Saisine du juge de l’exécution : 13 juin 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04592

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Saisine du juge de l’exécution : 13 juin 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04592

N° RG 21/04592 – N° Portalis DBVM-V-B7F-LDCC

C6

N° Minute :

copie certifiée conforme délivrée

aux avocats le :

Copie Exécutoire délivrée

le :

aux parties (notifiée par LRAR)

aux avocats

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES

ARRET DU MARDI 13 JUIN 2023

APPEL

Jugement au fond, origine juge aux affaires familiales de Vienne, décision attaquée en date du 26 août 2021, enregistrée sous le n° 14/00727 suivant déclaration d’appel du 28 octobre 2021

APPELANTE :

Mme [A] [S] divorcée [U]

née le 4 Décembre 1962 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Erick ZENOU de la SELARL CABINET ERICK ZENOU AVOCATS ET ASSOCIES, avocat au barreau de VIENNE, substituée par Me Florence GUERAUD PINET, avocat au barreau de VIENNE

INTIME :

M. [W] [M] [U]

né le 23 Octobre 1960 à [Localité 5] (18)

de nationalité Française

Chez Mme [J] [K] – [Adresse 4]

[Localité 1]

représenté par Me Cédric TEIXEIRA de la SELARL CABINET GRABARCZYK, avocat au barreau de VIENNE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Mme Anne BARRUOL, Présidente,

Mme Martine RIVIERE, Conseillère,

M. Philippe GREINER, Conseiller honoraire,

DEBATS :

A l’audience publique du 25 avril 2023,M. Philippe Greiner, conseiller, chargé du rapport, assisté de Amélia Thuillot, greffière a entendu les avocats en leurs conclusions, les parties ne s’y étant pas opposées, conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile. Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [A] [S] et M. [W] [U] ont divorcé aux termes d’un jugement du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Vienne du 11 mars 1998.

Ils ont ensuite vécu en concubinage jusqu’ en 2011 faisant l’acquisition le 8 janvier 2004 d’un tènement immobilier situé à [Localité 2] au prix de 195 000 euros.

Vu l’assignation délivrée le 15 mai 2014 à M. [U] par Mme [S] sur le fondement des articles 1360 et suivants du code civil et des articles 1578 et suivants du code civil,

Vu le jugement du 26 août 2015, du tribunal de grande instance de Vienne, ayant ordonné l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage, désigné Maître [G] [C], notaire, à cet effet et condamné M. [U] au versement d’une indemnité d’occupation du 01/07/2011 au 10/02/2014 d’un montant mensuel de 800 euros ;

Vu l’arrêt de la cour d’appel de Grenoble du 20 juin 2017, confirmant le jugement, hormis sur l’indemnité d’occupation, les demandes à ce titre étant rejetées ;

Vu l’ordonnance du Président du tribunal de grande instance de Vienne, statuant en référé le 26 avril 2018, autorisant M. [U] à vendre le bien indivis à M. [E] au prix de 165.000 euros, confirmée par arrêt de la cour d’appel de Grenoble du 12 décembre 2018 ;

Vu l’ordonnance du Président du tribunal de grande instance de Vienne, statuant en référé le 16 mai 2018,

Vu le jugement du 4 juin 2019 du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Vienne adjugeant le bien indivis à M. [N], au prix de 96.500 euros ;

Par jugement contradictoire du 26 août 2021, le juge aux affaires familiales de Vienne a principalement :

– désigné Maître [I] [G]-[C], notaire à [Localité 8] pour procéder aux opérations de partage conformément à ce qui a été tranché par le jugement, avec pour mission de :

*convoquer les parties,

*demander la communication de tous documents utiles à l’accomplissement de sa mission,

*visiter le bien immobilier, le décrire sommairement et l’évaluer en détaillant les critères essentiels à son évaluation,

*indiquer la valeur de mise à prix de ce bien immobilier pour une vente éventuelle sur licitation,

*estimer le montant de l’indemnité d’occupation et dresser un état liquidatif, établissant le compte entre co-indivisaires et la masse partageable,

– dit que la provision sera à la seule charge de Mme [S],

– commis le juge désigné à cet effet par ordonnance du Président du tribunal judiciaire de Vienne, pour surveiller les opérations de partage,

– condamné Mme [S] à payer à M. [U] 40 050 euros (32 800 euros + 7 250 euros) au titre de l’indemnité d’occupation,

– condamné Mme [S] à payer à M. [U] 88 250 euros à titre de dommages et intérêts,

– condamné Mme [S] à payer à M. [U] 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [S] aux entiers dépens.

Le 28 octobre 2021, Mme [S] a interjeté appel du jugement rendu le 26 août 2021 concernant le notaire désigné pour procéder aux opérations de partage, la provision à sa charge, le versement de la somme de 45 050 euros à M. [U] au titre de l’indemnité d’occupation et les sommes à verser à M. [U] au titre des dommages et intérêts, de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 11 octobre 2022, Mme [S] demande  :

– d’infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a désigné Maître [G] aux frais avancés de Mme [S],

– statuant à nouveau, à titre principal dire n’y avoir lieu à désignation en l’absence d’actif, le bien ayant été vendu aux enchères, à titre subsidiaire aux frais partagés,

– infirmer le jugement en ce qu’il a condamné Mme [S] à payer à M. [U] 40 050 euros d’indemnité d’occupation,

-statuant derechef débouter M. [U] de cette demande d’indemnité d’occupation,

– infirmer le jugement en ce qu’il a condamné Mme [S] à payer à M. [U] 88 250 euros de dommages et intérêts,

– statuant derechef, débouter M. [U] de cette demande en l’absence de faute de Mme [S] et de son propre comportement fautif,

– condamner M. [U] à payer à Mme [S] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Zenou & Associés, Avocat sur son affirmation de droit.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 26 décembre 2022, M. [U] demande de :

– confirmer le jugement rendu par le juge aux affaires familiales de Vienne le 26 août 2021,

– condamner Mme [S] au paiement de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner aux entiers dépens d’appel.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application de l’article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’indemnité d’occupation

En application de l’article 815-9 aliéna 3 du code civil, l’indivisaire est redevable d’une indemnité lorsqu’il use ou jouit privativement de la chose indivise, c’est à dire lorsque son occupation empêche les autres indivisaires de jouir du bien indivis.

Par arrêt du 20/06/2017, la cour d’appel de Grenoble a, pour débouter M. [U] d’une demande d’indemnité d’occupation à l’encontre de Mme [S], considéré que son utilisation des lieux à partir du 10/02/2014 n’était pas privative, M. [U] ayant continué à venir occasionnellement dans le bien indivis, notamment en décembre 2015.

Dès lors, seule la période postérieure peut donner lieu à indemnité, c’est à dire du 1er janvier 2016 jusqu’ à la vente du bien, le 04/06/2019.

Le bâtiment a une superficie d’environ 600 m² et est constitué de 4 parties, un grand appartement, deux petits, et un local à usage de bureaux.

Le 15/05/2017, un constat des lieux a été dressé par Maître [B] [L], huissier de justice. Il en ressort que seul un appartement était occupé par M. [D] [H]. Si des effets personnels de Mme [S] se trouvaient dans le placard d’une chambre, celle-ci n’était pas utilisable (matelas sur le sol, carrelage de la salle de bains taché par des crottes de souris), la cuisine ne disposant pas d’appareils électro-ménagers branchés, l’ensemble des pièces étant sale et encombré d’objets divers.

Par ailleurs, le compagnon d’alors de Mme [S], M. [F], atteste (pièce appelante n° 7) qu’il a vécu avec cette dernière à [Localité 7] jusqu’à fin 2016, et à [Localité 6] jusqu’à fin 2017, ces dires étant confirmés par Mme [Y] (pièce appelante n° 8).

En revanche, un nouveau constat a été dressé le 30/05/2018. A cette occasion, Mme [S] a déclaré à l’huissier de justice qu’elle demeurait dans les lieux indivis avec sa fille et son fils, qui y a son activité et qu’elle y reçoit les livraisons pour le compte de la société de son ami. Les constatations de l’huissier confirment ces dires.

En outre, l’huissier ajoute que Mme [S] lui a précisé qu’un locataire venait de quitter les lieux, laissant un appartement en mauvais état.

Enfin, la boîte aux lettres porte les noms de Mme [S], de M. [F], et de M. [U], ce qui confirme l’occupation des lieux par l’appelante.

Mme [S] est ainsi redevable d’une indemnité d’occupation pour l’ensemble des lieux de janvier 2018 à mai 2019.

Compte tenu de la surface des lieux, c’est à juste titre que le premier juge a fixé, en tenant compte d’un abattement pour précarité, à 800 euros mensuels l’indemnité due pour l’habitation principale et à 250 euros mensuels pour l’appartement loué.

En conséquence, l’indemnité due par l’appelante à l’indivision sera fixée à (17 mois x 1.050 euros) soit 17.850 euros, le jugement déféré étant réformé de ce chef.

Sur l’inertie dolosive de Mme [S]

Le bien litigieux a été acquis au prix de 195.000 euros le 08/01/2004.

Le 15/05/2014, Mme [S] a assigné M. [U] aux fins de licitation de la maison sur une mise à prix de 130.000 euros.

Le 27/06/2016, les consorts [S]/[U] ont donné mandat de vente de l’ensemble à deux agences immobilières au prix de 152.250 euros.

Dans son rapport du 12/04/2017, le notaire commis indique que deux offres d’un montant de 130.000 et 135.000 euros sont restées sans suite.

Par la suite, de nombreuses personnes ont fait part de leur intérêt pour acquérir la propriété. Toutefois, seule une offre est allée à son terme, celle de M. [E] du 10/11/2017, puisque celui-ci a obtenu un prêt et la garantie d’un organisme de caution, au prix de 150.000 euros.

Or, si cette vente n’a pu aller à son terme, c’est en raison de l’opposition de Mme [S].

Certes, M. [U] s’est vu autorisé à la passer seul, par ordonnance en la forme des référés du président du tribunal de grande instance de Vienne, du 26/04/2018. Néanmoins, Mme [S] en a interjeté appel, au motif que le bien devrait être plutôt vendu soit à son compagnon d’alors, M. [F], soit à ses enfants.

Toutefois, aucune offre sérieuse, appuyée sur un octroi de prêt, n’a été faite par ces derniers.

Le comportement de Mme [S] s’avère ainsi fautif, car, alors qu’elle avait sollicité la vente du bien depuis plusieurs années déjà, elle a fait en sorte que toutes les tentatives de vente échouent, et ce alors qu’un commandement de saisie aux fins de vente aux enchères avait été délivré par le Crédit Agricole le 22/07/2018 avec une mise à prix de 90.000 euros.

Là encore, Mme [S] a fait preuve d’ une attitude négative. Mme [O] [P], venue visiter les lieux le 02/05/2019, atteste ainsi que Mme [S] lui avait déclaré à cette occasion ‘qu’elle n’avait nullement l’intention de partir et qu’il faudrait entamer une longue procédure d’expulsion en nous souhaitant bon courage car elle ne se laisserait pas faire’.

C’est en raison du comportement de l’appelante qui a découragé tous les acquéreurs potentiels, que le bien a finalement été adjugé au nouveau partenaire de Mme [S], M. [N], au prix de 96.500 euros.

Cette attitude fautive est directement à l’origine d’un prix de cession inférieur à celui qui aurait été perçu, par une vente amiable à M. [E].

Le préjudice subi par l’indivision est de (150.000€ – 96.500 €) soit 53.500 euros. Mme [S] sera condamnée à rapporter à l’indivision cette somme, le jugement entrepris étant infirmé sur ce point.

Sur la désignation d’un notaire pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l’indivision

Quand bien même, suite à la vente du bien, seul un partage en numéraire reste à opérer, pour établir les comptes définitifs, l’intervention d’un notaire reste nécessaire.

Dans ces conditions, la demande de dessaisissement de Maître [G] [C] formée par l’appelante sera rejetée.

Sur les frais irrépétibles

Compte tenu du sort partagé du litige, il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

En revanche, Mme [S], qui succombe sur le principe de son appel, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne l’indemnité d’occupation, les dommages-intérêts et les frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que Mme [S] est redevable envers l’indivision [S]/[U] d’une indemnité d’occupation pour la période de janvier 2018 à mai 2019 ;

La condamne à rapporter à l’indivision [S]/[U] la somme de 17.850 euros;

Déclare Mme [S] responsable du dommage subi par l’indivision [S]/[U] au titre de la vente du bien indivis ;

La condamne à rapporter à l’indivision [S]/[U] la somme de 53.500 euros;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés par M. [U] en première instance et en cause d’appel ;

Condamne Mme [S] aux dépens de première instance et d’appel ;

PRONONCÉ par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile .

SIGNÉ par la présidente, Anne Barruol, et par la greffière, Abla Amari, présente lors de la mise à disposition, à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La greffière La Présidente

 


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