Saisine du juge de l’exécution : 17 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/18941

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Saisine du juge de l’exécution : 17 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/18941

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 10

ARRÊT DU 17 MAI 2023

(n° , 4 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 22/18941 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGVML

Décision déférée à la cour :

Jugement du 18 octobre 2022-Juge de l’exécution d’Evry-RG n° 22/01823

APPELANTE

S.A.S.U. [5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Delphine LABOREY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0509

INTIMÉE

S.A.R.L. [6]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Sandra ROBERT de la SELARL CSR, avocat au barreau de PARIS, toque : L0017

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 7 avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT

-contradictoire

-par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, présidente et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier, présent lors de la mise à disposition.

Déclarant agir en vertu d’une ordonnance de référé rendue le 1er septembre 2020 par le président du Tribunal de grande instance d’Evry, la SARL [6] a le 27 octobre 2020 puis le 14 décembre 2021 délivré à la SASU [5] deux commandements de quitter les lieux, portant sur un local sis à [Localité 4] (91), [Adresse 2]. Elle lui a également délivré le 4 novembre 2020 un commandement à fin de saisie-vente de payer la somme de 71 525,02 euros.

Suivant jugement en date du 18 octobre 2022, le juge de l’exécution d’Evry qui avait été saisi par la SASU [5] selon assignation datée du 26 janvier 2022, a rejeté la demande de délais pour quitter les lieux ainsi que la demande de délais de paiement présentées par l’intéressée. En outre la prétention en application de l’article 700 du code de procédure civile de la créancière a été rejetée et la SASU [5] condamnée aux dépens.

Par déclaration en date du 8 novembre 2022, la SASU [5] a relevé appel de cette décision.

En ses conclusions notifiées le 23 mars 2023, elle expose :

– qu’elle s’est retrouvée titulaire du bail commercial portant sur le local susvisé dans le cadre d’une cession d’actifs prononcée à l’occasion d’une procédure collective concernant le précédent locataire ;

– qu’elle n’a pas été en mesure de régler le loyer à bonne date, ayant dû financer des travaux coûteux dans les locaux ;

– qu’un protocole d’accord a été régularisé le 6 février 2020, mais immédiatement après son activité a été fortement impactée par l’épidémie de Covid 19 ;

– qu’elle a réalisé des versements tant avant qu’après le prononcé du jugement dont appel, à hauteur de 68 000 euros ;

– que le solde de la dette en principal ne s’élève à ce jour qu’à 3 551,53 euros ;

– que la partie adverse lui a facturé des frais d’avocats qui ne sont pas compris dans le titre exécutoire fondant les poursuites ;

– que son activité redémarre ; que si une expulsion est menée à bien elle ne pourra pas poursuivre ladite activité ce qui entraînerait son placement en liquidation judiciaire ;

– qu’elle a payé l’ensemble des frais de procédure.

La SASU [5] demande en conséquence à la Cour de :

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de délais, d’arrêt de la majoration des intérêts et de l’application des pénalités de retard, et de suspension des mesures d’exécution ;

– lui octroyer un délai d’un an à compter de l’arrêt à intervenir pour quitter les lieux afin de trouver le temps de négocier un nouveau bail avec sa bailleresse ;

– ordonner le partage des dépens.

Dans ses conclusions notifiées le 30 mars 2023, la SARL [6] réplique :

– que l’appelante s’est rendue coupable de manquements répétés aux obligations à elle imparties par le contrat de bail commercial ;

– que les deux protocoles mis en place n’ont pas été respectés, notamment le second qui prévoyait le versement d’un premier acompte de 10 400 euros qui ne lui a jamais été remis ;

– qu’elle a dû délivrer à la SASU [5] un nouveau commandement de quitter les lieux le 14 décembre 2021 ;

– que celle-ci ne justifie pas de sa situation par des pièces comptables si ce n’est un bilan sur l’exercice 2019-2020 qui mentionne seulement le déficit de la société ; que son état d’endettement reste imprécis ; qu’aucun bilan 2021 n’est versé aux débats ;

– qu’en tant que restaurateur, elle a bénéficié d’aides de l’Etat à la suite de l’épidémie de Covid 19 ;

– qu’au 29 mars 2023 la dette s’élève à 5 018 euros ;

– que la SASU [5] est de mauvaise foi ;

– que la dette est ancienne et a commencé à se constituer il y a quatre ans.

La SARL [6] demande en conséquence à la Cour de confirmer le jugement, et de condamner la SASU [5] au paiement de la somme de 3 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Par ordonnance en date du 16 mars 2023, le magistrat délégataire du premier président de cette Cour a débouté la Sasu [5] de sa demande de sursis à exécution du jugement dont appel.

MOTIFS

Selon les dispositions de l’article L 412-3 du Code des procédures civiles d’exécution, le Juge peut accorder des délais pour quitter les lieux à des personnes dont l’expulsion a été judiciairement ordonnée, chaque fois que le relogement des intéressés ne pourra avoir lieu dans des conditions normales ; l’article L 412-4 du même code énonce que la durée des délais prévus à l’article précédent ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans, et que pour la fixation de ces délais, il doit être tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement.

Il appartient donc au juge de respecter un juste équilibre entre deux revendications contraires en veillant à ce que l’atteinte au droit du propriétaire soit proportionnée et justifiée par la sauvegarde des droits de l’occupant, dès lors que ces derniers apparaissent légitimes.

Au cas d’espèce, l’appelante ne prouve ni même ne soutient avoir cherché un nouveau local et se borne à évoquer la possibilité de négocier la conclusion d’un nouveau bail avec la Sarl [6], laquelle ne manifeste nullement, dans ses écritures, la volonté d’accueillir cette demande. En outre, la décision de justice fondant les poursuite date du 1er septembre 2020 si bien que l’appelante a d’ores et déjà bénéficié de délais de fait.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de délais pour quitter les lieux.

En vertu de l’article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital.

Il peut subordonner ces mesures à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

La décision du juge suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d’intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

(…)

L’historique du compte démontre que dès l’année 2019 la Sasu [5] a été destinataire de lettres de relance. L’arriéré de loyers s’est accru à partir du mois de janvier 2020 dans des proportions significatives. Malgré la mise en application de deux protocoles d’accord les 6 et 7 février 2020 puis le 13 novembre suivant, la Sasu [5] n’a pas tenu ses engagements de paiement. Le commandement à fin de saisie-vente délivré à la débitrice le 4 novembre 2020 portait sur la somme de 71 525,02 euros. Toutefois au 2 janvier 2023 le compte accusait un solde débiteur de 10 214,75 euros et au 29 mars 2023 de 5 018 euros. La Sasu [5] a donc accompli des efforts pour résorber sa dette. Toutefois si elle sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de délais de paiement et d’arrêt de la majoration des intérêts et de l’application des pénalités de retard, elle ne sollicite pas l’octroi d’une telle mesure, laquelle ne se justifie plus à ce jour au vu du montant modeste de la dette. Le jugement est confirmé sur ce point.

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la Sarl [6].

La SASU [5], qui succombe en ses prétentions, sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

– CONFIRME le jugement en date du 18 octobre 2022 ;

– REJETTE la demande de la Sarl [6] en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– CONDAMNE la SASU [5] aux dépens d’appel.

Le greffier, Le président,

 


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