Saisine du juge de l’exécution : 16 mai 2023 Cour d’appel de Fort-de-France RG n° 22/00362

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Saisine du juge de l’exécution : 16 mai 2023 Cour d’appel de Fort-de-France RG n° 22/00362

ARRET N°

N° RG 22/00362 – N° Portalis DBWA-V-B7G-CK2J

[E]

C/

[D]

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERROR ISME ET AUTRES INFRACTIONS

N° RG 22/00386 – N° Portalis DBWA-V-B7G-CK5U

[E]

C/

[D]

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES ACTES DE TERRORISME ET AUTRES INFRACTIONS

COUR D’APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 16 MAI 2023

Décision déférée à la cour : Jugement du Juge de l’Exécution de Fort de France, près le Tribunal Judiciaire en date du 05 Septembre 2022, enregistré sous le n° 21/01108 ;

Dossier RG 22/00362

APPELANT :

Monsieur [C] [E]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me Dominique NICOLAS de la SELAS JURISCARIB, avocat postulant au barreau de MARTINIQUE

Me Angélina JOLLY NICOLAS, avocat plaidant au barreau de PARIS

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/002372 du 10/11/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de FORT DE FRANCE)

INTIMES :

Madame [O] [D]

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Isabelle ANDRE, avocat au barreau de MARTINIQUE

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET AUTRES INFRACTIONS

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Alexandra REQUET, avocat postulant, au barreau de MARTINIQUE

Me Denis LATREMOUILLE, avocat plaidant, au barreau de PARIS

Dossier RG 22/00386

APPELANTE :

Madame [N] [L] [E]

[Adresse 8]

[Localité 2] (BELGIQUE)

Représentée par Me Dominique NICOLAS de la SELAS JURISCARIB, avocat postulant au barreau de MARTINIQUE

Me Angélina JOLLY NICOLAS, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMES :

Madame [O] [D]

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Isabelle ANDRE, avocat au barreau de MARTINIQUE

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES ACTES DE TERRORISME ET AUTRES INFRACTIONS

[Adresse 4]

[Localité 5]

Non représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 10 Mars 2023, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Thierry PLUMENAIL, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour, composée de :

Présidente : Mme Nathalie RAMAGE, Présidente de Chambre

Assesseur :Mme Claire DONNIZAUX, Conseillère

Assesseur : M. Thierry PLUMENAIL, Conseiller

Greffière, lors des débats : Mme Béatrice PIERRE-GABRIEL,

Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l’arrêt fixée au 16 Mai 2023 ;

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Suivant jugement du tribunal correctionnel de Fort-de-France en date du 26 octobre 2009 confirmé par un arrêt rendu le 30 juin 2011 par la cour d’appel de Fort-de-France, M. [C] [E] a été condamné solidairement avec M. [B] [Z] et Mme [M] [J] à payer à Mme [O] [D] reçue partie civile, les sommes de 30 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel outre la somme de 30 000 € en réparation de son préjudice moral.

Par acte d’huissier en date du 20 avril 2021, établi par la SCP Michel-Abautret, huissiers de justice à Fort-de-France, le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et autres infractions et Mme [O] [D] ont procédé à une saisie-attribution successive entre les mains de la SARL Eden paradise, personnellement tenue de sommes envers M. [C] [E], pour le paiement de la somme de 66.176,57 euros, en vertu d’un jugement rendu le 26 octobre 2009 par le tribunal correctionnel de Fort-de-France et d’un arrêt rendu le 30 juin 2011 par la cour d’appel de Fort-de-France, signifiés le 25 mars 2021. Ladite saisie-attribution a été dénoncée à M. [C] [E] suivant exploit d’huissier en date du 23 avril 2021.

La mesure d’exécution forcée portant sur les loyers d’un immeuble situé à [Localité 9] et ayant fait l’objet d’une donation en date du 05 juin 2003 par M. [C] [E] et son épouse à leur fille, Mme [N] [E], celle-ci est intervenue volontairement à la procédure.

Par actes d’huissier en date du 25 mai 2021, M. [C] [E] et Mme [N] [E] ont fait assigner Mme [O] [D] et le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et autres infractions devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Fort-de-France aux fins de contester la saisie-attribution susvisée.

Par jugement rendu le 05 septembre 2022, le juge de l’exécution près le tribunal judiciaire de Fort-de-France a statué comme suit :

– Dit la contestation de M. [C] [E] et Mme [N] [E] recevable mais non fondée ;

– Dit que l’action en recouvrement du Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et autres infractions et de Mme [O] [D] à leur encontre est recevable ;

– Dit que la procédure de saisie-attribution à exécution successive du 20 avril 2021 est régulière ;

– Déboute M. [C] [E] et Mme [N] [E] de leurs demandes subsidiaires tendant à voir déduire les loyers saisis depuis le 20 avril 2021 des sommes réclamées par le Fonds de garantie et de cantonner ladite saisie à la somme de 300 euros ;

– Valide la saisie-attribution à exécution successive pratiquée le 20 avril 2021 par la SCP Michel-Abautret, huissiers de justice à Fort-de-France, à la demande du Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et autres infractions et de Mme [O] [D], entre les mains de la SARL Eden paradise, personnellement tenue de sommes envers M. [C] [E], pour le paiement de la somme de 66.176,57 euros, en vertu d’un jugement rendu le 26 octobre 2009 par le tribunal correctionnel de Fort-de-France et d’un arrêt rendu le 30 juin 2011 par la cour d’appel de Fort-de-France, signifiés le 25 mars 2021, à lui dénoncée suivant exploit en date du 23 avril 2021;

– Déboute M. [C] [E] et Mme [N] [E] de leur demande de dommages et intérêts ;

– Déboute M. [C] [E] et Mme [N] [E] de leur demande au titre de I’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamne in solidum M. [C] [E] et Mme [N] [E] à payer au Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et autres infractions la somme de 1.000 euros au titre de I’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamne in solidum M. [C] [E] et Mme [N] [E] à payer à Mme [O] [D] la somme de 1.000 euros au titre de I’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamne in solidum M. [C] [E] et Mme [N] [E] aux dépens ;

– Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article R. 121-17 du code des procédures civiles d’exécution ;

– Rappelle que les décisions du juge de l’exécution bénéficient de l’exécution provisoire de droit.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 21 septembre 2022 (n° RG 22-00362), M. [C] [E] a critiqué tous les chefs du jugement rendu le 05 septembre 2022, sauf en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à l’application de l’article R. 121-17 du code des procédures civiles d’exécution et a rappelé que les décisions du juge de l’exécution bénéficient de l’exécution provisoire de droit.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 05 octobre 2022 (n° RG 22-00386), Mme [N] [L] [E] a critiqué les chefs du jugement rendu le 05 septembre 2022, sauf en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à l’application de l’article R. 121-17 du code des procédures civiles d’exécution et a rappelé que les décisions du juge de l’exécution bénéficient de l’exécution provisoire de droit.

Dans leurs conclusions d’appel du 31 octobre 2022 (procédures RG 22-00362 et 22-00386), M. [C] [E] et Mme [N] [L] [E] demandent à la cour d’appel de:

– ‘ Infirmer le jugement rendu le 5 septembre 2022 par le juge de l’exécution.

Statuant à nouveau,

– Juger que la créance dont il est réclamé l’exécution est éteinte par la prescription de l’action en recouvrement.

– Juger nuls et de nuls effets les actes de signification et de dénonciation de la saisie.

– Juger que la saisie attribution a été pratiquée sur la chose d’autrui en l’espèce sur un immeuble n’appartenant non pas au débiteur mais à Mme [N] [L] [E].

En conséquence,

– Ordonner la main-levée immédiate de la saisie-attribution pratiquée par la SCP MICHEL et ABAUTRET, le 20 avril 2021.

– Restituer à Mme [N] [E] l’intégralité des loyers saisis depuis le 20 avril 2021.

– Débouter le Fonds de Garantie de toutes demandes au titre des intérêts, frais et accessoires.

Si par extraordinaire, la Cour devait valider la saisie pratiquée,

– Déduire les loyers saisis depuis le 20 avril 2021 des sommes réclamées par le Fonds de garantie.

– Cantonner la saisie à la somme de 300 €.

En tout état de cause,

– Condamner Mme [D] et le Fonds de garantie des victimes actes de terrorisme et autres infractions à verser à M. [C] [E] et Mme [N] [E] la somme de 3 000 € chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– Condamner Mme [D] et le Fonds de garantie des victimes actes de terrorisme et autres infractions à verser à Mme [N] [E] la somme de 12 000 € à titre de dommages et intérêts pour privation de loyers depuis plus de 12 mois.

– Les condamner aux entiers dépens.’

M. [C] [E] et Mme [N] [L] [E] exposent que la saisie-attribution est tardive et irrégulière en ce qu’elle est fondée sur un titre exécutoire caduc depuis le 26 octobre 2019, de sorte que l’acte d’exécution est intervenu plus de dix ans après la condamnation de M. [C] [E]. Ils font valoir également que les intérêts pour lesquels il est réclamé une somme de 19.645,43 euros ne sont pas justifiés, la date à laquelle le Fonds de garantie aurait indemnisé Mme [D], ainsi que son montant n’étant pas précisés. M. [C] [E] et Mme [N] Gace [E] ajoutent que la mainlevée de la saisie-attribution doit être immédiatement ordonnée, M. [C] [E] n’ayant été touché par aucune des significations dont se prévalent les intimés.

Par ailleurs, M. [C] [E] et Mme [N] [L] [E] prétendent que la saisie-attribution pratiquée le 20 avril 2021 vise les loyers d’un bien immobilier que M. [E] n’occupe plus et dont il n’est plus propriétaire. Ils exposent que l’acte de donation en date du 05 juin 2003 portant sur le bien sis à [Localité 9] prévoyait une réserve du droit d’usage et d’habitation, le donateur et son conjoint ne pouvant céder ce droit ni consentir une location, même partielle, à peine de nullité des cessions, baux de location et même d’extinction de leur droit d’usage et d’habitation. M. [C] [E] et Mme [N] [L] [E] font valoir également que les époux [E] ne disposaient que d’un droit d’usage et d’habitation sur le bien litigieux dont ils n’étaient plus usufruitiers. Ils ajoutent que le bien litigieux dont les loyers sont saisis est sorti du patrimoine de M. [C] [E], de sorte que Mme [N] [L] [E] en a aujourd’hui l’entière propriété dont les fruits qu’elle ne peut percevoir au titre d’une saisie-attribution qui ne la concerne pas.

Dans ses conclusions d’intimée du 07 novembre 2022 (procédure RG n° 22-00362), Mme [O] [D] demande à la cour d’appel de :

‘In limine litis :

Déclarer les conclusions et la signification nuls et de nuls effets pour défaut de pouvoir en vertu des dispositions de l’article 117 du code de procédure civile ;

En conséquence,

– Déclarer caduc l’appel interjeté,

A défaut,

En tout état de cause,

– Confirmer le jugement rendu par le Juge de l’Exécution en date du 05 septembre 2022 ;

Déclarer M. [C] [G] [E] autant irrecevable que mal fondé en toutes ses demandes ;

– Débouter M. [C] [G] [E] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

En conséquence,

– Valider la saisie-attribution du 20 avril 2021 ;

– Condamner M. [C] [G] [E] à payer à Mme [D] la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Le Condamner aux entiers dépens.’

Mme [O] [D] expose que seul M. [C] [E] a relevé appel du jugement rendu le 05 septembre 2022 par déclaration enregistrée au greffe le 20 septembre 2022; or, la signification de la déclaration d’appel, de l’avis d’orientation et de fixation à bref délai et des conclusions prises au nom de M. [C] [E] et de Mme [N] [L] [E] a été effectuée pour le compte d’une partie ne figurant pas à la procédure et ne pouvant être représentée dans ladite procédure d’appel, de sorte que la signification des actes susvisés est nulle et de nul effet. Mme [O] [D] fait valoir également que les décisions pénales rendues contradictoirement n’ont pas à être signifiées et que le commandement de payer les causes du jugement rendu le 26 octobre 2009, qui a été délivré le 15 novembre 2012 à M. [C] [E], a interrompu la prescription.

Par ailleurs, Mme [O] [D] expose que l’acte de donation produit par M. [C] [E] démontre que seule la nue-propriété du bien litigieux a été transférée à Mme [N] [L] [E], M. [C] [E] ayant conservé l’usufruit jusqu’au jour de son décès. Mme [O] [D] fait valoir que M. [C] [E] se prévalant d’un droit d’usage était le seul à pouvoir conclure un bail puisque, dans un démembrement de propriété, le nu-propriétaire détient la propriété stricte mais non le droit d’usage.

Dans ses conclusions d’intimée du 22 novembre 2022 (procédure RG n° 22-00386), Mme [O] [D] demande à la cour d’appel de :

‘In limine litis :

– Déclarer caduc l’appel interjeté,

A défaut,

En tout état de cause,

– Confirmer le jugement rendu par le Juge de l’Exécution en date du 05 septembre 2022 ;

– Déclarer Mme [N] [E] autant irrecevable que mal fondée en toutes ses demandes ;

– Débouter Mme [N] [E] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

En conséquence,

– Valider la saisie-attribution du 20 avril 2021 ;

– Condamner Mme [N] [E] à payer à Mme [D] la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– La Condamner aux entiers dépens.’

Mme [O] [D] expose que, aux termes de l’article 905-1 du code de procédure civile, il est imposé à l’appelant l’obligation de faire signifier à l’intimé non constitué la déclaration d’appel dans les dix jours de la réception de l’avis de fixation qui lui est adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d’appel. Elle fait valoir que la déclaration d’appel n’a pas été signifiée dans la copie remise par l’huissier instrumentaire en date du 25 octobre 2022 à la demande de Mme [E], de sorte que la déclaration d’appel de Mme [E] est caduque. Mme [O] [D] soutient également que les décisions pénales rendues contradictoirement n’ont pas à être signifiées et que le commandement de payer les causes du jugement rendu le 26 octobre 2009, qui a été délivré le 15 novembre 2012 à M. [C] [E], a interrompu la prescription.

Par ailleurs, Mme [O] [D] expose que l’acte de donation produit par M. [C] [E] démontre que seule la nue-propriété du bien litigieux a été transférée à Mme [N] [L] [E], M. [C] [E] ayant conservé l’usufruit jusqu’au jour de son décès. Mme [O] [D] fait valoir que M. [C] [E] se prévalant d’un droit d’usage était le seul à pouvoir conclure un bail puisque, dans un démembrement de propriété, le nu-propriétaire détient la propriété stricte mais non le droit d’usage. Mme [O] [D] ajoute que, lors de la signification du procès-verbal de la saisie-attribution pratiquée entre les mains de la société Eden paradise, titulaire d’un bail commercial, son dirigeant a confirmé que M. [C] [E] était le bailleur.

Dans ses conclusions d’intimé du 08 novembre 2022, le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) demande à la cour de :

‘A titre principal :

– DÉCLARER irrecevable l’appel interjeté par M. [C] [E] et Mme [N] [E], enregistré sous le numéro RG 22/00362 ;

– DÉCLARER caduque la déclaration d’appel n° 22100489 établie par M. [C] [E] et Mme [N] [E];

A titre subsidiaire :

– RADIER l’affaire enrôlée sous le numéro RG 22/00362 pour défaut d’exécution de la décision n°21/01108 déférée ;

A titre infiniment subsidiaire :

– CONFIRMER le jugement rendu par le juge de l’exécution du tribunal judicaire de Fort- de-France sous le numéro RG 21/01108 en toutes ses dispositions ;

– DÉBOUTER Mme [N] [E] et M. [C] [E] de l’ensemble de leurs demandes ;

En tout état de cause :

– CONDAMNER Mme [N] [E] et M. [C] [E] à verser au Fonds de Garantie la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– CONDAMNER Mme [N] [E] et M. [C] [E] aux dépens de la procédure.’

Le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) expose que le jugement rendu le 05 septembre 2022 par le juge de l’exécution a été notifié par le greffe le 13 septembre 2022 à M. [C] [E] et le 18 septembre 2022 à Mme [N] [L] [E], de sorte que les parties avaient respectivement jusqu’au 28 septembre et 03 octobre 2022 pour interjeter appel de la décision; or, la déclaration d’appel a été déposée le 05 octobre 2022. Il rappelle également qu’il avait demandé au conseiller de la mise en état de déclarer caduque la déclaration d’appel et qu’il l’avait sollicité aux fins de prononcer la radiation de l’affaire pour défaut d’exécution. Le FGTI ajoute que, à la date des saisies-attribution contestées, la prescription de l’action n’était pas acquise.

Par ailleurs, le FGTI expose qu’il est fondé à recouvrer la somme en principal de 35.000 euros, outre les frais de gestion, les intérêts de retard et les frais d’exécution. Il fait valoir également que, lors de la saisie-attribution pratiquée le 20 avril 2021, le locataire, à savoir la SARL Eden paradise, a déclaré à l’huissier de justice instrumentaire que le bailleur était M. [C] [E], de sorte que l’appelant est bien le propriétaire usufruitier du bien immobilier sur lequel porte la saisie-attribution.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 19 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, il sera fait expressément référence à la décision déférée à la cour et aux dernières conclusions déposées.

Dans une note en délibéré en date du 24 mars 2023, le conseiller près la cour d’appel de Fort-de-France a indiqué aux parties que M. [C] [E] avait formé appel du jugement rendu le 05 septembre 2022 par le juge de l’exécution près le tribunal judiciaire de Fort-de-France et qui lui avait été notifié le 13 septembre 2022, la déclaration d’appel ayant été enregistrée le 21 septembre 2022 au greffe de la cour d’appel sous le n° RG 22/00362, et que Mme [N] [L] [E] avait formé également appel de ce jugement rendu le 05 septembre 2022 par le juge de l’exécution près le tribunal judiciaire de Fort-de-France et qui lui avait été notifié le 18 octobre 2022, la déclaration d’appel ayant été enregistrée le 06 octobre 2022 au greffe de la cour d’appel sous le n° RG 22/00386 et ayant été signifiée à tous les intimés et notamment au Fonds de garantie, intimé non constitué.

Le conseiller près la cour d’appel de Fort-de-France a également avisé les parties que, dans le jugement susvisé du 05 septembre 2022, M. [C] [E] et Mme [N] [L] [E] avaient été déboutés de leurs demandes qu’ils avaient présentées de manière indivisible et avaient fait l’objet d’une condamnation in solidum au titre des frais irrépétibles et des dépens. Au regard des dispositions de l’article 367 du code de procédure civile, le conseiller près la cour d’appel de Fort-de-France a informé les parties qu’il apparaissait, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, que la jonction des affaires RG n° 22-00362 et 22-00386 fût ordonnée.

Le conseil de M. [C] [E] et Mme [N] [E] a répondu dans une note en date du 05 avril 2023 ne pas être opposés à la jonction des affaires RG 22-00362 et RG 22-00386.

L’affaire a été plaidée le 10 mars 2023. La décision a été mise en délibéré au 16 mai 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la jonction.

Dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, il y a lieu d’ordonner la jonction des affaires RG n° 22/00362 et 22/00386 et dire que l’affaire poursuivra sous le RG n° 22/00362.

Sur le paiement du droit de timbre.

Selon l’article 1635 bis P du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi 2014-1654 du 29 décembre 2014, applicable au litige, il est institué un droit d’un montant de 225 euros dû par les parties à l’instance d’appel lorsque la constitution d’avocat est obligatoire devant la cour d’appel. Le droit est acquitté par l’avocat postulant pour le compte de son client, soit par voie de timbres mobiles, soit par voie électronique. Il n’est pas dû par la partie bénéficiaire de l’aide juridictionnelle.

Selon l’article 963 du code de procédure civile, lorsque l’appel entre dans le champ d’application de l’article précité, les parties justifient, à peine d’irrecevabilité de l’appel ou des défenses, selon le cas, de l’acquittement du droit prévu à cet article.

La cour relève que, en application de l’article 16 du code de procédure civile, la partie concernée a été invitée à s’en expliquer par le magistrat chargé de la mise en état dans sa note en date du 17 octobre 2022.

La cour constate le défaut d’acquittement du droit prévu par l’article 1635 bis P du code général des impôts au jour des débats par Mme [N], [L] [E] et prononce en conséquence l’irrecevabilité de son appel (n° RG 22-00386).

Sur la signification de la déclaration d’appel.

Constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l’acte, le défaut de capacité d’ester en justice, le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit d’une personne morale, soit d’une personne atteinte d’une incapacité d’exercice, ainsi que le défaut de capacité ou de pouvoir des personnes assurant la représentation d’une partie en justice et ce par application des dispositions de l’article 117 du code de procédure civile. Seules affectent la validité d’un acte de procédure les irrégularités de fond limitativement énumérées par l’article 117 du code de procédure civile.

Mme [D] prétend que la signification de la déclaration d’appel, de l’avis d’orientation et des conclusions d’appel prises au nom de M. [C] [E] et de Mme [N] [E] est irrégulière, Mme [N] [E] n’ayant pas formé appel.

Or, la cour relève que la déclaration d’appel de Mme [N] [E] a été enregistrée le 06 octobre 2022 par le greffe de la cour d’appel de Fort-de-France, alors que la signification de la déclaration d’appel, de l’avis d’orientation et des conclusions d’appel a été effectuée le 07 octobre 2022.

Par ailleurs, la cour rappelle que M. [C] [E] a formé appel du jugement rendu le 05 septembre 2022 par le juge de l’exécution près le tribunal judiciaire de Fort-de-France et qui lui a été notifié le 13 septembre 2022, la déclaration d’appel ayant été enregistrée le 21 septembre 2022 au greffe de la cour d’appel sous le n° RG 22/00362.

En conséquence, l’appel formé par M. [C] [E] sera déclaré recevable.

Sur la prescription de l’action en recouvrement.

Conformément aux dispositions de l’article L.111-3 du code des procédures civiles d’exécution, les décisions des juridictions de l’ordre judiciaire lorsqu’elles ont force exécutoire constituent des titres exécutoires.

L’exécution des titres exécutoires peut être poursuivie pendant dix ans en application de l’article L. 111-4 du code des procédures civiles d’exécution.

Sur ce point, les parties ne font que reprendre devant la cour leurs moyens de première instance. En l’absence d’élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs qu’elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties pour constater que la prescription a bien été interrompue par la procédure d’appel, de sorte que le point de départ doit être fixé au 30 juin 2011, date à laquelle le jugement rendu contradictoirement le 26 octobre 2009 par le tribunal correctionnel de Fort-de-France et confirmé en toutes ses dispositions civiles par un arrêt de la cour d’appel de Fort-de-France a acquis la force exécutoire. Il en résulte que, à la date à laquelle la saisie-attribution a été pratiquée, soit le 20 avril 2021, la prescription décennale n’était pas acquise. Le jugement de première instance sera confirmé sur ce point.

La cour rappelle également que les décisions pénales rendues contradictoirement n’ont pas à être signifiées.

Enfin, la cour relève que l’arrêt du 30 juin 2011, ainsi qu’un commandement de payer, ont été signifiés à M. [C] [E] par exploit d’huissier en date du 15 novembre 2012.

Sur la régularité de la saisie-attribution.

Conformément aux dispositions de l’article L. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent.

M. [C] [E] prétend que la saisie-attribution pratiquée le 20 avril 2021 vise les loyers d’un bien immobilier qu’il n’occupe plus et dont il n’est plus propriétaire. Il explique que l’acte de donation en date du 05 juin 2003 portant sur le bien sis à [Localité 9] prévoyait une réserve du droit d’usage et d’habitation, le donateur et son conjoint ne pouvant céder ce droit ni consentir une location, même partielle, à peine de nullité des cessions, baux de location et même d’extinction de leur droit d’usage et d’habitation. M. [C] [E] fait valoir également que les époux [E] ne disposaient que d’un droit d’usage et d’habitation sur le bien litigieux dont ils n’étaient plus usufruitiers. Il ajoute que le bien litigieux dont les loyers sont saisis est sorti de son patrimoine, de sorte que Mme [N] [L] [E] en a aujourd’hui l’entière propriété dont les fruits qu’elle ne peut percevoir au titre d’une saisie-attribution qui ne la concerne pas.

Contrairement à ce que soutient M. [C] [E], il est stipulé dans l’acte de donation en date du 05 juin 2003 que le donateur (les époux [E]) fait donation au donataire ([N] [E]) de la nue-propriété du bien sis à [Localité 9] pour y réunir l’usufruit au jour de son décès. Il est également précisé dans cet acte notarié que le donataire est propriétaire des biens à compter de ce jour mais il n’en aura la jouissance qu’à l’extinction du droit d’usage et d’habitation ci-après réservé par le donateur à son profit.

Ainsi, le droit de percevoir les revenus d’un bien immobilier et donc les loyers appartient aux époux [E] en leur qualité d’usufruitier et non au nu-propriétaire. S’il apparaît à la lecture du paragraphe ‘Réserve du droit d’usage et d’habitation’ de l’acte de donation susvisé que M. [C] [E] s’est engagé à ne pas louer le bien, la seule sanction encourue est la nullité du bail, le donateur continuant à percevoir les loyers.

En l’espèce, lors de la saisie-attribution pratiquée le 20 avril 2021, le locataire, à savoir la SARL Eden Paradise, a déclaré à l’huissier instrumentaire que le bailleur était M. [C] [E].

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la procédure de saisie-attribution à exécution successive est régulière. Le jugement de première instance sera confirmé sur ce point.

Sur le montant de la saisie.

C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a retenu que la saisie-attribution à exécution successive est fondée en son montant à hauteur de 66.183,21 euros.

La cour relève également que le décompte produit par le Fonds de garantie (pièce n° 7) opère une distinction entre le principal, les frais de procédure, les frais de gestion et les intérêts qui sont détaillés par période, de sorte que la contestation de l’appelant portant sur le mode de calcul des intérêts est inopérante.

En conséquence, M. [C] [E] sera débouté de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 20 avril 2021. Le jugement de première instance sera confirmé sur ce point.

Par ailleurs, au regard de l’ancienneté de la créance, de son montant et de l’absence de versement effectué par M. [C] [E], il n’y a pas lieu de faire droit à la demande visant à voir déduire les loyers saisis depuis le 20 avril 2021 des sommes réclamées par le Fonds de garantie; pour les mêmes motifs, la demande de cantonnement de la saisie-attribution pratiquée le 20 avril 2021 sera rejetée. Le jugement de première instance sera confirmé sur ce point.

Sur l’abus de droit.

C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a retenu qu’aucun abus de saisie n’a été commis par le Fonds de garantie, et ce d’autant que l’auteur de l’infraction n’a jamais versé la moindre somme à la partie civile qui n’a à ce jour toujours pas été indemnisée de son entier préjudice.

En conséquence, M. [C] [E] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement de première instance sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires.

Les dispositions du jugement déféré sur les dépens et les frais irrépétibles seront confirmées.

Il sera alloué au titre des frais irrépétibles la somme de 1.000 euros au Fonds de garantie et la somme de 2.000 euros à Mme [O] [D].

Succombant, M. [C] [E] et Mme [N], [L] [E] serront condamnés aux dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

ORDONNE la jonction des affaires RG n° 22/00362 et 22/00386 ;

DIT que l’affaire se poursuivra sous le RG n° 22/00362 ;

DÉCLARE l’appel de Mme [N], [L] [E] irrecevable ;

CONFIRME le jugement rendu le 05 septembre 2022 dont appel dans toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs plus amples demandes ;

CONDAMNE M. [C] [E] et Mme [N], [L] [E] à payer au Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions la somme de 1.000€ (mille euros) sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [C] [E] et Mme [N], [L] [E] à payer à Mme [O] [D] la somme de 2.000€ (deux mille euros) sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [C] [E] et Mme [N], [L] [E] aux dépens de la présente instance.

Signé par Mme Nathalie RAMAGE, Présidente de Chambre et Mme Béatrice PIERRE-GABRIEL, Greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,

 


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