Saisine du juge de l’exécution : 26 mai 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/03132

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Saisine du juge de l’exécution : 26 mai 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/03132

2ème Chambre

ARRÊT N° 265

N° RG 20/03132 – N° Portalis DBVL-V-B7E-QX7G

(1)

Mme [R] [B]

C/

M. [X] [C]

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ATLANTIQUE VENDEE

S.C.P. [G] [M]

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– Me Dominique LE COULS-BOUVET

– Me Cyril DUBREIL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 MAI 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 28 Février 2023

ARRÊT :

Rendu par défaut, prononcé publiquement le 26 Mai 2023, après prorogations, par mise à disposition au greffe

****

APPELANTE :

Madame [R] [B]

née le [Date naissance 2] 1979 à [Localité 10]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, PPostulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Emilie MOUSSION, Plaidant, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉS :

Monsieur [X] [C]

né le [Date naissance 3] 1980 à [Localité 9]

[Adresse 8]

[Localité 4]

N’ayant pas constitué avocat, assigné par acte d’huissier le 20 octobre 2020 à domicile

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ATLANTIQUE VENDEE

[Adresse 12]

[Localité 6]

Représentée par Me Cyril DUBREIL de la SCP OUEST AVOCATS CONSEILS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

S.C.P. [G] [M] , es qualité de liquidateur de M. [X] [C]

[Adresse 11]

[Localité 5]

N’ayant pas constitué avocat, assignée par acte d’huissier le 13 octobre 2020 à étude

2

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant acte sous-seing-privé en date du 14 août 2009, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Atlantique Vendée a consenti à M. [X] [C] et Mme [R] [B] un prêt numéro 00054525961 d’un montant de 109 814 euros au taux de 4,85 % l’an remboursable en 360 mensualités.

 

Suivant acte sous-seing-privé en date du 3 septembre 2009, la banque a consenti à M. [X] [C] et Mme [R] [B] un prêt numéro 00054529100 d’un montant de 30 000 euros sans intérêts remboursable en 120 mensualités.

 

Suivant acte sous-seing-privé en date du 14 septembre 2010, la banque a consenti à M. [X] [C] et Mme [R] [B] un prêt numéro 00064721555 d’un montant de 190 780,13 euros au taux de 4,29 % l’an remboursable en 360 mensualités.

 

Suivant lettre recommandée en date du 9 décembre 2014, la banque a prononcé la déchéance du terme.

 

Suivant acte d’huissier en date du 25 février 2015, la banque a assigné M. [X] [C] et Mme [R] [B] en paiement devant le tribunal de grande instance de Saint-Nazaire.

 

Suivant jugement en date du 27 mai 2015, le tribunal de commerce de Saint-Nazaire a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de M. [X] [C]. La société [G] [M] a été désignée en qualité de mandataire liquidateur.

 

Suivant acte d’huissier en date du 1er septembre 2015, la banque a assigné le mandataire liquidateur devant le tribunal de grande instance de Saint-Nazaire.

 

Les instances ont été jointes.

 

Suivant jugement en date du 11 juin 2020, le tribunal de grande instance de Saint-Nazaire devenu tribunal judiciaire de Saint-Nazaire a :

 

Dit les demandes de M. [X] [C] irrecevables.

Prononcé la déchéance partielle du droit aux intérêts de la banque sur le prêt numéro 00054525961 à hauteur de la somme de 10 000 euros.

Prononcé la déchéance partielle du droit aux intérêts de la banque sur le prêt numéro 00064721555 à hauteur de la somme de 15 000 euros.

Débouté Mme [R] [B] du surplus de ses contestations et demandes.

Condamné Mme [R] [B] à payer à la banque :

 

Au titre du prêt numéro 00054525961 la somme de 109 877,87 euros outre les intérêts au taux conventionnel de 4,85 % sur la somme de 109 640,80 euros à compter du 27 mai 2015 et au taux légal sur le surplus à compter du 10 décembre 2014.

Au titre du prêt numéro 54529100 la somme de 16 924,39 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2014.

Au titre du prêt numéro 00064721555 la somme de 198 268,29 euros outre les intérêts au taux conventionnel de 4,29 % sur la somme de 195 507,61 euros à compter du 27 mai 2015 et au taux légal sur le surplus à compter du 10 décembre 2014.

 

Ordonné la capitalisation des intérêts échus par année entière.

Fixé la créance de la banque au passif de la liquidation judiciaire de M. [X] [C] à la somme de 328 818,88 euros dont 325 134,35 euros à titre privilégié.

Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Rejeté la demande de la banque sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamné Mme [R] [B] et la société [G] [M] ès qualités aux dépens dont distraction au profit de la société Ouest avocats conseils conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

 

Suivant déclaration en date du 10 juillet 2020, Mme [R] [B] a interjeté appel.

Suivant conclusions en date du 4 janvier 2021, la banque a interjeté appel incident.

 

En ses dernières conclusions en date du 3 janvier 2023, Mme [R] [B] demande à la cour de :

 

Vu les articles 1134, 1147, 1184, 1152, 1154 et 1244-1 du code civil dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance numéro 2016-131 du 10 février 2016 aujourd’hui les articles 1103, 1104, 1231-1, 1231-5, 1343-2 et 1343-5 du code civil,

Vu les articles L. 313-1 et suivants, L. 312-10, L. 312-33, L. 312-22 et L. 312-23 du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance numéro 2016-301 du 14 mars 2016,

 

Réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :

Prononcé la déchéance partielle du droit aux intérêts de la banque sur le prêt numéro 00054525961 à hauteur de la somme de 10 000 euros.

Prononcé la déchéance partielle du droit aux intérêts de la banque sur le prêt numéro 00064721555 à hauteur de la somme de 15 000 euros

Rejeté ses autres contestations et demandes.

Prononcé sa condamnation à payer à la banque :

Au titre du prêt numéro 00054525961 la somme de 109 877,87 euros outre les intérêts au taux conventionnel de 4,85 % sur la somme de 109 640,80 euros à compter du 27 mai 2015 et au taux légal sur le surplus à compter du 10 décembre 2014.

Au titre du prêt numéro 54529100 la somme de 16 924,39 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2014.

Au titre du prêt numéro 00064721555 la somme de 198 268,29 euros outre les intérêts au taux conventionnel de 4,29 % sur la somme de 195 507,61 euros à compter du 27 mai 2015 et au taux légal sur le surplus à compter du 10 décembre 2014.

Ordonné la capitalisation des intérêts échus par année entière.

Prononcé sa condamnation, avec la société [G] [M] ès qualités aux dépens dont distraction au profit de la société Ouest avocats conseils conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

La recevoir en ses demandes et la déclarer bien fondée.

Statuant à nouveau,

À titre principal,

Constater l’irrégularité affectant le taux effectif global des prêts numéro 00054525961 et 00064721555.

Dire que la banque sera déchue du droit aux intérêts contractuels.

Y substituer l’intérêt légal en vigueur à la date de la présente décision, et ce étant précisé que l’intérêt légal se substituera à l’intérêt contractuel pour toute la durée des contrats de prêt.

En tout état de cause,

Enjoindre la banque de produire pour chacun des prêts un décompte détaillant les mensualités impayées exigibles ainsi que le capital restant dû et précisant la date de la déchéance du terme.

À défaut, débouter la banque de l’intégralité de ses demandes en application de l’article 1353 anciennement 1315 du code civil.

Constater que la banque a effectué le calcul des intérêts sur une année lombarde et non sur une année civile.

En conséquence, déclarer la clause de stipulation des intérêts nulle et y substituer le taux d’intérêt légal.

Débouter la banque de ses demandes au titre de l’indemnité contractuelle et réduire cette somme à un euro symbolique en raison de son caractère excessif.

Débouter la banque de sa demande de capitalisation des intérêts.

Constater que la banque a engagé sa responsabilité en application de l’article 1231-1 anciennement 1147 du code civil.

La condamner à lui payer des dommages et intérêts qui ne saurait être inférieurs au montant des sommes restant dues en principal au titre des prêts numéro 00054525961, 54529100 et 00064721555 soit une somme de l’ordre de 347 776 euros.

Ordonner la compensation entre cette somme et les sommes restant dues.

Reporter le paiement des sommes éventuellement dues pendant deux années en application de l’article 1343-5 anciennement 1244-1 du code civil.

Condamner la banque à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamner la banque aux dépens en ce compris les frais d’expertise judiciaire ordonnée avant dire droit par le premier juge.

Dire qu’à défaut de règlement spontanée des condamnations prononcées, et s’il est nécessaire de procéder à l’exécution forcée par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 seront supportées par la partie condamnée aux dépens.

 

En ses dernières conclusions en date du 4 janvier 2021, la banque demande à la cour de :

 

Vu les articles 1134 et 1153 et suivants du code civil,

 

Débouter Mme [R] [B] de ses demandes, fins et conclusions comme irrecevables et mal fondées.

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a prononcé sa déchéance du droit aux intérêts à hauteur de la somme de 10 000 euros pour le prêt numéro 00054525961 et à hauteur de la somme de 15 000 euros pour le prêt numéro 00064721555.

Statuant à nouveau,

Fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de M. [X] [C] à la somme de 353 818,88 euros dont trois 350 134,35 euros à titre privilégié.

Condamner Mme [R] [B] à lui payer :

Au titre du prêt numéro 00054525961 la somme de 119 877,17 euros outre les intérêts au taux conventionnel de 4,85 % sur la somme de 109 640,80 euros à compter du 27 mai 2015 et au taux légal sur le surplus à compter du 10 décembre 2014.

Au titre du prêt numéro 54529100 la somme de 16 924,39 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2014.

Au titre du prêt numéro 00064721555 la somme de 213 268,29 euros outre les intérêts au taux conventionnel de 4,29 % sur la somme de 195 507,61 euros à compter du 27 mai 2015 et au taux légal sur le surplus à compter du 10 décembre 2014.

Condamner Mme [R] [B] à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens et accorder à la société Ouest avocats conseils le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

 

M. [X] [C] et la société [G] [M] n’ont pas constitué avocat.

 

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions des parties.

 

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

 

 

Au soutien de son appel, Mme [R] [B] fait valoir que le taux effectif global indiqué dans les contrats de prêt numéro 00054525961 et numéro 00064721555 est erroné dès lors qu’il ne tient pas compte de l’assurance décès invalidité pourtant obligatoire pour les deux emprunteurs. Elle sollicite en conséquence la déchéance totale de la banque du droit aux intérêts et la substitution du taux légal au taux d’intérêt conventionnel.

 

La banque soutient que l’action relative à l’erreur de taux effectif global est prescrite. Elle considère en effet que le défaut d’intégration des cotisations d’assurance dans le calcul du taux effectif global était décelable dès la conclusion des contrats de prêt. Sur le fond, elle soutient que l’assurance décès invalidité était obligatoire pour l’un des deux co-emprunteurs et que le coût du deuxième contrat d’assurance n’avait pas à être pris en compte.

 

Comme soutenu par Mme [R] [B], la demande en nullité du taux effectif global n’est pas prescrite s’agissant d’un moyen de défense opposé à l’action en paiement de la banque. Les contrats de prêt numéro 00054525961 et numéro 00064721555 sont parfaitement clairs en ce sens que l’emprunteur, s’il n’opte pas pour l’assurance groupe proposée par la banque, doit s’assurer en secteur libre en souscrivant des garanties au moins équivalentes. Or M. [X] [C] et Mme [R] [B] sont tous deux désignés sous le vocable « l’emprunteur » et figurent tous deux dans la rubrique « couverture des assurés ». Il s’en déduit que conformément aux articles L. 313-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction applicable à l’espèce, le calcul du taux effectif global des deux prêts devait intégrer les frais d’assurance des deux emprunteurs et non de l’un d’entre eux seulement. Pour les deux prêts, il n’est pas discuté que l’expertise judiciaire en date du 25 octobre 2018 ordonnée avant dire droit par les premiers juges a révélé une erreur supérieure à la décimale prescrite par l’article R. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à l’espèce laquelle vient au détriment des emprunteurs. Il est constant que la sanction applicable en présence d’un taux effectif global erroné est la perte en totalité ou en partie du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge. C’est à juste titre que les premiers juges ont prononcé la déchéance partielle du droit aux intérêts de la banque pour le prêt numéro 00054525961 à hauteur de la somme de 10 000 euros et pour le prêt numéro 00064721555 à hauteur de la somme de 15 000 euros, sommes équivalentes au coût de l’assurance groupe pour les deux emprunteurs selon les indications portées par la banque dans les contrats de prêt.

 

Mme [R] [B] soutient que les intérêts des prêts numéro 00054525961 et 00064721555 ont été calculés sur la base d’une année lombarde. Elle conclut à la nullité de la clause de stipulation d’intérêt. Elle soutient que les intérêts au taux légal doivent être substitués au taux contractuel. Elle conteste le fait que l’erreur affectant le taux devrait être supérieur d’une décimale au taux annoncé.

 

La banque reproche à Mme [R] [B] de proposer un calcul sur 30 jours. Elle indique qu’en utilisant un mois normalisé de 30,41666 jours, il apparaît que les tableaux d’amortissement correspondent bien à un calcul d’intérêt sur une année de 365 jours. En toute hypothèse, elle fait observer que la preuve d’une erreur supérieure à la décimale dans le calcul des intérêts du fait de l’utilisation de l’année lombarde n’est pas rapportée.

 

S’il est constant que les intérêts conventionnels et le taux effectif global doivent être calculés sur la base de l’année civile, il demeure qu’il appartient à l’emprunteur d’établir que le prêteur a calculé les intérêts sur une autre base que celle de l’année civile. Comme relevé par les premiers juges, il ressort des tableaux d’amortissement des deux contrats de prêt que les intérêts réclamés ont été calculés sur la base d’un mois normalisé de 30,41666 jours et donc d’une année civile. Mme [R] [B] ne démontre pas que la banque a eu recours à l’année lombarde pour procéder au calcul des intérêts. Sa contestation de la clause d’intérêt ne peut prospérer.

 

Mme [R] [B] fait valoir concernant le prêt 00064721555 que le décompte en date du 13 janvier 2015 laisse supposer que la défaillance des emprunteurs dans le remboursement du prêt est survenue le 14 décembre 2014. Elle conclut que la banque ne pouvait se prévaloir de la déchéance du terme à la date du 9 décembre 2014. Elle fait valoir concernant le prêt numéro 00054525961 que le décompte en date du 13 janvier 2015 laisse supposer que les mensualités de remboursement ont été régulièrement payées jusqu’au mois de mai 2015 alors la banque a introduit son action en paiement le 25 février 2015. Elle soutient que les documents produits par la banque ne permettent pas de déterminer la date à laquelle la déchéance du terme est intervenue ni le montant des sommes restant dues. Elle conclut au rejet de ses demandes. Elle fait valoir en outre que les sommes réclamées au titre de l’indemnité de défaillance sont manifestement excessives.

 

La banque indique que la déchéance du terme a été prononcée le 9 décembre 2014 après l’envoi d’un courrier de mise en demeure préalable le 8 août 2014. Elle confirme qu’aucun paiement n’a été effectué après cette date. Elle ajoute que Mme [R] [B] ne démontre pas que des mensualités de remboursement impayées à la date de la mise en demeure ont été régularisées. Elle fait valoir par ailleurs que l’indemnité de défaillance ne constitue pas une clause pénale et qu’en toute hypothèse, elle a été convenue entre les parties, qu’elle n’excède pas le plafond réglementairement fixé et que la débitrice ne démontre pas que l’indemnité réclamée serait manifestement excessive.

 

Devant les premiers juges, Mme [R] [B] a admis que les mensualités des prêts étaient restées impayées à compter des mois d’avril et mai 2014. Selon les historiques de compte produits par la banque, le prêt numéro 00054525961 n’a plus été remboursé à compter du 9 novembre 2013 tandis que les prêts 00054529100 et 00064721555 n’ont plus été remboursés à compter du 7 avril 2014. La banque produit aux débats la déclaration de créance à la liquidation judiciaire de M. [X] [C] en date du 27 juillet 2015 aux termes de laquelle elle indiquait qu’il restait dû la somme de 119 877,87 euros au titre du prêt numéro 00054525961, la somme de 16 924,39 euros au titre du prêt numéro 00054529100 outre les intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2014 et la somme de 213 268,29 euros au titre du prêt numéro 00064721555. Mme [R] [B] ne démontre pas qu’elle s’est acquittée de son obligation à paiement au-delà de ce qui est déclaré par la banque et que le décompte de cette dernière serait erroné. Les contestations des sommes réclamées par la banque sont vaines sauf à rappeler que les premiers juges ont retranché desdites sommes les sommes allouées au titre de la déchéance partielle du droit aux intérêts.

 

Concernant l’indemnité de défaillance prévue par les contrats de prêt, il convient de rappeler que le prêteur qui se prévaut de la déchéance du terme peut, conformément à l’article R. 312-3 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à l’espèce, obtenir de l’emprunteur défaillant une indemnité représentant 7 % des sommes dues au titre du capital restant dû ainsi que des intérêts échus et non versés. Il n’y a pas lieu de considérer que, telle que liquidée, l’indemnité égale à 7 % des sommes restant dues en capital et intérêts échus prévue selon les conditions générales des prêts en cas de défaillance de l’emprunteur avec déchéance du terme, et qui a bien la nature d’une clause pénale en ce qu’elle fixe par avance le préjudice subi par le prêteur pour sanctionner l’inexécution de son obligation par l’emprunteur, est manifestement excessive et qu’elle devrait être modérée eu égard aux sommes restant dues et au préjudice effectivement subi par la banque.

 

En revanche, Mme [R] [B] est fondée à solliciter l’infirmation du jugement attaqué en ce qu’il a ordonné la capitalisation des intérêts alors que selon l’article L. 312-23 devenu L. 313-49 du code de la consommation aucune indemnité ni aucun coût, autres que ceux qui sont mentionnés à l’article L. 312-22 devenu L. 313-51 du code de la consommation, ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur.

 

Mme [R] [B] fait valoir que la banque a fait preuve de négligence en octroyant les prêts puisque les revenus du couple ne lui permettaient pas de rembourser chaque mois les sommes dues.

 

La banque soutient que la demande de Mme [R] [B] au titre du devoir de mise en garde est prescrite. Sur le fond, elle fait observer que les prêts ont été remboursés jusqu’au mois d’avril 2014 et que les difficultés de remboursement sont apparues à la séparation du couple.

 

Le dommage résultant du manquement d’une banque à son obligation de mettre en garde un emprunteur non averti sur le risque d’endettement excessif né de l’octroi d’un prêt consiste en la perte d’une chance d’éviter le risque qui s’est réalisé, ce risque étant que l’emprunteur ne soit pas en mesure de faire face au paiement des sommes exigibles au titre du prêt, de sorte que le délai de prescription de l’action en indemnisation d’un tel dommage commence à courir, non à la date de conclusion du contrat de prêt, mais à la date d’exigibilité des sommes au paiement desquelles l’emprunteur n’est pas en mesure de faire face. La demande de Mme [R] [B] à cet égard n’est pas prescrite si l’on considère que la demande a été présentée aux premiers juges selon la banque par des conclusions en date du 23 février 2016 et que la déchéance du terme a été prononcée le 9 décembre 2014. Sur le fond, il ressort des éléments de la procédure que les prêts ont été remboursés sans difficulté jusqu’à la séparation du couple à tout le moins jusqu’au mois de septembre 2013. Mme [R] [B] produit aux débats l’avis d’imposition 2010 de M. [X] [C] qui fait état de revenus industriels et commerciaux d’un montant de 17 974 euros après abattement forfaitaire pour frais professionnels de 39,5 %. Il n’est pas possible à partir de ce document de déterminer ses revenus réels. Mme [R] [B] déclarait quant à elle pour la même période des revenus de l’ordre de 27 794 euros. Dans une correspondance en date du 27 novembre 2014 qu’elle a produite aux débats, Mme [R] [B] expliquait à la banque que ses difficultés financières étaient la conséquence du comportement de son conjoint dans le contexte d’une séparation conflictuelle. La débitrice rappelle qu’elle a été à plusieurs reprises contrainte de demander la suspension de l’exécution des contrats de prêt. Ces demandes ont été formulées après la séparation du couple. Il n’apparaît donc pas que la banque a manqué à son devoir de mise en garde en l’absence de risque d’endettement excessif, les emprunteurs bénéficiant manifestement au moment de l’octroi des prêts des ressources suffisantes pour faire face aux mensualités de remboursement.

 

Il n’y a pas lieu de fixer comme demandé par la banque sa créance au passif de la liquidation judiciaire de M. [X] [C] à la somme de 353 818,88 euros dont trois 350 134,35 euros à titre privilégié alors que les premiers juges ont fixé cette créance à la somme de 328 818,88 euros dont 325 134,35 euros à titre privilégié et qu’il n’a pas été relevé appel de cette disposition.

 

Le jugement attaqué sera confirmé sauf en ce qu’il a ordonné la capitalisation des intérêts.

 

Il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de délai de paiement puisque Mme [R] [B], du fait de la durée de la procédure, a déjà bénéficié de larges délais pour apurer la dette. En outre, il convient de relever que le bien immobilier financé par les prêts litigieux a été vendu le 10 juin 2022 au prix de 331 000 euros.

 

Il n’est pas inéquitable de condamner Mme [R] [B] à payer à la banque la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d’appel.

 

Mme [R] [B], partie succombante à titre principal, sera condamnée aux dépens de la procédure d’appel et il sera fait application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au bénéfice de la société Ouest avocats conseils. Et il convient de rappeler qu’aux termes de l’article L.111-8 du code des procédures civiles d’exécution, les frais de l’exécution forcée sont à la charge du débiteur, à l’exception des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement qui peuvent être mis partiellement à la charge du créancier dans des conditions fixées par décret, et qu’il appartient au juge de l’exécution sur la justification des démarches entreprises pour le recouvrement de la créance de laisser tout ou partie des frais exposés à la charge du débiteur de mauvaise foi.

PAR CES MOTIFS :

 

 

La cour,

 

Confirme le jugement rendu le 11 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire sauf en ce qu’il a ordonné la capitalisation des intérêts échus par année entière.

 

Statuant à nouveau,

 

Rejette la demande de capitalisation des intérêts formulée par la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Atlantique Vendée.

 

Y ajoutant,

 

Condamne Mme [R] [B] à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Atlantique Vendée la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d’appel.

 

Condamne Mme [R] [B] aux dépens de la procédure d’appel et dit qu’il sera fait application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au bénéfice de la société Ouest avocats conseils.

 

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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