ARRET N°312
FV/KP
N° RG 22/02767 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GVJK
[U]
C/
[Z]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 27 JUIN 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/02767 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GVJK
Décision déférée à la Cour : jugement du 10 octobre 2022 rendu(e) par le Juge de l’exécution de [Localité 6].
APPELANT :
Monsieur [B] [U]
né le [Date naissance 3] 1967 à CASABLANCA (MAROC)
[Adresse 4]
[Localité 5]
Ayant pour avocat plaidant Me Mehdi ABDALLAH de l’AARPI TRAINEAU & ABDALLAH, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON.
INTIMEE :
Madame [D] [Z]
née le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Ayant pour avocat plaidant Me Frédéric CUIF de la SARL DESCARTES AVOCATS, avocat au barreau de POITIERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 16 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Madame [D] [Z] et Monsieur [B] [U] ont vécu en couple et ont eu deux enfants nés en 1999 et 2001.
Suivant jugement du 13 novembre 2009, le juge aux affaires familiales de [Localité 7] a donné force exécutoire à l’accord survenu entre les parents à leur séparation et fixé à 90 € par mois et par enfant la somme mensuelle due par le père pour l’entretien et l’éducation des enfants.
Par jugement rectificatif du 14 décembre 2010, le juge aux affaires familiales a précisé que les parents partageront par moitié les frais exceptionnels des enfants et les frais d’activités extra-scolaires (optique, orthodontie, psychologue, etc…).
Sur le fondement de ces décisions, Madame [D] [Z] a fait procéder, le 04 février 2022, à une saisie-attribution sur les comptes détenus par la Caisse de Crédit Mutuel des Herbiers pour le compte de Monsieur [B] [U] en paiement de la somme de 16.698,77 €.
La saisie, opérée sur un compte créditeur de 5.141,08 €, solde bancaire insaisissable déduit, a été dénoncée le 08 février 2022.
Par acte d’huissier du 1er mars 2022, Monsieur [B] [U] a donné assignation à Madame [D] [Z] en contestation de la mesure de saisie-attribution et sollicité la somme de 2.400 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
Par jugement du 10 octobre 2022, le juge de l’exécution du Tribunal judiciaire de la Roche-Sur-Yon a statué ainsi :
– Déclare recevable la contestation formée par Monsieur [B] [U] ;
– Dit que les effets de la saisie-attribution doivent être limités au paiement de la somme de 10.362,50 € ;
Donne plein et entier effet à la saisie-attribution pratiquée le 04 février 2022 entre les mains du Crédit Mutuel des Herbiers pour les sommes détenues pour le compte de Monsieur [B] [U] ;
– Condamne Monsieur [B] [U] à verser la somme de 1.500 € à Madame [D] [Z] ;
– Condamne Monsieur [B] [U] aux dépens ;
– Rejette le-surplus des demandes.
Par déclaration en date du 03 novembre 2022, Monsieur [B] [U] a relevé appel de ce jugement en visant expressément les chefs critiqués.
Par dernières conclusions en date du 11 mai 2023, Monsieur [B] [U] demande à la cour de :
Vu l’article L.121-2 du Code des procédures civiles d’exécution,
Vu l’article 700 du Code de procédure civile,
Vu les pièces du dossier,
Réformer le Jugement rendu par le juge de l’exécution près le tribunal judiciaire de la Roche sur Yon en date du 10 octobre 2022 en ce qu’il a :
– Dit que les effets de la saisie-attribution doivent être limités au paiement de la somme de 10.362,50 € ;
– Donné plein et entier effet à la saisie-attribution pratiquée le 4 février 2022 entre les mains du Crédit Mutuel des Herbiers pour les sommes détenues pour le compte de Monsieur [B] [U] ;
– Condamné Monsieur [B] [U] à verser la somme de 1500 € à Madame [D] [Z] ;
– Condamné Monsieur [B] [U] au dépens ;
– Rejeté le surplus des demandes.
Et, statuant de nouveau,
Dire et juger que la saisie-attribution litigieuse n’était pas justifiée au sens de l’article L.121-2 du Code des procédures civiles d’exécution,
Débouter Madame [D] [Z] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Condamner Madame [D] [Z] à procéder au remboursement de l’ensemble des sommes perçues par cette dernière en exécution de la saisie litigieuse,
Condamner Madame [D] [Z] à verser à Monsieur [B] [U] la somme de 3.600,00 € au titre des frais irrépétibles.
Par dernières conclusions RPVA du 12 mai 2023, contenant appel incident, Madame [D] [Z] demande à la cour de :
Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a :
– Déclaré recevable la contestation formée par Monsieur [B] [U] ;
– Dit que les effets de la saisie-attribution doivent être limités au paiement de la somme de 10.362,50 € ;
– Condamné Monsieur [B] [U] à verser la somme de 1 500 € à Madame [D] [Z] ;
– Rejeté le surplus des demandes ;
Et, statuant à nouveau,
Déclarer irrecevables comme tardives les contestations élevées par Monsieur [U] en première instance relatives au montant des sommes réclamées par Madame [Z],
Fixer à 21 036 € la somme provisionnelle arrêtée à la date de la saisie-attribution du 04 février 2022, due à Madame [Z] par Monsieur [U] au titre de sa contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants [M] et [E] [S] et des frais exceptionnels,
Débouter Monsieur [B] [U] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Condamner Monsieur [B] [U] au paiement d’une somme de 1 000 € au profit de Madame [D] [Z] à titre de dommages et intérêts,
Condamner Monsieur [B] [U] au paiement d’une amende civile dont le quantum sera déterminé par la Cour d’appel de céans,
Condamner Monsieur [B] [U] au paiement d’une somme de 3 174,91 € au titre des frais irrépétibles de première instance,
Confirmer la décision entreprise pour le surplus,
Y additant,
Déclarer irrecevables les conclusions notifiées par Monsieur [B] [U] le 11 mai 2023,
Condamner Monsieur [B] [U] au paiement d’une somme de 3 500 € au profit de Madame [D] [Z] au titre des frais irrépétibles,
Condamner Monsieur [B] [U] au paiement des entiers dépens, en ce compris les frais de la saisie, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
Lors de l’audience de plaidoirie du 16 mai 2023, l’affaire a été clôturée puis, mise en délibéré à ce jour.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. A titre liminaire, la cour indique qu’il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir sollicitée par Mme [Z] en ce qui concerne les conclusions de M. [U] signifiées par RPVA le 11 mai 2023, dès lors qu’elles sont intervenues avant clôture de l’instruction et qu’elle a pu en outre y répliquer par conclusions RPVA du 12 mai 2023, le principe du contradictoire ayant été de ce fait respecté.
Sur le montant de créance de Mme [Z]
1. Les parties maintiennent la même argumentation qu’en première instance à savoir :
2. Moyens de M. [U] :
– Mme [Z] et lui avaient convenu en septembre 2012 que chacun d’eux supporterait les charges de l’enfant qu’ils hébergeraient, écartant ainsi la pension alimentaire fixée par jugement du 13 novembre 2009, rectifié le 14 décembre 2010 ;
– Mme [Z] ne démontre ni avoir recueillir son accord, ni avoir engagé les dépenses dont elle réclame le partage par moitié ;
– Mme [Z] ne démontre pas qu’ils seraient revenus sur leur accord.
3. Moyens de Mme [Z] :
– M. [U] n’a jamais participé au paiement des frais exceptionnels depuis 2007 et a cessé de verser la contribution à l’entretien et l’éducation depuis 2012, hormis le paiement de la moitié des frais de scolarité de leur fils entre septembre 2015 et juin 2019 ;
– leur fils a été hébergé chez son père pour la période comprise entre septembre 2012 et fin 2015 laquelle est exclue du décompte de sa créance ;
– la contestation du montant des frais par M. [U] doit exclue puisque étant tardive, en application de l’article R. 211-11 du code des procédures d’exécution dès lors que M. [U] n’a pas contesté le montant des frais dans son assignation du 1er mars 2022, mais seulement dans ses conclusions du 13 juin 2022 ;
– elle justifie de l’ensemble des frais réclamés à hauteur de 9.066 € ;
– Elle estime que c’est à juste titre que le juge de l’exécution a rappelé que le jugement concernant la pension n a pas prévu que ces frais soient engagés d’un commun accord et qu’elle a systématiquement interrogé le père avant d’exposer ces dépenses lequel serait resté indifférent à ses demandes.
– Elle réclame aussi paiement de la contribution à l’entretien et l’éducation pour un total de 6.480€ pour la période visée de 2016 à 2019.
4. La cour observe néanmoins que le premier juge n’a pas statué sur le moyen tiré des dispositions de l’article R. 211-11 du Code des procédures civiles d’exécution selon laquelle la cour n’aurait pas à se prononcer sur l’étendue de la saisie mais que sur son bienfondé.
5. M. [U] ne conclut pas sur ce point.
6. L’article R. 211-11 du Code des procédures civiles d’exécution dispose :
‘A peine d’irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie.
L’auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. Il remet une copie de l’assignation, à peine de caducité de celle-ci , au greffe du juge de l’exécution au plus tard le jour de l’audience.’
7. La cour rappelle que la saisie a été dénoncée à l’étude le 08 février 2022 rappelant à M. [U] qu’il pouvait contester cette saisie jusqu’au 08 mars 2022. Or, pour rappel encore, par acte d’huissier du 1er mars 2022, M. [U] a donné assignation à Mme [Z] en contestation de la mesure de saisie-attribution.
8. La cour indique que le texte de l’article L. 211-11 ne distingue pas entre le montant ou le bienfondé de la saisie comme le fait à tort Mme [Z] mais soumet exclusivement au délai de procédure d’un mois ‘les contestations relatives à la saisie’. Ainsi, cet argument est inopérant, M. [U] ayant contesté ladite saisie dans le délai fixé par la loi.
9. Pour le surplus et comme rappelé précédemment, la cour observe que sur ce point, les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance.
10. Conformément aux dispositions de l’article 955 du Code de procédure civile, en l’absence d’élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu’elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties.
11. Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point limitant les effets de la saisie-attribution à la somme de 10.362,50 €, étant précisé que la somme de 9.066 € correspondant aux frais réglés pour les enfants et dont le paiement de la moitié incomberait à Monsieur [U] est pour partie, d’une part, non sollicitée dans le procès-verbal de saisie attribution signifié le 04 février 2022, d’autre part, non justifiée par les éléments versés aux débats.
Sur la demande de dommages et intérêts et l’amende civile
12. L’article L. 121-3 du Code des procédures civiles d’exécution dispose que le juge de l’exécution a le pouvoir de condamner le débiteur à des dommages-intérêts en cas de résistance abusive
13. Mme [Z] fait valoir que la contestation de la procédure de saisie-attribution injustifiée et abusive aurait été diligentée dans un but purement dilatoire et lui cause incontestablement un dommage dès lors que cet abus a eu pour conséquence immédiate de faire obstacle à la libération des fonds à son profit, ce qui fait perdurer une situation de fragilité financière directement liée à l’obligation pour Madame [Z] d’assumer seule les frais liés aux enfants depuis plus de dix ans en palliant la carence du père.
14. La cour rappelle que pour admettre que la résistance du débiteur à l’exécution d’un titre exécutoire n’est abusive que si ce caractère est démontré par celui qui l’allègue.
15. Or, cette démonstration n’est pas rapportée par Mme [Z] qui en a pourtant la charge.
16. La décision déférée sera confirmée sur ce point de même qu’en ce qui concerne l’éventuel prononcé d’une amende civile, en application de l’article 32-1 du code de procédure civile, son prononcé restant subordonné à la constatation par la cour d’une action en justice dilatoire ou abusive, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Sur les autres demandes
17. Il apparaît équitable de condamner M. [U] à payer à Mme [Z] une indemnité de 2.500 € au titre de ses frais irrépétibles en cause d’appel sans qu’il ne soit justifié de revenir sur la somme qui lui a été allouée en première instance en considération de l’équité. M. [U] sera débouté de la demande formée au même titre.
18. L’appelant qui échoue en ses prétentions sera condamné aux dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare recevable les conclusions de Monsieur [B] [U] signifiées le 11 mai 2023,
Confirme en toutes ses dispositions contestées le jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de La Roche-Sur-Yon daté du 10 octobre 2022,
Y ajoutant,
Condamne Monsieur [B] [U] à payer à Madame [D] [Z] une indemnité de 2.500 € au titre des frais irrépétibles,
Rejette les autres demandes des parties,
Condamne Monsieur [B] [U] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,