Saisine du juge de l’exécution : 22 juin 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 23/00144

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Saisine du juge de l’exécution : 22 juin 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 23/00144

LC/LL

SAS CABINET [E]

C/

SAS IDC MEDICAL

expédition et copie exécutoire

délivrées aux avocats le

COUR D’APPEL DE DIJON

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 22 JUIN 2023

N° RG 23/00144 – N° Portalis DBVF-V-B7H-GDUF

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 janvier 2023,

rendue par le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Dijon – RG : 22/487

APPELANTE :

SAS CABINET [E], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège :

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Patrice CANNET, membre de la SARL CANNET – MIGNOT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 81

INTIMÉE :

SAS IDC MEDICAL, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège :

[Adresse 5]

[Localité 2]

représentée par Me Cécile RENEVEY, membre de la SELARL ANDRE RENEVEY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 2

assistée de Me Sophie FERRY, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 avril 2023 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Sophie DUMURGIER, Conseiller et Leslie CHARBONNIER, Conseiller, chargé du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

Sophie BAILLY, Conseiller

Leslie CHARBONNIER, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG,

DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 22 Juin 2023,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Sophie DUMURGIER, Conseiller, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

Selon contrat du 21 février 2018, ayant fait l’objet de plusieurs avenants, la SAS IDC Médical a confié à la SAS Cabinet [M] [E], une mission d’établissement de ses comptes annuels et de ses déclarations fiscales et sociales.

Elle a mis fin à ce contrat par lettre recommandée du 13 mars 2020.

Par ordonnance du 18 novembre 2020, le juge des référés du tribunal de commerce de Dijon a enjoint à la SAS Cabinet [M] [E] de restituer diverses pièces à la SAS IDC Médical, sous astreinte.

Par jugement du 22 mars 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Dijon a condamné la SAS Cabinet [M] [E] :

‘ à verser à la SAS IDC Médical :

la somme de 95 750 euros au titre de la liquidation de l’astreinte sur la période de 383 jours comprise entre le 22 janvier 2021 et le 8 février 2022,

la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ aux dépens.

Par déclaration du 14 avril 2022, la SAS Cabinet [M] [E] a interjeté appel de ce jugement.

Par acte du 12 mai 2022, l’appelante a fait signifier à l’intimée sa déclaration d’appel et l’avis de fixation à bref délai du 9 mai 2022.

L’appelante a remis ses conclusions au fond le 3 juin 2022 et les a fait signifier à l’intimée par acte du 7 juin 2022.

L’intimée a constitué avocat le 11 juillet 2022 et a conclu le 4 août 2022.

Dès le 9 septembre 2022, l’appelante a soulevé l’irrecevabilité des conclusions de l’intimée pour non-respect du délai d’un mois prescrit par l’article 905-2 du code de procédure civile.

Par conclusions d’incident du 12 octobre 2022, l’intimée demandait au président de la chambre de :

– prononcer la nullité des actes du 12 mai et du 7 juin 2022

– prononcer par conséquence la caducité de la déclaration d’appel de la SAS Cabinet [M] [E],

– condamner cette société aux dépens et à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions d’incident du 8 novembre 2022, l’appelante demandait au président de la chambre de :

‘ à titre principal,

– débouter la SAS IDC Médical de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– constater l’irrecevabilité de sa constitution,

‘ à titre subsidiaire,

– constater l’absence de grief subi par la SAS IDC Médical

– en conséquence,

. dire n’y avoir lieu à prononcer la caducité de l’appel,

. constater l’irrecevabilité des conclusions de la SAS IDC Médical,

‘ en tout état de cause, condamner la SAS IDC Médical aux dépens et à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance rendue le 12 janvier 2023, le président de la 1ère chambre civile a :

– Débouté la SAS IDC Médical de ses demandes tendant à :

– la nullité des actes du 12 mai et du 7 juin 2022, par lesquels la SAS Cabinet [E] lui a fait signifier d’une part sa déclaration d’appel et l’avis de fixation à bref délai et d’autre part ses conclusions au fond,

– la caducité de la déclaration d’appel de la SAS Cabinet [E],

– Déclaré irrecevables les conclusions au fond de la SAS IDC Médical en date du 4 août 2022,

– Rappelé qu’en application du dernier alinéa de l’article 906 du code de procédure civile, cette irrecevabilité s’étend aux pièces communiquées et déposées au soutien des conclusions déclarées irrecevables, à l’exception toutefois de celles qui ont déjà été contradictoirement débattues en première instance ;

– Rappelé que la SAS IDC Médical doit être regardée comme demandant la confirmation du jugement déféré dont elle est réputée s’approprier les moyens,

– Dit en conséquence que la SAS IDC Médical pourra remettre à la cour un dossier contenant exclusivement les pièces qu’elle a produites en première instance,

– Condamné la SAS IDC Médical :

– aux dépens de l’incident,

– à payer à la SAS Cabinet [E] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La SAS IDC Médical a saisi la cour d’une requête aux fins de déféré de l’ordonnance précitée en date du 2 février 2023.

Au terme de ladite requête, elle demande à la cour, au visa des articles 693, 655 et suivants du code de procédure civile de :

– juger recevable et bien fondé le déféré à l’encontre de l’ordonnance rendue le 12 janvier 2023 par le conseiller de la mise en état,

– adoptant ses motifs quant à la nullité de forme affectant les actes signifiés le 12 mai et 7 juin 2022 mais la réformant,

– juger que cette nullité de forme est constitutive d’un grief établi,

– prononcer la nullité des actes d’huissier signifiés le 7 juin 2022 et 12 mai 2022 à son endroit,

– prononcer par conséquent la caducité de la déclaration d’appel du 22 avril 2022, n°20/0706 de la SAS Cabinet [M] [E],

– débouter la SAS Cabinet [M] [E] de l’ensemble de ses demandes,

– condamner la SAS Cabinet [M] [E] à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 20 mars 2023, la SAS CEC demande à la cour, au visa de l’article 905-2 du Code de procédure civile, de :

A titre principal,

– Débouter la société IDC Médical de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– Constater l’irrecevabilité de la constitution de la SAS IDC Médical,

A titre subsidiaire,

– Constater l’absence de grief subi par la SAS IDC Médical,

En conséquence,

– Dire n’y avoir lieu à prononcer la caducité de la déclaration d’appel,

– Constater l’irrecevabilité des conclusions déposées par la SAS IDC Médical au soutien de ses intérêts,

En tout état de cause,

– Condamner la société IDC Médical à la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens de l’instance.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties pour un exposé complet de leurs moyens.

SUR CE, LA COUR

La SAS IDC Médical soutient que les actes du 12 mai et du 7 juin 2022, par lesquels la SAS Cabinet [M] [E] lui a fait signifier, d’une part, sa déclaration d’appel et l’avis de fixation à bref délai et, d’autre part, ses conclusions, sont nuls comme étant affectés d’un vice de forme pour avoir été délivrés selon les modalités de l’article 656 du code de procédure civile à l’adresse de son ancien siège social sis [Adresse 4], alors que :

– depuis la fin de l’année 2019, elle a déménagé son siège social pour le fixer [Adresse 5],

– elle n’a plus ni boîte aux lettres, ni trace d’une quelconque activité [Adresse 4],

– l’huissier de justice n’a effectué aucune autre diligence que de vérifier l’adresse de son siège social sur le site societe.com, ce qui est insuffisant ce d’autant que ce site n’est pas le site officiel du tribunal de commerce et peut donc comporter des erreurs,

– la notification par le greffe du JEX est d’ailleurs revenue avec la mention ‘destinataire inconnu à l’adresse’.

Elle ajoute que ce vice lui a causé un grief avéré dès lors qu’elle a été placée ‘dans l’impossibilité complète de se défendre’ sur l’appel interjeté par la SAS Cabinet [M] [E] ; qu’elle n’a appris l’existence de l’appel qu’après avoir sollicité du greffe un certificat de non appel ; que le greffe par courrier du 30 juin, reçu le 11 juillet, l’a informée de l’appel adverse, sur lequel elle s’est immédiatement constituée ; que n’ayant pas reçu de signification de déclaration d’appel et de conclusions, elle pensait que la SAS CEC n’avait pas donné de suite à son recours ; que c’est alors que le conseil de la SAS CEC lui a notifié par RPVA ses pièces et conclusions mais également les actes d’huissier dont la nullité est sollicitée ; que son grief est constitué par l’irrecevabilité de son argumentation et son impossibilité de se défendre.

Elle conclut enfin à la caducité de la déclaration d’appel, en application des articles 905-1 et 911 du code de procédure civile, en ce que la nullité qui affecte l’acte de signification de la déclaration d’appel entraîne le défaut total de signification de cette dernière dans le délai de 10 jours à compter de la réception de l’avis de fixation qui a été adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d’appel.

Au terme de l’article 649 du code de procédure civile, la nullité des actes d’huissier de justice est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure.

L’article 693 du même code indique que ce qui est prescrit notamment par les articles 654 à 659 est observé à peine de nullité.

L’article 114 alinéa 2 du code de procédure civile prévoit que la nullité d’un acte de procédure ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

Il est constant que les actes du 12 mai et du 7 juin 2022 ont été délivrés à la SAS IDC Médical à [Adresse 4], selon les modalités de l’article 656 du code de procédure civile.

L’huissier de justice doit s’être assuré de la réalité du domicile du destinataire de l’acte et il doit résulter des vérifications faites par l’officier public ministériel, dont il sera fait mention dans l’acte de signification, que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée, sous peine de nullité de l’acte.

Pour confirmer que le destinataire de la signification résidait à cette adresse, l’huissier de justice a précisé, au terme des deux actes, qu’il a vérifié que le nom figurait ‘sur la façade société.com’.

Or, comme il a été jugé, la réalité du domicile de la personne morale ne saurait résulter de la seule consultation du site société.com qui peut ne pas être à jour et comporter des erreurs.

C’est donc de manière parfaitement légitime que la présidente de la première chambre a considéré au regard des diligences insuffisantes de l’huissier de justice que les actes de signification litigieux étaient entachés d’un vice de forme.

Il appartient alors à la SA IDC Médical, qui se prévaut de la nullité des actes d’huissier, de prouver l’existence d’un grief en lien avec ce vice.

Or, il est relevé, à l’instar de la présidente de la 1ère chambre, que si la lettre recommandée de notification du jugement rendu par le juge de l’exécution, dont appel, est revenue avec la mention « n’habite pas à l’adresse indiquée », l’huissier de justice a mentionné dans les actes, dont la nullité est recherchée, avoir laissé un avis de passage au domicile du destinataire, mention qui fait foi jusqu’à inscription de faux.

Il a, en outre, précisé par courrier postérieur produit à la procédure avoir constaté que lors du dépôt des avis de passage, la boîte aux lettres était vide, ce dont il a déduit de manière légitime que le courrier était régulièrement relevé, et qu’au surplus, le copie envoyée par voie postale, conformément aux dispositions de l’article 658 du code de procédure civile, n’a jamais été retournée avec la mention « non distribuable » ou « parti sans laisser d’adresse ».

Les déclarations de la SAS IDC Médical, qui soutient avoir déménagé son siège social depuis la fin de l’année 2019, pour le fixer ZA Les Gatines à Saint Fargeau, sont contredites par le fait qu’elle a déclaré être domiciliée [Adresse 4] :

– lors de la saisine du juge de l’exécution aux fins de liquidation de l’astreinte le 4 octobre 2021,

– lors de sa constitution devant la cour le 11 juillet 2022,

– dans ses conclusions au fond le 4 août 2022.

Par ailleurs, il ne peut être que constaté, à la lecture de l’extrait Kbis produit aux débats, qu’à la date du 26 octobre 2022, le siège social de la SAS IDC Médical était toujours fixé [Adresse 4].

S’il est constant que la SAS IDC Médical a sollicité, par l’intermédiaire de son avocat, par courrier du 24 juin 2022, un certificat de non appel du jugement rendu le 22 mars 2022 par le juge de l’exécution de Dijon, rien ne permet de vérifier qu’elle n’a eu connaissance de l’appel relevé par la société CEC le 15 avril 2022 contre ledit jugement que par la réponse du greffe datée du 30 juin 2022 ni qu’elle aurait reçu cette réponse le 11 juillet 2022.

En tout état de cause, quand bien même aurait-elle eu connaissance de l’appel litigieux par le courrier du greffe daté du 30 juin 2022, la SAS IDC Médical disposait encore d’un délai de 7 jours pour communiquer ses écritures dans le délai imparti du 7 juillet 2022, en application de l’article 905-2 du code de procédure civile.

En conséquence, la décision déférée ne peut être que confirmée en ce qu’elle a considéré que la preuve du grief allégué n’est pas rapportée de sorte qu’il n’y a pas lieu d’annuler les actes critiqués et que la caducité de l’appel formé par la SAS Cabinet [M] [E] n’est pas encourue.

Elle doit être également confirmée en ce qu’elle a jugé que les conclusions d’intimée de la SAS IDC Médical sont irrecevables pour avoir été remises et notifiées plus d’un mois après la signification des conclusions de l’appelante le 7 juin 2022.

L’ordonnance déférée est confirmée sur les dépens d’incident et les frais irrépétibles non compris dans les dépens.

La SAS IDC Médical, partie succombante, est condamnée aux dépens de déféré et à verser à la SAS Cabinet [E] une indemnité de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Condamne la SAS IDC Médical aux dépens de déféré,

Condamne la SAS IDC Médical à payer à la SAS Cabinet [E] une indemnité de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

 


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