Saisine du juge de l’exécution : 22 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/07855

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Saisine du juge de l’exécution : 22 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/07855

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 3

ARRET DU 22 JUIN 2023

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/07855 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFVZT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 14 février 2017 – Tribunal d’Instance de PARIS 19ème – RG 116001332

Arrêt du 4 décembre 2020 – Cour d’Appel de PARIS Pôle 4- Chambre 3 – RG 17/07497

Arrêt du 9 février 2022 – Cour de Cassation – Pourvoi Q21-11.643

APPELANTS

Monsieur [N] [W]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Madame [V] [Z] épouse [W]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentés et assistés par Me Olivier TOUCHOT, avocat au barreau de PARIS, toque : G0778

INTIMEE

E.P.I.C. [Localité 6] HABITAT OPH ANCIENNEMENT OPAC

[Adresse 1]

[Localité 4]

N° SIRET : B34 481 082 6

Représentée et assistée par Me Michel MENANT de la SELEURL CABINET MENANT ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0190

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 13 Avril 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. François LEPLAT, Président de chambre

Mme Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre

Mme Aurore DOCQUINCOURT, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Aurore DOCQUINCOURT dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Joëlle COULMANCE

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par François LEPLAT, Président de chambre et par Joëlle COULMANCE, Greffière, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 30 novembre 1982 Paris Habitat OPH donnait à bail aux époux [W] un logement sis [Adresse 2] à [Localité 5] .

En juillet 2003 les époux [W] informaient le bailleur de nuisances sonores provenant de l’appartement situé au-dessus du leur, occupé par les époux [I], lesquels avaient remplacé la moquette existante par du carrelage.

Par jugement du 28 juin 2005, le tribunal d’instance de Paris 19ème enjoignait aux époux [I] de:

– procéder à la remise en état du sol du logement après dépose du carrelage existant, sous astreinte de 10 euros par jour de retard,

– procéder à la remise en état d’origine de l’installation phonique existante avant les transformations effectuées sans autorisation, sous astreinte de 10 euros par jour de retard,

– contrôler et réceptionner les travaux par le bailleur.

En août 2006, les époux [I] ont fait déposer le carrelage et l’ont remplacé par un parquet flottant.

L’astreinte prononcée par le tribunal d’instance a été liquidée par jugement du juge de l’exécution du 14 juin 2010, décision partiellement confirmée en appel par arrêt du 16 mai 2013.

L’astreinte a de nouveau été liquidée par jugement du 10 octobre 2013 ; par arrêt du 26 mars 2015, la cour d’appel de Paris a infirmé en partie ce jugement après avoir constaté que Mme [P] divorcée [I] avait fait retirer le parquet flottant en janvier 2015 pour le remplacer par une moquette. Par un arrêt du 12 mai 2016, la cour de cassation a déclaré le pourvoi des époux [W] non admis.

Par acte du 27 juillet 2016, les époux [W] ont fait assigner [Localité 6] Habitat OPH en paiement de :

– la somme de 15000 euros à titre de dommages et intérêts en compensation du trouble de

jouissance de juillet 2003 à janvier 2015 ,

– la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

– la somme de 20.000 euros au titre de la mauvaise foi manifeste dans l’exécution du contrat,

– la somme de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens et l’exécution provisoire.

Par jugement entrepris du 14 février 2017, le tribunal d’instance de Paris 19ème a ainsi statué:

– déclare [Localité 6] Habitat OPH responsable du préjudice de jouissance subi par les époux [W] pour la période antérieure à août 2006,

– condamne [Localité 6] Habitat OPH à payer aux époux [W] la somme de 3700 euros au titre des dommages et intérêts et la somme de 500 euros à titre de préjudice moral,

– condamne [Localité 6] Habitat OPH à payer aux époux [W] la somme de 1163 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– déboute les parties du surplus de leurs demandes,

– dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire et condamne [Localité 6] Habitat OPH aux dépens.

Les époux [W] ont interjeté appel de ce jugement le 6 avril 2017.

Par ordonnance sur incident du 16 novembre 2017, confirmée par arrêt du 29 mars 2018, le conseiller de la mise en état a déclaré les conclusions de [Localité 6] Habitat OPH irrecevables sur le fondement de l’article 909 du code de procédure civile.

Par arrêt contradictoire du 4 décembre 2020, la cour d’appel de Paris, autrement composée, a ainsi statué :

– confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

– déboute M. et Mme [W] de toutes leurs demandes formées devant la cour,

– condamne M. et Mme [W] aux dépens d’appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Sur pourvoi formé par les époux [W], par arrêt du 9 février 2022, la troisième chambre civile de la cour de cassation a ainsi statué :

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu les article 132, 906 et 909 du code de procedure civile :

5. ll résulte de ces textes que doivent être écartées des débats les pièces communiquées et déposées au soutien de conclusions irrecevables.

6. Pour rejeter la demande de M. et Mme [W] en dommages-intérêts pour trouble de jouissance subi de septembre 2006 à janvier 2015, l’arrêt retient que le bailleur disposait d’un rapport d’expert en acoustique certifiant que le parquet flottant offrait un confort d’isolation au bruit d’impact supérieur à celui offert par la moquette présente dans les placards, qu’il ne pouvait exiger de Mme [I] sa dépose et son remplacement par de la moquette, et par conséquent, qu’il n’avait pas manqué à son obligation d’assurer la jouissance paisible du logement à partir de la date où Mme [I] avait remplacé le carrelage par du parquet flottant posé sur un isolant phonique.

7. En statuant ainsi, en considération d’un rapport de la société Impedance bâtiment du 18 décembre 2013 qui devait être écarté des débats pour avoir été produit au soutien de conclusions du bailleur déclarées irrecevables par arrêt de la cour d’appel du 29 mars 2018, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la cour:

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il déclare [Localité 6] habitat OPH responsable du préjudice de jouissance subi par M. et Mme [W] pour la période antérieure à août 2006 et condamne [Localité 6] habitat OPH à leur payer la somme de 3 700 euros à titre de dommages-intérêts et la somme de 500 euros à titre de préjudice moral, l’arrêt rendu le 4 décembre 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Paris;

Remet, sauf sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne [Localité 6] habitat OPH aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, condamne [Localité 6] habitat OPH à payer à M. et Mme [W] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les dispositions des articles 1032 et suivants du code de procédure civile,

Vu la déclaration de saisine du 11 avril 2022 de la cour d’appel de Paris par M. et Mme [W],

Vu les dernières écritures remises au greffe le 23 juin 2022 par lesquelles les époux [W] demandent à la cour de :

Vu les articles 6 et 6.1 de la loi du 6 juillet 1989, les articles 1315 ancien (1353 nouveau) et 1719 du code civil,

– Confirmer le jugement du 14 février 2017 déféré, en ce qu’il a condamné [Localité 6] Habitat à verser aux époux [W] la somme de 3700 euros de dommages et intérêts pour trouble de jouissance pour la période de juillet 2003 à août 2006, soit 37 mois, 1163 euros au titre de remboursement des frais d’expertise exposés et 500 euros au titre du préjudice moral ;

– ‘Infirmer’ en ce qu’il a rejeté le surplus des demandes de première instance et y ajoutant :

– Condamner [Localité 6] Habitat à verser aux époux [W] la somme de 10.000 euros au titre des dommages et intérêts pour trouble de jouissance pour la période de septembre 2006 à janvier 2015, soit 100 mois ;

– Condamner [Localité 6] Habitat à verser aux époux [W] la somme de 20.000 euros au titre des dommages et intérêts pour mauvaise foi et procédure dilatoire et abusive ;

– Condamner [Localité 6] Habitat à payer à M. et Mme [W] la somme de 1500 euros au titre du préjudice moral ;

– Condamner [Localité 6] Habitat à payer à M. et Mme [W] la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner [Localité 6] Habitat aux dépens.

Vu les dernières écritures remises au greffe le 4 juillet 2022 par lesquelles [Localité 6] Habitat OPH demande à la cour de :

Vu la loi du 6 juillet 1989,

Vu les articles 1315 et 32-1 du code civil,

Vu l’article 700 du Code de procédure civile

Vu les pièces versées aux débats,

– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

En conséquence,

Y ajoutant,

– condamner les époux [W] à payer à [Localité 6] Habitat OPH la somme de 5.000 euros ‘sous le fondement de procédure abusive’,

– condamner les époux [W] à payer à [Localité 6] Habitat OPH la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamner les époux [W] en tous les dépens.

Par des conclusions d’incident du 7 juillet 2022, réitérées pour la dernière fois le 27 janvier 2023, les époux [W] demandent à la cour de :

Vu l’arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 29 mars 2018

Vu l’arrêt de la cour de cassation en date du 9 février 2022

Vu les articles 906 et 909 du code de procédure civile

– constater que l’arrêt sur déféré de la cour d’appel de Paris rendu le 29 mars 2018 écarte les écritures et pièces de [Localité 6]-Habitat,

– constater que l’arrêt de la cour de cassation en date du 9 février 2022 confirme l’irrecevabilité des écritures et pièces de [Localité 6]-Habitat devant la cour d’appel,

En conséquence :

– prononcer l’irrecevabilité des conclusions et pièces de [Localité 6] Habitat signifiées le 4 juillet 2022

En tout état de cause :

– retirer l’ensemble des écritures et pièces produites sous forme électronique ou papier par [Localité 6]-Habitat au cours de l’instance devant la cour d’appel,

– condamner [Localité 6]-Habitat à payer à M. et Mme [W] la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par des conclusions en défense sur incident du 5 janvier 2023, [Localité 6] Habitat OPH demande au conseiller de la mise en état de :

– rejeter l’incident,

– condamner M. et Mme [W] à payer à [Localité 6] Habitat OPH la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. et Mme [W] aux dépens.

A l’audience de plaidoiries du 13 avril 2023, l’incident a été joint au fond.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’étendue de la saisine

La cassation est partielle, elle ne porte pas sur la responsabilité pour préjudice de jouissance de [Localité 6] Habitat OPH pour la période antérieure à août 2006, ni sur la condamnation de [Localité 6] Habitat OPH à payer aux époux [W] les sommes de 3700 euros à titre de dommages et intérêts et 500 euros à titre de préjudice moral.

La cour n’est donc saisie que du préjudice de jouissance allégué par M.et Mme [W] pour la période ayant couru du mois de septembre 2006 au mois de janvier 2015, durant laquelle le sol de l’appartement situé au-dessus du leur, occupé par Mme [P] divorcée [I], était revêtu d’un parquet flottant, ainsi que des demandes de dommages et intérêts afférentes.

Sur la recevabilité des conclusions et pièces de [Localité 6] Habitat

Selon l’article 631 du code de procédure civile, ‘devant la juridiction de renvoi, l’instruction est reprise en l’état de la procédure non atteinte par la cassation’.

Par ordonnance sur incident du 16 novembre 2017, confirmée par arrêt du 29 mars 2018, le conseiller de la mise en état a déclaré les conclusions de [Localité 6] Habitat OPH irrecevables sur le fondement de l’article 909 du code de procédure civile.

Il résulte des articles 132, 906 et 909 du code de procedure civile que doivent être écartées des débats les pièces communiquées et déposées au soutien de conclusions irrecevables.

Par arrêt du 9 février 2022, la troisième chambre civile de la cour de cassation a jugé que la cour d’appel avait violé les textes susvisés en statuant en considération d’un rapport de la société Impédance bâtiment du 18 décembre 2013 qui devait être écarté des débats pour avoir été produit au soutien de conclusions du bailleur déclarées irrecevables par arrêt de la cour d’appel du 29 mars 2018.

Il en résulte que, devant la cour de renvoi, les conclusions et pièces de [Localité 6] Habitat OPH demeurent irrecevables en application de l’arrêt du 29 mars 2018, l’article 631 précisant que l’instruction est reprise devant la cour de renvoi en l’état de la procédure non atteinte par la cassation, le renvoi après cassation n’ouvrant pas une nouvelle instance en appel.

Il convient dès lors de juger que les conclusions et pièces remises au greffe par [Localité 6] Habitat OPH le 4 juillet 2022 sont irrecevables et doivent être écartées des débats, dont le rapport de la société Impédance Bâtiment du 18 décembre 2013, produit au soutien de conclusions du bailleur irrecevables.

Sur la demande de dommages et intérêts pour trouble de jouissance pour la période de septembre 2006 à janvier 2015

En vertu des articles 6 b de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et 1719 du code civil, le bailleur est obligé d’assurer au locataire la jouissance paisible du logement. Il est responsable à ce titre des troubles de jouissance imputables aux agissements des autres occupants de l’immeuble (Civ. 3ème , 29 mai 1991, n°89-15973).

En l’espèce, Mme [P] divorcée [I], habitant l’appartement situé au-dessus de celui des époux [W], a fait procéder en août 2006 à la dépose du carrelage et à son remplacement par du parquet flottant. En janvier 2015, elle a fait procéder à la dépose du parquet flottant et à son remplacement par de la moquette.

Les époux [W] produisent le rapport de mesurage acoustique de la société Impedance bâtiment pour Batiplus du 6 mars 2009, mentionnant que les mesurages acoustiques de contrôle du niveau de bruit de chocs entre les appartements de Mme [P] et de M. [W] ont été réalisés le 24 février 2009, et que les résultats observés ont montré la conformité de l’ouvrage avec la réglementation en vigueur à la date de construction de l’immeuble (arrêté du 14 juin 1969).

Les époux [W] opposent à ce rapport le rapport d’expertise amiable non contradictoire de M. [A] [C], expert près la cour d’appel de Paris, en date du 27 mai 2010, dont il résulte que ‘l’examen des résultats de mesures aux bruits d’impacts effectuées par Impédance bâtiment sur le parquet flottant de l’appartement situé au-dessus de celui de M. [W] en comparaison du revêtement d’origine en tapis aiguilleté plat, fait apparaître une dégradation incontestable du niveau d’isolation acoustique variant de 4 à 7dB’. L’expert fait observer que ‘les résultats de mesures acoustiques aux bruits d’impact effectués par le Centre Scientifique et Technique du Bâtiment ont montré que les revêtements en parquets et sols stratifiés flottants affaiblissent le niveau d’isolation acoustique aux bruits aériens des planchers’. Il conclut que ‘les bruits d’impacts transmis sur un revêtement de sol en parquet flottant posé sur sous couche mince, en remplacement du revêtement en tapis aiguilleté d’origine, affecte de façon très significative l’isolation et le confort acoustique d’origine pour l’appartement de M. [W]’.

Les époux [W] se fondent en outre sur le rapport d’expertise amiable non contradictoire de M. [R] [X], acousticien expert près la cour d’appel de Paris, lequel conclut le 5 mars 2014 que ‘même si le niveau de réception au bruit d’impact normalisé mesuré par le bureau d’étude Impédance bâtiment est conforme aux objectifs réglementaires, le confort acoustique dans l’appartement de M. [W] a été réduit particulièrement sur les bruits d’activité relative au sol de l’appartement superposé (soit les pas sur le sol, les déplacements des chaises et tables, les chutes d’objets, etc…) du fait de l’augmentation du paramètre de sonorité à la marche du nouveau revêtement de sol’. Il ajoute que ‘le confort acoustique initial pourra être retrouvé uniquement par la pose d’un revêtement de sol souple de type PVC sur mousse ou textile (moquette) sur le sol de l’appartement de l’étage superposé’.

Il convient de rappeler que le jugement du tribunal d’Instance de [Localité 5] du 28 juin 2005, devenu définitif, enjoignait aux époux [I] de remettre en l’état le sol du logement après dépose du carrelage existant, et leur enjoignait de remettre en l’état d’origine l’installation phonique existante avant les transformations effectuées sans autorisation.

Or, en autorisant Mme [P] divorcée [I] à remplacer le carrelage par un parquet flottant en août 2006, [Localité 6] Habitat OPH n’a pas permis la remise en état du sol du logement, ni la remise en état de l’installation phonique existante avant les transformations effectuées sans autorisation, les deux expertises précitées mentionnant notamment que ‘le parquet flottant, en comparaison du revêtement d’origine en tapis aiguilleté plat, fait apparaître une dégradation incontestable du niveau d’isolation acoustique variant de 4 à 7dB’ pour M. [C], et que ‘le confort acoustique initial pourra être retrouvé uniquement par la pose d’un revêtement de sol souple de type PVC sur mousse ou textile (moquette) sur le sol de l’appartement de l’étage superposé’ pour M. [X].

Il importe peu que le parquet flottant soit ‘conforme à la réglementation en vigueur à la date de construction de l’immeuble’ comme le relève le rapport de la société Batiplus, dès lors qu’il n’assure pas une isolation phonique comparable à celle obtenue initialement avec de la moquette, et ne permet dès lors pas de ‘remettre en l’état d’origine l’installation phonique existante avant les transformations effectuées sans autorisation’, selon les termes du jugement du 28 juin 2005 précité. A cet égard, des bruits, s’ils ne sont pas supérieurs aux niveaux limites réglementaires, peuvent néanmoins occasionner un trouble de jouissance (Civ. 3ème, 4 décembre 1991, n°90-14600), comme c’est le cas en l’espèce.

Il convient dès lors de juger que [Localité 6] Habitat OPH est responsable du préjudice de jouissance subi par les époux [W] pour la période du mois de septembre 2006 au mois de janvier 2015, infirmant le jugement entrepris sur ce point.

En retenant une indemnisation de 100 euros par mois, identique à celle devenue définitive pour la période antérieure à août 2006, et compte tenu des 100 mois écoulés entre septembre 2006 et janvier 2015, il convient de condamner [Localité 6] Habitat OPH à verser aux époux [W] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral

Il convient de juger que les époux [W] ont subi un préjudice moral, constitué par les multiples tracas et inquiétudes causés par la procédure, et il convient de condamner [Localité 6] Habitat OPH à leur verser la somme de 1000 euros à ce titre.

Sur la demande de dommages et intérêts pour mauvaise foi et procédure dilatoire et abusive

Les époux [W] fondent leur demande sur l’article 32-1 du code de procédure civile, selon lequel ‘celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés’.

En l’espèce, le fait que [Localité 6] Habitat OPH ait fait valoir sa position dans les différentes instances l’ayant opposé aux époux [W], et qu’il se soit mépris sur l’étendue de ses droits, puisqu’il n’obtient pas satisfaction aux termes du présent arrêt, ne saurait toutefois constituer un abus du droit de se défendre en justice.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté les époux [W] de leur demande à ce titre.

Sur les demandes accessoires

Le sens de la présente décision commande de confirmer le jugement entrepris s’agissant des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile en première instance.

Il est équitable d’allouer aux époux [W] une indemnité de procédure de 3000 euros au titre de l’instance d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Déclare irrecevables les conclusions et pièces remises au greffe par [Localité 6] Habitat OPH le 4 juillet 2022,

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [N] [W] et Mme [V] [W] née [Z] de leurs demandes de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance et de leur préjudice moral pour la période de septembre 2006 à janvier 2015,

Le confirme pour le surplus,

Et statuant à nouveau,

Condamne [Localité 6] Habitat OPH à payer M. [N] [W] et Mme [V] [W] née [Z] les sommes suivantes pour la période de septembre 2006 à janvier 2015 :

– 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance,

– 1.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral,

Rejette toutes demandes plus amples ou contraires,

Et y ajoutant,

Condamne [Localité 6] Habitat OPH à payer à M. [N] [W] et Mme [V] [W] née [Z] la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne [Localité 6] Habitat OPH aux dépens d’appel,

Rejette toutes autres demandes.

La greffière, Le Président,

 


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