N° RG 21/05638 – N° Portalis DBVX-V-B7F-NXJ5
Décision du Tribunal de proximité de Villeurbanne au fond du 30 avril 2021
RG : 1121000630
[E]
[V]
C/
[H]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRÊT DU 24 Mai 2023
APPELANTS :
M. [M] [E]
né le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 7] (Guadeloupe) ([Localité 7])
[Adresse 2]
[Localité 6]
Mme [W] [V]
née le [Date naissance 3] 1982 à [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentés par Me Maxence GENTY, avocat au barreau de LYON, toque : 2298
INTIMÉE :
Mme [F] [H]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Frédéric PIRAS de la SELARL PIRAS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 704
assisté de Maître David ROGUET, avocat au barreau de GRENOBLE
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 13 Octobre 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 22 Mars 2023
Date de mise à disposition : 24 Mai 2023
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
– Bénédicte BOISSELET, président
– Karen STELLA, conseiller
– Véronique MASSON-BESSOU, conseiller
assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier
A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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Exposé du litige
Par acte du 15 janvier 2020, [F] [H] a donné à bail à [M] [E] et [W] [V] un logement à usage d’habitation situé [Adresse 2] à [Localité 6] (Rhône).
Un commandement de payer, visant la clause résolutoire a été délivré à [M] [E] et [W] [V] le 14 septembre 2020 pour le paiement de la somme de 2.308,50 €, correspondant au montant des loyers dus au 9 septembre 2020.
Aux motifs que les causes du commandement n’avaient pas été apurées dans les délais, [F] [H], en date du 21 décembre 2020, a assigné [M] [E] et [W] [V] devant le juge des contentieux et de la protection du Tribunal de proximité de Villeurbanne aux fins de voir au principal constater l’acquisition de la clause résolutoire et statuer sur ses conséquences et obtenir leur condamnation à lui payer la somme de 3.113,50 € au titre de l’arriéré locatif arrêté au 3 décembre 2020.
A l’audience, [M] [E] a sollicité des délais de paiement et [W] [V] n’a pas comparu.
Par jugement du 30 avril 2021, le juge des contentieux de la protection du Tribunal de proximité de Villeurbanne, a :
Constaté la résiliation judiciaire du bail à la date du 15 novembre 2020 ;
Autorisé [F] [H] à faire procéder à l’expulsion de [W] [V] et [M] [E] et à celle de tout occupant de leur chef, au besoin avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier, à défaut pour ceux-ci d’avoir libéré les lieux dans les deux mois de la signification d’un commandement d’avoir à quitter les lieux ;
Condamné solidairement [W] [V] et [M] [E] à payer [F] [H] la somme de 3.113,50 €, déduction faite des frais de poursuite, au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation arrêtés au 3 décembre 2020, échéance du mois de décembre 2020 incluse, outre intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement ;
Condamné solidairement [W] [V] et [M] [E] à payer [F] [H] une indemnité mensuelle d’occupation équivalente au loyer et charges courants, outre indexation prévue au contrat, à compter du 1er janvier 2021 et jusqu’à la libération effective des lieux loués ;
Condamné solidairement [W] [V] et [M] [E] à payer [F] [H] la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamné solidairement [W] [V] et [M] [E] aux dépens de l’instance, comprenant le coût du commandement de payer et les frais d’exécution.
Le juge a notamment retenu :
qu’en moins d’un an d’occupation des lieux, les locataires ont cumulé une dette de loyers de plus de 3.000 €, étant observé qu’avant la signature du bail, ils avaient déjà généré une dette de loyers dont ils sont toujours redevables ;
que la demande de délais de paiement, au regard des risques d’impayés, doit être rejetée, [F] [H] n’ayant pas à vocation à assister ses locataires rencontrant des difficultés de gestion.
Par acte régularisé par RPVA le 2 juillet 2021, [W] [V] et [M] [E] ont interjeté appel de l’intégralité des chefs de décision figurant au dispositif du jugement du 30 avril 2021, dont ils ont repris les termes dans leur déclaration d’appel.
Aux termes de leurs dernières écritures, régularisées par RPVA le 7 septembre 2021, [W] [V] et [M] [E], demandent à la Cour de :
Vu les dispositions de la loi du 6 juillet 1989,
Les dire et juger recevables et bien fondés en leurs demandes,
Y faisant droit :
Infirmer la décision du juge des contentieux de la protection de Villeurbanne du 30 avril 2021 en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :
Suspendre l’effet de la clause résolutoire,
Leur accorder le même échéancier que celui convenu avec le bailleur pour l’apurement de leur dette ;
Condamner [F] [H] au paiement de la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner [F] [H] au paiement des dépens.
A l’appui de leurs prétentions, les appelants font valoir :
qu’ils ont demandé des délais de paiement en première instance qui ont été refusés à tort ;
qu’en effet, depuis la décision du juge des contentieux de la protection rendue le 30 avril 2021, ils honorent régulièrement le paiement de leur loyer d’une part et ont convenu avec leur bailleur d’un plan d’apurement de leur dette d’ici 2022 d’autre part.
Aux termes de ses dernières écritures, régularisées par RPVA le 1er décembre 2021, [F] [H] demande à la Cour de :
Confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions ;
Rejeter les demandes, fins et conclusions des appelants.
Y ajoutant,
Les condamner à payer une somme supplémentaire de 500 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, et ce en cause d’appel ;
Les condamner aux entiers dépens.
[F] [H] expose qu’elle s’oppose à tout délai de paiement, dès lors :
que ces délais de paiement ont déjà été refusés par le Juge de l’exécution ;
Contrairement à ce qui a été indiqué, l’arriéré ne cesse d’augmenter en raison des rejets de prélèvements constatés.
Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé, par application des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur la résiliation du bail et la demande de suspension des effets de la clause résolutoire
En application de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, la clause résolutoire insérée au bail ne produit effet que deux mois après la délivrance d’un commandement de payer infructueux.
En l’espèce, il n’est pas contesté par les appelants et confirmé par le décompte versé aux débats par [F] [H] que l’arriéré de loyers réclamé aux termes du commandement délivré le 14 septembre 2020 n’a pas été apuré dans le délai de deux mois.
Dès lors, au visa des articles 24 de la loi du 6 juillet 1989, 1124 et 1228 du Code civil, c’est à raison qu’il a été retenu aux termes de la décision déférée que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 15 novembre 2020, soit deux mois après la date de délivrance du commandement.
L’article 1343-5 du Code civil dispose notamment :
‘Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que le sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital ‘.
Par ailleurs, en vertu de l’article 24.V de la loi du 6 juillet 1989 :
‘Le juge peut, même d’office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l’article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative…..
Pendant le cours des délais ainsi accordés, les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus ; ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l’exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges.
Si le locataire se libère dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué ; dans le cas contraire, elle reprend son plein effet’.
En l’espèce, [M] [E] et [W] [V] sollicitent la suspension des effets de la clause résolutoire et qu’il leur soit accordé des délais de paiement conformes à l’échéancier convenu avec le bailleur pour l’apurement de leur dette locative, échéancier intervenu après que soit rendu le jugement du juge des contentieux de la protection.
Pour autant, la Cour ne peut que constater que ce plan d’apurement, en date du 10 juin 2021 n’a pas été respecté puisqu’à l’examen du décompte produit par le bailleur, le prélèvement du 10 juin 2021 pour le réglement du loyer a été rejeté pour provision insuffisante le 16 juin suivant et qu’il en a été de même pour le prélèvement du 29 juin 2021, rejeté le 6 juillet 2012 pour la même raison.
La Cour observe également que, saisi par [M] [E] et [W] [V] d’une demande de délai pour quitter leur logement à la suite de la délivrance d’un commandement de quitter les lieux signifié le 10 juin 2021, le juge de l’exécution du Tribunal judiciaire de Lyon, dans un jugement du 21 septembre 2021, a relevé :
que les réglements effectués en vue du paiement du loyer avaient été rejetés et que la dette avait augmenté et s’élevait à la somme de 5.914,35 € ;
qu'[M] [E] subissait un endettement important de plus de 25.000 € constitué d’une précédente dette de loyer et qu’un maintien dans les lieux aurait pour effet d’obérer une situation financière déjà très délicate.
La Cour constate par ailleurs qu'[M] [E] et [W] [V] ne produisent aucun justificatif de leur situation financière.
Il ne peut donc qu’être constaté que les appelants ne rapportent pas la preuve qu’ils sont en situation de régler leur dette locative et que les seuls éléments dont dispose la Cour pour apprécier leur situation démontrent au contraire qu’ils ne sont en mesure ni de régler leur arriéré de loyer, ni de faire face au paiement du loyer courant.
En conséquence la Cour rejette la demande de délais de paiement avec suspension des effets de la clause résolutoire présentée par [M] [E] et [W] [V] et confirme la décision déférée en ce qu’elle a constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail liant les parties et rejeté leur demande de délais de paiement.
Par ailleurs, la Cour confirme les autres dispositions du jugement déféré, dont il y a lieu de relever qu’elles ne sont pas expressément contestées par les appelants, dès lors que :
[M] [E] et [W] [V] étant désormais sans droit ni titre, il était justifié que leur expulsion soit ordonnée et qu’ils soient condamnés au paiement d’une indemnité d’occupation alors qu’ils se trouvent toujours dans les lieux ;
la dette de loyers telle que retenue par le premier juge est confirmée par les décomptes versés aux débats par le bailleur.
3) Sur les demandes accessoires
La Cour confirme la décision déférée qui a condamné [M] [E] et [W] [V], parties perdantes, aux dépens et à payer à [F] [H] la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, justifiée en équité.
[M] [E] et [W] [V] , parties perdantes sont condamnés aux dépens à hauteur d’appel.
Enfin, la Cour condamne [M] [E] et [W] [V] à payer à [F] [H] la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile à hauteur d’appel, justifiée en équité.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Rejette la demande de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire présentée par [M] [E] et [W] [V] ;
Confirme la décision déférée dans son intégralité ;
Condamne [M] [E] et [W] [V] aux dépens à hauteur d’appel ;
Condamne [M] [E] et [W] [V] à payer à [F] [H] la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile à hauteur d’appel ;
Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT