Saisine du juge de l’exécution : 25 mai 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/04161

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Saisine du juge de l’exécution : 25 mai 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/04161

N° RG 22/04161 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LS23

C4

Minute N°

Copie exécutoire

délivrée le :

la SELARL BARD

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 25 MAI 2023

Appel d’un jugement (N° RG 22/00625)

rendu par le Président du TJ de Grenoble

en date du 15 septembre 2022

suivant déclaration d’appel du 22 novembre 2022

APPELANT :

M. [U] [X]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté et plaidant par Me Vincent BARD de la SELARL BARD, avocat au barreau de VALENCE

INTIMÉS :

Me [B] [N] ès-qualité de Liquidateur Judiciaire de Monsieur [U] [X],

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté et plaidant par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE

M. LE PROCUREUR GENERAL 2

commercial

place firmin gautier

[Localité 2]

M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE

Tribunal Judiciaire

Palais de Justice – Place Firmin Gautier

[Localité 2]

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Pierre FIGUET, Présidente,

Mme Marie-Pascale BLANCHARD, Conseillère,

M. Lionel BRUNO, Conseiller,

Assistés lors des débats de Alice RICHET, Greffière

MINISTÈRE PUBLIC :

Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée à Madame Françoise BENEZECH, avocate générale qui a fait connaître son avis

DÉBATS :

A l’audience publique du 01 mars 2023, M. BRUNO conseiller, a été entendu en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l’affaire a été mise en délibéré pour que l’arrêt soit rendu ce jour,

Faits et procédure :

1. Après avoir préalablement saisi le président du tribunal d’une demande de règlement amiable, la MSA Alpes du Nord a, par acte du 04 février 2022, fait assigner monsieur [U] [X] en redressement judiciaire et éventuellement en liquidation judiciaire, exposant que cette personne lui est redevable de 31.919,69 euros au titre de cotisations salariales, cotisations personnelles et de majorations de retard et/ou pénalités et/ou frais.

2. Par jugement du 17 mars 2022, le tribunal judiciaire de Grenoble, après avoir constaté la présente de [U] [X] à l’audience, de son accord pour l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, a notamment :

– ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de [U] [X]’;

– fixé au 3 mars 2022 la date de cessation des paiements’;

– fixé la durée de la période d’observation à 6 mois’;

– désigné le juge-commissaire ainsi que son suppléant;

– désigné maître [N] en qualité de mandataire judiciaire’;

– ordonné l’inventaire et la prisée du patrimoine du débiteur ainsi que des garanties qui le grèvent’;

– désigné aux fins de réaliser l’inventaire et la prisée du patrimoine la Selarl Torossian’;

– dit que le débiteur devra remettre au mandataire judiciaire, dans les huit jours du jugement, la liste certifiée de ses créanciers et du montant de ses dettes’;

– dit que le débiteur devra remettre au mandataire judiciaire la liste de ses salariés’;

– dit que le débiteur devra remettre à ce mandataire tout document ou information qu’il estimera utile à l’accomplissement de sa mission, et notamment la copie de ses trois derniers bilans, la justification de la situation de sa trésorerie, un compte prévisionnel de son activité établi sur un an à compter du jugement’;

– dit que le débiteur tiendra informé le tribunal avant l’expiration de chaque période de poursuite d’activité des résultats d’exploitation, de sa situation de trésorerie et de ses capacités prévisibles à faire face aux dettes nées après le jugement d’ouverture’;

– dit que le débiteur devra communiquer au mandataire ses références bancaires et faire toutes diligences pour se faire ouvrir un compte bancaire de redressement judiciaire.

3. Par requête reçue au tribunal judiciaire de Grenoble le 13 mai 2022, le mandataire judiciaire a sollicité qu’il soit mis fin à la période d’observation, et que la liquidation judiciaire soit prononcée, au motif que suite à une ordonnance exécutoire du 12 janvier 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire a constaté la résiliation des baux consentis à [U] [X] et a ordonné son expulsion, outre sa condamnation au paiement de 10.195,50 euros, de sorte que le redressement judiciaire paraît manifestement impossible.

4. Par jugement du 8 septembre 2022, le tribunal judiciaire a’:

– mis fin à la période d’observation’;

– prononcé la liquidation judiciaire de [U] [X] demeurant [Adresse 1], exerçant l’activité d’élevage de chevaux et autres équidés ;

– désigné madame [P] en qualité de juge-commissaire, et madame [G] en qualité de juge-commissaire suppléant ;

– nommé maître [N] en qualité de liquidateur’;

– fixé à deux ans l’expiration du délai au terme duquel la clôture de la procédure devra être examinée’;

– ordonné les mesures de publicités prescrites par la loi’;

– ordonné l’exécution provisoire du jugement’;

– passé les dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

5. [U] [X] a interjeté appel de cette décision le 22 novembre 2022, en toutes ses dispositions reprises dans son acte d’appel. L’instruction de cette procédure a été clôturée le 23 février 2023.

Prétentions et moyens de [U] [X] ‘:

6. Selon ses conclusions remises le 5 décembre 2022, il demande à la cour’:

– d’infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions’;

– d’ordonner la poursuite de la période d’observation et de la procédure du redressement judiciaire du concluant’;

– de condamner maître [N] ès-qualités, à verser au concluant la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance.

Il expose’:

7. – que son compte bancaire démontre que le concluant dispose d’une trésorerie lui permettant de faire face à ses échéances, et qu’il n’existe aucune dette postérieure au jugement d’ouverture’;

8. – que les différentes factures produites justifient de la persistance de son activité, laquelle est pérenne ;

9. – que pour 70’%, les créances déclarées concernent le litige l’opposant à son bailleur, alors que des procédures sont en cours devant la cour d’appel de Grenoble et la Cour de Cassation, notamment concernant la qualification du bail en bail rural et le montant des loyers’; qu’une erreur a été commise dans la déclaration de créance du Trésor public’; que les créances fiscales et sociales sont déclarées à titre provisionnel, et sont en attente de régularisation’;

10. – que les indemnités d’occupation dues pour les mois de septembre et octobre au bailleur ont été réglées, de même que les honoraires de maître [N].

Prétentions et moyens de maître [N], ès-qualités de liquidateur judiciaire de [U] [X]’:

11. Selon ses conclusions remises le 7 février 2023, il demande à la cour’:

– de déclarer irrecevable l’appel interjeté le 22 novembre 2022 par [U] [X]’;

– de déclarer non fondé cet appel et de débouter [U] [X] de l’intégralité de ses demandes’;

– de confirmer le jugement déféré’;

– de condamner l’appelant à payer au concluant la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, distraits au profit de maître Alexis Grimaud, avocat associé de la Selarl Lexavoué Grenoble.

Il soutient’:

12. – concernant l’irrecevabilité de l’appel de [U] [X], que par ordonnance juridictionnelle du «’2 février 2022’», le président de la chambre a déclaré cet appel irrecevable’; que le concluant a formé un nouvel appel par déclaration du 22 novembre 2022′; que ce nouvel appel est irrecevable pour défaut d’intérêt en application de l’article 911-1 alinéa 3 du code de procédure civile’;

13. – sur le fond, que le redressement judiciaire de l’appelant est manifestement impossible, en raison de l’importance de son passif, de sa situation financière et de son activité commerciale actuelle’;

14. – que le passif déclaré est ainsi de 286.991,66 euros, alors que le passif définitivement admis est de 35.131,07 euros, dont 20.571,36 euros à titre échu’; que la plupart des contestations de [U] [X] ne sont pas sérieuses, puisque la créance [S] pour 22.873,85 euros correspond à des condamnations définitives’; que la créance Sci Le Clos de Champagnier pour 205.707,24 euros est fondée sur des titres exécutoires et est échue pour 163.826,74 euros’; que par ordonnance du 14 novembre 2022, le juge-commissaire a ordonné l’admission d’une partie de cette créance pour 49.569,14 euros et a constaté l’existence d’instances en cours concernant la condamnation provisionnelle du débiteur au paiement de 80.740 euros’; que les créances de la MSA pour 19.070,30 euros résultent de titres exécutoires définitifs’; qu’il existe un passif non contestable supérieur à 220.000 euros’;

15. – qu’il existe également un passif postérieur, puisque le débiteur n’a pas réglé les indemnités d’occupation concernant son local professionnel de mars à août 2022, avant le mois de septembre 2022′; qu’il ne démontre pas avoir réglé les indemnités de septembre à novembre 2022′; que les honoraires du liquidateur n’ont été réglés que le 16 novembre 2022, bien que le débiteur se soit engagé à les régler le 6 octobre 2022′; qu’un passif a ainsi été créé pendant la période d’observation’;

16. – que le débiteur ne produit aucun élément concernant sa situation financière et économique’: absence de production du bilan et du compte de résultat pour les années 2020 et 2021, absence de communication de ses relevés bancaires’; que si l’appelant produit un solde bancaire créditeur pour 3.134,72 euros au 5 juillet 2022, cela est inopérant puisqu’il a effectué un paiement de 12.941,01 euros en septembre 2022 afin de régler des indemnités d’occupation’; qu’en qualité d’entrepreneur individuel, l’appelant ne fournit aucun élément sur ses charges personnelles, permettant d’apprécier ses besoins personnels après paiement d’un plan de continuation’; qu’il ne produit aucune liste de ses charges professionnelles structurelles’;

17. – que l’appelant ne justifie pas d’un droit d’occupation de ses locaux professionnels, puisque la Sci Le Clos de Champagnier lui a signifié en 2018 un congé au titre de deux baux précaires de nature commerciale signés en 2015, avec commandement de payer visant la clause résolutoire insérée dans ces baux’; que par ordonnance de référé du 12 janvier 2022, le président du tribunal judiciaire de Grenoble a constaté la résiliation de ces baux et a ordonné l’expulsion de [U] [X], outre sa condamnation au paiement de 80.740 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 1er juillet 2021 et une indemnité mensuelle d’occupation de 2.260 euros; que l’arrêt de l’exécution provisoire de cette décision a été rejeté par ordonnance du premier président de la cour d’appel ;

18. – que l’appelant ne justifie pas de son activité économique récente, alors que le tableau des recettes qu’il communique indique un chiffre d’affaire mensuel compris entre 500 et 4.000 euros, couvrant à peine les charges et ne permettant ni à l’appelant de percevoir une rémunération, ni d’envisager un plan d’apurement du passif.

Conclusions du ministère public’:

19. Selon ses conclusions remises le 23 février 2023, il conclut à la confirmation du jugement déféré.

*****

20. Il convient en application de l’article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS DE LA DECISION’:

1) Concernant la recevabilité de l’appel’:

21. Si l’intimé soutient que par ordonnance juridictionnelle du «’2 février 2022’», le président de la chambre a déclaré cet appel irrecevable, cette pièce n’est pas produite, alors que la preuve de la cause entraînant l’irrecevabilité de l’appel est à la charge de celui qui soutient cette prétention. Il existe au demeurant une contradiction entre la date de cette ordonnance, et la déclaration d’appel invoquée, dont la date serait le 14 septembre 2022 selon les conclusions de l’intimé. Il en résulte que l’appel interjeté selon déclaration du 22 novembre 2022’est recevable, la preuve d’un défaut d’intérêt en application de l’article 911-1 alinéa 3 du code de procédure civile n’étant pas établie.

2) Sur le fond’:

22. Selon le tribunal judiciaire, il ressort du décompte d’huissier daté du 5 septembre 2022 et du mail du mandataire judiciaire en date du 6 septembre 2022, que l’indemnité d’occupation du mois de septembre 2022, à laquelle il est établi et non contesté que le débiteur demeure tenu en vertu de l’ordonnance exécutoire rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Grenoble le 12 janvier 2022, ainsi que les frais du mandataire judiciaire d’un montant de 2.821,50 euros, n’ont pas été réglés à la date du 7 septembre 2022. [U] [X], dans le cadre du délai supplémentaire qui lui a été imparti par le tribunal au titre du principe du contradictoire, n’a pas contesté ces impayés et n’a communiqué aucun élément justifiant qu’il serait en mesure de procéder à leur paiement. Il s’en déduit qu’il se trouve dans l’incapacité de faire face au passif postérieur à l’ouverture de la procédure collective et donc que le redressement judiciaire initialement envisagé est manifestement impossible. En conséquence, il convient de mettre fin à la période d’observation et de prononcer la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire.

23. La cour constate que les pièces de l’appelant se limitent, concernant l’établissement de sa situation, à un relevé de son compte bancaire au 5 juillet 2022, mentionnant un solde créditeur de 3.134,72 euros et à un justificatif du paiement des indemnités d’occupation de mars à août 2022, établi par l’huissier de justice de la Sci Le Clos de Champagnier.

24. Il est justifié par maître [N] que les créances déclarées’représentent 286.991,66 euros, dont 232.100,59 euros sont contestés’; que la déclaration de la créance [S]’résulte de diverses décisions rendues par le tribunal paritaire des baux ruraux, par la cour d’appel de Grenoble, la Cour de Cassation, pour un montant total’de 22.873,85 euros’; que la MSA a déclaré une créance de 17.000 euros à titre provisionnel, et 19.070,30 euros à titre définitif’; que la déclaration de créance de la Sci Le Clos de Champagnier’pour 205.707 euros résultent de condamnations exécutoires (tribunal judiciaire tant en référé que juge de l’exécution, cour d’appel de Grenoble). Il est justifié que par arrêt du 13 juillet 2021, l’expulsion de [U] [X] a été ordonnée concernant une parcelle où il exploite son activité. Par ordonnance du 12 janvier 2022, le juge des référés a constaté la résiliation des baux commerciaux, a ordonné l’expulsion de [U] [X], avec sa condamnation à payer à la Sci Le Clos de Champagnier 80.740 euros au titre de l’arriéré locatif, outre paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle de 2.260 euros à compter du 1er juillet 2021. Par ordonnance du 14 novembre 2022, le juge-commissaire a admis à titre définitif la créance de la Sci Le Clos de Champagnier pour 49.569,14 euros, et a sursis à statuer sur le reste en raison des procédures en cours.

25. Selon le décompte de l’activité du débiteur en mars et mai 2022, il a réalisé un chiffre d’affaires mensuel avoisinant 5.000 euros. Son activité est modestement bénéficiaire (entre 1.600 et 3.800 euros selon les mois), mais sans tenir compte des cotisations sociales, de nombreuses charges inhérentes à l’activité (dont l’électricité, l’eau), et sans que le débiteur ne perçoive de salaire. Il n’est pas justifié des charges d’exploitation. L’appelant ne produit aucun document comptable permettant de déterminer le montant de ses produits et de ses charges, et ainsi la viabilité de son entreprise.

26. Il résulte de l’ensemble de ces éléments qu’aucun plan d’apurement ne peut être envisagé, tant en raison du passif déclaré à titre définitif et admis, qu’au regard de la rentabilité de l’activité et des différentes décisions ayant constaté la résiliation des divers baux permettant l’exercice de cette activité et ayant prononcé des mesures d’expulsion. Ainsi que soutenu par le mandataire judiciaire, tout redressement judiciaire est désormais impossible. En conséquence, la cour ne peut que confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.

27. Succombant en son appel, monsieur [X] sera condamné à payer à maître [N] la somme de 2.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu les articles L631-15, L640-1 et suivants du code de commerce’;

Déclare l’appel interjeté le 22 novembre 2022 recevable’;

Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour ;

y ajoutant’;

Condamne [U] [X] à payer à maître [N] ès-qualités de liquidateur judiciaire, la somme de 2.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile’;

Condamne [U] [X] aux dépens, qui seront employés en frais privilégiés de la liquidation judiciaire, avec distraction au profit de maître Alexis Grimaud, avocat associé de la Selarl Lexavoué Grenoble ;

SIGNÉ par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

 


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