MINUTE N° 23/272
Copie exécutoire à :
– Me Noémie BRUNNER
Le
Le greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION A
ARRET DU 26 Juin 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/03662 – N° Portalis DBVW-V-B7G-H5WX
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 14 septembre 2022 par le juge de l’exécution d’Illkirch-Graffenstaden
APPELANT :
S.C.I. SAVIC prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Noémie BRUNNER, avocat au barreau de COLMAR
INTIMÉE :
S.A.S.U. GARAGE RAULAND prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 1]
[Localité 4]
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 03 avril 2023, en audience publique, devant la cour composée de :
Mme MARTINO, Présidente de chambre
Mme FABREGUETTES, Conseiller
M. LAETHIER, Vice-Président placé
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme HOUSER
ARRET :
– rendu par défaut
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS ET PROCEDURE
Il résulte du jugement déféré, dont les énonciations factuelles ne sont pas remises en cause à hauteur d’appel, que :
-la Sci Savic est devenu propriétaire le 16 septembre 2020 d’un immeuble situé à [Localité 4], donné en location à la Sasu Garage Rauland, selon bail commercial en date du 22 janvier 2016,
-par ordonnance en date du 29 mars 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Strasbourg a notamment condamné la Sasu Garage Rauland à verser par provision à la Sci Savic la somme de 31 880,18 € au titre des loyers et charges impayés jusqu’au mois de février 2022 inclus, a autorisé la locataire à se libérer du montant de cette condamnation en 24 versements mensuels de 1 328,34 € à verser au plus tard le 10e jour de chaque mois, la première fois le 10e jour du mois suivant la signification de l’ordonnance, a dit que pendant ce délai les effets de la clause résolutoire seront suspendus et qu’en cas de non paiement d’une seule échéance à son terme et du loyer courant selon les modalités fixées au contrat de bail, le solde encore dû, ainsi que les accessoires deviendront immédiatement exigibles de plein droit et a en ce cas ordonné l’expulsion du locataire,
-cette ordonnance a été signifiée à la Sasu Garage Rauland le 7 avril 2022,
-un commandement de quitter les lieux dans un délai de huit jours ainsi qu’un commandement de payer aux fins de saisie vente ont été signifiés à la Sasu Garage Rauland par acte du 8 juin 2022.
Par assignation en date du 17 juin 2022, la Sasu Garage Rauland a attrait la Sci Savic devant le juge de l’exécution au tribunal de proximité d’Illkirch Graffenstaden pour obtenir l’annulation de ces mesures.
Elle faisait valoir que l’échéancier accordé par le juge des référés n’aurait débuté qu’à partir du mois de mai 2022 et qu’elle a satisfait au paiement des sommes qui lui incombaient en exécution de la décision de référé dès le 9 mai 2022 en réglant les sommes de 1 328,34 € et de 4 835,19 €, de sorte que le bailleur ne pouvait pas se prévaloir de la résiliation du bail dès le 17 mai 2022.
La Sci Savic, qui a précisé que le loyer est payable par termes trimestriels de 14 478,51 €, a soutenu que le locataire n’a réglé ni le solde du terme du premier trimestre 2022, ni le terme du
deuxième trimestre 2022 exigible au 1er avril 2022 ; que les paiements effectués par la locataire de la somme de 1 328,34 € et 4 835,19 € correspondant au solde du premier trimestre 2022, ne couvrent pas le terme du deuxième trimestre 2022 échu au plus tard le 2 mai voire le 10 mai.
Par jugement en date du 14 septembre 2022, le juge de l’exécution ainsi saisi a annulé le commandement de quitter les lieux et le commandement de payer aux fins de saisie vente délivrés le 8 juin 2022 par la Sci Savic à la Sasu Garage Rauland, a dit que le coût des actes annulés et celui des actes subséquents devront rester à la charge de la Sci Savic, a dit n’y avoir lieu à délai d’évacuation en l’absence de résiliation effective du bail, a condamné la Sci Savic à payer à la Sasu Garage Rauland la somme de 600 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, a débouté la Sci Savic de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’a condamnée aux dépens.
Pour se déterminer ainsi, le premier juge a retenu que le bail commercial liant les parties précise que les loyers et accessoires doivent être payés en quatre termes de paiements égaux et d’avance le premier jour de chaque trimestre civil ; que l’ordonnance du 29 mars 2022 ayant été signifiée à la Sasu Garage Rauland le 7 avril 2022, le point de départ des délais octroyés et des modalités suspendant les effets de la clause résolutoire doit être fixé à la date de signification de sorte que la première mensualité du plan d’apurement à verser en sus du loyer courant était celle de mai 2022 pour le plan d’apurement et, conformément aux modalités de paiement fixées au bail pour le loyer, celle du prochain trimestre, soit le troisième trimestre civil avec une exigibilité au 1er juillet.
Il en a tiré que la Sasu Garage Rauland avait respecté les délais fixés à la décision de référé.
Cette décision a été notifiée à la Sci Savic par lettre recommandée réceptionnée le 16 septembre 2022.
Elle en a relevé appel par acte du 27 septembre 2022.
Par conclusions d’appel remises au greffe le 8 novembre 2022, la Sci Savic conclut à l’infirmation de la décision entreprise et demande à la cour, statuant à nouveau, de :
-valider le commandement de quitter les lieux et le commandement de payer aux fins de saisie vente délivrés à son initiative à la Sasu Garage Rauland le 8 juin 2022,
-débouter la Sasu Garage Rauland de l’intégralité de ses demandes,
En tout état de cause :
-condamner la Sasu Garage Rauland à payer à la Sci Savic la somme de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des procédures de première instance et d’appel,
-condamner la Sasu Garage Rauland aux entiers dépens des procédures de première instance et d’appel.
Au soutien de son appel, la Sci Savic rappelle que la Sasu Garage Rauland devait, aux termes de l’ordonnance intervenue, régler d’une part la mensualité de 1 328,34 € en règlement de l’arriéré et d’autre part, le loyer courant s’établissant à un terme trimestriel de 14 478,51 €.
Elle postule que la somme de 4 835,19 € réglée par la Sasu Garage Rauland correspond au solde du premier trimestre 2022 et ne couvre pas le terme du deuxième trimestre 2022 qui était échu au plus tard le 2 mai sinon le 10 mai 2022, et qui n’a jamais été payé.
Par ailleurs, elle soutient que la Sasu Garage Rauland ne rapporte pas la preuve de l’expédition en temps et heure des paiements qui lui incombaient.
La déclaration d’appel a été signifiée à la Sasu Garage Rauland le 19 octobre 2022 par procès-verbal de l’article 659 du code de procédure civile et les conclusions d’appel lui ont été signifiées de la même manière en date du 28 novembre 2022.
La Sasu Garage Rauland n’a pas constitué avocat.
MOTIFS DE LA DECISION
Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable, et bien fondée.
L’article 954 dernier alinéa du code de procédure civile dispose pour sa part que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement, est réputée s’en approprier les motifs.
Il en résulte qu’en appel, si l’intimé ne conclut pas ou si ses conclusions sont déclarées irrecevables, il est néanmoins statué sur le fond et le juge d’appel doit examiner, au vu des moyens d’appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s’est déterminé.
En l’espèce, alors que l’appelante ne produit ni le contrat de bail ni l’ordonnance de référé du 29 mars 2022, il n’est pas discuté que le contrat de bail liant les parties prévoyait que les loyers et accessoires devaient être payés en quatre termes de paiements égaux et d’avance le premier jour de chaque trimestre civil.
Il n’est pas non plus discuté que la clause cassatoire assortissant l’octroi, par le juge des référés, de délais de paiement rendait immédiatement exigible de plein droit les sommes restant dues en cas de non paiement à son terme d’une seule des 24 échéances de remboursement de l’arriéré, arrêté par le juge au mois de février 2022 inclus, ou en cas de non paiement du loyer courant selon les modalités fixées au contrat de bail.
L’octroi par le juge des référés d’un délai de paiement pour payer l’arriéré arrêté au mois de février 2022 inclus supposait nécessairement la reprise par la Sasu Garage Rauland du règlement trimestriel du loyer le premier jour de chaque trimestre civil et ne pouvait tendre à la matérialisation d’une nouvelle dette.
Or, la Sasu Garage Rauland n’a pas réglé le loyer trimestriel échu d’avance le 1er avril 2022, qui était contractuellement de plein droit exigible à cette date.
Il en résulte que si le premier juge a pu à bon escient constater que la première échéance de remboursement de l’arriéré avait bien été payée à son terme à savoir le 9 mai 2022, soit avant le 10 du mois suivant la signification de l’ordonnance de référé intervenue le 7 avril 2022, il n’en demeure pas moins que le loyer trimestriel courant exigible au 1er avril 2022 n’avait pas été réglé
et que par application de la clause cassatoire prévue dans l’ordonnance de référé, les sommes restant dues devenaient exigibles et l’expulsion pouvait être poursuivie.
Il y a donc lieu, infirmant la décision déférée de valider le commandement de quitter les lieux et le commandement de payer aux fins de saisie vente délivrés le 8 juin 2021 par la Sci Savic à la Sasu Garage Rauland.
Partie perdante, la Sasu Garage Rauland sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel, déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à la Sci Savic la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre des procédures de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement et par défaut,
INFIRME la décision déférée,
Et statuant à nouveau,
VALIDE le commandement de quitter les lieux et le commandement de payer aux fins de saisie vente délivrés le 8 juin 2022 par la Sci Savic à la Sasu Garage Rauland,
DÉBOUTE la Sasu Garage Rauland de l’intégralité de ses demandes,
Et y ajoutant,
CONDAMNE la Sasu Garage Rauland à payer à la Sci Savic la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des procédures de première instance et d’appel,
CONDAMNE la Sasu Garage Rauland aux entiers dépens des procédures de première instance et d’appel.
La Greffière La Présidente