Saisine du juge de l’exécution : 23 mai 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 23/00046

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Saisine du juge de l’exécution : 23 mai 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 23/00046

ARRET N°242

FV/KP

N° RG 23/00046 – N° Portalis DBV5-V-B7H-GWUG

Caisse CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 5]

C/

[L]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 23 MAI 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/00046 – N° Portalis DBV5-V-B7H-GWUG

Décision déférée à la Cour : jugement du 16 décembre 2022 rendu(e) par le Juge de l’exécution des SABLES D’OLONNE CEDEX.

APPELANTE :

CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 5], prise en la personne de son représentant légal en exercice, et de tous autres représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 2]

[Localité 5]

Ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Stephan SEGARULL, avocat au barreau de LORIENT.

INTIMEE :

Madame [S] [L]

née le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 10]

[Adresse 8]

[Localité 6]

Ayant pour avocat plaidant Me Laura NIOCHE de la SELARL GAUVIN – ROUBERT & ASSOCIES, avocat au barreau des SABLES D’OLONNE.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Claude PASCOT, Président

Monsieur Fabrice VETU, Conseiller

Monsieur Cédric LECLER, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte authentique en date du 15 février 2011, la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE [Localité 5] (Le Crédit Mutuel) a consenti à la SCI ERIECAL (dont le capital social se composait de 700 parts pour Madame [S] [L] et 300 parts pour Monsieur [V] [B]) un prêt immobilier d’un montant de 449.000 € aux fins d’acquisition d’un immeuble situé sur la commune de [Localité 5].

Par actes séparés du 08 janvier 2011, Mme [L] et M. [B] se sont portés cautions solidaires de la SCI ERIECAL à hauteur de 150.000 € chacun.

Par jugement du 25 juillet 2014, la SCI ERIECAL a été placée en liquidation judiciaire et la banque a déclaré sa créance auprès de la SCP Flatres, liquidateur judiciaire, le 02 mai 2013.

Par lettres recommandées des 17 et 26 février 2015, les cautions ont été mises en demeure de payer les sommes dues à hauteur de 150.000€ chacune.

Par acte du 12 août 2015, la banque a fait assigner Mme [L] devant le tribunal de grande instance de Lorient aux fins d’obtenir sa condamnation avec exécution provisoire à lui payer la somme de 150.000€ correspondant à son engagement de caution.

Par jugement en date du 4 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Lorient a condamné Mme [L] en sa qualité de caution solidaire de la société Eriecal à régler à la banque la somme de 150.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 12 août 2015.

Le bien immobilier, objet du prêt consenti par le Crédit Mutuel a été vendu le 03 janvier 2019, permettant de désintéresser partiellement le créancier poursuivant à hauteur de 115.000 €.

Par décision du 12 avril 2019 notifiée à la banque le jour même, la commission de surendettement des particuliers de la Vendée a orienté le dossier déposé par Mme [L] vers un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

Par jugement définitif daté du 03 juillet 2019, le tribunal de grande instance de Lorient a notamment condamné avec exécution provisoire Mme [L] en sa qualité d’associé indéfiniment responsable de la SCI ERIECAL a payer au Crédit Mutuel la somme de 312.989,87€ correspondant à 70% de la somme totale due.

Le 12 juillet 2019, la commission de surendettement des particuliers de Vendée a validé le principe de l’effacement total des dettes de Mme [L] à compter du 10 mai 2019 en l’absence de contestation de cette mesure.

Le 28 janvier 2020, Mme [L] a fait l’acquisition d’une maison d’habitation située [Adresse 9].

Par acte d’huissier du 27 janvier 2022, le Crédit Mutuel a fait délivrer à Mme [L] un commandement de payer valant saisie immobilière pour paiement de la somme totale de 371.894,33 € arrêtée au 27 décembre 2021, lequel a fait l’objet d’une publication au service de la publicité foncière des Sables d’Olonne le 14 mars 2022, volume 2022 S, n°7.

Par acte d’huissier du 05 mai 2022, le Crédit Mutuel a fait assigner Mme [L] devant le juge de l’exécution des Sables d’Olonne à l’audience d’orientation du 10 juin 2022, la mise à prix de l’immeuble ayant été fixée dans le cahier des conditions de la vente à la somme de 120.000€.

Par jugement en date du 16 décembre 2022, le tribunal judiciaire des Sables d’Olonne a statué ainsi :

– Constate l’effacement de la dette de Mme [L] à l’égard de la banque objet de la condamnation du tribunal de grande instance de Lorient en date du 03 juillet 2019,

– Déclare irrecevable la procédure de saisie immobilière engagée par la banque à l’encontre de Mme [L] et la déboute de l’ensemble de ses demandes,

– Déboute Mme [L] de ses demandes de dommages et intérêts au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne la banque au paiement des dépens.

Pour statuer comme il l’a fait, le tribunal judiciaire a notamment retenu qu’en application de l’article L.741-1 du code de la consommation, il convenait de considérer que la dette professionnelle contractée par Mme [L] auprès de la banque, qui existait au 10 mai 2019, avait été effacée par l’effet de la décision de la commission de surendettement des particuliers de la Vendée du 12 juillet 2019 et qu’ainsi, la procédure de saisie immobilière diligentée par la banque est dès lors irrecevable ;

Par déclaration en date du 04 janvier 2023, la Caisse de crédit mutuel de [Localité 5] a fait appel de cette décision en visant ses chefs expressément critiqués.

Par ordonnance du 13 janvier 2023, la première présidente de la Cour d’appel a autorisé la banque à assigner Mme [L] à jour fixe à l’audience du 15 mars 2023.

Par exploit en date du 02 février 2023, le Crédit Mutuel a assigné Mme [L] à jour fixe pour les besoins de cette audience.

La Caisse de crédit mutuel, par dernières conclusions RPVA du 14 mars 2023, sollicite de la cour de :

A titre liminaire et avant dire droit,

La communication par Madame [S] [L] des pièces suivantes :

1)- La déclaration de succession signée au décès de sa mère, Madame [U] [L] décédée le [Date décès 4] 2018 ;

2)- L’acte de partage successoral signé de Madame [S] [L] ;

3)- Le compromis de vente régularisé le 21 octobre 2019 par Madame [S] [L] pour l’acquisition de l’immeuble sis [Adresse 9] ;

4)- Les factures de travaux de rénovation réalisés par Madame [S] [L] dans son l’immeuble comme listés au compromis du 13 juin 2022 (Pièce adverse n°48 page 15).

Au fond,

– Juger la Caisse de crédit mutuel de [Localité 5] recevable et bien fondée en l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

– Recevoir la caisse de crédit mutuel de [Localité 5] en son appel de jugement d’orientation portant le RG 22/00019 du 16 décembre 2022 rendu par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire des Sables d’Olonne ;

En conséquence,

– Réformer le jugement du 16 décembre 2022 rendu par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire des Sables d’Olonne précitée, en ce qu’il a :

-Constaté l’effacement de la dette de Mme [L] à l’égard de la banque objet de la condamnation du tribunal de grande instance de Lorient en date du 3 juillet 2019,

-Déclaré irrecevable la procédure de saisie immobilière engagée par la banque à l’encontre de Mme [L] et la déboute de l’ensemble de ses demandes,

-Débouté Mme [L] de ses demandes de dommages et intérêts au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-Condamné la banque au paiement des dépens.

A titre principal,

– Juger que la Caisse de crédit mutuel de [Localité 5] justifie d’une créance certaine, liquide et exigible à l’encontre de Mme [L] ;

– Déclarer irrecevable avec toutes suites et conséquences de droit les demandes de Mme [L] ;

– Débouter Mme [L] de l’ensemble de ses contestations et demandes ;

– Constater que le créancier poursuivant, titulaire d’une créance liquide et exigible, agit en vertu d’un titre exécutoire, comme il est dit aux articles L.311-2 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, et que la procédure de saisie immobilière engagée, suivant commandement de payer valant saisie immobilière, du ministère de Me [Z] [I], Huissier de justice associé, membre de la SARL [I] Guibert, titulaire d’un office d’huissier de justice à la résidence de [Localité 7] au [Adresse 1], délivré le 27 janvier 2022 à Mme [L] et publié pour valoir saisie au Service de la Publicité Foncière des Sables d’Olonne le 14 mars 2022 volume 2022 S n°7, est régulière ;

– Statuer sur les éventuelles contestations et demandes incidentes ;

– Déterminer les modalités de poursuite de la procédure;

– Mentionner le montant de la créance du créancier poursuivant en principal, frais, intérêts et autres et autres accessoires, au jour de l’arrêt à intervenir ;

En cas de vente forcée,

– Renvoyer le dossier devant Madame la juge de l’exécution du tribunal judiciaire des Sables d’Olonne, pour :

fixer la date de l’audience de vente et déterminer les modalités de visite de l’immeuble dont il s’agit ;

ordonner l’emploi des dépens en frais privilégiés de vente ;

En tout état de cause,

– Condamner Mme [L] de l’ensemble de ses constatations et demandes ;

– Condamner Mme [L] à régler à la Caisse de crédit mutuel de [Localité 5] la somme de 5.000€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Mme [L], par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 2 mars 2023, demande à la cour de :

– Dire et juger recevable et bien fondée Mme [L], en toutes ses demandes, fins et conclusions,

– Débouter la Caisse de crédit mutuel de [Localité 5] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

– Confirmer le jugement rendu le 16 décembre 2022 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire des Sables d’Olonne en ce qu’il a :

-Constaté l’effacement de la dette de Mme [L] à l’égard de la banque objet de la condamnation du tribunal de grande instance de Lorient en date du 3 juillet 2019,

-Déclaré irrecevable la procédure de saisie immobilière engagée par la banque à l’encontre de Mme [L] et la déboute de l’ensemble de ses demandes,

-Condamné la banque au paiement des dépens.

– Infirmer le jugement en date du 16 décembre 2022 rendu par le Juge de l’exécution du tribunal judiciaire des Sables d’Olonne en ce qu’il a :

-Débouté Mme [L] de ses demandes de dommages et intérêts au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

– Condamner la Caisse de crédit mutuel de [Localité 5] à verser à Mme [L] la somme de 20.000€ à titre de dommages-intérêts,

A titre subsidiaire et si par extraordinaire, la Cour d’appel de Poitiers considérait que le créancier poursuivant est titulaire d’une créance liquide et exigible et agit en vertu d’un titre exécutoire,

– Autoriser la vente amiable du bien immobilier situé [Adresse 9],

En tout état de cause,

– Condamner la Caisse de Crédit mutuel de [Localité 5] à verser à Mme [L] la somme de 3.500€ en application de l’article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles pour la procédure de première instance, et à la somme de 5.000€ en application de l’article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles pour la procédure d’appel,

– Condamner la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 5] aux entiers dépens d’appel.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

A l’audience de plaidoirie du 15 mars 2023, l’instruction de l’affaire a été clôturée puis mise en délibéré à ce jour.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la procédure de saisie-immobilière

1. Aux termes de l’article 122 du Code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

2. Le second alinéa de l’article L. 733-2 du Code de la consommation dispose que la commission peut, le cas échéant, imposer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou saisir le juge aux fins d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire.

A cet égard, il résulte des termes de l’article L. 741-1 du Code de la consommation que si l’examen de la demande de traitement de la situation de surendettement fait apparaître que le débiteur se trouve dans la situation irrémédiablement compromise définie au deuxième alinéa de l’article L. 724-1 et ne possède que des biens mentionnés au 1° du même article L. 724-1, la commission impose un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

L’article L. 741-2 prévoit qu’en l’absence de contestation dans les conditions prévues à l’article L. 741-4, le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire entraîne l’effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur, arrêtées à la date de la décision de la commission, à l’exception des dettes mentionnées aux articles L. 711-4 et L. 711-5 et des dettes dont le montant a été payé au lieu et place du débiteur par la caution ou le coobligé, personnes physiques.

Le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire entraîne aussi l’effacement de la dette résultant de l’engagement que le débiteur a pris de cautionner ou d’acquitter solidairement la dette d’un entrepreneur individuel ou d’une société.

3. Selon l’article L. 741-4 du Code de la consommation, une partie peut contester devant le juge du tribunal d’instance, dans un délai fixé par décret, le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire imposé par la commission

Il résulte notamment des termes de l’article R. 741-1 du même code que lorsque la commission impose un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, cette décision est notifiée aux parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

[…] [cette lettre] indique que la décision peut être contestée par déclaration remise ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au secrétariat de la commission dans un délai de trente jours à compter de sa notification.

Selon l’article R. 741-2 du Code de la consommation, la commission procède à des mesures de publicité pour permettre aux créanciers qui n’ont pas été avisés de sa décision de former un recours devant le juge du tribunal d’instance. Les titulaires de créances disposent d’un délai de deux mois à compter de cette publicité pour exercer leur recours.

4. L’article R. 741-3 de ce code énonce qu’un avis de la décision est adressé pour publication au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales par le secrétariat de la commission. Cette publication comporte les nom et prénoms du débiteur, sa date de naissance, le numéro du département de sa résidence, la date de la décision, l’indication de la commission qui l’a rendue et à laquelle doivent être adressés les recours formés par les créanciers non avisés ainsi que le délai de recours à l’encontre de la décision. Elle est effectuée dans un délai de trente jours à compter de la date de la décision.

L’article R. 741-4 du Code de la consommation dispose qu’à défaut de contestation formée dans le délai prévu à l’article R. 741-1, la commission informe par lettre simple le débiteur et les créanciers que la décision prise en application de l’article L. 741-1 s’impose.

5. Le Crédit Mutuel fait valoir que dans le cadre de son dossier de surendettement déposé auprès de la Commission de surendettement des particuliers de la Vendée, Mme [L] a déclaré, au titre de son passif, la seule somme de 150.000 € correspondant à la condamnation dont elle a fait l’objet en sa qualité de caution des engagements pris auprès de la SCI ERIECAL comme en atteste le tableau des créances actualisées au 10 mai 2019 de cette commission.

En revanche, indique le Crédit Mutuel, la condamnation prononcée à son encontre à hauteur de 312.989.87 € en sa qualité d’associé indéfiniment responsable de la SCI ERIECAL suivant jugement du tribunal de grande instance de Lorient en date du 03 juillet 2019 n’est aucunement visée à la procédure de surendettement de Mme [L], celle-ci n’apparaissant à aucun endroit dans le tableau des créances établi par la commission de surendettement.

6. Le Crédit Mutuel conclut qu’aucun élément n’est par ailleurs communiqué aux débats aux fins de démontrer que Mme [L] aurait fait état de cette dette d’un montant de 312.989,87 € dans le cadre de sa procédure de surendettement et rappelle que le jugement de condamnation la fixant est de toute façon intervenu postérieurement, à savoir, le 03 juillet 2019.

7. L’intimée objecte que par ‘dettes arrêtées’, il ne s’agirait en aucune façon, contrairement à ce que laisse entendre l’appelante, de dette exclusivement exigible constatée dans un titre exécutoire, le texte de l’article L. 741-2 du Code de la consommation ne l’imposant pas et la jurisprudence y afférent, pas davantage.

Selon elle, peu importe en outre que le débiteur a été condamné en qualité d’associé d’une société, cette circonstance ne faisant pas obstacle à l’effacement de la dette, le créancier ne pouvant plus, au terme de la procédure de rétablissement personnel, agir contre le débiteur.

8. A titre liminaire, la cour rappelle qu’il est constant en droit que l’effacement des dettes issues d’un rétablissement personnel imposé par la commission ou décidé par le juge, qu’il intervienne avec ou sans liquidation judiciaire, pour extinction du passif ou insuffisance d’actif concerne toutes les dettes non professionnelles, mais également la dette résultant de l’engagement que le débiteur a donné de cautionner ou d’acquitter solidairement d’un entrepreneur individuel ou d’une société, sans qu’il ne soit tenu compte de sa nature professionnelle ou non.

7. Il est tout aussi établi, en droit, que l’effacement vise la totalité de ces dettes, qu’elles aient été ou non déclarées à la procédure, l’article L. 733-9 du Code de la consommation ne visant pas l’effacement des dettes prévues à l’article L. 733-2 précité, et qu’à défaut d’être expressément exclues par la loi, toutes les dettes non professionnelles sont effacées de plein droit par la clôture de la procédure de rétablissement personnel.

9. Ceci étant préalablement rappelé, la cour observe que le Crédit Mutuel ne conteste pas la régularité de la procédure tenant à son information et de ses possibilités de recours tant, au stade de l’orientation pressenti du dossier de Mme [L], qu’au moment de la décision de cette même commission imposant la mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

10. Sans autre élément produit aux débats par le Crédit Mutuel, la cour indique ainsi que le Crédit Mutuel a été régulièrement informée de l’orientation du dossier de Mme [L] vers un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire par la commission de surendettement par courrier du 12 avril 2019 et de sa possibilité de la contester.

11. C’est d’ailleurs à défaut de contestation, que la Commission de surendettement des particuliers de la Vendée a validé le 12 juillet 2019 la mesure consistant en un effacement total de ses dettes à effet du 10 mai 2019, cette mention de la décision étant portée au fichier national des incidents de remboursement des crédits au particuliers, conformément à la loi.

12. Dans le cadre de la décision de validation du 12 juillet 2019 dont le Crédit Mutuel ne conteste pas avoir été destinataire, il était mentionné :

– d’une part, au titre des observations importantes de la motivation de cette mesure, qu’il était rappelé au Crédit Mutuel que ‘Madame [S] [L] doit vendre les parts de la SCI ERIECAL dont elle est propriétaires à hauteur de 70%’ de sorte que ces parts avaient été bien été déclarées par la débitrice au titre de ses actifs et qu’il appartenait au Crédit Mutuel de s’emparer de cette information pour préserver ses droits, étant rappelé que le Crédit Mutuel avait d’ores et déjà assigné, par acte du 09 avril 2019, Mme [L] devant le tribunal de grande instance de Lorient en sa qualité d’associée de la SCI ERIECAL en vue d’obtenir sa condamnation ;

– d’autre part, qu’en l’absence de contestation dans un délai de 30 jours, de cette mesure imposée de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, que l’effacement des dettes s’imposera[it] à la date de cette décision.

13. La cour indique ainsi que c’est à tort que le Crédit Mutuel laisse entendre que la créance de 312.987,87 €, objet de la condamnation prononcée par le tribunal de grande instance de Lorient le 03 juillet 2019, ne serait pas visée par la procédure de surendettement et observe dans le même temps que nonobstant la double possibilité de recours qui lui était offerte, notamment l’un expirant le 12 août 2019, elle n’en a formé aucun.

14. En prenant en compte les éléments du dossier, la cour indique que la décision du 12 juillet 2019 de la commission a effacé l’ensemble des dettes arrêtées à la date de la décision de la commission ainsi que le prévoit l’article L. 741-2 du Code de la consommation, dont fait partie la condamnation prononcée le 03 juillet 2019 par le tribunal de grande instance de Lorient et qu’à défaut d’une contestation de cette décision dans le délai de 30 jours par le Crédit Mutuel, cette créance est définitivement éteinte.

15. La décision sera confirmée de ce chef et, consécutivement, l’irrecevabilité de la demande formée devant le juge de l’exécution au titre de la saisie-immobilière.

16. Par ailleurs, les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 n’étant pas réunies afin de permettre la poursuite de la procédure, la créance du Crédit Mutuel ayant été effacée en suite de l’adoption du plan de surendettement, il n’y a pas lieu pour la cour d’examiner les demandes présentées avant dire droit, ayant trait à la démonstration d’une éventuelle mauvaise foi de la débitrice, d’une part, dès lors que cette appréciation échappe à la compétence du juge de l’exécution, d’autre part, parce qu’à la supposer démontrée, cette mauvaise foi n’aurait aucun emport sur l’effacement de la créance de l’appelante.

Sur la demande indemnitaire

17. L’article 1240 du Code civil dispose que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

18. L’article 32-1 du Code de procédure civile dispose que ‘celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés’.

19. L’article 559 du Code de procédure civile énonce qu’en cas d’appel principal dilatoire ou abusif, l’appelant peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10.000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui lui seraient réclamés.

20. L’exercice d’une action en justice et d’une voie de recours, même mal fondées, ne peut constituer un abus de droit que dans des circonstance particulières le rendant fautif.

21. Mme [L] indique qu’en réponse au commandement de payer reçu le 27 janvier 2022, par courriel officiel de son conseil en date du 22 février 2022, elle avait eu d’ores et déjà l’occasion de rappeler la situation d’effacement de ses dettes au conseil du Crédit Mutuel de [Localité 5].

Selon elle, l’appelante serait particulièrement de mauvaise foi pour avoir poursuivi la procédure alors que son droit d’exécuter la décision rendue le 03 juillet 2019 par le tribunal de grande instance de Lorient était éteint suite à la notification de la commission de surendettement des particuliers de la Vendée qu’elle a reçue.

22. Selon l’intimée encore, l’acharnement de la Banque a eu pour effet de lui causer un préjudice découlant de ses problèmes de santé moraux et physiques.

23. Le crédit Mutuel objecte qu’aucun élément ne permet toutefois de caractériser un quelconque préjudice moral issu d’une faute qu’elle aurait commise dans le cadre de la présente instance ni aucun lien de causalité.

24. La cour observe que sur ce point, les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance.

25. Conformément aux dispositions de l’article 955 du Code de procédure civile, en l’absence d’élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu’elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties.

26. Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point.

Sur les autres demandes

27. Il apparaît équitable de condamner le Crédit Mutuel à payer à Mme [L] une indemnité de 3.000 € au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel et de rejeter la demande formée de ce chef par l’appelante.

28. Le Crédit Mutuel qui échoue en ses prétentions sera condamné aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire des Sables-d’Olonne en date du 16 décembre 2022,

Y ajoutant,

Condamne la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE [Localité 5] à payer à Madame [S] [L] une indemnité de 3.000 € par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE [Localité 5] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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