RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
R.G. : J.E.X. N° RG 22/01618 – N° Portalis DBVS-V-B7G-FYNK
Minute n° 23/00213
[R]
C/
S.C.P. DOMINIQUE MUGNIER-CLAIRE MOULIN DEVENUE SELARL A C TI HUISSIERS
COUR D’APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE
J.E.X.
ARRÊT DU 13 JUILLET 2023
APPELANTE :
Madame [M] [R]
[Adresse 3]
[Localité 6]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 2022/4346 du 26/01/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)
Représentée par Me Thomas ROULLEAUX, avocat au barreau de METZ
INTIMÉE :
S.C.P. DOMINIQUE MUGNIER-CLAIRE MOULIN devenue SELARL AC TI HUISSIERS en la personne de son gérant
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés devant Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries.
A l’issue des débats, les parties ont été informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
A cette date le délibéré a été prorogé au 13 juillet 2023 et les parties en ont été avisées.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
PRÉSIDENT : Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : Monsieur MICHEL, Conseiller
Monsieur KOEHL, Conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame CHU KOYE HO, Greffier
ARRÊT :
Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Madame PELSER, Greffier placé à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
La SA Société Générale a fait signifier à Mme [M] [R] :
– en vertu d’un acte de prêt notarié du 11 juin 2007 :
‘ par acte du 1er mars 2011 remis à étude, un commandement de payer aux fins de saisie-vente portant sur la somme de 102.009,61 euros
‘ par acte du 14 avril 2011 remis à étude et annulant le précédent, un commandement de payer aux fins de saisie-vente portant sur la somme de 119.101,71 euros
‘ un procès-verbal de carence du 20 avril 2011
‘ par acte du 19 mars 2013 signifié à personne, un commandement de payer aux fins de saisie-vente pour la somme de 125.990,50 euros
‘ un acte de dénonciation d’un procès-verbal de saisie-attribution entre les mains de la SCP de notaires Litaize et Gauthier en date du 19 avril 2013 pour paiement de la somme de 101.190,70 en principal avec intérêts et frais, signifié le 22 avril 2013 à étude’
‘ un certificat de non contestation du 30 mai 2013 signifié à étude.
– en vertu d’un acte de prêt notarié du 21 juillet 2007 :
‘ par acte du 1er mars 2011 remis à étude, un commandement de payer aux fins de saisie-vente portant sur la somme de 78.910,01 euros
‘ par acte du 14 avril 2011 remis à étude et annulant le précédent, un commandement de payer aux fins de saisie-vente portant sur la somme de 93.122,42 euros
‘ un procès-verbal de carence du 20 avril 2011
‘ par acte du 19 mars 2013 signifié à personne, un commandement de payer aux fins de saisie-vente pour la somme de 98.769,32 euros
‘ un acte de dénonciation d’un procès-verbal de saisie-attribution entre les mains de la SCP de notaires Litaize et Gauthier en date du 19 avril 2013 pour paiement de la somme de 78.212,09 euros en principal avec intérêts et frais, signifié le 22 avril 2013 à étude’
‘ un certificat de non contestation du 30 mai 2013 signifié à étude.
– en vertu d’un acte de prêt notarié du 11 janvier 2008 :
‘ par acte du 1er mars 2011 remis à étude, un commandement de payer aux fins de saisie-vente portant sur la somme de 248.333,95 euros
‘ par acte du 14 avril 2011 remis à étude et annulant le précédent, un commandement de payer aux fins de saisie-vente portant sur la somme de 291.915,02 euros
‘ un procès-verbal de carence du 20 avril 2011
‘ par acte du 19 mars 2013 signifié à personne, un commandement de payer aux fins de saisie-vente pour la somme de 158.823,14 euros
‘ un acte de dénonciation d’un procès-verbal de saisie-attribution entre les mains de la SCP de notaires Litaize et Gauthier en date du 19 avril 2013 pour paiement de la somme de 135.069,61 euros en principal avec intérêts et frais, signifié le 22 avril 2013 à étude’
‘ un certificat de non contestation du 30 mai 2013 signifié à étude.
Par acte d’huissier du 21 août 2019, Mme [R] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Metz, qui s’est déclaré incompétent au profit du juge de l’exécution par jugement du 16 septembre 2021, la SCP Dominique Munier-Claire Moulin aux fins de voir prononcer la nullité des cinq commandements de payer aux fins de saisie-vente, des procès-verbaux de carence, des actes de saisie-attribution et du certificat de non contestation, et condamner la SCP à lui payer la somme de 316.729,34 euros au titre des sommes injustement saisies, la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice moral et une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La SCP Dominique Munier-Claire Moulin a conclu à l’irrecevabilité des demandes en raison de la prescription, subsidiairement à leur rejet et a sollicité une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 10 juin 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Metz a :
– déclaré prescrite l’action de Mme [R] visant à voir annuler cinq commandements aux fins de saisie-vente délivrés les 1er mars 2011, 14 avril 2011 et 19 mars 2013 et celle visant à voir engager la responsabilité de la SCP Dominique Munier-Claire Moulin, huissiers de justice au motif des irrégularités les affectant
– rejeté l’exception de prescription de la demande en nullité du certificat de non-contestation signifié le 30 mai 2013 et celle visant à voir engager la responsabilité de la SCP Dominique Munier-Claire Moulin au motif de son irrégularité
– rejeté l’exception de prescription de la demande en nullité des procès-verbaux de carence établis le 20 avril 2011 et des procès-verbaux de saisie-attribution du 19 avril 2013
– débouté Mme [R] de ses demandes en nullité du certificat de non-contestation signifié le 30 mai 2013 et des saisies-attribution du 19 avril 2013
– débouté Mme [R] de sa demande de dommages-intérêts à l’encontre de la SCP Dominique Munier-Claire Moulin
– condamné Mme [R] à régler à la SCP Dominique Munier-Claire Munier devenue la SELARL Acti Huissiers la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens
– débouté les parties de toute autre demande.
Par déclaration d’appel déposée au greffe de la cour le 16 juin 2022, Mme [R] a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions.
Aux termes de ses dernières conclusions du 22 mars 2023, elle demande à la cour d’infirmer le jugement et de :
– prononcer la nullité des cinq commandements de payer aux fins de saisie-vente, des procès-verbaux de carence, des actes de saisie-attribution, des certificats de non contestation
– juger que la SCP Dominique Munier-Claire Moulin, devenue SELARL Acti Huissiers a engagé sa responsabilité civile professionnelle à son égard et en conséquence la condamner à lui payer la somme de 316.529,34 euros au titre des sommes injustement saisies
– condamner la SCP Dominique Munier-Claire Moulin, devenue SELARL Acti Huissiers à lui payer la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel
– en tout état de cause, condamner la SCP Dominique Munier-Claire Moulin, devenue SELARL Acti Huissiers, aux dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’au paiement de la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’appelante expose qu’elle a contracté plusieurs prêts auprès de la Société Générale aux fins de financer l’acquisition de biens immobilier et que suite à des incidents de paiement le 7 décembre 2008, diverses procédures de saisie ont été diligentées à son encontre par la SCP d’huissiers de justice Dominique Munier-Claire Moulin. Elle prétend que la nullité des commandements de payer aux fins de saisie-vente est encourue en ce qu’ils ont été délivrés par un clerc assermenté alors que les actes d’exécution forcée sont de la compétence exclusive des huissiers de justice conformément à l’article L. 112-1 du code des procédures civiles d’exécution, que du fait de la nullité, la prescription n’a pas commencé à courir et qu’elle est recevable en son action. Elle fait valoir que les commandements de payer des 14 avril 2011, qui ont remplacé ceux du 1er mars 2011, encourent également la nullité en ce que l’huissier n’a pas effectué les vérifications suffisantes justifiant que les actes n’ont pas été signifiés à personne, la seule mention du nom du destinataire sur la boîte aux lettres étant insuffisante à établir, en l’absence d’autres diligences, la réalité du domicile du destinataire. Elle ajoute que contrairement aux énonciations de l’acte, l’huissier n’a pas pu laisser à son domicile l’avis de passage, qu’ainsi qu’il résulte des attestations précisant qu’elle ne disposait pas de boîtes aux lettres à son nom au [Adresse 1] et que l’accès à l’immeuble était impossible, que faute pour elle d’avoir eu connaissance des commandements de payer, la prescription n’a pas commencé à courir et les actions en nullité et en responsabilité sont recevables.
Sur la nullité des procès-verbaux de carence, l’appelante indique qu’ils n’ont pas accompagnés d’actes de signification et qu’elle n’en a jamais eu connaissance, de sorte qu’ils n’ont pu produire effet.
Sur les procès-verbaux de saisie-attribution du 22 avril 2013, elle soutient qu’ils sont également nuls en ce qu’ils mentionnent un domicile [Adresse 1] alors qu’elle justifie avoir
déménagé au [Adresse 2] à [Localité 6] le 28 février 2013, et en ce qu’ils visent un titre exécutoire sans autre précision, ces imprécisions lui causant grief dans la mesure où elle ne lui permettent pas de vérifier la réalité et l’étendue de la dette et la privent de la possibilité de faire des offres de paiement ou exercer les voies de recours utiles. Elle invoque la nullité des dénonciations de saisie-attribution qui n’ont pas été délivrées à personne et dont elle n’a jamais eu connaissance, ajoutant que les procès-verbaux de dénonciation ne sont pas signés par l’huissier de justice.
Elle soutient que ces manquements sont constitutifs d’une faute professionnelle de nature à engager la responsabilité civile professionnelle des huissiers de justice, qu’en raison de ces fautes professionnelles, elle a perdu une chance de pouvoir contester les actes litigieux et exercer un recours qui aurait pu faire échec aux procédures de saisie pour le recouvrement de la somme globale de 316.729,34 euros et qu’il existe un lien de causalité certain entre les fautes commises par l’intimée et le préjudice subi. Elle ajoute que la nullité qui frappe les différents actes d’exécution les prive rétroactivement de leur effet interruptif de prescription, que la créance de la banque qui a prononcé la déchéance des prêts litigieux le 7 juin 2009, était prescrite par application des dispositions de L.137-2 du code de la consommation, devenu L.218-2, ce que ne pouvait ignorer la SCP Dominique Munier-Claire Moulin dont la responsabilité se trouve d’autant plus engagée.
Aux termes de ses dernières conclusions du 20 mars 2023, la SCP Dominique Munier-Claire Moulin, devenue SELARL Acti Huissiers, demande à la cour de rejeter l’appel et les demandes de Mme [R], confirmer le jugement en toutes ses dispositions et condamner l’appelante aux dépens et au paiement d’une indemnité de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle rappelle que les actes litigieux d’exécution forcée se rapportent à des actes notariés exécutoires portant sur des prêts immobiliers. Sur la nullité des commandements de payer aux fins de saisie-vente, elle expose qu’en l’absence de toute précision concernant les commandements dont la nullité est soutenue, l’objet de la saisine de la cour n’est pas déterminé, que le moyen soulevé par l’appelante au visa de l’article L.112-1 du code des procédures civiles d’exécution n’est pas fondé, étant rappelé que les commandements de payer aux fins de saisie-vente ne constituent pas un acte d’exécution forcée mais un préalable obligatoire à la saisie-vente elle-même, de sorte que celle-ci peut être signifiée par un clerc assermenté, et qu’en tout état de cause, la demande est prescrite ainsi que l’a exactement retenu le premier juge, les actes des 19 mars 2013 ayant été signifiés à la personne de Mme [R], [Adresse 1]. Elle rappelle que les mentions de l’huissier valent jusqu’à inscription de faux et conteste la valeur probante de l’attestation de Mme [B], non conforme aux dispositions du code de procédure civile et son interprétation.
Sur les procès-verbaux de saisie-attribution du 22 avril 2013, l’intimée soutient que l’absence de signature de l’huissier constitue une nullité de forme qui requiert la preuve d’un grief, que les actes de signification indiquent que le nom de Mme [R] figure sur sa boîte aux lettres attestant de son domicile et que c’est de mauvaise foi que l’appelante soutient qu’elle ne résidait plus au [Adresse 1] au jour de la saisie-attribution alors qu’une dénonciation de saisie-attribution a été faite à cette adresse le 18 avril 2013 à sa personne, que les procès-verbaux de saisie-attribution mentionnent la nature et la date de l’acte en vertu duquel l’exécution est poursuivie avec le montant dû en principal, intérêts et frais de procédure, de sorte que la débitrice était parfaitement en mesure d’effectuer une offre de paiement.
Sur la nullité des procès-verbaux de carence, elle fait valoir que l’appelante doit rapporter la preuve des irrégularités qu’elle invoque, qu’elle a produit des actes incomplets en enlevant les pièces annexes et que le premier juge a exactement considéré qu’il n’était pas en mesure de s’assurer de la régularité des significations. Elle ajoute que le procès-verbal de carence dressé lorsqu’aucun bien n’est susceptible d’être saisi, par application de l’article R. 221-14 du code des procédures civiles d’exécution, n’a pas à être signifié de sorte que le moyen est sans emport.
En tout état de cause, l’intimée soutient que Mme [R] n’a subi aucun préjudice, alors qu’elle ne conteste pas la réalité des créances et n’a jamais saisi le juge de l’exécution d’une quelconque contestation de l’ensemble des mesures d’exécution, ni effectué de démarche pour voir déclarer prescrite sa créance, que la cour ne peut dire que la créance de la banque serait prescrite sans que celle-ci, qui dispose d’un droit propre à se défendre contre tout moyen de prescription, soit appelée à l’instance et que le cas échéant, l’huissier aurait engagé sa responsabilité à l’égard de sa mandante mais en aucun cas à l’égard de l’appelante.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 avril 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la prescription
Selon l’article 2224 du code civil, les actions mobilières ou personnelles se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
S’agissant des commandements de payer aux fins de saisie-vente du 19 avril 2013, il ressort des pièces qu’ils ont été signifiés à la personne de Mme [R] à son domicile situé [Adresse 1], de sorte que celle-ci était en mesure, dès cette date, de dénoncer les irrégularités dont elle entend se prévaloir dans le cadre de la présente procédure.
Etant rappelé que les mentions relatives aux diligences que l’huissier indique avoir accomplies valent jusqu’à inscription de faux en vertu de l’article 1317 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, les allégations de l’appelante quant au fait qu’elle avait déménagé à la date de l’acte sont sans emport et le jugement sera confirmé en ce qu’il a déclaré irrecevable la contestation élevée par Mme [R] à l’encontre des commandements de payer du 19 avril 2013 ainsi que son action en responsabilité contre l’huissier instrumentaire, introduite après acquisition de la prescription par assignation du 21 août 2019.
Concernant les commandements de payer aux fins de saisie-vente du 14 avril 2011 annulant et remplaçant ceux du 1er mars 2011, ils ont été signifiés par dépôt à étude au domicile de Mme [R] situé [Adresse 1], avec la mention selon laquelle la signification à personne est impossible en raison de l’absence de l’intéressée et que la certitude du domicile est caractérisée par le nom de Mme [R] sur la boîte aux lettres et sur la sonnette.
Si la mention relative au fait que le nom du destinataire figure sur la boîte aux lettres et sur la sonnette est insuffisante à caractériser les diligences requises par l’article 656 du code de procédure civile pour s’assurer de la réalité du domicile du destinataire, l’appelante, qui ne conteste pas qu’elle résidait bien au [Adresse 1] à la date du 14 avril 2011, n’invoque aucun grief en lien avec la nullité de forme relevée, le seul fait qu’elle allègue n’avoir pas eu connaissance de l’acte ne suffisant pas à caractériser le préjudice résultant de l’irrégularité, de sorte qu’il n’y a pas lieu de prononcer la nullité des actes de signification. Il sera par ailleurs rappelé que les mentions de l’acte relatives au dépôt de l’avis et à l’envoi de la copie de l’acte par lettre simple, que l’huissier indique avoir accomplies, valent jusqu’à inscription de faux, de sorte que sont sans emport les allégations de l’appelante concernant l’absence de boîte aux lettres à son nom ou la défectuosité du système Vigik permettant l’accès aux boîtes aux lettres. Il s’ensuit qu’elle était en mesure, dès la remise de l’acte, d’avoir connaissance des commandements de payer et des irrégularités qu’elle invoque, de sorte que son action en nullité des actes et en responsabilité en découlant est prescrite pour avoir été introduite le 21 août 2019 après l’expiration du délai quinquennal.
En conséquence le jugement est confirmé en ce qu’il a déclaré prescrites l’action en nullité des cinq commandement de payer aux fins de saisie-vente délivrés les 1er mars 2011, 14 avril 2011 et 19 mars 2013 et l’action en responsabilité en découlant.
Pour le reste, l’intimée ne formant pas d’appel incident sur le rejet de l’exception de prescription des demandes de nullité des procès-verbaux de carence du 20 avril 2011, des procès-verbaux de saisie-attribution du 19 avril 2013 et du certificat de non-contestation du 30 mai 2013, le jugement sera également confirmé sur ces points.
Sur la nullité des actes de procédure
La nullité des actes de procédure pour vice de forme est régie par les articles 112 et suivants du code de procédure civile. Selon l’article 114, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public, et la nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
S’agissant des procès-verbaux de carence établis par l’huissier de justice aux termes de l’article R. 221-14 du code des procédures civiles d’exécution lorsqu’aucun bien n’est susceptible d’être saisi ou si aucun bien n’a manifestement de valeur marchande, il est relevé que Mme [R] produit (pièces 12 à 14) uniquement la première page de trois actes intitulés «’procès-verbal de carence’» aux fins de signification des procès-verbaux de saisie-vente en date du 20 avril 2011 en vertu des actes notariés exécutoires des 11 juin 2007, 21 juillet 2007 et 11 janvier 2008, en omettant de joindre les pages suivantes concernant les modalités de signification de ces actes. Le premier juge en a exactement déduit que faute de rapporter la preuve de l’irrégularité alléguée de ces actes, Mme [R] devait être déboutée de sa demande de nullité.
Il résulte des pièces produites aux débats que suivant procès-verbaux dressés le 19 avril 2013, la SA Société Générale a fait pratiquer, le 19 avril 2013, entre les mains de la SCP de notaires Litaize et Gauthier, des mesures de saisie-attribution des sommes dues par Mme [R], soit :
‘ au titre de l’acte notarié exécutoire du 11 juin 2007, les sommes de 101.190,70 euros en principal, 16.884,71 euros au titre des intérêts au taux contractuel de 4,41 % jusqu’au 15 mars 2013, 7.083,35 euros au titre de l’indemnité forfaitaire, 440,14 euros au titre des intérêts courus au 19 avril 2013, outre les frais
‘ au titre de l’acte notarié exécutoire du 21 juillet 2007, les sommes de 78.212,09 euros en principal, 14.355,29 euros au titre des intérêts au taux contractuel de 4,85 % jusqu’au 15 mars 2013, 5.474,85 euros au titre de l’indemnité forfaitaire, 374,13 euros au titre des intérêts courus au 19 avril 2013, outre les frais
‘ au titre de l’acte notarié exécutoire du 11 janvier 2008, les sommes de 135,069,61 euros en principal, 5.305,46 euros au titre des intérêts au taux de 4,86 % jusqu’au 15 mars 2013, 17.276,62 euros au titre de l’indemnité forfaitaire, 647,45 euros au titre des intérêts courus au 19 avril 2013, outre les frais.
Il sera rappelé qu’aux termes de l’article L. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir paiement, saisir entre les mains de tiers, les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent. L’article R. 211-1 précise que le créancier procède à la saisie par acte d’huissier de justice contenant, à peine de nullité, notamment l’énonciation du titre exécutoire en vertu duquel la saisie est pratiquée et le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus, majorés d’une provision pour les intérêts à échoir dans le délai d’un mois prévu pour élever une contestation, l’omission de ces formalités constituant une nullité de forme subordonnée à la preuve d’un grief.
En l’espèce, il résulte de ce qui précède que les procès-verbaux de saisie-attribution précisent la nature et la date des titres exécutoires en vertu desquels l’exécution est poursuivie et mentionnent les montants dus en principal, frais et intérêts échus ainsi que la provision pour les intérêts à échoir, permettant ainsi à l’appelante de vérifier le montant de sa dette, d’effectuer des offres de paiement et de contester ces actes. Il est en outre rappelé que l’omission de la signature de l’huissier de justice constitue un vice de forme nécessitant la preuve d’un grief, lequel n’est ni allégué ni démontré par l’appelante. En conséquence la demande de nullité des procès-verbaux de saisie-attribution a été justement rejetée par le juge de l’exécution.
Les saisies-attribution ont été dénoncées le 22 avril 2013 à Mme [R] à son domicile situé [Adresse 1], par dépôt des actes à étude, l’huissier indiquant d’une part, que la signification à personne est impossible, aucune personne n’étant présente au domicile au moment du passage et d’autre part, que le domicile est confirmé par la présence du nom du destinataire sur la boîte aux lettres. Si ces mentions sont insuffisantes à caractériser les diligences requises pour s’assurer de la réalité du domicile du destinataire, il est relevé que l’appelante n’allègue ni ne démontre l’existence d’un grief du fait de cette irrégularité, de sorte qu’il n’y a pas lieu de prononcer la nullité des actes de dénonciation.
S’agissant des trois certificats de non contestation signifiés les 30 mai 2013 à la SCP Litaize et Gauthier, ces actes n’ont pas été signifiés à Mme [R], de sorte qu’ils ne lui sont pas opposables. Pour autant, étant rappelé qu’aux termes de l’article R 211-6 du code des procédures civiles d’exécution, le tiers saisi procède au paiement sur la présentation d’un certificat délivré par le greffe ou établi par l’huissier de justice qui a procédé à la saisie attestant qu’aucune contestation n’a été formée dans le mois suivant la dénonciation, les certificats de non contestation à l’encontre desquels Mme [R] ne fait valoir aucun grief, ne présentent aucune irrégularité de sorte qu’il n’y a pas lieu de les annuler.
En conséquence le jugement est confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de nullité des procès-verbaux de saisie-attribution du 19 avril 2013, du certificat de non contestation du 30 mai 2013 et des procès-verbaux de carence du 20 avril 2011.
Sur l’action en responsabilité
L’huissier de justice, devenu commissaire de justice, engage sa responsabilité délictuelle à l’égard du débiteur en raison des dommages que celui-ci subit du fait des fautes qu’il a commises dans l’exercice de ses fonctions.
En l’espèce, l’action en responsabilité formée par Mme [R] à l’encontre de la SCP Dominique Munier-Claire Moulin devenue SELARL Acti Huissiers est fondée sur les irrégularités affectant les actes d’exécution forcée réalisés à la demande de la SA Société Générale.
Il résulte de ce qui précède qu’aucune faute ne peut être retenue à l’encontre de l’étude d’huissier au titre des certificats de non-contestation établis dans le cadre des saisies-attribution pratiquées le 19 avril 2013, ni au titre des procès-verbaux de carence établis le 20 avril 2011 suite à la procédure de saisie-vente, de sorte que sa responsabilité ne peut être recherchée en conséquence de la prétendue nullité de ces actes, laquelle a été rejetée. L’appelante n’est pas davantage fondée à soutenir qu’elle a subi une perte de chance de soulever la prescription de la créance de la banque, alors que les actes de procédure dont elle fait état, non annulés par la cour, ont produit leur effet interruptif de prescription.
En conséquence le jugement est confirmé en ce qu’il l’a déboutée de sa demande en paiement de la somme de 316.529,34 euros de dommages-intérêts. Il est également confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral qui n’est pas reprise en appel par l’appelante.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.
Mme [R], partie perdante, devra supporter les dépens d’appel et il est équitable qu’elle soit condamnée à verser à l’intimée la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée en première instance. Il convient en outre de la débouter de sa propre demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
CONDAMNE Mme [M] [R] à payer à la SELARL Acti Huissiers, anciennement dénommée SCP Dominique Munier-Claire Moulin, une indemnité de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE Mme [M] [R] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [M] [R] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT