ARRET N°236
CL/KP
N° RG 22/02464 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GUSC
S.A.S. EQUITIS GESTION SOCIÉTÉ DE GESTION DU FCT CASTANE A
C/
S.C.E.A. DE [Localité 4]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 23 MAI 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/02464 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GUSC
Décision déférée à la Cour : jugement du 27 septembre 2022 rendu par le Juge de l’exécution de POITIERS.
APPELANTE :
S.A.S. EQUITIS GESTION SOCIÉTÉ DE GESTION DU FCT CASTANE A FONDS COMMUN DE TITRISATION CASTANEA, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, venant aux droits de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE
[Adresse 3]
[Localité 1]
Ayant pour avocat postulant Me Anne-Marie FREZOULS de la SCP BEAUMONT – FREZOULS, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Nicolas TAVIEAUX MORO, avocat au barreau de PARIS.
INTIMEE :
S.C.E.A. DE [Localité 4], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
[Localité 4]
[Localité 2]
Ayant pour avocat plaidant Me Vincent HUBERDEAU de la SELARL ACTE JURIS, avocat au barreau de SAINTES.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 21 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
Par acte notarié en date du 9 avril 2014, la société anonyme Société Générale (la banque) a consenti à la société civile d’exploitation agricole de [Localité 4] (la société de [Localité 4]) un prêt d’investissement d’un montant en principal de 2.200.000 euros, remboursable en 180 mensualités, au taux fixe hors frais et assurance de 3,75 % l’an.
Le 21 juin 2018, la banque a adressé un courrier recommandé à son débiteur lui demandant de régler sous huit jours la somme de 510.370,71 euros.
Le 16 juillet 2018, sans régularisation de la part de la société agricole, la banque a prononcé la déchéance du terme.
La banque a cédé les créances détenues sur la société de [Localité 4] au Fonds commun de titrisation Castanea (le Fonds) ayant pour société de gestion la société par actions simplifiée Equitis Gestion et représenté par son recouvreur par actions simplifiée la société Mcs et Associés.
Le 22 février 2022, le Fonds a pratiqué une saisie-attribution entre les mains de l’agent comptable de l’agence de services et de paiement (Asp).
Le 28 février 2022, cette saisie-attribution a été dénoncée à la société de [Localité 4].
Le 28 mars 2022, la société de [Localité 4] a attrait le Fonds devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Poitiers.
Dans le dernier état de ses demandes, la société de [Localité 4] a demandé de:
– la déclarer recevable et bien fondée;
– à titre principal, prononcer la nullité de la saisie-attribution ;
– à titre subsidiaire, en ordonner la mainlevée ;
– en tout état de cause, débouter le défendeur et le condamner à lui verser la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles.
Dans le dernier état de ses demandes, le Fonds a demandé de :
– juger qu’il venait régulièrement aux droits de la Société Générale ;
– juger que la cession de créances qu’elle lui avait consentie était opposable à la société de [Localité 4] ;
– juger qu’il avait bien qualité à agir en recouvrement de sa créance à l’encontre de la société de [Localité 4] ;
– valider la saisie-attribution ;
– en tout état de cause, condamner la demanderesse à lui payer la somme de 2500 euros au titre des frais irrépétibles.
Par jugement contradictoire en date du 27 septembre 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Poitiers a :
– déclaré l’action en contestation de saisie-attribution recevable ;
– rejeté la demande de nullité de la saisie-attribution pratiquée le 22 février 2022 par le Fonds, ayant pour société de gestion Equitis entre les mains de l’agent comptable de l’Asp l’agence de service et de paiement sur les valeurs détenues pour le compte de la société de [Localité 4] pour recouvrement de la somme totale de 3.342.558,93 euros ;
– ordonné mainlevée de cette saisie-attribution ;
– condamné le Fonds ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion à régler à la société de [Localité 4] 1800 euros au titre des frais irrépétibles.
Le 5 octobre 2022, le Fonds a relevé appel de ce jugement, en intimant la société de [Localité 4].
La société de [Localité 4] n’a pas initialement constitué avocat.
Le 25 octobre 2022, le Fonds a signifié ses premières écritures.
Le 9 janvier 2023, la société de [Localité 4] a signifié ses premières écritures.
Le 15 février 2023, la société de [Localité 4] a signifié ses premières écritures.
Le 16 février 2023, Le Fonds a demandé de :
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a ordonné la mainlevée de la saisie attribution et l’a condamné à verser à la société de [Localité 4] la somme de 1800 euros au titre des frais irrépétibles, et de :
– juger qu’il justifiait d’une créance exigible ;
– juger que le décompte de créance contenu dans l’acte de saisie attribution du 22 février 2022 était conforme aux dispositions de l’article R. 211-1-3° du code des procédures civiles d’exécution ;
– juger que le caractère excessif d’une clause pénale n’autorisait pas le juge de l’exécution à donner mainlevée de la saisie attribution querellée ;
– débouter la société de [Localité 4] de l’intégralité de ses prétentions ;
statuant à nouveau,
– valider que la saisie attribution diligentée entre les mains de l’Asp, selon procès-verbal en date du 22 février 2022 et dénoncée à la société de [Localité 4] selon procès-verbal dressé le 28 février 2022, était régulière ;
à titre subsidiaire,
– juger qu’il venait régulièrement aux droits de la Société Générale ;
– juger que la cession de créances intervenue entre la Société Générale et lui-même selon bordereau de cession de créances en date du 3 août 2020 était opposable à la société de [Localité 4] ;
– juger qu’il avait justifié de sa qualité à agir ;
– débouter la société de [Localité 4] de l’intégralité de ses prétentions ;
En tout état de cause,
– condamner la société de [Localité 4] aux dépens qui comprendraient notamment le timbre fiscal pour 225 euros, la taxe de plaidoirie pour 13 euros et les frais d’huissier à parfaire, avec distraction au profit de son conseil.
Pour plus ample exposé, il sera expressément renvoyé aux écritures de l’une des parties, déposées à la date susdite.
Le 21 février 2023 a été ordonnée la clôture de l’instruction de l’affaire.
Par ordonnance en date du 7 mars 2023, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les écritures déposées les 9 janvier 2023 et 15 février 2023 par la société de [Localité 4].
MOTIVATION:
Selon l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire, le juge de l’exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et de contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit.
Selon l’article L. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévues par le code du travail.
Selon l’article R. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, le créancier procède à la saisie par acte d’huissier de justice signifié au débiteur, contenant à peine de nullité :
….
3° le décompte distinct des sommes réclamées en principal intérêts frais et intérêts échus, majorés d’une provision pour les intérêts à échoir dans le délai d’un mois prévu pour élever une contestation.
A la date de la saisie, la créance dont se prévaut le poursuivant à l’égard du saisi doit exister, et être certaine liquide et exigible.
De manière liminaire, il sera observé que l’acte notarié, détaillant le capital emprunté, les intérêts contractuels, leur majoration et l’indemnité de résiliation comprend tous les éléments nécessaires au calcul de la créance dont se prévaut la banque, de telle sorte que sa créance est liquide.
Il résulte des stipulations contractuelles du prêt (page 10 – exigibilité facultative) que :
– la banque pourra rendre exigible par anticipation toutes sommes dues par le client au titre du contrat de prêt notamment en cas de non-paiement, à son échéance, d’une somme quelconque devenue exigible au titre du contrat ;
– dans l’un des cas d’exigibilité facultative, la banque informera le client par lettre recommandée avec avis de réception, qu’elle prononce l’exigibilité du prêt en application des dispositions du présent article ;
– la banque mentionnera dans sa lettre qu’elle se prévaut de la présente clause, sans avoir à remplir aucune autre formalité, sans que le paiement ou les régularisations postérieures à cette lettre ne fassent obstacle à cette exigibilité anticipée.
Il ressort du courrier adressé à la débitrice en date du 16 juillet 2018 que la banque a prononcé l’exigibilité anticipée du contrat de prêt, motif pris du défaut de règlement par le client de plusieurs échéances, dont la société de [Localité 4] ne démontre pas le paiement.
Dans ce courrier, la banque donne les références alphanumériques de l’accusé de réception constituant la modalité de son envoi.
Le Fonds a produit au verso la photocopie de mauvaise qualité d’un accusé de réception, comportant très exactement les références alphanumériques visées à son courrier, la désignant comme expéditeur, désignant la société de [Localité 4] comme destinataire, mais ne présentant strictement aucune mention dactylographiée ou manuscrite ni cachet de l’opérateur postal permettant de s’assurer de son envoi ou à défaut de sa présentation à son destinataire, ou de son retour à son expéditeur.
Il n’est ainsi pas justifié que la banque ait effectivement envoyé le courrier notifiant l’exigibilité anticipée du prêt à l’emprunteur.
Dès lors, le Fonds défaille à démontrer que la créance dont il poursuit le recouvrement serait effectivement exigible.
Il y aura donc lieu d’ordonner mainlevée de la saisie-attribution pratiquée par le Fonds entre les mains de l’agent comptable de l’Asp sur les valeurs détenues pour le compte de la société de [Localité 4] pour recouvrement de la somme totale de 3 342 558,93 euros, et l’ordonnance sera confirmée de ce chef.
* * * * *
L’ordonnance sera confirmée en ce qu’elle a condamné le Fonds aux dépens de première instance et à payer à la société de [Localité 4] la somme de 1800 euros au titre des frais irrépétibles de première instance.
Il y sera ajouté pour débouter le Fonds de sa demande présentée au même titre.
Le Fonds sera débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles d’appel et sera condamné aux dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS:
La cour,
statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme l’ordonnance en toutes ses dispositions déférées à la cour ;
Y ajoutant :
Déboute le Fonds commun de titrisation Castanea, ayant pour société de gestion la société par actions simplifiée Equitis Gestion, et représenté par son recouvreur par actions simplifiée la société Mcs et Associés, de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel ;
Condamne le Fonds commun de titrisation Castanea, ayant pour société de gestion la société par actions simplifiée Equitis Gestion, et représenté par son recouvreur la société par actions simplifiée Mcs et Associés, aux entiers dépens d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,