JG/ND
Numéro 23/2060
COUR D’APPEL DE PAU
2ème CH – Section 1
ARRÊT DU 15/06/2023
Dossier : N° RG 22/02072 – N° Portalis DBVV-V-B7G-IIX7
Nature affaire :
Autres demandes relatives à la saisie mobilière
Affaire :
S.A.R.L. MONDIAL AUTO64
C/
S.C.I. LES OLIVIERS
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 15 Juin 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
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APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 23 Mars 2023, devant :
Madame Joëlle GUIROY, magistrat chargé du rapport,
assistée de Madame SAYOUS, greffier présent à l’appel des causes,
Joëlle GUIROY, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente
Madame Joëlle GUIROY, Conseillère
Monsieur Marc MAGNON, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANTE :
S.A.R.L.U MONDIAL AUTO64
immatriculée au RCS de Bayonne sous le n° 882 734 395, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Emmanuelle LAGARDE, avocat au barreau de PAU
INTIMEE :
S.C.I. LES OLIVIERS
immatriculée au RCS de Bayonne sous le n° 823 126 495, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Leslie CHASSERIAUD, avocat au barreau de BAYONNE
sur appel de la décision
en date du 30 JUIN 2022
rendue par le JUGE DE L’EXECUTION DE BAYONNE
Exposé du litige et des prétentions des parties :
Par assignation du 21 décembre 2021, la SARL Mondial Auto64 a attrait la SCI Les Oliviers devant le Juge de l’exécution du Tribunal judiciaire de Bayonne, sur le fondement de l’article L. 412-3 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, le saisissant d’une demande de délais avant son expulsion suite au jugement en date du 22 novembre 2021 signifié le 3 décembre 2021.
Par jugement du 30 juin 2022, le Juge de l’exécution du Tribunal judiciaire de Bayonne a :
– débouté la SARL Mondial Auto 64 de ses demandes ;
– condamné la SARL Mondial Auto 64 à verser à la SCI Les Oliviers la somme de 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la SARL Mondial Auto 64 à assumer la charge des entiers dépens ;
– rappelé que les décisions du juge de l’exécution bénéficient de l’exécution provisoire de droit.
Par déclaration au greffe en date du 20 juillet 2022, la SARL Mondial Auto64 a interjeté appel du jugement.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 février 2023 et l’audience de plaidoirie a eu lieu le 23 mars 2023.
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Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 3 février 2023, la SARL Mondial Auto64 demande à la cour de :
Vu les articles L 412-3 et L. 412-4 du Code des procédures civiles d’exécution;
Vu les pièces du dossier ;
Rejetant toutes demandes, fins et conclusions contraires ;
– Juger recevable et bien fondé son appel ;
– Infirmer ledit jugement,
En conséquence, statuant à nouveau :
– lui accorder un délai de 2 ans lui permettant de trouver un local professionnel adapté avant de procéder à son expulsion ;
– dire que chacune des parties conservera à sa charge les frais et dépens de l’instance ;
– débouter la SCI Les Oliviers de ses demandes.
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Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 3 novembre 2022, la SCI Les Oliviers demande à la cour de :
Vu l’article L 412-3 et L 412-4 du Code des Procédures Civiles d’Exécution
– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
En conséquence,
– débouter la SARL Mondial Auto 64 de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.
Y ajoutant,
– condamner la SARL Mondial Auto 64 à lui verser la somme de 2.500,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens
Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l’espèce des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l’exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessus.
MOTIVATION :
A titre liminaire, la SCI Les Oliviers a soutenu dans ses conclusions adressées à la cour que l’appel de la SARL Mondial Auto64 serait irrecevable pour avoir été formé hors délai sans cependant produire, comme le souligne l’appelante, l’acte de signification du jugement entrepris.
Au dispositif de ses conclusions, la SCI Les Oliviers n’a pas formulé une telle prétention qui ne sera dès lors pas examinée en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile.
Sur le fond, la SARL Mondial Auto64 fait valoir qu’elle exerce une activité de commerce, d’entretien et de réparation de voitures et de véhicules automobiles légers dans le local professionnel sis [Adresse 2] à [Localité 3] dont elle a acquis le droit au bail par acte sous seing privé du 20 mars 2020 auprès de la SARL Erik’Auto.
Cependant, cette cession a été contestée par le bailleur commercial, la SCI Les Oliviers, qui, par acte du 24 mars 2021 l’a attrait devant le tribunal judiciaire de Bayonne afin de voir constater que ladite cession lui était inopposable et voir ordonner son expulsion.
Par jugement réputé contradictoire du 22 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Bayonne, statuant selon la procédure à jour fixe, a notamment :
– dit que la cession de droit au bail en date du 20 mars 2020 est irrégulière et inopposable au bailleur, la SCI Les Oliviers, motif pris que le bail interdisait la cession du droit au bail indépendamment du fonds et sans agrément du bailleur,
– ordonné l’expulsion de la SARL Mondial Auto 64, ainsi que celle de tous occupants de son chef et la libération des lieux ainsi que la remise des clefs, si besoin est avec le concours de la force publique,
La SARL Mondial Auto64 précise avoir fait appel de ce jugement le 1er janvier 2022 mais que, par ordonnance du 15 septembre 2022, le magistrat de la mise en état a prononcé la caducité de son appel.
Le 30 septembre 2022, elle a déposé une requête en déféré.
Dans ce contexte, la SARL Mondial Auto64 relate avoir saisi le juge de l’exécution de Bayonne afin d’obtenir des délais avant expulsion à raison des grandes difficultés auxquelles elle est confrontée pour se reloger dans des locaux adaptés à son activité.
Elle soutient que ceux-ci doivent lui permettre de stocker les véhicules qu’elle propose à la vente, disposer de deux ponts élévateurs pour la réparation des véhicules et quatre machines à pneus ainsi que de bureaux pour ses quatre salariés. En outre, ils doivent être situés dans son secteur géographique et être disponibles dans le délai imparti pour qu’elle quitte les lieux, la SCI Les Oliviers ayant entrepris l’exécution de la décision prononçant son expulsion en août 2022.
Elle soutient s’être toujours montrée de bonne foi dans ses relations avec le propriétaire des locaux et s’être vu refuser par lui les paiements des loyers qu’elle devait pour son occupation des lieux.
En réplique, la SCI Les Oliviers expose qu’elle s’est opposée à la cession du bail dont bénéficiait la SARL Erik’Auto et qu’elle a obtenu une décision de justice ordonnant l’expulsion de la SARL Mondial Auto64. Or, la demande de délai avant expulsion qui est formulée est destinée à remettre en cause le titre exécutoire dont elle bénéficie, ce qui n’entre pas dans les pouvoirs du juge de l’exécution.
En effet, elle affirme que la SARL Mondial Auto64 conteste le principe même de son expulsion et qu’elle n’a pas entrepris de démarches sérieuses pour retrouver un local commercial lui permettant de se reloger de telle sorte qu’elle ne peut exciper de difficultés à réorganiser son activité.
Ainsi, ce n’est que très tardivement qu’elle a entrepris des démarches auprès de l’agence CBRE IPC et elle a, ensuite, refusé les deux locaux disponibles qui lui étaient proposés alors qu’ils semblaient correspondre à son activité.
En outre, elle ne verse pas spontanément les indemnités d’occupation au paiement desquelles elle a été condamnée et a contesté les voies d’exécution qu’elle a mise en ‘uvre à cette fin.
Enfin, elle n’a pas saisi le premier président de la cour d’appel de Pau d’une demande de suspension de l’exécution provisoire attachée au jugement du 22 novembre 2021 comme elle s’en est pourtant prévalue auprès des services de la Préfecture pour obtenir la suspension de l’autorisation de recours à la force publique.
La SCI Les Oliviers ajoute qu’elle doit faire face au remboursement d’un prêt immobilier et à l’occupation de ses locaux par l’appelante dont le gérant adopte envers elle des comportements critiquables. Elle subit dès lors une atteinte à son droit de propriété et des répercussions financières.
En droit, selon l’article L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d’un titre à l’origine de l’occupation.
La charge de la preuve de l’impossibilité de se reloger dans des conditions normales pèse sur le demandeur aux délais.
En l’espèce, le premier juge a rejeté la demande de la SARL Mondial Auto64 au motif qu’elle ne produisait, pour justifier des difficultés rencontrées dans la recherche d’un nouveau local, qu’une copie écran du site « le bon coin » qui, à la recherche « annonces local commercial bureaux, boulangerie, restaurant, garage [Localité 3] » répondait « désolé nous n’avons pas de résultat ».
A hauteur d’appel, la SARL produit trois photographies destinées à attester de son activité de vente de véhicule d’occasion, des extraits des contrats de travail de 4 salariés, la capture d’écran du site « le bon coin » produite en première instance, un courriel du 13 octobre 2022 de validation d’inscription sur le site Cessionpme.com destiné à consulter ses annonces, un bon de visite du 9 août 2022 portant sur deux biens présentés ou visités et deux courriels échangés les 5 septembre et 13 octobre 2022 avec l’agence CBRE/IPC faisant état de l’absence de bien correspondant à son activité à proposer ainsi qu’une demande adressée le 14 juin 2022 à [E] [V] portant sur la disponibilité d’un local voisin à celui dont est propriétaire la SCI Les Oliviers accompagnée de la réitération, le 19 juillet 2022, de cette sollicitation.
Toutefois, les justificatifs de démarches auprès du site Cessionpme.com, de l’agence CBRE/IPC et de [E] [V] que produit la SARL Mondial Auto64 indiquent qu’elles sont toutes postérieures à la saisine du juge de l’exécution.
De plus, elle ne justifie pas des critères géographiques et techniques qui ont été les siens pour fixer le cadre de ses recherches.
Enfin, elle n’explique pas les raisons pour lesquelles elle a écarté les deux biens pour lesquels elle a produit les bons de visite et qui étaient pourtant situés sur la même commune que son lieu d’installation actuel et comportaient des surfaces utilisables plus importantes que celles proposées par le local loué par la SCI Les Oliviers.
En effet, l’examen du descriptif de ces biens, mis en rapport avec la consistance de celui qu’elle occupe telle qu’elle ressort du bail commercial signé avec la SARL Erik’Auto et remis au débat par la SCI Les Oliviers, ne permet pas d’objectiver les raisons pour lesquelles la SARL Mondial Auto64 ne les a pas retenus.
Dans ce contexte, la SARL Mondial Auto64 échoue à rapporter la preuve que son relogement ne peut avoir lieu dans des conditions normales et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a rejeté sa demande de délai, ceci d’autant qu’elle a bénéficié, de fait, d’un maintien dans les lieux à raison des procédures et recours qu’elle a engagés.
S’agissant des demandes accessoires portant sur les dépens et les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, le jugement déféré sera confirmé compte tenu de la solution du litige.
A hauteur d’appel, la SARL Mondial Auto64, qui succombe en l’intégralité de ses prétentions, sera condamnée aux dépens conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
En revanche, eu égard à la situation des parties et à leur positionnement respectif, elle sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens et il sera fait droit la demande de la SCI Les Oliviers à hauteur de la somme de 1000 euros.
PAR CES MOTIFS
la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement du 30 juin 2022 du Juge de l’exécution du Tribunal judiciaire de Bayonne dans la limite de la dévolution opérée,
Déboute la SARL Mondial Auto64 du surplus de ses demandes ;
Condamne la SARL Mondial Auto64 aux dépens ;
Condamne la SARL Mondial Auto64 à verser à la SCI Les Oliviers la somme de 1.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Joëlle GUIROY, conseillère, suite à l’empêchement de Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.
La Greffière La Présidente