PhD/CS
Numéro 23/2618
COUR D’APPEL DE PAU
2ème CH – Section 1
ARRÊT DU 26 juillet 2023
Dossier : N° RG 22/01036 – N° Portalis DBVV-V-B7G-IFU5
Nature affaire :
Demande en nullité et/ou en mainlevée, en suspension ou en exécution d’une saisie mobilière
Affaire :
S.A.S. LES MAISONS FRANCE HABITAT LES MAISONS DE SAINT GERMAIN
C/
S.A.R.L. FORTIMMO
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 26 juillet 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience en chambre du conseil tenue le 15 juin 2023, devant :
Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,
assisté de Mme DENIS, greffier présent à l’appel des causes,
Philippe DARRACQ, en application des articles 434 et 451 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente
Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller
Monsieur Marc MAGNON, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
Le ministère public a eu connaissance de la procédure et de la date d’audience
dans l’affaire opposant :
APPELANTE :
S.A.S. LES MAISONS FRANCE HABITAT LES MAISONS DE SAINT GERMAIN
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Otxanda IRIART, avocat au barreau de PAU
INTIMEE :
S.A.R.L. FORTIMMO
[Adresse 1]
[Localité 4]
sur appel de la décision
en date du 24 MARS 2022
rendue par le JUGE DE L’EXECUTION DE PAU
FAITS-PROCEDURE -PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES
Suivant deux contrats de construction de maison individuelle avec fourniture de plans du 27 novembre 2015, la société Fortimo (sarl) (le maître de l’ouvrage) a confié à la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain (sas) (le constructeur) la construction de deux maisons, en deux lots A et B, à [Localité 4].
Les travaux ont fait l’objet d’un procès-verbal de réception avec réserves en date du 17 janvier 2019.
Le constructeur a émis deux factures représentant le solde des travaux d’un montant respectif de 5.774,75 euros (lot A) et 5.307,05 euros (lot B).
Le 22 janvier 2019, le maître de l’ouvrage a notifié des réserves supplémentaires.
Le 17 mai 2019, les parties ont signé un constat de levée des réserves.
N’obtenant pas le paiement des factures, le constructeur a fait assigner le maître de l’ouvrage par devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Pau, lequel, par ordonnance du 20 mai 2020, a rejeté la demande de provision en raison des contestations sérieuses touchant le fond du litige.
Le 10 juillet 2020, le constructeur a fait assigner le maître de l’ouvrage par devant le tribunal judiciaire de Pau en paiement de ses deux factures.
Par requête déposée le 23 mars 2022, le constructeur a saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Pau d’une demande d’autorisation de pratiquer une saisie conservatoire des comptes du maître de l’ouvrage ouverts auprès de la société Caixa geral de depositos, succursale de France, agence de [Localité 5], en garantie du paiement de la somme de 23.179,42 euros, en principal, intérêts contractuels, dépens et frais irrépétibles.
Par ordonnance du 24 mars 2022, le juge de l’exécution a rejeté la requête en considérant que « le principe de la créance n’était pas suffisamment établi ».
Le 1er avril 2022, par déclaration faite au greffe du juge de l’exécution, la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain a formé appel contre cette ordonnance.
Le dossier a été transmis à la cour d’appel.
La procédure d’appel a été instruite et jugée comme en matière gracieuse, en application des articles 496, 953, 434 et 451 du code de procédure civile.
Le 05 janvier 2023, le ministère public a été avisé de la fixation de l’affaire à l’audience du 15 juin 2023.
Le ministère public n’a pas pris de conclusions.
Par dernières conclusions du 15 juin 2023, la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain a demandé à la cour, au visa de l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution, d’infirmer l’ordonnance entreprise, et, statuant à nouveau, de l’autoriser à pratiquer une saisie conservatoire de tous comptes bancaires ouverts par la société Fortimo auprès de la société Caixa geral de depositos, succursale de France, agence de [Localité 5], 13 place du foirail, pour la garantie de la somme globale de 16.849,61 euros, en principal, intérêts, frais, outre celle de 2.000 euros au titre des frais de procédure.
MOTIFS
L’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution dispose que toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement.
Il résulte des articles R511-1 et R121-23 du même code que la justification de la dispense du respect du contradictoire n’est pas une condition de recevabilité de la demande d’autorisation de pratiquer une saisie conservatoire.
Par ailleurs, contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, le requérant doit démontrer l’existence non pas d’un principe certain de créance mais seulement d’une créance paraissant fondée en son principe.
Et, pour apprécier l’existence d’une créance paraissant fondée en son principe, comme les circonstances qui en menacent le recouvrement, le juge doit se placer au jour où il statue.
Enfin, il entre dans les pouvoirs du juge de l’exécution, statuant sur l’autorisation de saisie conservatoire, d’examiner l’exception de compensation dont peut se prévaloir le débiteur.
En l’espèce, il résulte, d’une part, de l’article 3-3 des conditions générales des CCMI liant les parties que, en application des articles R231-7 et 231-8 du code la construction et de l’habitation, le maître de l’ouvrage est tenu de régler le solde des travaux à la réception des travaux sans réserve ou après la levée des réserves, et, d’autre part, de l’article 7-6 suivant que le maître de l’ouvrage, s’il ne respecte pas le délai de paiement (payé et encaissé) fixé à l’article 3-1 des conditions générales, devra payer au constructeur une indemnité calculée au taux de 1% par mois sur les sommes non réglées.
Au soutien de sa requête, la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain se prévaut des factures du solde des travaux, du procès-verbal de constat de levée de réserves du 17 mai 2019 ainsi que des dispositions du jugement rendu le 21 février 2023 par le tribunal de commerce de Pau qui, statuant sur le fond du litige, a condamné la société Fortimo à lui payer les factures litigieuses.
Mais, par ce jugement, le tribunal de commerce a :
– condamné la société Fortimo à régler le solde du lot A à la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain, soit 5.774,75 euros TTC, dès la levée de la dernière réserve, et sans pénalité de retard
– condamné la société Fortimo à régler le solde du lot B à la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain soit 5.307,05 euros TTC
– dit qu’il n’y a pas lieu d’appliquer une indemnité de retard pour le lot A
– condamné la société Fortimo à payer au titre du lot B à la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain une pénalité de 1 % par mois de retard dans le paiement du solde du chantier depuis le 15 mai 2019 jusqu’à ce jour soit : 45 mois x 1% x 4.422,54 ht = 1.990 euros HT, soit 2.388 euros TTC
– condamné la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain à payer à la société Fortimo une pénalité conformément à l’article L231-13 du code de la consommation de 1/3000 du prix convenu par jour de retard sur la livraison du chantier soit 220 jours x 1/3000 x 95.245,83 euros HT = 6.985 euros HT au titre du lot A, soit 8.382 euros TTC
– condamné la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain à payer à la société Fortimo une pénalité conformément à l’article L231-13 du code de la consommation de 1/3000 du prix convenu par jour de retard sur la livraison du chantier soit 220 jours x 1/3000 x 88.450 euros HT = 6.486 euros HT au titre du lot B, soit 7.783,20 euros TTC
– ordonné la compensation judiciaire entre les sommes auxquelles la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain et la société Fortimo sont condamnées
– dit que l’exécution provisoire est de plein droit
– condamné la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain à payer à la société Fortimo la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens liquidés à la somme de 60,22 euros.
Il résulte des dispositions de ce jugement que la créance de la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain s’élève à 5.774,75 euros (sous réserve de justifier de la levée de la dernière réserve) + 5.307,05 euros + 2.388 euros + 1.500 + 60,22 euros = 15.030,22 euros.
Et que la créance de la société Fortimo, elle-même fondée sur les clauses contractuelles du CCMI, s’élève à : 8.382 euros + 7.783,20 euros = 16.165,20 euros.
Le tribunal a ordonné la compensation judiciaire entre les créances réciproques des parties.
Par conséquent, à la suite de ce jugement, la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain ne justifie pas d’une créance paraissant fondée en son principe sur la société Fortimo, laquelle, au contraire, est créancière du constructeur, peu important l’appel interjeté contre ce jugement, au demeurant assorti de l’exécution provisoire, la décision du juge du fond s’imposant, sauf circonstances particulières postérieures, au juge de la saisie conservatoire.
Par ces motifs, l’ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu’elle a rejeté la requête de la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant en chambre du conseil, après débats en chambre du conseil, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME l’ordonnance entreprise,
LAISSE les dépens de l’instance d’appel à la charge de la société Maisons France Habitat-Les Maisons de Saint-Germain.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur DARRACQ, Conseiller, suite à l’empêchement de Madame PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Catherine SAYOUS, greffier suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.
Le Greffier Le Président