REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 10
ARRÊT DU 29 JUIN 2023
(n° , 14 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général
N° RG 22/06972 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFTGP
Décision déférée à la cour
Jugement du 03 mars 2022-Juge de l’exécution de PARIS-RG n° 21/81745
APPELANTS
Monsieur [F] [O]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
Ayant pour avocat plaidant Me Isabelle ARMAND, avocat au barreau de PARIS
Madame [U] [N] épouse [O]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
Ayant pour avocat plaidant Me Isabelle ARMAND, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
Madame [T] [W] veuve [N]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Sabine CHARDON, avocat au barreau de PARIS, toque : R101
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 31 mai 2023, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Catherine LEFORT, conseiller, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER
ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 10 octobre 2014, M. [R] [N] est décédé, laissant pour lui succéder son épouse, Mme [T] [W], et leurs deux filles, [U] et [X] [N]. Mme [U] [N] et son époux, M. [F] [O], résident dans un appartement situé [Adresse 2] qui appartenait au défunt, et ont signé à ce titre un prêt à usage ou commodat par acte notarié du 9 octobre 2014.
Par arrêt du 21 novembre 2018, la cour d’appel de Paris a notamment :
– infirmé le jugement du 9 février 2017 en ce qu’il a :
déclaré nuls la procuration signée par [R] [N] le 9 septembre 2014 et le commodat du 9 octobre 2014 pour insanité d’esprit,
condamné in solidum M. et Mme [O] à payer à Mme [W] la somme de 212.300 euros à titre d’indemnité pour l’occupation de l’appartement du [Adresse 2] au cours de la période du 18 février 2015 jusqu’au 30 novembre 2016,
condamné Mme [U] [N] épouse [O] à restituer à la succession de M. [R] [N] les lots 9, 10, 62, 68, 93 et 102 manquant à l’inventaire du 15 avril 2016, dans les 30 jours de la signification du jugement et sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé ce délai,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
– déclaré valide la procuration signée par M. [R] [N] afin de commodat et le contrat de commodat consécutif,
– débouté Mme [W] et Mme [X] [N] de leurs demandes de résiliation du commodat et de paiement d’une indemnité d’occupation,
– condamné Mme [U] [O] à restituer à Mme [W] les lots 9, 10, 62, 68, 93 et 102 manquant à l’inventaire du 15 avril 2016, dans les 30 jours de la signification de l’arrêt et sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé ce délai et pendant 120 jours,
– confirmé le jugement en ce qu’il a condamné M. et Mme [O] à restituer à Mme [W] l’intégralité des meubles meublant le domaine [Adresse 5], propriété de Mme [N], selon la liste dressée en pièce 93, ainsi que les lots 103, 104, 105 et 106, biens propres de celle-ci inventoriés dans l’appartement du [Adresse 2] et le tableau d’Utrillo intitulé « Le maquis de Montmartre », à leurs frais exclusifs, au lieu désigné par Mme [N], dans les 30 jours de la signification du jugement et sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé ce délai et pendant 120 jours, SAUF en ce qui concerne les objets suivants mentionnés dans la liste dressée en pièce 93 : assiettes en faïence appartenant à [F], 3 vues d’optique XVIIIème, toutes les aquarelles et gravures, grande gravure XVIIIème.
Par arrêt du 18 décembre 2019, la Cour de cassation a cassé partiellement cet arrêt en ce qu’il rejette les demandes en résiliation du commodat et en paiement d’une indemnité d’occupation formées par Mmes [W] et [X] [N], et a renvoyé l’affaire devant la cour d’appel de Paris autrement composée.
Par arrêt du 6 mai 2021, en appel d’un jugement du juge de l’exécution du tribunal de Paris du 19 juin 2018, la cour d’appel de Paris a notamment :
liquidé l’astreinte prononcée par jugement du 9 février 2017 portant sur les biens propres de Mme [W] pour la période du 1er mai au 28 août 2017 à la somme de 60.000 euros,
enjoint à M. et Mme [O] de restituer à Mme [W] à son domicile de Madrid, dans les 30 jours de la signification de l’arrêt, et passé ce délai, sous astreinte de 2.000 euros par jour de retard pendant 120 jours, les lots 103 à 106 inventoriés dans l’appartement du [Adresse 2] et un certain nombre de meubles meublants provenant du domaine de Laporte énumérés au dispositif,
rejeté les demandes de liquidation des astreintes prononcées par l’arrêt du 21 novembre 2018.
Le 28 mai 2021, Mme [W] a fait délivrer à M. et Mme [O] un commandement de payer aux fins de saisie-vente, pour avoir paiement de la somme d’environ 50.000 euros, en exécution de cet arrêt. Puis, le 2 juin 2021, elle a fait pratiquer quatre saisies-attributions sur les comptes bancaires de Mme [O] et celui de M. [O] pour environ 51.000 euros.
Par acte d’huissier du 11 juin 2021, M. et Mme [O] ont fait assigner Mme [W] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris aux fins d’obtenir le séquestre de la somme de 43.327,39 euros qu’ils reconnaissent devoir en exécution de l’arrêt du 6 mai 2021, ainsi que des délais de paiement sur 24 mois. Mme [W] a formé des demandes reconventionnelles.
Par jugement du 3 mars 2022, le juge de l’exécution a :
dit irrecevable la demande de séquestre ;
rejeté la demande de délais de paiement ;
liquidé à la somme de 166.000 euros l’astreinte prononcée par l’arrêt du 6 mai 2021, au titre de la période allant du 8 juillet 2021 au 28 septembre 2021 ;
condamné solidairement M. et Mme [O] à verser cette somme à Mme [W] ;
dit que l’injonction faite à M. et Mme [O] par l’arrêt du 6 mai 2021 de restituer les objets suivants est assortie d’une nouvelle astreinte globale de 1.000 euros pendant 100 jours à compter du 30ème jour suivant la signification du jugement :
tableau de sous-bois à l’automne de [B] [M],
gravure et beau cadre Louis XII à cheval (cliché 6000),
terrine en porcelaine polychrome en forme de canard,
faïence polychrome,
4 fauteuils style Louis XV,
2 assiettes en faïence de Moustiers (cliché 5858),
2 assiettes en faïence à décor d’oiseau,
service de table en faïence à motif floral peint en rouge,
2 chaises XVIIIe,
verres ;
rejeté la demande d’astreinte pour assortir l’injonction faite aux époux [O] par l’arrêt du 21 novembre 2018 de restituer à Mme [W] les lots 9, 10, 62, 68, 93 et 102 dont elle est usufruitière ;
rejeté la demande de dommages-intérêts des époux [O] ;
dit irrecevable la demande en paiement de frais d’exécution forcée ;
condamné solidairement M. et Mme [O] à verser à Mme [W] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
Par déclaration du 4 avril 2022, M. et Mme [O] ont formé appel de ce jugement.
Par arrêt du 31 août 2022, la cour d’appel de Paris, statuant comme cour de renvoi après cassation, a débouté Mme [W] et Mme [X] [N] de leur demande de résiliation du commodat consenti par M. [R] [N] à M. et Mme [O] le 9 octobre 2014 portant notamment sur l’appartement situé [Adresse 2] et de leur demande en paiement d’indemnités d’occupation.
Par dernières conclusions du 29 mars 2023, Mme [U] [N] épouse [O] et M. [F] [O] demandent à la cour de :
À titre principal,
annuler le jugement du 3 mars 2022, cette décision étant la suite et l’exécution du jugement du 9 février 2017 et de l’arrêt du 6 mai 2021 ;
écarter dès lors l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt du 6 mai 2021 au regard des dispositions de l’arrêt de la cour d’appel de renvoi du 31 août 2022 statuant sur le jugement du 9 février 2017, qui a constaté la validité de la procuration signée par M. [N] pour passer le commodat et a débouté Mme [W] de sa demande de résiliation du commodat ;
débouter Mme [W] de toutes ses demandes, fins et conclusions aussi injustifiées qu’infondées ;
À titre subsidiaire,
infirmer le jugement du 3 mars 2022 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a rejeté la demande d’astreinte assortissant l’injonction de restituer à Mme [W] les lots 9, 10, 62, 68, 93 et 102 dont elle est usufruitière, rejeté la demande de dommages-intérêts et dit irrecevable la demande en paiement de frais d’exécution forcée ;
juger que les demandes de Mme [W] de liquidation d’astreinte et de fixation d’une nouvelle astreinte sont mal fondées ;
débouter Mme [W] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions, notamment de condamnations et de liquidation d’astreinte ;
À défaut, à titre subsidiaire :
infirmer le jugement du 3 mars 2022 en ce qu’il a liquidé à la somme de 166.000 euros l’astreinte prononcée par l’arrêt du 6 mai 2021 au titre de la période allant du 8 juillet 2021 au 28 septembre 2021 ;
fixer la liquidation de cette astreinte à la somme de 5.000 euros ;
fixer la nouvelle astreinte à la somme de 10 euros par jour pendant 30 jours à compter du trentième jour suivant la signification de l’arrêt ;
À titre encore plus subsidiaire,
séquestrer la somme due par les débiteurs à hauteur de 43 327,39 euros ;
échelonner le paiement de 43.327,39 euros sur une durée de 24 mois au titre d’un délai de grâce ;
En tout état de cause,
débouter Mme [W] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
condamner Mme [W] à leur payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et en dépens de l’instance.
Par dernières conclusions du 11 avril 2023, Mme [W] veuve [N] demande à la cour d’appel de :
confirmer le jugement du 3 mars 2022 en ce qu’il a débouté M. et Mme [O] de leurs demandes de séquestre et de délais de paiement, a fixé une nouvelle astreinte de 1.000 euros pendant 100 jours et a condamné M. et Mme [O] au paiement d’une somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
l’infirmer pour le surplus,
Statuant à nouveau,
liquider l’astreinte prononcée par l’arrêt définitif du 6 mai 2022 [2021] à la somme de 240.000 euros, à savoir 42.000 euros pour la 1ère période du 18 juin 2021 au 8 juillet 2021 + 198.000 euros pour la 2ème période du 9 juillet 2021 au 5 octobre 2021 ;
liquider la nouvelle astreinte prononcée par le jugement du 3 mars 2022, de 1.000 euros par jour de retard, à compter du 30ème jour suivant la signification du jugement, à la somme de 100.000 euros, au titre de la période du 1er juillet 2022 au 8 octobre 2022 ;
liquider l’astreinte prononcée par l’arrêt du 21 novembre 2018 à la somme de 120.000 euros, au titre de la période du 1er août 2022 au 28 novembre 2022 ;
condamner solidairement M. et Mme [O] à lui verser ces sommes ;
condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et préjudice moral ;
À titre subsidiaire, en cas de délai de grâce octroyé pour payer,
fixer le délai de grâce à 1 an à avec prise d’effet à compter de la date du jugement à venir, à titre subsidiaire à compter du jour suivant sa signification ;
débouter M. et Mme [O] de leur demande de séquestre des échéances à payer ;
ordonner la déchéance du terme ;
ordonner l’inscription d’une hypothèque judiciaire d’un montant de 43.327,39 euros et de 240.000 euros, en principal avec intérêts au taux légal et frais sur l’appartement du [Adresse 2] au 2ème étage, lot 3, uniquement sur la quote-part des droits successoraux futurs de Mme [O] à son profit, afin de garantir le respect des échéances accordées et plus généralement le paiement de la dette au sens de l’article 1343-5 alinéa 2 du code civil ;
prononcer l’interdiction à M. et Mme [O] de contracter de nouveaux crédits ou d’utiliser un crédit renouvelable, afin de garantir le paiement des échéances accordées, pendant toute la durée du délai de grâce ;
condamner M. et Mme [O] à prendre en charge l’intégralité des frais d’un éventuel séquestre de meubles et/ou des échéances à payer et des frais de prise d’hypothèque judiciaire ;
En tout état de cause,
condamner in solidum M. et Mme [O] à lui payer la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les frais et honoraires de l’huissier restés à sa charge, soit 101,64 euros, 53,64 euros, 288,76 euros et 2.331,19 euros au titre des saisies-attributions et aux dépens de l’instance.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande d’annulation du jugement
Les époux [O] font valoir que le principe de l’astreinte et sa liquidation sont remis en cause en raison de l’absence d’autorité de la chose jugée de l’arrêt du 6 mai 2021 à la suite de l’arrêt de renvoi du 31 août 2022 qui a validé le commodat sur l’appartement et les meubles qui avait été conclu jusqu’au 31 décembre 2022, puisque c’est en considération de sa nullité qu’ils avaient été condamnés à restituer les meubles sous astreinte.
Mme [W] estime qu’en raison du caractère irrévocable et exécutoire de l’arrêt du 6 mai 2021, contre lequel aucun pourvoi en cassation n’a été formé et qui a bien autorité de la chose jugée, et de l’effet dévolutif de l’appel, la cour d’appel est saisie de l’entier litige porté par les époux [O] devant le juge de l’exécution.
Contrairement à ce que soutiennent les appelants, l’arrêt du 31 août 2022, qui a rejeté la demande de résiliation du commodat, n’a pas d’incidence sur le sort des astreintes. La validité du commodat est définitivement acquise depuis l’arrêt de la Cour de cassation du 18 décembre 2019 qui a rejeté le moyen du pourvoi faisant grief à l’arrêt du 21 novembre 2018 d’avoir déclaré ce prêt à usage valide en infirmant le jugement qui l’avait annulé. Pour autant, il ne saurait être considéré, comme le font les époux [O], que les obligations de restitution sous astreinte ont pris fin et que les demandes de liquidation d’astreinte sont dépourvues de base légale. C’est en vain qu’ils font valoir que les restitutions n’avaient été ordonnées qu’en considération de l’annulation du commodat, alors qu’au contraire, la cour d’appel, dans son arrêt du 21 novembre 2018, a maintenu les condamnations à restitution sous astreinte, bien qu’elle ait validé le commodat et rejeté la demande de résiliation de ce contrat. La Cour de cassation n’a pas remis en cause ces condamnations qui n’étaient pas critiquées devant elle. Les parties étaient d’ailleurs dans la même situation (s’agissant de la validité du commodat) lorsque l’arrêt du 6 mai 2021 a été rendu et les époux [O] n’ont pas formé de pourvoi en cassation contre cet arrêt qui a liquidé l’astreinte et fixé une nouvelle astreinte.
C’est donc à tort que les appelants font valoir qu’il n’y a pas de restitution possible, les condamnations y relatives étant irrévocables et l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt du 6 mai 2021 ne pouvant être remise en cause. La demande d’annulation du jugement du juge de l’exécution pour ce motif ne peut qu’être rejetée.
Sur les demandes de liquidation d’astreinte
Aux termes de l’article L.131-4 alinéa 1er du code des procédures civiles d’exécution, le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter.
L’article L.131-4 alinéa 3 dispose que l’astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient, en tout ou partie, d’une cause étrangère.
Cette mesure, qui est indépendante des dommages et intérêts, a uniquement un but comminatoire et est destinée à contraindre le débiteur à s’exécuter par une menace de condamnation. Elle n’a aucune vocation à le punir ni à indemniser le créancier d’un préjudice.
Il incombe au débiteur de rapporter la preuve qu’il a exécuté les obligations assorties de l’astreinte ou qu’il s’est heurté à une cause étrangère ou a rencontré des difficultés pour s’exécuter.
1) Sur la liquidation de l’astreinte prononcée par l’arrêt du 6 mai 2021
Le juge de l’exécution a estimé que l’arrêt du 6 mai 2021 ayant été signifié aux époux [O] le 21 mai 2021, l’astreinte avait commencé à courir le 20 juin 2021 pour une période de 120 jours allant jusqu’au 18 octobre 2021, que sa liquidation n’est demandée qu’au titre de la période allant jusqu’au 28 septembre 2021, d’une durée de 100 jours, de sorte que l’astreinte encourue sur cette période est donc de 200.000 euros (100 x 2.000). Il a retenu que le moyen des époux [O] selon lequel ils ont déjà restitué en juin 2017 plusieurs meubles était irrecevable en ce qu’il tendait à remettre en cause l’autorité de chose jugée attachée à l’arrêt du 6 mai 2021 ; que Mme [W] reconnaissait avoir reçu en restitution le 8 juillet 2021 deux des quinze objets ou meubles visés à l’arrêt du 6 mai 2021 ; que l’affirmation des époux [O] selon laquelle ils ont restitué le 8 juillet 2021 plusieurs des meubles figurant à la liste dressée par la cour d’appel qui leur ont ensuite été renvoyés n’était pas démontrée par le constat d’huissier du 2 juillet 2021, en l’absence notamment de la production d’une lettre de voiture circonstanciée ; que les époux [O] n’alléguaient aucune difficulté ni cause étrangère ; que, au titre de la période de 18 jours allant du 20 juin 2021 au 8 juillet 2021, l’astreinte devait être liquidée à son taux plein pour 36.000 euros (18 x 2.000) puisqu’il n’existait aucune raison légalement admissible de supprimer ou réduire son taux et que, au titre de la période de 75 jours allant du 9 juillet 2021 au 22 septembre 2022, l’astreinte devait être liquidée à la somme forfaitaire de 130.000 euros (150.000 x (15-2) / 15) pour tenir compte de l’exécution partielle.
Les époux [O] estiment que les demandes de liquidation d’astreinte et de fixation d’une nouvelle astreinte ne sont pas fondées puisqu’ils ont exécuté l’arrêt du 6 mai 2021 en restituant 2 assiettes en faïence de Moustiers, 2 assiettes en faïence à décor d’oiseau, un service de table en faïence à motif floral peint en rouge, 2 chaises XVIIIème, un bureau de pente Charles X, une console d’applique Louis XVI, tandis que le tableau de sous-bois à l’automne de [B] [M], la gravure et beau cadre Louis XII à cheval, les terrines en porcelaine polychrome en forme de canard, la faïence polychrome et les 4 fauteuils style Louis XV ont été restitués mais refusés par Mme [W]. Ils ajoutent que le juge de l’exécution aurait dû apprécier le caractère proportionné de l’atteinte portée au droit de propriété du débiteur au regard du but légitime poursuivi par l’astreinte, et qu’en l’espèce, le montant de l’astreinte liquidée et celui de la nouvelle astreinte sont en totale disproportion avec l’enjeu du litige, la valeur des meubles, dont Mme [W] n’a nul besoin pour vivre, étant estimée à 3.550 euros.
Par arrêt du 6 mai 2021, la cour d’appel de Paris a enjoint à M. et Mme [O] de restituer à Mme [W] à son domicile de Madrid, dans les 30 jours de la signification de l’arrêt, et passé ce délai, sous astreinte de 2.000 euros par jour de retard pendant 120 jours :
– les lots 103 à 106 inventoriés dans l’appartement du [Adresse 2],
– les objets ou meubles suivants provenant du domaine de Laporte :
gravure et beau cadre Louis XII à cheval (cliché 6000)
console d’applique Louis XVI en bois naturel sculpté (cliché 5856,13)
2 assiettes en faïence de Moustiers (cliché 5858)
2 assiettes en faïence à décor d’oiseau
service de table en faïence à motif floral peint en rouge
verres
terrine en porcelaine polychrome en forme de canard
bureau de pente Charles X bois clair
2 chaises XVIIIème
tableau de sous-bois à l’automne de [B] [M]
faïence polychrome
4 fauteuils style Louis XV.
Il n’est pas contesté que cet arrêt a été signifié aux époux [O] le 21 mai 2021. L’astreinte a donc commencé à courir le 21 juin 2021, et ce pendant 120 jours, soit jusqu’au 19 octobre 2021. C’est en vain que Mme [W] se prévaut d’une date de signification au 18 mai, faisant courir l’astreinte à compter du 18 juin, dès lors qu’il ressort des actes d’exécution de cet arrêt que la date du 18 mai correspond à la date de notification d’avocat à avocat, qui ne fait pas courir l’astreinte.
Mme [W] indique renoncer à la restitution des lots 103 à 106 lui appartenant en propre, admettant qu’ils lui ont déjà été restitués le 19 juin 2017. L’astreinte doit donc être supprimée pour ces biens.
Mme [W] reconnaît en outre avoir reçu restitution, le 8 juillet 2021, des meubles suivants :
– la console d’applique Louis XVI en bois naturel sculpté
– le bureau de pente Charles X bois clair.
Les parties s’accordent également sur le fait que le 8 juillet 2021, Mme [W] a refusé des meubles et objets.
Il résulte d’une attestation (pièce 19 appelants) datée du 8 juillet 2021 émanant de Mme [W] (dont l’authenticité de la signature est toutefois contestée par les appelants eux-mêmes, rapport d’expertise privée en écritures à l’appui, tandis que Mme [W] confirme, dans un acte notarié du 27 septembre 2021, avoir signé cette attestation), contresignée par deux témoins, qu’un camion en provenance de Paris s’est présenté à son domicile à Madrid pour lui livrer des meubles, que de tous les meubles et objets déchargés, seuls deux correspondaient à la liste dressée par la cour d’appel de Paris, et que les autres n’étant pas sa propriété, elle les a refusés. Elle a joint les photographies des meubles acceptés et celles de ceux refusés.
Les époux [O] produisent en pièce 17 des procès-verbaux de constats d’huissier en date des 2 juillet et 17 septembre 2021 portant inventaires des meubles qui vont être acheminés à Madrid, puis de ceux qui sont revenus à leur domicile parisien, avec photographies. Il s’avère que les deux inventaires (avant/après) sont identiques. Il s’agit :
– d’une commode trois tiroirs avec un dessus marbre
– d’une bergère [en réalité un fauteuil d’après les photos] en velours couleur moutarde
– d’un secrétaire avec vitrine et son dessus marbre
– de deux chaises avec assise de couleur verte
– d’un tableau représentant un lac et au fond une maison
– d’un trumeau en bois avec miroir.
Cette liste correspond exactement aux meubles refusés dont Mme [W] fait état dans son attestation du 8 juillet 2021.
Force est de constater que, comme le soutient l’intimée, il ne s’agit nullement des meubles objet de l’injonction de restituer selon arrêt du 6 mai 2021. Les époux [O] ne sauraient en toute bonne foi prétendre avoir ainsi restitué les meubles ou objets suivants :
gravure et beau cadre Louis XII à cheval (cliché 6000)
terrine en porcelaine polychrome en forme de canard
tableau de sous-bois à l’automne de [B] [M]
faïence polychrome
4 fauteuils style Louis XV.
Mme [W] produit d’ailleurs la photo du tableau de [B] [M] qui montre qu’il ne correspond pas du tout au « tableau représentant un lac et au fond une maison ».
Ainsi, les époux [O] ne peuvent se prévaloir du refus de Mme [W] ni soutenir utilement que les meubles refusés correspondraient bien à la liste de biens citée par la cour d’appel dans son arrêt du 6 mai 2021.
Selon M. et Mme [O], ont également été restitués, en juin 2017 :
– 2 assiettes en faïence de Moustiers
– 2 assiettes en faïence décor d’oiseau
– le service de table en faïence à motif floral peint en rouge
– 2 chaises XVIIIème.
Ils se prévalent d’un procès-verbal de constat d’un notaire espagnol, établi le 19 juin 2017 à la demande de Mme [W], qui énumère les meubles et objets (13 lots) déchargés chez cette dernière à cette date et comporte des photographies en annexe. S’y trouvent notamment les lots 103 à 106 visés par l’arrêt du 6 mai 2021 dont la restitution n’est pas contestée. Les époux [O] soutiennent que le « lot de plats en céramique et verres en plastique non réclamés » inclut les 2 assiettes en faïence de Moustiers, les 2 assiettes en faïence décor d’oiseau et le service de table en faïence à motif floral peint en rouge et les verres, et que les « 2 chaises paillées XVIII » correspondent aux 2 chaises XVIIIème de la liste de l’arrêt du 6 mai 2021.
S’agissant des objets en faïence et des verres (en plastique), la mention « non réclamés », qui implique un refus de Mme [W], montre qu’il ne s’agit pas des objets à restituer et la comparaison des photographies exclut d’ailleurs toute correspondance. En revanche, il ressort des inventaires de Mme [W] (la pièce 93 qu’elle avait produite devant le tribunal en 2017) que les deux chaises XVIIIe, dont elle demande toujours la restitution, correspondent nécessairement aux deux chaises paillées XVIIIe qui lui ont été restituées le 19 juin 2017, car il n’y a pas d’autres chaises XVIIIe dans l’inventaire. En outre, la photographie des chaises paillées figurant en annexe du constat notarié du 19 juin 2017 correspond à celle insérée dans l’estimation de valeur du commissaire-priseur du 29 mars 2023 (pièce 40 appelants) avec l’intitulé « 2 chaises XVIIIème ».
Si le juge de l’exécution, ni partant, la cour d’appel statuant avec les mêmes pouvoirs, ne peuvent modifier le dispositif de la décision servant de fondement aux poursuites, ils peuvent néanmoins supprimer l’astreinte en cas d’impossibilité absolue d’exécuter l’ordre judiciaire assorti de cette astreinte. C’est donc à juste titre que les époux [O] font valoir qu’ils ne peuvent restituer ce qu’ils ont déjà restitué, du moins pour ces deux chaises uniquement.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que les appelants n’ont toujours pas restitué à Mme [W] les objets ou meubles suivants provenant du domaine de Laporte :
gravure et beau cadre Louis XII à cheval (cliché 6000)
2 assiettes en faïence de Moustiers (cliché 5858)
2 assiettes en faïence à décor d’oiseau
service de table en faïence à motif floral peint en rouge
verres
terrine en porcelaine polychrome en forme de canard
tableau de sous-bois à l’automne de [B] [M]
faïence polychrome
4 fauteuils style Louis XV,
étant rappelé qu’ils n’ont, à la suite de l’arrêt du 6 mai 2021, restitué que deux biens meubles le 8 juillet 2021.
Mme [W] sollicite la liquidation de l’astreinte en distinguant deux périodes :
– du 18 juin au 8 juillet 2021 : 2000 euros x 21 jours = 42.000 euros,
– du 9 juillet au 5 octobre 2021 : 2.000 euros x 99 jours = 198.000 euros,
soit un total de 240.000 euros.
Compte tenu notamment de ce qui précède sur le point de départ de l’astreinte, il conviendra en réalité de distinguer les périodes suivantes :
– du 21 juin au 7 juillet 2021, soit 17 jours, pendant laquelle aucune exécution n’a eu lieu,
– du 8 juillet au 18 octobre 2021, soit 103 jours, au cours de laquelle deux meubles ont été restitués.
Toutefois, les époux [O] justifiant être dans l’impossibilité de restituer les deux chaises du XVIIIe provenant du domaine de Laporte ainsi que les lots 103 à 106 inventoriés dans l’appartement parisien, déjà restitués, l’astreinte ne peut, même sur la première période être liquidée à taux plein comme l’a fait le premier juge, et peut être réduite à 1.400 euros x 17 jours, soit 23.800 euros. Sur la deuxième période, il convient de prendre en compte tant cette impossibilité d’exécution partielle que l’exécution partielle concernant deux meubles, de sorte que l’astreinte peut être liquidée à la somme de 1.100 euros x 103 jours = 113.000 euros. Le total s’élève donc à la somme de 136.800 euros.
Cependant, les époux [O] invoquent à juste titre le caractère disproportionné de cette astreinte eu égard à la valeur vénale des biens litigieux et à l’enjeu du litige, s’agissant de meubles et objets d’ornement, sans utilité impérieuse pour leur propriétaire, Mme [W], qui manifestement y attache néanmoins une forte valeur sentimentale depuis le décès de son époux, mais en use surtout pour alimenter son ressentiment à l’égard de sa fille cadette.
Il y a donc lieu de ramener l’astreinte liquidée à de plus justes proportions, soit 50.000 euros.
Il convient donc d’infirmer le jugement en ce qu’il a liquidé l’astreinte à la somme de 166.000 euros et de la liquider à la somme totale de 50.000 euros. M. et Mme [O] seront donc condamnés in solidum au paiement de cette somme.
2) Sur la fixation d’une nouvelle astreinte et la liquidation de l’astreinte prononcée par le jugement dont appel
L’ordre judiciaire résultant de l’arrêt du 6 mai 2021 n’étant toujours pas exécuté en totalité, c’est à bon droit que le premier juge a fixé une nouvelle astreinte.
Néanmoins, c’est à juste titre que les époux [O] font valoir que le montant de la nouvelle astreinte fixé par le premier juge (1000 euros par jour de retard) est disproportionné au regard de la valeur des meubles et de l’enjeu du litige.
Il convient donc d’infirmer le jugement sur ce point et d’assortir l’injonction de restitution des biens propres de Mme [W], énumérés au dispositif de la présente décision, d’une nouvelle astreinte de 300 euros par jour de retard, passé un délai de deux mois suivant la signification du présent arrêt, et pendant 100 jours.
L’astreinte prononcée par le premier juge n’étant pas confirmée, elle ne peut être liquidée.
Mme [W] sera donc déboutée de sa demande de liquidation de l’astreinte prononcée par le juge de l’exécution.
3) Sur la liquidation de l’astreinte prononcée par l’arrêt du 21 novembre 2018
Le juge de l’exécution a rejeté la demande de Mme [W] de nouvelle astreinte assortissant l’injonction de restitution des meubles entrant dans la succession de son époux, aux motifs que dans son arrêt du 6 mai 2021, la cour d’appel avait estimé nulle la signification de l’arrêt du 21 novembre 2018 et que Mme [W] ne justifiait pas d’une nouvelle signification.
Mme [W] sollicite à hauteur d’appel la liquidation de l’astreinte prononcée par l’arrêt du 21 novembre 2018, à la somme de 120.000 euros au titre de la période du 1er août 2022 au 28 novembre 2022, au titre de la restitution des biens propres d'[R] [N] (lots n°9, 10, 62, 68, 93 et 102) dont elle est usufruitière.
Les époux [O] n’ont pas conclu en réponse sur cette demande.
Par arrêt du 21 novembre 2018, la cour d’appel de Paris a condamné Mme [U] [O] à restituer à Mme [W] les lots 9, 10, 62, 68, 93 et 102 manquant à l’inventaire du 15 avril 2016, à ses frais exclusifs et au lieu choisi par sa mère, dans les 30 jours de la signification de l’arrêt et sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé ce délai et pendant 120 jours.
L’intimée justifie avoir procédé à une nouvelle signification de l’arrêt du 21 novembre 2018, et ce le 1er juillet 2022 tant à l’égard de Mme [O] que de M. [O]. L’astreinte a donc commencé à courir, à l’égard de Mme [O], le 1er août 2022, et ce pendant 120 jours, soit jusqu’au 28 novembre 2022. M. [O] n’ayant pas été condamné, les demandes dirigées contre lui ne peuvent qu’être rejetées.
Les pièces produites par les parties, notamment Mme [W], qui sollicite la liquidation de l’astreinte, ne permettent pas à la cour de déterminer à quoi correspondent les lots 9, 10, 62, 68, 93 et 102 qui sont chacun désignés, par l’inventaire du 15 avril 2016, par l’intitulé « manquant ». Par conséquent, Mme [W] ne met pas la cour en mesure de constater que l’ordre judiciaire n’a pas été exécuté par Mme [O].
Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de liquidation d’astreinte de Mme [W] au titre de la restitution des biens propres de son époux.
Sur la demande de séquestre
Pour déclarer irrecevable la demande de séquestre, le premier juge a retenu que cette demande ne portait pas sur les sommes appréhendées par les saisies-attributions du 2 juin 2021 mais sur le solde dû après ces saisies et ne pouvait être formulée par le débiteur. Il a également expliqué que le séquestre des meubles n’était pas demandé dans le dispositif des conclusions et qu’en tout état de cause, une telle demande excéderait les pouvoirs du juge de l’exécution.
Les époux [O] estiment qu’au vu des procédures en partage engagées en France et en Espagne, il est nécessaire que soient mis sous séquestre, dans l’attente du partage successoral, tant les meubles que la somme d’argent sur le fondement de l’article R.211-2 du code des procédures civiles d’exécution, la part successorale de chacun des héritiers n’étant pas encore déterminée.
Mme [W] fait valoir que ses biens propres ne peuvent faire l’objet d’un séquestre, puisqu’ils ne sont pas entrés dans la société d’acquêts des époux et ne font pas partie de la succession espagnole de M. [N], et doivent lui être restitués immédiatement, de même que les lots appartenant en propre à M. [N] puisqu’elle est usufruitière de la succession de son mari.
Il résulte du dispositif des conclusions des appelants qu’ils ne demandent en réalité que la mise sous séquestre de la somme dont ils sont débiteurs à hauteur de 43.327,39 euros.
En application de l’article 954 du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer sur le séquestre des meubles, non demandé aux dispositif des conclusions.
La somme de 43.327,39 euros est celle à laquelle la dette des époux [O] au titre de l’exécution de l’arrêt du 6 mai 2021 (liquidation d’astreinte) a été arrêtée par le premier juge au vu du décompte figurant au commandement de payer aux fins de saisie-vente du 28 mai 2021 et compte tenu des versements résultant des saisies-attributions du 2 juin 2021. C’est à juste titre, et par des motifs pertinents que la cour adopte, que le juge de l’exécution a relevé que la demande de séquestre de la somme due ne portait pas sur les sommes appréhendées par les saisies-attributions mais sur le solde dû après les saisies, de sorte qu’elle est irrecevable.
La cour ajoute qu’il résulte de l’article R.211-2 du code des procédures civiles d’exécution que seules les sommes saisies peuvent être versées sur un séquestre. En outre, la demande des époux [O] s’analyse en une suspension de l’exécution de l’arrêt du 6 mai 2021, ce que le juge de l’exécution, et partant, la cour d’appel statuant avec les mêmes pouvoirs, ne peuvent pas faire en application de l’article R.121-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a déclaré irrecevable la demande de séquestre.
Sur les délais de paiement et demandes subséquentes
Pour débouter M. et Mme [O] de leur demande de délai de paiement, le premier juge a retenu que leur dette était constituée par une condamnation en liquidation d’astreinte ayant donc pour origine l’inexécution d’une injonction judiciaire, circonstance exclusive de bonne foi, et que les pièces produites n’établissaient pas que les situations financières respectives des parties autorise l’octroi de délais.
Les époux [O] expliquent, à l’appui de leur demande, qu’ils n’ont pas les moyens de payer la somme de 43.327,39 euros en une seule fois, qu’ils ont dû faire face à d’énormes dépenses en 2021, que leurs charges annuelles sont exorbitantes, si bien que leur budget est déficitaire, que la société dont ils étaient les gérants a été liquidée en 2010, tandis que Mme [W] est dans une situation confortable.
Mme [W] s’oppose aux délais, aux motifs que M. et Mme [O] ne font face à aucune difficulté financière puisqu’ils habitent gratuitement l’appartement de 380m² appartenant à la succession de M. [N] et sont propriétaires de plusieurs immeubles dans [Localité 6], dont ils perçoivent des revenus fonciers non déclarés à l’administration fiscale, que leurs enfants travaillent et ne sont plus à leur charge, qu’ils ont des dépenses annuelles qui ne correspondent pas à leurs revenus déclarés, que M. [O] exploite plusieurs sociétés qui lui rapportent des revenus de dividendes, qu’ils cachent à l’évidence leurs revenus et tentent d’organiser leur insolvabilité, étant ajouté qu’ils n’ont même pas commencé à payer leur dette pour montrer leur bonne foi. Elle ajoute qu’elle est âgée de 95 ans, a une santé fragile et une situation financière difficile car elle perçoit une rente mensuelle d’environ 4.500 euros qui est insuffisante pour payer toutes ses charges annuelles, comprenant notamment la taxe foncière de l’appartement occupé par M. et Mme [O].
Il résulte des articles 510 alinéa 3 du code de procédure civile et R.121-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution que le juge de l’exécution peut, notamment à compter de l’audience de conciliation en matière de saisie des rémunérations, accorder un délai de grâce.
Aux termes de l’article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues, dans la limite de deux années.
Les époux [O] sollicitent des délais de paiement sur la somme de 43.327,39 euros due au titre de l’exécution de l’arrêt du 6 mai 2021 qui a liquidé la première astreinte assortissant l’obligation de restituer à Mme [W] ses biens propres. Ils ont, de fait, déjà bénéficié d’un délai de deux ans depuis cette décision de justice et n’ont pas commencé à payer leur dette, ce qui fait douter de leur intention véritable.
En outre, les justificatifs de leur situation financière sont anciens et la présentation de leur budget au vu de ces justificatifs est trompeuse. En effet, ils ne font état et ne justifient que :
– de leurs charges en 2021, année au cours de laquelle ils ont eu des dépenses exceptionnelles (rénovation de deux salles de bains, sans pour autant apporter la preuve que leur assurance n’a pas pris en charge le sinistre dégât des eaux dont il est justifié),
– et de leurs revenus 2020, année lors de laquelle ils admettent avoir été impactés financièrement par le covid, M. [O] étant chef d’entreprise et Mme [O] étant interprète de conférence,
pour en déduire qu’ils ont un déficit annuel de plus de 65.000 euros, ce qui est peu crédible s’agissant d’un couple ayant des revenus confortables (ceux perçus en 2019 s’élevaient à 116.180 euros) bénéficiant d’un logement à titre gratuit (même si les charges de copropriété sont élevées).
M. et Mme [O] sont taisants sur leur situation financière en 2022 et 2023, de sorte que la cour ignore leur situation véritable.
Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté leur demande de délai de paiement.
Sur la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive
Mme [W] sollicite des dommages-intérêts pour résistance abusive à la restitution de ses biens propres, des lots de son mari au titre de son usufruit et de l’appartement dont elle a l’usufruit et le préjudice moral causé par la mise en cause de sa santé mentale par sa fille et la spéculation de celle-ci sur la destination de ses biens.
Toutefois, elle ne justifie pas de la nécessité impérieuse et urgente de récupérer les biens meubles et objets qui se trouvaient dans son Domaine de Laporte dans le Gers, ainsi que les meubles meublant l’appartement parisien de son défunt époux, alors qu’elle réside en Espagne.
Il convient donc de rejeter la demande de dommages-intérêts.
Sur les demandes accessoires
L’issue du litige justifie de confirmer les condamnations accessoires de M. et Mme [O].
Succombant en grande partie en leurs prétentions, ils seront également condamnés in solidum aux dépens d’appel.
C’est à bon droit que le juge de l’exécution a estimé que Mme [W] ne pouvait demander la condamnation des époux [O] au paiement des frais d’exécution (saisies-attributions…) puisqu’elle dispose déjà d’un titre exécutoire. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a déclaré cette demande irrecevable.
En revanche, l’équité commande en l’espèce de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
REJETTE la demande d’annulation du jugement rendu le 3 mars 2022 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris,
INFIRME ledit jugement en ce qu’il a :
– liquidé à la somme de 166.000 euros l’astreinte prononcée par l’arrêt du 6 mai 2021 et condamné les époux [O] à payer cette somme à Mme [T] [W] veuve [N],
– dit que l’injonction faite à M. et Mme [O] par l’arrêt du 6 mai 2021 de restituer les biens propres de Mme [T] [W] veuve [N] est assortie d’une nouvelle astreinte globale de 1.000 euros pendant 100 jours à compter du 30ème jour suivant la signification du jugement,
Statuant à nouveau sur ces seuls chefs,
LIQUIDE à la somme de 50.000 euros l’astreinte prononcée par l’arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 6 mai 2021 au titre de la période du 21 juin au 18 octobre 2021,
CONDAMNE en conséquence in solidum Mme [U] [N] épouse [O] et M. [F] [O] à payer cette somme à Mme [T] [W] veuve [N],
ASSORTIT l’injonction faite, par arrêt du 6 mai 2021, à Mme [U] [N] épouse [O] et M. [F] [O] de restituer à Mme [T] [W] veuve [N] ses biens propres énumérés ci-après, d’une nouvelle astreinte de 300 euros par jour de retard pendant 100 jours, passé un délai de deux mois suivant la signification du présent arrêt,
DIT que les biens restant à restituer sont les suivants :
tableau de sous-bois à l’automne de [B] [M],
gravure et beau cadre Louis XII à cheval (cliché 6000),
terrine en porcelaine polychrome en forme de canard,
faïence polychrome,
4 fauteuils style Louis XV,
2 assiettes en faïence de Moustiers (cliché 5858),
2 assiettes en faïence à décor d’oiseau,
service de table en faïence à motif floral peint en rouge,
verres ;
CONFIRME le jugement pour le surplus,
Y ajoutant,
DEBOUTE Mme [T] [W] veuve [N] de sa demande de liquidation de l’astreinte prononcée par le juge de l’exécution dans son jugement du 3 mars 2022,
DEBOUTE Mme [T] [W] veuve [N] de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,
DEBOUTE les parties de leurs demandes respectives fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE in solidum Mme [U] [N] épouse [O] et M. [F] [O] aux dépens d’appel.
Le greffier, Le président,