Saisine du juge de l’exécution : 25 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/02028

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Saisine du juge de l’exécution : 25 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/02028

Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 5

ORDONNANCE DU 25 MAI 2023

(n° /2023)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/02028 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHATW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Décembre 2022 du Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2019031699

Nature de la décision : Contradictoire

NOUS, Patricia LEFEVRE, Conseillère, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Cécilie MARTEL, Greffière.

Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :

DEMANDEUR

S.A.R.L. A.M.S. 94

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Et assisté de Me Olivia CHAFIR substituant Me Anais AYACHE de la SELARL LE 190 AVOCATS ASSOCIES, avocat plaidant au barreau de PARIS, toque : D0551

à

DÉFENDEUR

S.A. SOLOCAL (anciennement PAGES JAUNES)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Armand PATRAIGOT collaborateur de Me Gilles GODIGNON SANTONI de la SELARL DOLLA – VIAL & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0074

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 13 Avril 2023 :

Saisi par un acte extra-judiciaire en date du 6 mai 2019, le tribunal de commerce de Paris a, par jugement contradictoire du 14 décembre 2022 :

– condamné la société AMS 94 à payer à la société Solocal (anciennement Pages jaunes) la somme de 43 810,89 euros, assortie des intérêts légaux de retard à compter du 21 février 2019 ;

– débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit ;

– condamné la société AMS 94 à payer à la société Solocal la somme de 4500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de I’instance.

Le 27 janvier 2023 la société AMS 94 a interjeté appel de cette décision et par acte extra-judiciaire en date du 1er février 2023 elle a fait assigner la société Solocal devant le premier président de la cour de céans, afin de voir, au visa de l’article 514-3 du code de procédure civile prononcer l’arrêt de l’exécution provisoire.

Elle soutient, par la voix de son conseil, son recours et les conclusions déposées à l’audience, sollicitant au visa de l’article 514-3 du code de procédure civile dont il sera jugé que les conditions sont réunies, que l’exécution provisoire assortissant le jugement du 14 décembre 2022 soit suspendue, les dépens devant suivre ceux de l’instance au fond.

Elle fait valoir que société familiale, elle a été poussée, voire contrainte, à souscrire à des offres commerciales, dont le prix et les conditions étaient disproportionnées par rapport à ses capacités financières. Elle précise qu’une saisie attribution a été pratiquée sur son compte bancaire en exécution de la décision du 14 décembre 2022, saisie qu’elle a contestée devant le juge de l’exécution. Elle affirme avoir sollicité du premier juge qu’il écarte l’exécution provisoire, critique le jugement déféré et fait valoir principalement que le juge a omis de statuer sur ses demandes reconventionnelles et a dénaturé le litige en indiquant que les parties ne contestaient pas l’exécution des prestations, alors qu’elle avait longuement conclu en ce sens. S’agissant des conséquences de l’exécution du jugement, elle avance qu’il ne fait aucun doute, comme en atteste son expert-comptable, que si elle devait exécuter ne serait-ce que le principal des condamnations mises à sa charge, elle n’aurait d’autres choix que de déclarer sa cessation des paiements, et risquer plus encore la liquidation judiciaire.

Par conclusions déposées et soutenues à l’audience, la société Solocal soutient au visa de l’article 513-4 du code de procédure civile le rejet de la demande de suspension, faute à titre principal de conséquences manifestement excessives et subsidiairement de moyens sérieux de réformation, sollicitant la condamnation de la société A.M.S 94 aux dépens. En premier lieu, elle prétend qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour n’est pas saisie des « demandes » consistant en des dire ou juger. Elle rappelle que les conditions de l’article 514-3 du code de procédure civile sont cumulatives et fait valoir, citant des décisions de justice en ce sens, qu’il est également de jurisprudence constante que le caractère manifestement excessif ne saurait exclusivement résulter de l’exécution de la condamnation au paiement d’une somme d’argent mais doit être établi sur des éléments pertinents, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

SUR CE,

A titre liminaire, il convient de relever que l’invocation des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile inapplicable dans une instance soumise à la procédure orale est inopérante et qu’elle est également inutile, les juger figurant au dispositif des conclusions de la société AMS 94 constituant uniquement la reprise de ses moyens.

La société AMS 94 fonde sa réclamation sur les dispositions de l’article 514-3 du code de procédure civile créé par l’article 3 du décret 2019-1333 du 19 décembre 2019 applicable ainsi que le prévoit l’article 55 II de ce décret aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020.

La présente instance est soumise aux dispositions de l’article 524 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur dans les procédures introduites devant les juridictions du 1er degré, comme en l’espèce, avant le 1er janvier 2020.

Selon ce texte, lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d’appel, par le premier président statuant en référé que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

Au regard de ces dispositions, l’existence de conséquences manifestement excessives s’apprécie par rapport aux capacités de paiement du débiteur et en fonction des facultés de remboursement du créancier, sans qu’il y ait lieu de prendre en considération les moyens de réformation éventuelle de la décision attaquée. Il s’ensuit que les longs développements de la société AMS 94 consacrés à la critique de la décision du 14 décembre 2022 comme la réponse apportée par la société Solocal, qui constituent le fond du litige, sont inopérants.

Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cause d’infirmation. Pour prétendre que l’exécution de la décision de du 14 décembre 2019 ruinerait ses efforts de redressement, la société AMS 94 produit ses comptes sociaux des exercices clos au 31 août 2016 et au 31 août 2022 et deux attestations de son expert comptable analysant la situation de l’entreprise à la date de leur établissement (27 janvier et 28 mars 2023).

Il en ressort, qu’après plusieurs exercices déficitaires, qui sur le plan comptable se sont traduits, malgré l’imputation du bénéfice du dernier exercice à des capitaux propres négatifs (à hauteur de 26 482 euros), la situation financière société AMS 94 s’est redressée, la dernière mise à jour des comptes au 28 février 2023, mettant en évidence une activité courante en équilibre. En revanche, l’expert comptable atteste d’une trésorerie courante positive uniquement de quelques milliers d’euros et l’absence de concours bancaire à court terme. Dès lors, l’impossibilité matérielle de régler les causes du jugement, la société ne disposant pas de liquidité, ni à l’évidence d’une capacité d’endettement, entraînerait une cessation de paiement qui dégénérait irrésistiblement en l’ouverture d’une procédure collective.

Il sera fait droit à la demande d’arrêt de l’exécution provisoire de la décision, exécution provisoire qui en l’espèce, ruinerait le redressement de l’entreprise.

L’instance a été engagée dans le seul intérêt de la société AMS 94 qui conservera la charge des dépens y afférents.

PAR CES MOTIFS

Arrêtons l’exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 14 décembre 2022 ;

Condamnons la société AMS 94 aux dépens de l’instance.

ORDONNANCE rendue par Mme Patricia LEFEVRE, Conseillère, assistée de Mme Cécilie MARTEL, greffière présente lors de la mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, La Conseillère

 


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