N° RG 22/04164 – N° Portalis DBV2-V-B7G-JH6W
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITE
ARRET DU 25 MAI 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
22/00954
Jugement du juge de l’exécution d’Evreux du 13 décembre 2022
APPELANT :
Monsieur [R] [G]
né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 5] (27)
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représenté par Me Emmanuelle MENOU de la SCP RSD AVOCATS, avocat au barreau de l’EURE
INTIMEES :
Société AGROSALINE
Immatriculée au RCS de CAEN sous le numéro 494 537 848
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Pauline COSSE de la SCP BARON COSSE ANDRE, avocat au barreau de l’EURE, postulante de Me Thierry YGOUF de la SELARL YGOUF, West avocats, avocat au barreau de CAEN.
SCEA FERME DE LA SALINE
venant aux droits de la SCEA de MARCHAINVILLE, Immatriculée au RCS de CAEN sous le numéro 751 931 213
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Pauline COSSE de la SCP BARON COSSE ANDRE, avocat au barreau de l’EURE postulante de Me Thierry YGOUF de la SELARL YGOUF, West avocats, avocat au barreau de CAEN.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 04 mai 2023 sans opposition des avocats devant Madame GOUARIN, rapporteur.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Madame GOUARIN, présidente
Madame TILLIEZ, conseillère
Madame BACHELET, conseillère
DEBATS :
Madame DUPONT greffière
A l’audience publique du 04 mai 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 25 mai 2023
ARRET :
Contradictoire
Prononcé publiquement le 25 mai 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame GOUARIN, présidente et par Madame DUPONT, greffière lors de la mise à disposition.
Exposé des faits et de la procédure
M. [R] [G] était le gérant de la SARL [P] dont il est l’associé unique.
Un litige a opposé la société [P] à la SAS Agrosaline et à la SCEA Ferme de la Saline au titre de travaux de construction d’un ensemble de bâtiments et de silos et une mesure d’expertise a été ordonnée par ordonnance de référé du 4 mai 2017.
A la suite de la condamnation prononcée à l’encontre de M. [G] par le tribunal correctionnel d’Evreux, Mme [B] [F] épouse [G] a été désignée en qualité de gérante de la SARL [P] le 17 novembre 2017.
Par jugement du 9 juillet 2021 le tribunal judiciaire de Caen a :
– débouté la SAS Agrosaline et la SCEA Ferme de la Saline de leurs demandes formées à l’encontre de la société A.James, de la société MMA Iard et de Mme [B] [F] épouse [G] ;
– condamné la SARL [P] à payer à la SAS Agrosaline la somme de 1 485 732 euros en réparation de ses préjudices, avec intérêts au taux légal à compter de la décision et capitalisation des intérêts échus depuis plus d’un an ;
– condamné la SARL [P] à payer à la SCEA Ferme de la Saline la somme de 42 569,43 euros en réparation de ses préjudices, avec intérêts au taux légal à compter de la décision et capitalisation des intérêts échus depuis plus d’un an ;
– condamné la SAS Agrosaline à verser à la Coopérative de Creully la somme de 117 104 euros HT outre la TVA applicable au jour du règlement, en réparation des préjudices résultant de la résolution des conventions de stockage des 25 mars et 16 avril 2016 aux torts exclusifs de la société Agrosaline ;
– condamné la SARL [P] à garantir intégralement la SAS Agrosaline des condamnations prononcées au profit de la coopérative de Creully ;
– condamné la SAS Agrosaline à payer à la SAS A.James la somme de 16 000 euros au titre du solde de marché de travaux ;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes indemnitaires respectives ;
– condamné la SARL [P] aux dépens comprenant notamment les frais d’expertise d’un montant de 35 963,04 euros et dit qu’il sera fait application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Me Onraed ;
– condamné la SARL [P] à payer à la SAS Agrosaline et à la SCEA Ferme de la Saline unies d’intérêt la somme de 14 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile avec intérêts au taux légal à compter de la décision et capitalisation des intérêts échus depuis plus d’un an ;
– condamné la SAS Agrosaline à la Coopérative de Creully la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la SARL [P] à garantir intégralement la SAS Agrosaline du paiement de cette condamnation prononcée au profit de la Coopérative de Creully ;
– condamné la SAS Agrosaline et la SCEA Ferme de la Saline à payer à la SAS A.James et la SA MMA Iard, unies d’intérêt, la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté la SARL [P] de son recours en garantie contre la SAS A.James et la SA MMA Iard ;
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
Par ordonnance du 8 octobre 2021, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Evreux a autorisé la SAS Agrosaline et la SCEA Ferme de la Saline à faire procéder à la saisie conservatoire de tous actifs mobiliers corporels et incorporels appartenant à M. [G], ce pour garantie des sommes suivantes : 1 606 336 euros pour la société Agrosaline, 42 569,43 euros pour la SCEA Ferme de la Saline, 35 963,04 euros pour les frais d’expertise et 14 500 euros pour l’article 700 du code de procédure civile.
Par acte d’huissier du 18 novembre 2021 dénoncé à M. [G] le 19 novembre 2021, la société Agrosaline a fait pratiquer une saisie conservatoire sur les comptes détenus par M.[G] au CIC à hauteur de la somme de 301 957,90 euros pour garantie de la somme de 1 657 642,60 euros.
Par acte d’huissier du 18 novembre dénoncé à M. [G] le 19 novembre 2021, la société Ferme de la saline a fait pratiquer une saisie conservatoire sur les comptes détenus par M.[G] au CIC à hauteur de la somme de 7 274,64 euros pour garantie de la somme de 42 958,32 euros.
Par acte d’huissier du 21 décembre 2021, les sociétés Agrosaline et Ferme de la Saline ont fait pratiquer une saisie conservatoire auprès de la société d’encouragement à l’élevage du cheval français au titre des créances détenues pour le compte de M. [G].
Par ordonnance du 24 janvier 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Evreux a autorisé la SAS Agrosaline et la SCEA Ferme de la Saline à faire procéder à la saisie conservatoire de tous actifs mobiliers corporels et incorporels appartenant à M. [G], ce pour garantie des sommes suivantes : 1 606 336 euros pour la société Agrosaline, 42 569,43 euros pour la SCEA Ferme de la Saline, 35 963,04 euros pour les frais d’expertise et 14 500 euros pour l’article 700 du code de procédure.
En exécution de cette ordonnance, la société Agrosaline et la société Ferme de la Saline ont fait pratiquer une saisie conservatoire portant sur des chevaux appartenant à M. [G] et détenus par M. [H] par actes d’huissier du 29 mars 2022 signifiés à M. [G] le 6 avril 2022.
Par actes d’huissier des10 mars et 8 juin 2022, M. [G] a fait assigner les sociétés Agrosaline et Ferme de la Saline en contestation des mesures de saisie conservatoires autorisées par les ordonnances rendues les 8 octobre 2021 et 24 janvier 2022.
Par jugement contradictoire du 13 décembre 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Evreux a :
– débouté M. [G] de sa demande de rétractation de l’ordonnance du 8 octobre 2021 ayant autorisé la société Agrosaline et la SCEA Ferme de la Saline à faire procéder à la saisie conservatoire de tous actifs mobiliers corporels et incorporels lui appartenant et ce, pour garantie des sommes provisoirement évaluées à 1 606 336 euros pour la société Agrosaline, 42 569,43 euros pour la SCEA Ferme de la Saline, 35 963,04 euros pour les frais d’expertise et 14 500 euros pour l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté M. [G] de sa demande de rétractation de l’ordonnance du 24 janvier 2022 ayant autorisé la société Agrosaline et la SCEA Ferme de la Saline à faire procéder à la saisie conservatoire de tous actifs mobiliers corporels et incorporels lui appartenant et ce, pour garantie des sommes provisoirement évaluées à 1 606 336 euros pour la société Agrosaline, 42 569,43 euros pour la SCEA Ferme de la Saline, 35 963,04 euros pour les frais d’expertise et 14 500 euros pour l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [G] à payer à la société Agrosaline et à la SCEA Ferme de la Saline la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [G] aux dépens.
Par déclaration du 23 décembre 2022, M. [G] a relevé appel de cette décision.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 avril 2023.
Exposé des prétentions des parties
Par dernières conclusions reçues le 31 mars 2023, M. [G] demande à la cour de :
– réformer le jugement rendu ;
– rétracter l’ordonnance rendue le 8 octobre 2021 ;
– rétracter l’ordonnance rendue le 24 janvier 2022 ;
– débouter les sociétés Agrosaline et Ferme de la Saline de leurs demandes ;
– les condamner solidairement au paiement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions reçues le 6 mars 2023, la SAS Agrosaline et la SCEA Ferme de la Saline demandent à la cour de :
– confirmer le jugement dans toutes ses dispositions ;
– prononcer l’irrecevabilité de la demande de rétractation de l’ordonnance du 24 janvier 2022;
– prononcer la validité des ordonnances des 8 octobre 2021 et 24 janvier 2022 ;
– débouter M. [G] de ses demandes ;
– condamner M. [G] à leur verser la somme de 6 000 euros chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions des parties pour l’exposé des moyens développés par celles-ci.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de la demande de rétractation de l’ordonnance du 24 janvier 2022
Au visa des dispositions de l’article 564 du code de procédure civile, les sociétés intimées soutiennent que la demande de rétractation de l’ordonnance est irrecevable en ce qu’elle est nouvelle en appel pour n’avoir pas été formée en première instance.
L’appelant réplique que la demande de rétractation de l’ordonnance était virtuellement comprise dans la demande de débouté des demandes des sociétés intimées.
Aux termes de l’article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.
En l’espèce, par assignation du 8 juin 2022, contestant le bien-fondé de la saisie conservatoire autorisée par l’ordonnance rendue le 24 janvier 2022, M. [G] a sollicité du juge de l’exécution le débouté des demandes formées par les sociétés Agrosaline et Ferme de la Saline. Dans le cadre de l’appel, il saisit la cour d’une demande de rétractation de l’ordonnance du 24 janvier 2022.
Il en résulte que la demande de rétractation de l’ordonnance ayant autorisé la saisie conservatoire tend aux mêmes fins que la demande de débouté de la mesure de saisie conservatoire, de sorte qu’elle n’est pas nouvelle en appel.
La fin de non-recevoir tirée du caractère nouveau de la demande de rétractation formée en appel doit en conséquence être écartée.
Sur la contestation des saisies conservatoires
Aux termes de l’article L. 511-1 du code des procédures civiles d’exécution, toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement.
Sur l’existence d’une créance paraissant fondée en son principe
L’appelant fait essentiellement valoir que l’action engagée au fond à la fois sur l’article 1240 du code civil et L. 223-22 du code de commerce se heurte au principe du non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle et que l’action exercée sur le fondement de l’article L. 223-22 est prescrite en application des dispositions de l’article L. 223-23 en ce que le point de départ du délai doit être fixé à la date à laquelle le fait dommageable aurait pu être decelé et non à celle du constat effectif du fait dommageable, qu’il n’est plus gérant de la société [P] depuis le 12 décembre 2017, que les prélèvements de dividendes qui lui sont reprochés ont été effectués à une époque où il n’était plus gérant de la société, que l’associé unique qui décide d’une distribution de dividendes ne commet aucune faute et qu’aucune dissimulation ne peut être alléguée dès lors que les comptes ont été publiés. Sur le fond, il estime que les sociétés intimées ne rapportent pas la preuve d’une faute d’une particulière gravité commise alors qu’il étant gérant de la société et incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales.
En réplique, les intimées soutiennent principalement que leur créance a été consacrée par le jugement du tribunal judiciaire qui a reconnu la responsabilité de M. [P] et de M. [G] et chiffré le préjudice subi, qu’il n’appartient pas au juge de l’exécution d’apprécier l’existence d’une faute de gestion, laquelle est caractérisée par l’absence d’inscription de la créance en provision pour risque dans les écritures comptables de la société [P] et par la distribution d’importants dividendes alors que l’expertise était en cours et que la société a été mise en sommeil à compter du 1er mars 2018 et que M. [G] a agi comme un gérant de fait en organisant l’insolvabilité de la société [P]. Elles estiment que leur action indemnitaire n’est pas prescrite en ce que le point de départ du délai de l’article L. 223-23 du code de commerce court à compter de la révélation du fait dommageable lorsque celui-ci a été dissimulé et qu’en l’espèce, elles n’ont eu connaissance de l’ampleur de la fraude qu’à l’occasion de la communication des comptes au cours de la procédure devant le juge de l’exécution.
En application des dispositions de l’article L. 511-1 précité, il n’appartient pas au juge de l’exécution de statuer sur la réalité de la créance ou d’en fixer le montant mais de se prononcer sur le caractère vraisemblable d’un principe de créance.
En l’espèce, l’action indemnitaire engagée devant le tribunal de commerce par assignation délivrée le 8 décembre 2021 sur le fondement des dispositions de l’article L. 223-22 du code de commerce et de l’article 1240 du code civil n’apparaît pas manifestement prescrite dès lors que le point de départ du délai pour agir, de 3 ans ou de 5 ans selon le fondement retenu, se situe à la date à laquelle le titulaire d’un droit a eu connaissance ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer et qu’en l’espèce, il n’est pas établi que les sociétés intimées ont eu connaissance de la distribution de dividendes de nature à mettre en péril le recouvrement de la créance détenue à l’égard de la société [P] avant la procédure ayant abouti au jugement rendu le 9 juillet 2021. En effet, s’il est justifié à hauteur d’appel que les comptes de l’exercice clos le 31 août 2017 ont été publiés au Bodacc le 1er février 2018 et les comptes de l’exercice clos le 31 août 2018 au Bodacc du 23-24 mars 2019, ces comptes étaient accompagnés de la déclaration de confidentialité prévue par l’article L. 232-25 du code de commerce de sorte qu’ils n’ont donc pas été rendus publics et qu’ils ne pouvaient être connus des sociétés créancières.
Sur le fond, c’est à tort que les sociétés intimées soutiennent que leur créance à l’égard de M. [G] a été consacrée par le jugement rendu le 9 juillet 2021 alors que cette décision a été rendue dans le litige les opposant à la société [P] et à Mme [G] et que les motifs retenus par le jugement pour exonérer Mme [G] de toute responsabilité sont dépourvus d’autorité de chose jugée à l’égard de M. [G], lequel n’était pas partie à l’instance, peu important à cet égard que le tribunal ait indiqué qu’il aurait été opportun de mettre en oeuvre la responsabilité de M. [G] en tant qu’associé unique et gérant de fait tant pour les distributions de dividendes que pour la décision de mettre en sommeil la société.
Si la responsabilité de M. [G] est engagée par les sociétés Agrosaline et Ferme de la Saline sur le fondement des dispositions de l’article L. 223-22 alinéa 1 du code de commerce qui dispose que le gérant d’une société à responsabilité limitée est personnellement responsable envers les tiers des fautes commises dans sa gestion lorsqu’elles sont séparables de ses fonctions alors qu’il n’était pas à l’époque des faits le gérant de droit de la société et qu’il n’est pas acquis que ces dispositions sont applicables au gérant de fait, l’action indemnitaire engagée devant le tribunal de commerce est également exercée sur le fondement de la responsabilité de droit commun de l’article 1240 du code civil.
Il est établi que M. [G], alors gérant et associé unique de la société [P], a fait l’objet d’une sanction d’interdiction définitive d’exercer son activité professionnelle après avoir été reconnu coupable de l’infraction d’homicide involontaire à la suite du décès de l’un de ses salariés par jugement du tribunal correctionnel d’Evreux.
Suivant procès-verbal de décision de l’associé unique du 17 novembre 2017, M. [G] a désigné sa mère, Mme [F] épouse [G], en qualité de gérante de la société [P]. Il paraît cependant avoir conservé la gérance de fait de la société, ce qu’il reconnaît puisqu’il indique que sa mère ne disposait pas des compétences nécessaires pour gérer la société, ce qui l’a conduit à mettre en sommeil l’activité de ladite société à compter du mois de mars 2018 selon la mention figurant à ce titre au registre du commerce et des sociétés.
Il résulte en outre du procès-verbal de décision de l’associé unique du 29 janvier 2018 que M. [G], en sa qualité d’associé unique, a décidé de la distribution de dividendes à son profit à hauteur de la somme de 1 000 000 euros avant de mettre l’activité de la société en sommeil à compter du 1er mars 2018 alors qu’à cette date les opérations d’expertise étaient en cours et qu’il avait connaissance de la note de synthèse établie par l’expert le 17 décembre 2017, laquelle concluait à l’entière responsabilité de la société [P] dans les désordres en raison de la faute majeure commise dans la réalisation d’un dallage fortement chargé sans aucune étude préalable et de désordres de nature à compromettre la solidité de l’ouvrage et à rendre les bâtiments impropres à leur destination.
Il est également établi qu’une seconde distribution de dividendes a été décidée par M. [G] suivant procès-verbal de décisions de l’associé unique du 2 juillet 2018, qui a prévu la distribution de dividendes à son profit à hauteur de la somme de 42 857 euros.
Or l’analyse des bilans comptables versés aux débats révèle que, le 31 août 2017, la trésorerie de la société [P] s’élevait à la somme de 1 743 233 euros et les capitaux propres à la somme de 1 836 402 euros alors que le bilan clos au 31 août 2018 fait état d’une trésorerie d’un montant de 436 863 euros et de capitaux propres d’un montant de 597 547 euros. Il n’est à cet égard pas contesté que la distribution de dividendes était de 150 000 euros pour l’exercice clos le 31 août 2017 et qu’elle a été portée à la somme de 1 120 697 euros pour l’exercice clos le 31 août 2018.
Il en résulte que la responsabilité de M. [G] est susceptible d’être engagée sur le fondement des dispositions de l’article 1240 du code civil, que le préjudice subi par les sociétés intimées pourrait résulter de l’impossibilité de recouvrer leur créance à l’égard de la société [P] et que les éléments versés aux débats sont de nature à établir un principe de créance sans qu’il y ait lieu de statuer sur l’existence de la faute ni sur le lien de causalité avec le préjudice invoqué dont l’appréciation relève du juge du fond saisi.
Sur l’existence de menaces pesant sur le recouvrement
C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a caractérisé les risques pesant sur le recouvrement des créances des sociétés Agrosaline et Ferme de la Saline au regard du comportement de M. [G].
Le jugement déféré doit en conséquence être confirmé dans ses dispositions ayant débouté M. [G] de sa demande de rétractation des ordonnances rendues les 8 octobre 2021 et 24 janvier 2022.
Sur les frais et dépens
Les dispositions du jugement déféré à ce titre seront confirmées.
M. [G] sera condamné aux dépens d’appel et à verser à chacune des sociétés intimées la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et débouté de sa demande formée à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour :
Déclare recevable la demande de rétractation de l’ordonnance du 24 janvier 2022 ;
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant,
Condamne M. [R] [G] aux dépens d’appel ;
Condamne M. [R] [G] à verser à la SAS Agrosaline et à la SCEA Ferme de la Saline la somme de 2 000 euros chacune en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute M. [R] [G] de sa demande formée au titre des frais irrépétibles.
La greffière La présidente