Saisine du juge de l’exécution : 29 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/11182

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Saisine du juge de l’exécution : 29 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/11182

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 10

ARRÊT DU 29 JUIN 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général

N° RG 22/11182 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CF65W

Décision déférée à la cour

Jugement du 17 mai 2022-Juge de l’exécution de CRETEIL-RG n° 22/02172

APPELANTS

Monsieur [L] [J]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Pascale AUPERIN MOREAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0554

Madame [F] [G] épouse [J]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Pascale AUPERIN MOREAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0554

INTIMEE

Madame [O] [V]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Julie FAY de la SELARL CLAIRANCE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : D0658

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 1 juin 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT

-contradictoire

-par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

Par jugement du 8 octobre 2021, signifié le 25 octobre suivant, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d’Ivry-sur-Seine a notamment :

condamné M. [L] [J] et Mme [F] [G] épouse [J] à payer à Mme [O] [V], en deniers ou quittances valables, une somme de 4450,71 euros, au titre des loyers et charges impayés au 1er septembre 2021 (terme de septembre 2021 inclus) avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

autorisé les époux [J] à s’acquitter de cette somme au moyen de 36 mensualités consécutives d’un montant minimum de 125 euros, chaque mensualité étant payable, en plus du loyer courant, dans le courant de chaque mois et pour la première fois dans le courant du mois de novembre 2021, la 36ème mensualité correspondant au solde de la dette,

prononcé la suspension des effets de la clause résolutoire contenue au bail,

rappelé l’effet suspensif de toutes mesures d’exécution de sa décision accordant les délais susvisés,

dit qu’à défaut de règlement d’une mensualité à son échéance, suivie d’une mise en demeure restée infructueuse durant quinze jours, l’intégralité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible,

ordonné dans cette hypothèse l’expulsion des époux [J],

condamné les époux [J] à payer à Mme [V], en cas de résiliation du bail, une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant de 1400 euros (sans indexation possible et charges comprises) à partir de la date de résiliation du bail jusqu’à parfaite libération des locaux.

Par acte d’huissier du 26 janvier 2022, Mme [O] [V], bailleresse, a fait délivrer aux époux [J] un commandement aux fins de saisie-vente et un commandement de quitter les lieux.

Selon actes d’huissier des 16 et 22 février 2022, Mme [V] a fait pratiquer à l’encontre des époux [J] des saisies-attributions respectivement entre les mains de la société Bnp Paribas, la Banque Populaire Rive Gauche, la Caisse d’Epargne et la Banque Postale, pour avoir paiement de la somme de 3942,27 euros en principal, arrêté au 4 février 2022. Ces saisies-attributions ont été dénoncées à chacun des débiteurs par actes d’huissier du 23 février 2022.

Selon acte d’huissier du 22 mars 2022, les époux [J] ont assigné Mme [V] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Créteil aux fins de mainlevée des saisies-attributions des 16 et 22 février 2022, et d’annulation du commandement de quitter les lieux et du commandement aux fins de saisie-vente du 26 janvier 2022.

Par jugement du 17 mai 2022, le juge de l’exécution a :

déclaré irrecevable la contestation des saisies-attributions des 16 et 22 février 2022 et la demande subséquente de dommages-intérêts ;

débouté les époux [J] de leurs autres demandes ;

condamné les époux [J] à payer à Mme [V] la somme de 1000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamné les époux [J] aux dépens.

Par déclaration du 9 juin 2022, les époux [J] ont formé appel de ce jugement.

Par dernières conclusions signifiées le 9 mai 2023, les époux [J] demandent à la cour de :

infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

statuant nouveau,

déclarer irrecevable et mal fondée la demande de dommages-intérêts de Mme [V] et l’en débouter purement et simplement,

déclarer recevables et bien fondées l’intégralité de leurs demandes ;

donner mainlevée des saisies-attributions pratiquées les 16 et 22 février 2022,

condamner Mme [V] aux dépens de première instance et d’appel,

condamner Mme [V] à leur payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 24 mai 2023, Mme [V] demande à la cour de :

déclarer l’appel mal fondé,

rejeter toutes les demandes des appelants,

confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

dire non fondées les demandes tendant à l’annulation des saisies-attributions,

condamner les appelants à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts,

les condamner aux entiers dépens ainsi qu’à lui payer une somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Il convient de relever que, en dernier lieu, les prétentions des appelants ne portent plus que sur les saisies-attributions et la demande en dommages-intérêts de l’intimée et non sur la régularité des commandements de quitter les lieux et aux fins de saisie-vente, étant observé les époux [J] ont libéré les lieux le 20 avril 2023.

Sur la recevabilité de la contestation des saisies-attributions

Selon les dispositions de l’article R. 211-11 du code des procédures civiles d’exécution, à peine d’irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec avis de réception, à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie.

Après avoir soumis à la contradiction des parties le moyen tiré de l’irrecevabilité de la contestation au regard des dispositions précitées, le premier juge a, à juste titre, déclaré la contestation irrecevable au motif que les époux [J] ne justifiaient pas de la dénonciation de l’assignation introductive d’instance à l’huissier instrumentaire dans les formes et délai légaux.

A hauteur de cour, les appelants justifient de la lettre recommandée adressée à l’huissier de justice ayant pratiqué les saisies-attributions, lettre du 22 mars 2022, soit datée du même jour que l’acte d’assignation devant le juge de l’exécution, et dont l’avis de réception a été signé par l’huissier destinataire le 23 mars 2022, soit du lendemain, de sorte que la preuve est rapportée, à hauteur de cour, de la recevabilité de la contestation des saisies-attributions litigieuses.

Au fond

Les époux [J] font valoir que :

l’ensemble des échéances de 125 euros en règlement de la dette locative ont été payées conformément à l’échéancier sur 36 mois fixé par le juge des contentieux de la protection, étant rappelé qu’elles n’avaient à être réglées que dans le courant du mois ;

par erreur, le premier juge a indiqué en page 4 de son jugement qu’ils avaient reconnu avoir reçu la mise en demeure, alors qu’en page 2, il avait mentionné leur contestation à ce sujet ; que la créancière ne justifie pas de la preuve de la réception de cette mise en demeure adressée par courriel ; qu’en outre elle ne répond pas aux exigences des articles 1344 et suivants du code civil notamment quant à la nature et à la précision de la somme réclamée ;

à titre subsidiaire, qu’ils ont parfaitement respecté les délais impartis, détaillant leurs quatre règlements intervenus au mois de janvier 2022 selon quittance délivrée par la bailleresse.

En réplique, Mme [V] soutient que :

les demandes d’annulation des saisies-attributions doivent être déclarées irrecevables faute de précision de leur fondement juridique ;

les loyers des mois d’octobre 2021 à janvier 2022 n’ont jamais été payés en temps et en heure alors qu’ils devaient l’être le 1er du mois aux termes du bail ; la mise en demeure, n’était prévue par le jugement, au demeurant sans formes, qu’en ce qui concerne le paiement de l’arriéré et non du loyer courant, dû en vertu du bail ; qu’elle a adressé en ce sens un courriel le 2 janvier 2022 ; à compter du mois de février 2022, l’indemnité d’occupation fixée par le tribunal était due.

La fin de non-recevoir opposée par l’intimée aux appelants quant aux demandes de nullité des saisies-attributions est sans objet, les appelants se bornant à solliciter la mainlevée et non pas l’annulation des saisies-attributions.

Aux termes de l’article L. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail.

Il convient donc de déterminer si, à la date à laquelle ont été pratiquées les deux saisies-attributions, soit les 16 et 22 février 2022, la créance de Mme [V] visée aux décomptes joints aux procès-verbaux était exigible. L’intimée soutient avoir adressé aux appelants une mise en demeure par courriel du 2 janvier 2022, certes envoyé sur l’e-mail suivant : [Courriel 5], sur laquelle Mme [V] avait déjà envoyé aux appelants de semblables mises en demeure les 5 novembre et 26 décembre 2021. Cependant, comme le rappelle l’intimée elle-même, le jugement du 8 octobre 2021 prévoyait en son dispositif :

« AUTORISE les époux [J] à s’acquitter de cette somme [la dette locative de 4450,71 euros] au moyen de 36 mensualités consécutives d’un montant minimum de 125 euros, chaque mensualité étant payable, en plus du loyer courant, dans le courant de chaque mois et pour la première fois dans le courant du mois de novembre 2021, la 36ème mensualité correspondant au solde de la dette.

RAPPELLE que conformément à l’article 1343-5 du code civil, la présente décision suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier et que les majorations d’intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d’être dues pendant le délai fixé par la présente décision.

DIT qu’à défaut de règlement d’une seule mensualité à son échéance, suivie d’une mise en demeure restée infructueuse durant quinze jours, l’intégralité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible. »

Il en résulte que l’envoi d’une mise en demeure, prévu certes sans formalités particulières, n’était exigé qu’en ce qui concerne la mensualité d’apurement de 125 euros, mais également que ce n’était qu’en cas de défaut de règlement d’une seule mensualité de 125 euros à son échéance, soit dans le courant du mois, que l’intégralité des sommes restant dues deviendrait immédiatement exigible.

Or l’examen du décompte des sommes en principal joint aux saisies-attributions (pièces n°4 et 5 appelants) ainsi que la quittance délivrée par Mme [V] aux époux [J] le 26 janvier 2022 (pièce n°12 appelants) permet de constater que la mensualité de 125 euros (augmentée à 135,92 euros le 3 janvier 2022) a été réglée par les époux [J], conformément au dispositif du jugement, les 2 novembre 2021, 1er décembre 2021, 3 janvier et 2 février 2022, par conséquent à bonne date. Ce n’est que le solde du loyer qui a été réglé tardivement le 26 janvier 2022. Mais précisément, et Mme [V] le revendique, l’exigence d’une mise en demeure demeurée infructueuse durant quinze jours pour mettre en ‘uvre la clause résolutoire ne s’appliquait qu’aux mensualités d’apurement de la dette locative et non aux loyers courants. Par conséquent, aux dates des 16 et 22 février 2022, Mme [V] ne pouvait se prévaloir d’un titre exécutoire constatant une créance exigible pour faire pratiquer des saisies-attributions, alors que le jugement avait suspendu les procédures d’exécution pendant les délais octroyés.

Il y a donc lieu de donner mainlevée des saisies-attributions pratiquées les 16 et 22 février 2022.

Sur la demande en dommages-intérêts de l’intimée

Mme [V] soutient être victime d’un véritable acharnement procédural de la part des époux [J], qui l’ont accusée faussement d’une part d’une tentative d’effraction de leur domicile, en obtenant frauduleusement une attestation mensongère de leur voisine Mme [S], d’autre part d’avoir reloué la place de parking qu’elle leur donnait à bail, alors qu’elle a attendu leur libération des lieux pour le faire.

Les époux [J] font valoir que Mme [V] a adopté un comportement abusif et menaçant à leur égard, forçant leur porte d’entrée et multipliant les saisies indûment ; ils soulèvent l’irrecevabilité de la demande de dommages-intérêts faute de précision de son fondement juridique et indiquent avoir volontairement quitté les lieux le 20 avril 2023 alors que Mme [V] leur refusait toute quittance, entravant leurs recherches de relogement.

Quoi qu’il en soit, l’issue du litige conduit la cour à débouter l’intimée de sa demande en dommages-intérêts.

Sur les demandes accessoires

L’issue du litige commande de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de condamner Mme [V] aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’une indemnité globale de 2000 euros aux époux [J] en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, en compensation de leurs frais irrépétibles de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare recevable la contestation des saisies-attributions pratiquées les 16 et 22 février 2022 à la requête de Mme [O] [V] ;

Ordonne la mainlevée de ces saisies-attributions ;

Déboute Mme [O] [V] de sa demande en dommages-intérêts ;

Condamne Mme [O] [V] à payer à M. [L] [J] et Mme [F] [G] épouse [J] la somme globale de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [O] [V] aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier, Le président,

 


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