Copies exécutoires République française
délivrées aux parties le : Au nom du peuple français
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 5
ORDONNANCE DU 21 JUIN 2023
(n° /2023)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/05224 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHJ72
Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Août 2022 du Juge de l’exécution de PARIS – RG n° 22/00016
Nature de la décision : Rendue par défaut
NOUS, Rachel LE COTTY, Conseillère, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Cécilie MARTEL, Greffière.
Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :
DEMANDEUR
Madame [T] [U] [B]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 1] – RUSSIE
Représentée par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053
Et assistée de Me Charles-Henri ROY, avocat plaidant au barreau de PARIS, toque : K017
à
DEFENDEURS
LE COMPTABLE DU POLE DE RECOUVREMENT SPECIALISE PARISIEN 1
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représenté par Me Vanessa GRYNWAJC de l’AARPI GRYNWAJC – STIBBE, avocat au barreau de PARIS, toque : P211
SOCIÉTÉ BANQUE INTERNATIONALE A LUXEMBOURG
Dom. élu chez Me [V] [F], notaire
[Adresse 4]
[Localité 5]
Non comparante ni représentée à l’audience
Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 24 Mai 2023 :
Suivant commandement de payer valant saisie immobilière du 28 octobre 2021, publié le 16 novembre suivant au service de la publicité foncière, le comptable du pôle de recouvrement spécialisé parisien 1, représentant l’Etat, a poursuivi la vente de biens et droits immobiliers appartenant à Mme [B], dépendant d’un immeuble situé [Adresse 2].
Par jugement du 31 août 2022, le juge de l’exécution de Paris, statuant en matière de saisies immobilières, a rejeté les demandes de nullité, de caducité et de mainlevée du commandement valant saisie immobilière, fixé la créance du comptable du pôle de recouvrement spécialisé parisien 1 à 3.889.518 euros, intérêts arrêtés au 30 juin 2021, taxé les frais déjà exposés par le créancier poursuivant à 5.902,85 euros, autorisé Mme [B] à poursuivre la vente amiable des droits et biens immobiliers saisis, dit que le prix de vente ne pourra être inférieur à 14.000.000 euros net vendeur, rappelé l’affaire à l’audience du 15 décembre 2022 et rappelé que la décision autorisant la vente amiable suspendait le cours de la procédure d’exécution, à l’exception du délai imparti aux créanciers pour déclarer leurs créances.
Par déclaration du 13 septembre 2022, Mme [B] a interjeté appel de cette décision et, par actes des 28 et 29 mars 2023, elle a assigné le comptable responsable du pôle de recouvrement spécialisé parisien 1 représentant l’Etat et la société Banque Internationale A Luxembourg en référé devant le premier président aux fins de sursis à exécution.
Aux termes de ses conclusions, développées oralement à l’audience du 24 mai 2023, elle sollicite le sursis à exécution du jugement du 31 août 2022 au visa de l’article R. 121-22 du code des procédures civiles d’exécution et la condamnation du comptable responsable du pôle de recouvrement spécialisé parisien 1, représentant l’Etat, aux dépens.
Aux termes de ses conclusions déposées et développées oralement à l’audience, le comptable du pôle de recouvrement spécialisé parisien 1, représentant l’Etat, demande à la juridiction du premier président de débouter Mme [B] de sa demande et de la condamner aux dépens, avec faculté de recouvrement direct, ainsi qu’au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
A l’audience, les conseils des parties ont été entendus en leurs observations orales.
La société Banque Internationale A Luxembourg, régulièrement citée à personne morale, n’a pas comparu.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour l’exposé des moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
SUR CE,
En application de l’article R. 121-22 du code des procédures civiles d’exécution, en cas d’appel, un sursis à l’exécution des décisions prises par le juge de l’exécution peut être demandé au premier président de la cour d’appel. La demande est formée par assignation en référé délivrée à la partie adverse et dénoncée, s’il y a lieu, au tiers entre les mains de qui la saisie a été pratiquée. Jusqu’au jour du prononcé de l’ordonnance par le premier président, la demande de sursis à exécution suspend les poursuites si la décision attaquée n’a pas remis en cause leur continuation ; elle proroge les effets attachés à la saisie et aux mesures conservatoires si la décision attaquée a ordonné la mainlevée de la mesure. Le sursis à exécution n’est accordé que s’il existe des moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision déférée à la cour.
Il résulte de ce texte que le sursis à exécution des décisions prises par le juge de l’exécution ne peut être accordé que s’il existe des moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision déférée à la cour.
Le moyen sérieux de réformation, au sens de ce texte, est celui qui présente des chances raisonnables de succès, sans qu’il appartienne au premier président de se livrer à un examen approfondi de l’ensemble des moyens et arguments avancés par les parties et soumis à l’examen, au fond, de la cour d’appel.
En l’espèce, Mme [B] soutient que, contrairement à ce qu’a retenu le juge de l’exécution, le commandement de payer et l’assignation sont nuls en application de l’article 648 du code de procédure civile, faute de mention de son domicile sur les actes d’huissier. Elle expose que ces actes mentionnent une adresse ([Adresse 8]) où elle n’est plus domiciliée depuis longtemps, étant domiciliée [Adresse 7], et que, n’ayant jamais réceptionné les actes, elle a nécessairement subi un grief.
Mais il résulte des pièces produites par le défendeur que les actes litigieux mentionnent l’adresse [Adresse 8], qui a été déclarée par Mme [B] elle-même dans un acte officiel de 2016 comme étant la sienne, que les actes, régulièrement signifiés selon les dispositions de la Convention de La Haye du 15 novembre 1965, sont revenus avec la mention « non réclamée », et que c’est la mère de Mme [B], dont elle assume la tutelle et l’assistance matérielle, qui est domiciliée [Adresse 7] où elle prétend résider (pièce n° 14 de la demanderesse).
En outre, le défendeur produit le retour des tentatives de signification réalisées à Moscou, dont il ressort que les huissiers n’ont pu signifier le commandement et l’assignation à Mme [B], non parce que l’adresse était inexacte mais parce que celle-ci était absente.
En tout état de cause, ainsi que l’a relevé le premier juge, Mme [B] n’a subi aucun grief puisqu’il est établi que son conseil a eu connaissance du commandement de payer valant saisie immobilière fin novembre 2021, au retour de la demande de renseignements adressée au service de la publicité foncière le 24 novembre 2021 (la lettre du service de la publicité foncière contenant les renseignements est datée du 25 novembre 2021 – pièce n° 1 de la demanderesse).
C’est ainsi que, dans un courriel du 21 janvier 2022, il a demandé à son confrère adverse la communication de la copie de l’assignation à comparaître qui avait dû être délivrée à sa cliente, précisant « je suis le conseil de Mme [T] [B] à laquelle vous avez fait notifier un commandement de payer valant saisie immobilière ». Il n’a pas sollicité la remise d’une copie du commandement de payer, ce qui atteste qu’il avait bien été reçu et était connu de Mme [B] depuis la fin du mois de novembre 2021. Le délai dont celle-ci disposait avant l’audience lui permettait ainsi non seulement de régler sa dette si elle le souhaitait mais également de le contester devant le juge de l’exécution.
Par courriel du 27 janvier 2022, l’avocat du comptable du pôle de recouvrement spécialisé parisien 1, représentant l’Etat, a adressé à l’avocat de Mme [B] une copie de l’assignation délivrée pour l’audience d’orientation du 21 avril suivant, date à laquelle l’affaire a été renvoyée pour être examinée le 16 juin 2022.
Mme [B] a ainsi eu connaissance de l’assignation en temps utile et a pu présenter tous ses moyens de défense.
En l’absence de tout grief, il n’existe pas, de ce chef, de moyens sérieux de réformation ou d’annulation.
Mme [B] prétend également que, contrairement à ce qu’a retenu le juge de l’exécution, le commandement de payer valant saisie est caduc en application des articles R. 321-6 et R. 311-11 du code des procédures civiles d’exécution et 687-2 du code de procédure civile dès lors qu’il n’est pas justifié du respect des délais légaux de publication.
Aux termes de l’article R. 321-6 du code des procédures civiles d’exécution, le commandement de payer valant saisie est publié au fichier immobilier dans un délai de deux mois à compter de sa signification, délai qui est prévu à peine de caducité du commandement en application de l’article R. 311-11.
L’article R. 321-3 du même code impose également un délai de huit jours après le commandement pour procéder à sa publication.
Mais en l’espèce, le commandement été délivré le 28 octobre 2021 et publié le 16 novembre 2021, dans le délai de deux mois imparti au créancier et à l’expiration du délai de huit jours.
Ainsi que l’a retenu le premier juge, l’article 647-1 du code de procédure civile précise que la date de notification d’un acte judiciaire ou extra-judiciaire à l’étranger est, à l’égard de celui qui y procède, la date d’expédition de l’acte par l’huissier de justice ou, à défaut, la date de réception par le parquet compétent.
Ce texte fixe donc la date à l’égard de celui qui procède à la notification d’un acte, à la différence de l’article 687-2 visé par Mme [B], qui s’applique au destinataire de l’acte.
En conséquence, à l’égard du créancier poursuivant, la date de notification du commandement de payer est le 28 octobre 2021, de sorte que la caducité n’est pas encourue et qu’en tout état de cause, il n’existe pas de moyen sérieux de réformation.
Mme [B] soutient encore, au visa des articles R. 322-4 et R. 311-11 du code des procédures civiles d’exécution et 687-2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas établi que l’assignation ait été délivrée dans le délai de deux mois de la publicité du commandement de payer, de sorte que celui-ci est caduc.
Aux termes de l’article R. 322-4 du code des procédures civiles d’exécution, dans les deux mois qui suivent la publication au fichier immobilier du commandement de payer valant saisie, le créancier poursuivant assigne le débiteur saisi à comparaître devant le juge de l’exécution à une audience d’orientation, délai qui est prévu à peine de caducité du commandement en application de l’article R. 311-11.
Mais la date de l’assignation est, en application de l’article 647-1 du code de procédure civile précité, le 13 janvier 2022, de sorte qu’elle a bien été délivrée dans le délai de deux mois de la publication du commandement de payer, intervenue le 16 novembre 2021.
Au regard de ces éléments, aucun moyen sérieux de réformation ou d’annulation n’est formulé contre la décision du juge de l’exécution, de sorte que la demande de sursis à l’exécution de cette décision sera rejetée.
Mme [B], partie perdante, sera tenue aux dépens de la présente instance, sans possibilité de recouvrement direct, l’article 699 du code de procédure civile n’étant pas applicable à la présente procédure où le ministère d’avocat n’est pas obligatoire.
Elle sera par suite condamnée à indemniser le défendeur des frais qu’il a de nouveau été contraint d’exposer, à hauteur de la somme de 2.000 euros, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Rejetons la demande de sursis à exécution du jugement du juge de l’exécution de Paris du 31 août 2022 ;
Condamnons Mme [B] aux dépens de la présente instance ;
La condamnons à payer au comptable du pôle de recouvrement spécialisé parisien 1, représentant l’Etat, la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
ORDONNANCE rendue par Mme Rachel LE COTTY, Conseillère, assistée de Mme Cécilie MARTEL, greffière présente lors de la mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
La Greffière, La Conseillère