement qu’elle occupe, cette attribution accordée par le premier juge n’étant pas contestée dans son principe en appel.
Le désaccord porte en appel sur la durée du délai, Mme [T] sollicitant un délai de 36 mois pour quitter son logement dont le bail a été résilié, la procédure de libération du logement ayant débuté avec la délivrance d’un commandement de quitter les lieux du 04 février 2022.
Mme [T] estime que le délai de trois mois accordé par le premier juge est trop court pour retrouver un logement adapté à son mauvais état de santé et met en avant son âge et sa situation précaire ainsi que sa bonne foi vis-à-vis d’un bailleur resté inactif alors que son logement était humide et insuffisamment chauffé.
L’intimée s’y oppose et sollicite la confirmation de la décision entreprise, motivant son refus par l’absence de toute démarche de Mme [T] pour se reloger, l’absence de toute coopération avec son bailleur et l’augmentation constante de sa dette de loyer, alors que celle-ci a déjà bénéficié d’un effacement de sa dette de loyer dans le cadre d’une procédure de surendettement initiée en 2018 et qu’elle n’a pas honoré l’échéancier judiciairement mis en place suivant procès-verbal de conciliation du
18 octobre 2021 pour apurer son retard de paiement et payer le loyer et les charges courantes.
L’Office Public de l’Habitat 76 observe en outre que Mme [T] se contente d’alléguer l’existence dans son logement de problèmes d’humidité sans en justifier et ajoute que cette argumentation est en tout état de cause étrangère à la présente procédure.
C’est par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a fait la part des choses pour octroyer à Mme [T] un délai de trois mois pour quitter les lieux entre, d’une part sa situation précaire et son âge et d’autre part, l’effacement d’une dette de loyer antérieure, son absence de justification de ses problèmes de santé, ainsi que de problèmes d’humidité et de chauffage insuffisant, simplement allégués, son absence de justification de démarches pour se reloger et de son paiement irrégulier des loyers et charges dus.
La cour observe en outre que Mme [T] ne communique pas plus de justificatifs en appel pour étayer sa demande et que sa dette qui était de
6 828,81 euros en première instance est de 8 137,39 euros aux termes d’un décompte établi par le bailleur le 23 janvier 2023.
Mme [T] sera donc déboutée de sa demande tendant à obtenir un délai de 36 mois pour quitter le logement qu’elle occupe et la décision entreprise ayant fixé la durée de ce délai à trois mois et prévu les effets d’un défaut du paiement sera confirmée.
Sur les demandes accessoires
Mme [T] succombant en ses demandes sera condamnée aux dépens d’appel.
Les dispositions relatives aux dépens de première instance seront confirmées.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme les dispositions du jugement entrepris dans les limites de l’appel,
Y ajoutant,
Condamne Mme [P] [T] aux dépens d’appel.
La greffière La présidente