COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 25 MAI 2023
N° 2023/387
Rôle N° RG 22/09993 N° Portalis DBVB-V-B7G-BJXMK
[V] [D]
C/
S.A.S. BVI
Le Comptable Public du SIP [Localité 5] NORD
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Hubert ROUSSEL
Me Paul GUEDJ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l’exécution d’Aix en Provence en date du 20 Juin 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 21/02900.
APPELANTE
Madame [V] [D]
née le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 5]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 4]
représentée et plaidant par Me Hubert ROUSSEL de l’ASSOCIATION ROUSSEL-CABAYE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Ariane CAMPANA, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
S.A.S. BVI
immatriculée au RCS de MARSEILLE sous le n° 500 016 621
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]
Monsieur Le Comptable Public du SIP [Localité 5] NORD,
demeurant [Adresse 3]
Tous deux représentés et plaidant par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, substitué par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 22 Mars 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Pascale POCHIC, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : .
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Mai 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Mai 2023,
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Faits, procédure et prétentions des parties :
Le Comptable Public du Service des Impôts des Particuliers [Localité 5] Nord a poursuivi à l’encontre de Mme [V] [D] divorcée [Z] suivant commandement du 6 février 2018, publié le 19 février 2018, la vente de biens et droits immobiliers situés à [Adresse 6].
Par jugement du 23 juillet 2018, le juge de l’exécution du tribunal de grande instance d’Aix en Provence a validé la procédure de saisie immobilière, fixé la créance du Comptable Public à la somme totale de 2 296 674.96 euros et ordonné la vente forcée du bien saisi.
Par jugement en date du 12 novembre 2018, la SAS BVI a été déclaré adjudicataire de l’immeuble susvisé au prix de 2 400 000 euros outre frais préalables taxés à la somme de 5 924.94 euros.
La déclaration de surenchère formée le 22 novembre 2018 par la société civile La Marana a été annulée pour interposition de personne, par jugement rendu le 25 mars 2019 par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance d’Aix en Provence le 25 mars 2019, confirmé par arrêt de cette cour en date du 9 septembre 2021.
Invoquant l’absence de paiement du prix de l’adjudication dans son intégralité Mme [D] a par actes du 7 juillet 2021 fait assigner la société BVI et le Comptable Public du Service des Impôts des Particuliers [Localité 5] Nord, en résolution de la vente.
Les défendeurs ont soulevé l’irrecevabilité de l’action se heurtant de l’autorité de la chose jugée par un jugement devenu irrévocable, rendu le 20 octobre 2020 entre les mêmes parties qui avait déclaré irrecevable la précédente action introduite aux mêmes fins par Mme [D] faute de publication de l’assignation ou de ses conclusions au service de la publicité foncière. Au fond l’un et l’autre se sont opposés à la demande en raison des diligences de l’adjudicataire, lequel a sollicité à titre reconventionnel condamnation de la demanderesse au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Par jugement du 20 juin 2022 le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Aix en Provence a :
‘ rejeté la fin de non recevoir soulevée par la société BVI et le Comptable Public ;
‘ déclaré l’action recevable ;
‘ débouté Mme [D] de la demande en résolution de plein droit de la vente sur adjudication réalisée le 12 novembre 2018 devenue définitive le 25 mars 2019 ;
‘ débouté Mme [D] de sa demande de mainlevée et de radiation du commandement de payer valant saisie et de sa demande de paiement des frais ;
‘ condamné Mme [D] à payer à la société BVI la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
‘ l’a condamnée à payer à chacun des défendeurs la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;
‘ rejeté les autres demandes.
Mme [D] a interjeté appel de cette décision dans les quinze jours de sa notification, par déclaration du 12 juillet 2022.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 19 octobre 2022 auxquelles il est expressément fait référence pour plus ample exposé de ses moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, elle demande à la cour de :
– débouter la SAS BVI et M. le Comptable Public responsable du SIP [Localité 5] Nord de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la SAS BVI et M. le Comptable Public responsable du SIP [Localité 5] Nord et fondée sur l’autorité de la chose jugée,
Pour le surplus,
– réformer ledit jugement,
Et statuant à nouveau,
– juger que la SAS BVI, adjudicataire définitif à compter du 25 mars 2019, n’a pas respecté les dispositions et délais du cahier des conditions de vente, notamment les articles 13, 16 et 17, s’abstenant de procéder à la consignation ou au paiement des sommes correspondant au prix principal de l’adjudication, et aux droits d’enregistrement, et aux intérêts
– juger que la SAS BVI, adjudicataire définitif à compter du 25 mars 2019, ne justifie pas du paiement du prix dans son intégralité dont notamment les intérêts, résultant de l’application des dispositions des articles L.322-12 du code des procédures civiles d’exécution, R.322-56 du même code et de l’article L313-3 du code monétaire et financier,
– juger encore que le Comptable public du Service des Impôts des particuliers d'[Localité 5] Nord s’est abstenu, passé le 25 mai 2019, de réitérer les enchères,
En conséquence,
– prononcer en conséquence au visa de l’article L.322-12 du code de procédure civile d’exécution la résolution de plein droit de la vente sur adjudication réalisée le 12 novembre 2018 devenue définitive le 25 mars 2019,
– juger d’autre part que selon paiement intégral de la créance de M. le Comptable Public du Service des Impôts des Particuliers d'[Localité 5] Nord en date du 5 juillet 2019, le commandement de saisie immobilière daté du 6 février 2018 et publié le 9 février 2018 sous le numéro volume 2018 S numéro 10 n’a plus de fondement,
-ordonner en conséquence sa radiation et à défaut, sa mainlevée,
– ordonner la radiation de la publication du jugement d’adjudication du 12 novembre 2018 et du jugement du 25 mars 2019 au premier bureau du service de la publicité foncière d'[Localité 5],
– condamner la SAS BVI au paiement de tous les frais et droits du fait de la radiation des publications du jugement d’adjudication et du jugement du 25 mars 2019 au premier bureau du service de la publicité foncière d'[Localité 5],
– condamner M. le Comptable Public du Service des Impôts des Particuliers d'[Localité 5] Nord et la société BVI au paiement d’une somme de 15 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens distraits au profit de maître Hubert Roussel sur sa justification de droit,
– ordonner la publication de la décision à intervenir au premier bureau du service de la publicité foncière d'[Localité 5].
A l’appui de ses demandes, Mme [D] fait valoir s’agissant de la fin de non recevoir soulevée par les intimés, que l’autorité de la chose jugée s’attache uniquement à la contestation tranchée et non à l’intégralité du litige et qu’en l’espèce le jugement rendu par le juge de l’exécution le 12 octobre 2020 qui avait déclaré irrecevable, sa première action en résolution de la vente d’adjudication, n’avait pas tranché le fond, à savoir le non-paiement du prix par l’adjudicataire.
Elle précise avoir régulièrement procédé à la publication de son assignation au service de la publicité foncière dès le 27 juillet 2022, ainsi qu’il ressort de l’état sur formalités qu’elle produit.
Au fond et après rappel des dispositions du cahier des conditions de vente et du code des procédures civiles d’exécution, Mme [D] note que la société BVI reconnaît elle même que le prix de la vente n’a pas été réglé dans les deux mois de la date d’adjudication définitive, puis elle indique que ce prix a été payé le 4 novembre 2019. En outre elle ne justifie pas de la régularisation du paiement des intérêts au taux légal découlant de ce retard de paiement, qui ont commencé à courir au 15 mai 2019 ni du règlement des intérêts majorés prévus par l’article L313-3 du code monétaire et financier qui ont commencé à courir à compter du 25 juillet 2019.
L’appelante relève en outre qu’au visa des articles R. 322-56 et R. 322-66 du code des procédures civiles d’exécution, à défaut de paiement du prix d’adjudication dans le délai de deux mois de l’adjudication, le créancier poursuivant doit réitérer les enchères, ce qu’il n’a pas fait.
Elle estime que c’est par une interprétation erronée des arrêts rendus le 1er octobre 2020 et le 3 février 2022 par la Cour de cassation, que la société BVI prétend que la résolution de la vente ne peut intervenir que dans le cadre d’une réitération des enchères alors qu’il est jugé que la demande en résolution de la vente par adjudication peut être formée à titre principal, sans que soit demandée la réitération des enchères.
A titre superfétatoire Mme [D] fait valoir l’extinction de la dette ayant donné lieu à la procédure de vente forcée à son encontre, qui a été réglée le 5 juillet 2019, en sorte que le commandement de saisie immobilière du 6 février 2018 n’a plus depuis cette date ni fondement ni cause, et doit être radié.
Par dernières écritures notifiées le 27 octobre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé complet de ses moyens, la société BVI, formant appel incident, demande à la cour de :
– débouter Mme [D] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– reconventionnellement, réformer la décision dont appel en ce qu’elle a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la S.A.S BVI et M. Le Comptable Public responsable du SIP [Localité 5] Nord et fondée sur l’autorité de chose jugée, et déclaré Mme [D] recevable en son action ;
Statuant à nouveau ;
– déclarer irrecevable Mme [D] en son action,
Pour le surplus ;
– confirmer le jugement du 20 Juin 2022 en ce qu’il a :
– débouté Mme [D] de sa demande en résolution de plein droit de la vente sur adjudication réalisée le 12 novembre 2018 devenue définitive le 25 mars 2019,
– débouté Mme [D] de sa demande de mainlevée et de radiation du commandement de payer valant saisie sera rejetée ainsi que la demande subséquente sur la demande de paiements de tous les frais ;
– condamné Mme [D] à payer à la S.A.S BVI la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
– condamné Mme [D] à payer à la S.A.S BVI et à M. Le Comptable Public du Service des Impôts des Particuliers d'[Localité 5]-Nord, la somme de 2 000 euros chacun en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;
– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif,
En tout état de cause ;
– condamner Mme [D] à payer la somme de 100 000 euros au titre des dommages intérêts pour procédure abusive ;
– la condamner à payer à la SAS BVI la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, ceux distraits au profit de la SCP Cohen Guedj Montero Daval-Guedj qui en fait l’avance ;
Sur l’irrecevabilité tirée de la chose jugée, l’intimée rappelle que par jugement du 12 octobre 2020 l’action en résolution de la vente introduite par Mme [D] a été déclarée irrecevable faute de publication de son assignation, ou de ses conclusions postérieures, auprès des services de la publicité foncière en application des dispositions du décret du 4 janvier 1955, publication qui n’a pas été régularisée jusqu’au jugement ni dans le cadre de l’appel qu’elle a formé à l’encontre de cette décision, et qui a été déclaré caduc par ordonnance du 20 janvier 2021.
Or en vertu d’une jurisprudence constante, il est jugé que le caractère nouveau de l’événement permettant d’écarter la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée ne peut résulter de ce que la partie qui l’invoque a négligé d’accomplir une diligence en temps utile.(Cass. Civ. 2ème 20 avril 2017, n° 1613412, 19 septembre 2018, n° 17-22678).
Subsidiairement au fond, la société BVI affirme qu’elle a accompli toutes les démarches qui lui incombaient, dans les temps impartis, en considération des délais impulsés tant par les services fiscaux que par le greffe. Elle a ainsi procédé à la consignation de la totalité du prix à hauteur de 2 400 000 euros comme en atteste la Carpa le 4 Novembre 2019 et le justificatif du paiement a été adressé au greffe qui lui a délivré la copie exécutoire du jugement d’adjudication et le titre de vente le 17 janvier 2020 qui a été publié le 10 février 2020 auprès des services de la publicité foncière comme en atteste l’état sur formalité produit.
Elle soutient que si le paiement du prix par l’adjudicataire doit être régularisé dans un délai de deux mois à compter du moment où l’adjudication est définitive, à l’expiration de ce délai, la résolution de la vente n’est pas pour autant encourue puisque l’article R.322-26 du code des procédures civiles d’exécution prévoit spécifiquement une sanction pour le cas où le paiement interviendrait tardivement et qui consiste à l’augmentation du prix de vente des intérêts au taux légal ( Civ 2ème du 1er octobre 2020 n°19-12.380).
Elle soutient par ailleurs que la résolution de la vente suite à une adjudication est une sanction qui ne s’entend que dans le contexte d’une réitération des enchères et qu’une telle action n’est pas une procédure autonome.
Elle souligne que le titre de vente n’a pu être délivré en raison des multiples recours formés par Mme [D] et de la surenchère de la société La Marana et qu’il ne peut être considéré que l’adjudicataire est tenu au paiement du prix tant que la procédure n’est pas purgée de tous les recours et contestations concernant la régularité de l’adjudication.
Elle fait par ailleurs valoir que Mme [D] n’a pas respecté la procédure de réitération des enchères alors que la résolution de la vente n’est que l’accessoire de la procédure de réitération qui est celle qui doit être mise en oeuvre en cas de défaillance de l’adjudicataire (Civ 2ème du 3 février 2022 n°20-19.522 ).
S’agissant de sa demande complémentaire de dommages et intérêts pour procédure abusive l’intimée indique que la présente instance est une nouvelle illustration de l’acharnement de Mme [D] à son encontre et de l’abus qu’elle fait des innombrables recours qu’elle engage, n’hésitant pas à saisir à deux reprises la même juridiction des mêmes demandes, dont elle a déjà été déboutée, que cet acharnement lui cause préjudice, compte tenu du blocage du prix de vente qu’elle a acquitté qui l’empêche de finaliser la revente de l’immeuble qu’elle a acquis.
Par dernières écritures notifiées le 30 septembre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé complet de ses moyens, le Comptable public responsable du SIP [Localité 5] Nord formant appel incident, demande à la cour de :
– débouter Mme [D] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– reconventionnellement, réformer la décision dont appel en ce qu’elle a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la S.A.S BVI et M. Le Comptable Public responsable du SIP [Localité 5] Nord fondée sur l’autorité de chose jugée, et déclaré Mme [D] recevable en son action ;
Statuant à nouveau ;
– déclarer irrecevable Mme [D] en son action,
Pour le surplus :
– confirmer le jugement du 20 Juin 2022 en ce qu’il a :
– débouté Mme [D] de sa demande en résolution de plein droit de la vente sur adjudication réalisée le 12 novembre 2018 devenue définitive le 25 mars 2019,
– débouté Mme [D] de sa demande de mainlevée et de radiation du commandement de payer valant saisie ainsi que de la demande subséquente de paiements de tous les frais;
– condamné Mme [D] à payer à la S.A.S B VI la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
– condamné Mme [D] à payer à la S.A.S BVI et à M. Le Comptable Public du Service des Impôts des Particuliers d'[Localité 5]-Nord, la somme de 2 000 euros chacun en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;
En tout état de cause :
– condamner Mme [D] à payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, ceux distraits au profit de la SCP Cohen Guedj Montero Daval-Guedj qui en fait l’avance.
S’agissant de l’irrecevabilité de l’action de Mme [D] il invoque les mêmes moyens que la société BVI.
Au fond il rappelle que sa créance a été réglée après la vente aux enchères du bien saisi et précise qu’il demeure partie à cette procédure en sa qualité de créancier poursuivant, en raison de l’attitude dilatoire de Mme [D] par ailleurs malvenue à prétendre à une connivence entre les intimés.
Sur le moyen tiré de ce qu’il n’aurait pas respecté ses obligations de créancier poursuivant en s’abstenant de solliciter la réitération des enchères dès l’expiration du délai de deux mois prévus au cahier des conditions de vente pour la consignation du prix par l’adjudicataire, l’intimé rappelle qu’il s’agit d’une simple faculté dont il n’a pas usé dès lors que la société BVI a régularisé les formalités suite à la vente par adjudication et ce, en dépit des nombreux recours formés par Mme [D] et la société La Marana surenchérisseuse et qu’en outre il a obtenu le règlement de la créance poursuivie.
Il précise par ailleurs que le défaut de respect du délai de deux mois ne saurait caractériser à lui seul la défaillance de l’adjudicataire qui à ce jour, s’est acquitté des droits d’enregistrement, des frais de vente et a consigné le prix.
Enfin il rappelle que le règlement de sa créance est intervenu après la vente sur adjudication et qu’il ne peut être soutenu que le commandement est sans cause ou fondement puisqu’au moment où il a été délivré, la créance n’était pas éteinte, ajoutant dès lors que le titre de vente a été délivré et publié, cette demande est devenue sans objet.
L’instruction de l’affaire a été déclarée close par ordonnance du 21 février 2022.
MOTIVATION DE LA DÉCISION
Sur la fin de non recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée :
Selon l’article 1355 du code civil l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité ;
Par ailleurs l’article 480 alinéa 1 du code de procédure civile dispose que le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l’autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu’il tranche ;
Il n’est pas discuté qu’une même action en résolution de la vente sur adjudication basée sur les mêmes moyens a précédemment été engagée par Mme [D] entre les mêmes parties devant la même juridiction qui par jugement devenu irrévocable, rendu le12 octobre 2020, l’a déclarée irrecevable en raison de l’absence de publication de l’assignation dans les registres du service chargé de la publicité foncière, obligation prévue par les articles 30-5° et 28- 4° du décret n°55-22 du 4 janvier 1955, à peine d’irrecevabilité de la demande ;
Cette fin de non recevoir qui pouvait être régularisée en cours de première instance, ne l’a pas été ni en cause appel, ce recours ayant été déclaré caduc par ordonnance du 20 janvier 2021, non déférée à la cour, faute pour Mme [D] d’avoir conclu dans le délai imparti par l’article 905-2 du code de procédure civile ;
Celle-ci objecte que ce précédent jugement n’a d’autorité de la chose jugée que pour la contestation qu’il a tranchée et non sur le fond du litige sur lequel il n’a pas été statué et elle indique que dans le cadre de cette nouvelle action en résolution de la vente sur adjudication, elle a procédé à la formalité de publicité foncière obligatoire ;
Toutefois ainsi que l’opposent exactement les intimés, le caractère nouveau de l’événement permettant d’écarter la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de chose jugée ne peut résulter de ce que la partie qui l’invoque avait négligé d’accomplir une diligence en temps utile qui a été régularisée, en sorte que la nouvelle action de Mme [D] se heurte à l’autorité de la chose définitivement jugée par jugement du12 octobre 2020, alors que le fait nouveau invoqué aurait pu être régularisé lors de la première demande et que cette deuxième action ne vise qu’à réparer cette omission ;
Le jugement sera en conséquence réformé en ce qu’il a déclaré l’action recevable et débouté Mme [D] de sa demande en résolution de la vente sur adjudication et l’action sera déclarée irrecevable ;
Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :
L’acharnement de Mme [D] dénoncé par la société BVI est insuffisamment caractérisé par cette nouvelle action en résolution de la vente forcée, dont la recevabilité a été retenue en première instance, étant rappelé que l’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits ne constitue pas en soi une faute caractérisant un abus du droit d’agir en justice.
Il s’ensuit par réformation du jugement entrepris de ce chef, le rejet de ce la demande indemnitaire présentée par la société BVI.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Le sort en a été exactement réglé par le premier juge dont le jugement sera approuvé de ces chefs.
A hauteur de cour, il convient d’accorder aux intimés, contraints d’exposer de nouveaux frais pour se défendre, une indemnité complémentaire sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile dans les conditions précisées au dispositif ci-après. Partie perdante, l’appelante ne peut prétendre au bénéfice de ces dispositions et supportera les dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,
INFIRME le jugement entrepris excepté en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens ;
STATUANT à nouveau des chefs infirmés,
DÉCLARE irrecevable l’action en résolution de la vente sur adjudication formée par Mme [V] [D] ;
REJETTE la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par la SAS BVI;
CONDAMNE Mme [V] [D] à payer à ladite société et au Comptable public responsable du SIP [Localité 5] Nord la somme , chacun, de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE les autres demandes ;
CONDAMNE Mme [V] [D] aux dépens d’appel avec droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE