COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 29 JUIN 2023
N° 2023/487
N° RG 22/12168 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJ7GX
[S] [L]
C/
[F] [M]
S.E.L.A.R.L. LLC ET ASSOCIES
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me LE MORVAN
Me CHABRE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l’exécution de TOULON en date du 19 Juillet 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 21/04119.
APPELANT
Monsieur [S] [L]
né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Jean-baptiste LE MORVAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Maître [F] [M], demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Agnès CHABRE, avocat au barreau de TOULON, substituée par Me Lauriane BUONOMANO, avocat au barreau D’AIX EN PROVENCE
S.E.L.A.R.L. LLC ET ASSOCIES Prise en la personne de ses gérants, domiciliés en cette qualité audit siège., demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Agnès CHABRE, avocat au barreau de TOULON, substituée par Me Lauriane BUONOMANO, avocat au barreau D’AIX EN PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Ingrid LAVALLEE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Juin 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Juin 2023
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Ingrid LAVALLEE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Une décision du 11 avril 2014, revêtue de la formule exécutoire le 16 septembre 2014, de monsieur le Bâtonnier de l’Ordre des avocats au Barreau de Toulon fixait les honoraires dus par monsieur [S] [L] à maître [F] [M], à la somme de 4 321,82 € ttc en principal, intérêts et frais outre les frais d’huissier en cas de signification.
Le 27 mai 2021, maître [M] faisait signifier à la Caisse d’épargne de la Côte d’Azur, une saisie-attribution des sommes détenues pour le compte de monsieur [L] aux fins de paiement de la somme de 6 280,77 € en principal, intérêts et frais, sur le fondement de l’ordonnance précitée. Le 1er juin suivant, la saisie était dénoncée à monsieur [L].
Le 29 juin 2021, monsieur [L] faisait assigner monsieur [M] devant le juge de l’exécution de Toulon aux fins de mainlevée de la saisie-attribution du 27 mai 2021et de nullité du procès-verbal de saisie-attribution de la même date ainsi que de condamnation au paiement d’une indemnité de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des entiers dépens.
La Selarl LLC et Associés intervenait volontairement à l’instance.
Aux termes d’un jugement du 19 juillet 2022, le juge de l’exécution de Toulon :
– déclarait recevable la contestation de monsieur [L] et l’intervention volontaire de la Selarl LLC et Associés,
– cantonnait la saisie-attribution du 27 mai 2021 à la somme de 3 768,85 € et ordonnait la mainlevée partielle immédiate pour le surplus,
– disait n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamnait monsieur [L] aux entiers dépens sous réserve des règles applicables à l’aide juridictionnelle.
Le premier juge retient dans sa motivation que l’ordonnance de taxe du Bâtonnier du 11 avril 2014 est un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible. Seuls les versements partiels postérieurs de 1 033,34 € du 22 avril 2021 et de 432 € en décembre 2015 doivent être déduits du montant de la créance en principal de 4 321,82 €. En conséquence, il cantonnait la saisie à 3 768,85 €.
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 6 septembre 2022, monsieur [L] interjetait appel du jugement précité.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 19 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, monsieur [L] demande à la cour de :
– infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
– statuant à nouveau, prononcer la nullité de la saisie-attribution du 27 mai 2021 et ordonner sa mainlevée,
– à titre subsidiaire, cantonner la saisie attribution à la somme de 2 331,94 €,
– condamner maître [M] et le cabinet LLC et Associés au paiement d’une indemnité de 1 500 € au titre de l’application de l’article 700 du code de procédure civile et des entiers dépens de première instance et d’appel par application de l’article 699 du code civil.
Il fonde sa demande de nullité sur le défaut de titre exécutoire en l’absence d’ordonnance du président du tribunal de grande instance conférant force exécutoire à l’ordonnance de taxe.
Il fonde sa demande de mainlevée sur l’absence de créance liquide et exigible aux motifs que l’ordonnance de taxe a pour objet une somme de 4 321,82 € TTC alors que son assureur protection juridique a payé la somme de 3 960 € et qu’il a payé directement la somme de 1033,44 €.
Il conteste le montant des sommes dues à maître [M] et les factures, objet de l’ordonnance de taxe, aux motifs que deux factures du dossier n°1100593 ne sont pas produites et que les honoraires des trois autres dossiers ont été soldés. Il en conclut que le décompte de l’huissier au titre de l’exécution du jugement déféré est erroné et doit être annulé. Enfin, il fonde sa demande de cantonnement sur les paiements postérieurs à l’ordonnance de taxe des sommes de 432 €, 1033,34 €, et 524,24 €, soit une somme restant due de 2 331,94 €.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 19 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, monsieur [M] et la Selarl LLC et Associés demandent à la cour de :
– confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
– débouter monsieur [L] de toutes ses demandes,
– condamner monsieur [L] au paiement à la Selarl LLC et Associés d’une indemnité de 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.
Ils soutiennent que le défaut de titre exécutoire est une prétention nouvelle irrecevable devant la cour et qu’en tout état de cause, l’ordonnance de taxe est revêtue de la formule exécutoire depuis le 16 septembre 2014.
Ils invoquent une créance liquide et exigible de 4 321,82 € outre frais de signification à intervenir selon le dispositif de l’ordonnance de taxe revêtu de l’autorité de chose jugée et précise que les sommes payées par l’assureur protection juridique GMF ont déjà été déduites. Ils concluent à la confirmation du jugement déféré sur le cantonnement prononcé suite aux paiements postérieurs à l’ordonnance.
L’instruction de la procédure était close par ordonnance du 11 avril 2023.
MOTIVATION DE LA DÉCISION
Selon les dispositions de l’article L 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent.
– Sur le recevabilité du moyen relatif au défaut de titre exécutoire,
Selon les dispositions de l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions nouvelles adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers.
En l’espèce, les dispositions précitées de l’article 564 ne prohibent que les prétentions nouvelles devant la cour. Or, le défaut de titre exécutoire du créancier poursuivant n’est pas une prétention nouvelle mais un moyen nouveau à l’appui de la demande initiale de mainlevée de la saisie-attribution contestée.
Par conséquent, le moyen relatif au défaut de titre exécutoire des intimés est recevable devant la cour.
– Sur l’existence d’un titre exécutoire de nature à fonder la saisie contestée,
Selon les dispositions de l’article 178 du décret 91-1197 du 27 novembre 1991, dans sa version applicable à l’ordonnance de taxe du 11 avril 2014, lorsque la décision prise par le bâtonnier n’a pas été déférée au premier président de la cour d’appel, elle peut être rendue exécutoire par ordonnance du président du tribunal de grande instance à la requête, soit de l’avocat, soit de la partie.
En l’espèce, le procès-verbal de saisie-attribution du 27 mai 2021 mentionne qu’elle est fondée sur ‘ une ordonnance rendue par le président du tribunal de grande instance de Toulon statuant en matière d’honoraires en date du 11 avril 2014 revêtue de la formule exécutoire le 16 septembre 2014 par monsieur le greffier’.
Or, les intimés produisent la décision de taxe des honoraires du 11 avril 2014 revêtue de la formule exécutoire apposée par le greffier en chef, et sa notification par la voie postale selon accusé de réception signé le 25 avril 2014 par monsieur [L].
Par contre, ils n’ont manifestement pas présenté requête au président de leur juridiction et ne sont donc pas en mesure de produire son ordonnance rendant exécutoire la décision de taxe du 11 avril 2014 du Bâtonnier de l’ordre des avocats au barreau de ladite ville.
Il s’en déduit que la décision de taxe précitée ne constitue pas, à défaut d’ordonnance du président du tribunal de grande instance de Toulon, un titre exécutoire au sens des dispositions de l’article 178 du décret précité de nature à fonder la saisie-attribution contestée du 27 mai 2021.
Par conséquent, le jugement déféré doit être infirmé et la nullité de la saisie-attribution du 27 mai 2021 doit être prononcée pour défaut de titre exécutoire.
L’équité commande d’allouer à monsieur [L] une indemnité de 1 500 € au titre de ses frais irrépétibles.
Monsieur [M] et la Selarl cabinet LLC et Associés, parties perdantes, supporteront les dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant après débats en audience publique et en avoir délibéré, conformément à la loi, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,
INFIRME le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
PRONONCE la nullité de la saisie-attribution du 27 mai 2021 et Ordonne sa mainlevée,
CONDAMNE in solidum monsieur [F] [M] et la Selarl Cabinet LLC et Associés au paiement d’une indemnité de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE in solidum monsieur [F] [M] et la Selarl Cabinet LLC et Associés aux dépens de première instance et d’appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE