Saisine du juge de l’exécution : 25 juillet 2023 Cour d’appel de Reims RG n° 23/00536

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Saisine du juge de l’exécution : 25 juillet 2023 Cour d’appel de Reims RG n° 23/00536

ARRÊT N°

du 25 juillet 2023

(B. P.)

N° RG 23/00536

N° Portalis

DBVQ-V-B7H-FKAK

S.A. BNP PARIBAS

C/

– M. [V]

– Mme [M]

Formule exécutoire + CCC

le 25 juillet 2023

à :

– la SCP X.COLOMES-S.COLOMES-MATHIEU-

ZANCHI-THIBAULT

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE

CONTENTIEUX DE L’EXÉCUTION

ARRÊT DU 25 JUILLET 2023

Appelant :

d’un jugement rendu par le Juge de l’exécution de TROYES le 28 février 2023

S.A. BNP PARIBAS

[Adresse 2]

[Localité 5]

Comparante, concluant par la SCP X.COLOMES S.COLOMES-MATHIEU-ZANCHI-THIBAULT, avocats au barreau de l’AUBE

Intimé :

– M. [G] [V]

[Adresse 4]

[Localité 1]

N’ayant pas constitué avocat, bien que régulièrement assigné

– Mme [Y] [M]

[Adresse 4]

[Localité 1]

N’ayant pas constitué avocat, bien que régulièrement assignée,

DÉBATS :

A l’audience publique du 13 juin 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 25 juillet 2023, sans opposition de la part des conseils des parties et en application de l’article 786 du code de procédure civile, M. Benoît PETY, Président de chambre, a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la cour dans son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Benoît PETY, Président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, Conseiller

Madame Christel MAGNARD, Conseiller

GREFFIER lors des débats et du prononcé

Mme Sophie BALESTRE, Greffier

ARRÊT :

Par défaut, prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour le 25 juillet 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par M. Benoît PETY, Président de chambre, et Mme Sophie BALESTRE, Greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige, de la procédure et des prétentions des parties :

La SA BNP Paribas a fait délivrer le 14 juin 2022 à M. [G] [V], en sa qualité d’emprunteur, et à Mme [Y] [M], en sa qualité de caution solidaire, un commandement de payer aux fins de saisie immobilière portant sur un bien à usage d’habitation sis à [Localité 1] (Aube), [Adresse 4] [et non [Adresse 6]], cadastré section AR n°[Cadastre 3], pour une contenance de 4 a 31 ca, en vue du recouvrement d’une somme de 50 707,22 euros arrêtée au 24 février 2022, outre intérêts moratoires au taux de 3,39 % l’an depuis le 25 février 2022.

Ce commandement aux fins de saisie immobilière a été publié le 4 août 2022.

Par actes d’huissier du 3 octobre 2022, la SA BNP Paribas a fait assigner M. [V] et Mme [M] devant le juge de l’exécution au tribunal judiciaire de Troyes à l’audience d’orientation pour voir procéder à l’examen de la validité de la procédure de saisie immobilière, statuer sur les éventuelles contestations et demandes incidentes, déterminer les modalités à suivre, fixer le montant de sa créance, en cas de vente forcée en fixer les modalités.

Le cahier des conditions de la vente comportant état descriptif du bien a été déposé au greffe du tribunal judiciaire de Troyes le 5 octobre 2022.

A l’audience du 13 décembre 2022, le créancier poursuivant a demandé l’orientation de la procédure en vente forcée. Les débats ont été rouverts à l’audience du 24 janvier 2023 aux fins de production du commandement de saisie. La SA BNP Paribas a alors sollicité la suspension de la saisie pour cause de recevabilité des débiteurs saisis à la procédure de surendettement.

Par jugement réputé contradictoire du 28 février 2023, le juge de l’exécution au tribunal judiciaire de Troyes a notamment :

– prononcé la nullité du commandement de payer aux fins de saisie immobilière délivré par la SA BNP Paribas à Mme [Y] [M] le 14 juin 2022,

– ordonné la mainlevée de la procédure de saisie immobilière poursuivie à l’encontre de M. [V] et de Mme [M] sur leur bien sis à [Localité 1], [Adresse 4],

– ordonné la publication du jugement et mention de la mainlevée en marge de la copie du commandement de payer aux services chargés de la publicité foncière à [Localité 7],

– condamné la SA BNP Paribas à supporter les entiers dépens de l’instance, lesquels comprennent les frais de la procédure de saisie immobilière dont les frais de la publicité foncière.

La SA BNP Paribas a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 22 mars 2023, son recours portant sur l’entier dispositif de la décision querellée.

Par requête enregistrée le 29 mars 2023 au greffe de la cour de Reims, la SA BNP Paribas a sollicité l’autorisation d’assigner M. [G] [V] et Mme [Y] [M] à jour fixe.

En exécution d’une ordonnance du premier président du 12 avril 2023, la partie appelante, par actes d’huissier du 3 mai 2023, a fait assigner M. [V] et Mme [M] devant la cour de Reims, en sa chambre civile ‘ section II, à l’audience du 13 juin 2023 à 10 heures.

La SA BNP Paribas demande ainsi à la juridiction du second degré de :

– La déclarer recevable et bien-fondée en son appel et ses demandes,

-Infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

– Déclarer en tant que de besoin irrecevables ou, à défaut, mal-fondés M. [V] et Mme [M] en l’ensemble de leurs demandes,

A titre principal,

– Constater la suspension de la procédure de saisie immobilière diligentée à son initiative sur les biens immobiliers appartenant en indivision à M. [V] et à Mme [M] et ce jusqu’à la fin du plan définitif entré en vigueur le 28 février 2023 et qui doit donc intervenir le 28 février 2025,

– Déclarer que cette suspension s’applique conformément aux articles L. 722-2 et suivants du code de la consommation,

– Déclarer que la décision sera visée au service de la publicité foncière de [Localité 7] en marge du commandement,

En tout état de cause,

– Déclarer que la BNP Paribas se prévaut d’un titre exécutoire régulier tant à l’égard de M. [V] en sa qualité de débiteur principal que de Mme [M] en sa qualité de caution solidaire, titre exécutoire constatant une créance certaine, liquide et exigible,

– Fixer sa créance à la somme de 50 707,22 euros arrêtée au 24 février 2022, outre les intérêts moratoires au taux de 3,39 % l’an depuis le 25 février 2022,

– Ordonner d’ores et déjà, si la vente du bien des consorts [V]-[M], devait ne pas intervenir dans le cadre de leur procédure de surendettement, la reprise de la procédure de saisie immobilière et ainsi la poursuite de la procédure d’exécution devant le premier juge, laquelle reprise aura vocation à intervenir à l’issue du plan de surendettement de ces derniers et/ou en cas de caducité de celui-ci,

– Ordonner à cet égard et le cas échéant la vente forcée sur la mise à prix telle que fixée dans le cahier des conditions de vente, soit sur la somme de 30 000 euros,

– Déclarer que les dépens de l’incident comprenant notamment l’émolument proportionnel d’incident (article A 444-200 du code de commerce) devront être qualifiés de frais de justice privilégiés.

Au soutien de ses demandes, la partie poursuivante expose que :

La suspension de la procédure de saisie immobilière s’imposait au premier juge dès lors que les consorts [V]-[M] ont été déclarés recevables en leur demande de surendettement, soit le 27 septembre 2022, le plan définitif de redressement entré en vigueur le 28 février 2023 prévoyant un moratoire de 24 mois afin que les débiteurs organisent la vente de leur bien immobilier,

Le titre exécutoire, c’est-à-dire l’acte notarié revêtu de la formule exécutoire comporte l’engagement de M. [V] de rembourser le prêt qu’il a souscrit mais aussi l’engagement accessoire de Mme [M] de suppléer, en sa qualité de caution personnelle et solidaire, M. [V], débiteur principal, si celui-ci n’entendait pas répondre de ses propres obligations, le caractère exécutoire du titre concernant tant le débiteur principal que la caution. Il n’y a donc pas lieu de se référer à la notion de condamnation, s’agissant d’un acte notarié et non d’un jugement.

* * * *

M. [G] [V] a été assigné devant la cour le 3 mai 2023 par remise de l’acte à domicile, plus précisément à Mme [M], qui a accepté de se le voir délivrer.

Mme [M] a reçu personnellement le même jour l’assignation à comparaître la concernant.

Aucun des intimés n’ayant constitué avocat, il importera de statuer en la cause par décision prononcée par défaut.

* * * *

Motifs de la décision :

– Sur les conditions de la poursuite de la SA BNP Paribas à l’encontre des consorts [V]-[M] :

Attendu que l’article L. 311-2 du code des procédures civiles d’exécution énonce que tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière dans les conditions fixées par le présent livre et par les dispositions qui ne lui sont pas contraires du livre 1er ;

Attendu que la lecture de l’acte authentique dressé le 24 juin 2013 par Me [E] [B], notaire associé à [Localité 1], acte produit par la partie appelante sous sa pièce n°5, enseigne que M. [G] [V] a souscrit auprès de la SA BNP Paribas un prêt de 62 000 euros remboursable sur 18 années (216 mensualités) au taux annuel fixe de 3,39 % pour financer l’acquisition, indivisément avec Mme [Y] [M], d’une maison à usage de résidence principale à [Localité 1], [Adresse 4] ;

Qu’il se lit également en pages 10 et suivantes de l’acte que Mme [M], qui n’est pas partie au prêt immobilier, déclare se constituer caution solidaire de l’emprunteur envers le prêteur qui accepte, avec renonciation aux bénéfices de division et de discussion pour le remboursement des sommes dues en principal, intérêts, frais et accessoires en vertu du contrat de prêt, et jusqu’à concurrence des sommes acceptées par la caution dans l’offre de prêt ;

Qu’il est explicitement rappelé dans cet acte notarié que le prêteur pourra, sans avoir à respecter d’autres formalités que l’envoi d’une simple lettre recommandée, exercer son recours contre [la caution] dès que sa créance sur l’emprunteur deviendra exigible, notamment en cas de déchéance du terme ;

Qu’il est encore précisé dans cet acte notarié que, par renonciation au bénéfice de discussion, la caution reconnaît qu’au cas où le prêteur serait créancier d’une somme quelconque, il pourrait poursuivre indifféremment le débiteur principal ou la caution ;

Qu’il n’est pas discutable que Mme [Y] [M] est bien signataire de cet acte authentique, aux côtés de M. [G] [V] notamment, de telle sorte que le titre exécutoire dont se prévaut la SA BNP Paribas ne porte pas seulement sur l’engagement de M. [V] au titre du prêt mais aussi sur le cautionnement auquel Mme [Y] [M] s’est bel et bien engagée ;

Qu’en d’autres termes, la banque poursuivante, à l’origine de la procédure de saisie immobilière, justifie, au sens de l’article L. 311-2 du code des procédures civiles d’exécution, d’un titre exécutoire susceptible de constater une créance liquide et exigible tant à l’égard de M. [V] que de Mme [M], toute référence à la notion de condamnation s’avérant par définition inutile comme étrangère à un acte notarié, ce qui ne serait pas le cas si le titre exécutoire invoqué par la banque était une décision de justice ;

Que, par ailleurs, la SA BNP Paribas justifie sous ses pièces n°10, 11 et 12 de ce qu’elle a mis en demeure le 22 septembre 2020 M. [V] en sa qualité d’emprunteur de régulariser les mensualités échues impayées et de lui régler sous quinzaine la somme de 824,44 euros, ce qui a été suivi le 26 avril 2021 d’un nouveau courrier recommandé avec accusé de réception adressé à l’intéressé (accusé tout autant signé par le destinataire que celui de septembre 2020) par lequel le prêteur prononce l’exigibilité anticipée (ou déchéance du terme) du prêt pour lui réclamer le paiement de la somme de 47 730,87 euros ;

Que, par lettre recommandée distincte avec demande d’avis de réception, la SA BNP Paribas prenait le soin d’aviser la caution de l’état de sa créance envers l’emprunteur et de la mettre en demeure, ès qualités, de lui rembourser le montant réclamé à M. [V], soit 47 730,87 euros, outre intérêts ;

Qu’il s’ensuit que la banque poursuivante justifie d’une créance liquide et exigible à l’égard tant de M. [V] en sa qualité d’emprunteur (ou débiteur principal) que de Mme [M] en sa qualité de caution solidaire, au surplus au vu d’un titre exécutoire valide envers les deux, comme précédemment développé ;

Qu’en l’état de ces constatations, aucune nullité du commandement de payer aux fins de saisie immobilière du 14 juin 2022 n’est encourue ;

Que, par ailleurs, les deux propriétaires indivis du bien immobilier saisi étant valablement et utilement attraits à la mesure d’exécution, aucune mainlevée ne saurait en être prononcée ;

Que la décision dont appel sera en cela infirmée de ces deux chefs ;

– Sur la demande de suspension de la saisie immobilière :

Attendu que l’article 722-5 du code de la consommation énonce que la lettre notifiant la décision de recevabilité rappelle qu’elle a pour effet de suspendre et d’interdire les procédures d’exécution diligentées à l’encontre des biens du débiteur ainsi que des cessions de rémunérations qu’il a consenties et portant sur des dettes autres qu’alimentaires. Elle précise que la suspension ou l’interdiction produit effet, selon le cas, jusqu’à l’approbation du plan conventionnel de redressement prévu à l’article L. 732-1, jusqu’à la décision imposant les mesures prévues aux articles L. 733-1, L. 733-4, L. 733-7 et L. 741-1 ou jusqu’au jugement prononçant un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou jusqu’au jugement d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire, sans pouvoir excéder deux ans. [—] ;

Attendu que la SA BNP Paribas, qui sollicitait devant le premier juge la suspension de la procédure de saisie immobilière, communique sous sa pièce n°13 le courrier adressé le 27 septembre 2022 à M. [V] et Mme [M] par lequel la Commission de surendettement des particuliers de l’Aube leur notifiait la déclaration de recevabilité de leur dossier de surendettement avec orientation de celui-ci vers une phase de conciliation (réaménagement de leurs dettes) ;

Qu’il est notamment rappelé dans ce courrier que, pendant toute la procédure et pour deux ans au maximum, les créanciers déclarés dans leur dossier ne peuvent plus saisir leurs biens ou leurs revenus, sauf pour des dettes alimentaires ou pénales ;

Qu’il est joint à ce courrier un plan définitif mentionnant la créance de BNP Paribas pour une somme de 51 665,77 euros avec un palier de 24 mois sans aucune mensualité, précision étant inscrite à titre d’observation générale que le plan doit permettre la vente du bien immobilier, le plan étant appliqué à compter du 28 février 2023 ;

Que, dans ce contexte, la demande de suspension de la saisie immobilière par la SA BNP Paribas est justifiée et doit être entérinée comme il sera dit au dispositif du présent arrêt ;

Qu’afin de ne pas préjuger de l’exécution de ce plan de désendettement, lequel est applicable jusqu’au 28 février 2025, il n’y a pas lieu d’organiser dès à présent les modalités de la vente du bien saisi, ce qui devra le cas échéant être de nouveau formulé devant le juge de l’exécution en charge de la procédure par le biais de conclusions aux fins de reprise d’instance ;

– Sur les dépens :

Attendu que les dépens tant d’appel que de première instance seront compris dans les frais privilégiés de vente soumis à la taxe ;

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement et par décision prononcée par défaut,

– Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Prononçant à nouveau,

– Constate que la SA BNP Paribas est munie d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible tant envers M. [G] [V], emprunteur, qu’à l’égard de Mme [Y] [M], caution solidaire ;

– Dit en conséquence n’y avoir lieu à annulation du commandement de payer aux fins de saisie immobilière délivré le 14 juin 2022 à Mme [Y] [M] ;

– Dit n’y avoir lieu à mainlevée de la procédure de saisie immobilière poursuivie par la SA BNP Paribas à l’encontre de M. [G] [V] et de Mme [Y] [M] sur leur bien immobilier indivis sis à [Localité 1], [Adresse 4] ;

– Suspend la procédure de saisie immobilière jusqu’à l’expiration du plan définitif de désendettement émis par la Commission de surendettement des particuliers de l’Aube, plan prenant effet au 28 février 2023 pour une durée de 24 mois ;

– Dit en conséquence n’y avoir lieu de définir dès à présent les modalités de vente de l’immeuble saisi ;

– Dit que les dépens d’appel comme ceux de première instance seront compris dans les frais privilégiés de vente soumis à la taxe ;

– Renvoie la cause et les parties devant le juge de l’exécution au tribunal judiciaire de Troyes en charge des ventes immobilières, lequel définira le cas échéant et au vu de conclusions aux fins de reprise d’instance les modalités de poursuite de la procédure.

Le greffier. Le Président.

 


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