COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-2
ARRÊT AU FOND
DU 12 MAI 2023
N° 2023/166
Rôle N° RG 19/10100 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BEPHQ
[H] [G]
C/
SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE
Copie exécutoire délivrée
le : 12 mai 2023
à :
Me Vincent ARNAUD de la SELARL VINCENT ARNAUD, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 336)
Me Gilles MATHIEU, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 98)
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’AIX EN PROVENCE en date du 27 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F 13/00444.
APPELANT
Monsieur [H] [G], demeurant [Adresse 2]
comparant en personne, assisté de Me Vincent ARNAUD de la SELARL VINCENT ARNAUD, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Laure MICHEL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE DISTRIBUTION CASINO FRANCE, SAS, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités de droit audit siège, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Gilles MATHIEU, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Nathalie ROMAIN, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 15 Mars 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Véronique SOULIER, Présidente suppléante a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante
Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre
Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2023,
Signé par Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante et Mme Cyrielle GOUNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Monsieur [H] [G] a été engagé par la SAS Supermarché Casino par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 29 août 2007 en qualité de chef de rayon, statut agent de maîtrise, niveau 5.
La convention collective nationale applicable est celle du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.
Par courrier du 1er avril 2008, il a donné sa démission.
Il a été de nouveau engagé en qualité de chef de rayon, niveau 5 agent de maîtrise par contrat de travail à durée indéterminée du 28 septembre 2009 moyennant un revenu annuel de 23.660 euros bruts.
A compter du 1er octobre 2010, il a été affecté au magasin de [Localité 4] en qualité de chef de rayons fruits et légumes avant d’intégrer le 2 novembre 2010 le casino de [Localité 3].
Par avenant du 10 janvier 2012, il a été muté à compter du 2 février 2012 sur le magasin Casino de [Localité 5] en qualité de Manager Commercial Produits Grande Consommation (PGC), agent de maîtrise niveau 5.
A partir du 10 décembre 2012, il est affecté au supermarché de [Localité 3] en qualité de Manager Commercial Produits Grande Consommation.
Il a été placé en arrêt maladie ordinaire à compter du 13 février 2013.
Le 11 avril 2013, il a saisi le conseil de prud’hommes d’Aix en Provence sollicitant la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur en raison de divers manquements de celui-ci à ses obligations, celle-ci produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que le paiement de diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire.
M. [G] a été déclaré inapte à son poste de Manager PGC à l’issue de deux visites médicales des 2 et 17 septembre 2013, le médecin du travail ayant proposé un reclassement professionnel à un poste d’employé commercial rayon FL ou bien à un poste administratif au sein du groupe Casino.
Le salarié a contesté les avis d’inaptitude auprès de l’inspection du travail lequel par décision du 4 décembre 2013 l’a déclaré ‘inapte au poste de travail intitulé PGC précisant qu’il pourrait être reclassé sur un poste dont les horaires n’excèderaient pas 35 heures hebdomadaires’.
Le 20 octobre 2014, M. [G] a été licencié pour inaptitude physique avec impossibilité de reclassement.
Par jugement de départage du 27 mai 2019, le conseil de prud’hommes d’Aix en Provence a:
– rejeté la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur,
– dit le licenciement fondé sur un motif réel et sérieux,
– condamné la SAS Distribution Casino France à payer à M. [G] les sommes de 1.278,65 € à titre de rappel d’heures supplémentaires outre 127,86 € de congés payés afférents,
– rejeté toute autre demande des parties,
– ordonné l’exécution provisoire du jugement,
– condamné la SAS Distribution Casino France aux entiers dépens.
M. [G] a relevé appel de ce jugement le 24 juin 2019 par déclaration adressée au greffe par voie électronique.
Aux termes de ses conclusions d’appelant notifiées par voie électronique le 31 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens soutenus, M. [G] a demandé à la cour de :
– le recevoir en son appel régulier en la forme et justifié au fond,
Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a:
– débouté de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur,
– dit et jugé le licenciement fondé sur un motif réel et sérieux,
– débouté de ses demandes de dommages-inétrêts pour licenciement sans cause réelle ets érieuse,
– débouté de sa demande d’indemnité compensatrice de préavis outre incidence congés payés sur préavis,
– débouté de sa demande d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
– débouté de sa demande de rappel de prime de performance,
– débouté de sa demande de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de sécurité de résultat,
– débouté de sa demande de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat d etravail,
– débouté de sa demande de liquidation d’astreinte,
– limité le montant du rappel d’heures supplémentaires à la somme de 1.278,65 € outre 127,86€ de congés payés y afférents,
Le confirmer du chef de condamnation de la société Casino France au paiement des entiers dépens.
Statuant à nouveau:
– dire que la société Casino France a gravement manqué à ses obligations empêchant toute poursuite du contrat de travail,
– dire que l’inaptitude de M. [G] découle des manquements graves de la société Casino France ,
– dire que la société Casino France a manqué à son obligation de recherche loyale et sérieuse de reclassement,
– débouter la société Casino de son appel incident,
En conséquence:
A titre principal:
– prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [G] aux torts exclusifs de l’employeur,
A titre subsidiaire:
– dire que le licenciement de M. [G] est sans cause réelle et sérieuse,
– condamner la société Casino France à payer à M. [G] les sommes suivantes:
– 14.670 € à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
– 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de sécurité de résultat,
– 42.945,84 € à titre de rappel d’heures supplémentaires et 4.294,58 € de congés payés afférents,
– 40.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse en réparation du préjudice économique,
– 6.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse en réparation du préjudice moral,
– 7.335 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 733,50 € de congés payés afférents,
– 489 € de congés payés sur préavis,
– 2.091,86 € à titre de paiement de la prime de performance,
– 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,
– se réserver la liquidation d’astreinte,
– enjoindre à la société Casino France sous astreinte de 150 € par jour de retard 15 jours à compter de la notification de l’arrrêt à intervenir d’avoir à lui délivrer les documents suivants,
– bulletins de salaires rectifiés conformes à la décision à intervenir,
– documents de fin de contrat conformées à la décision à intervenir (attestation Pôle Emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte),
– dire qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement à intervenir et en cas d’exécution par voie extrajudiciaire les sommes retenues par l’huissier instrumentaire devront être supportées par la société Casino France en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– dire que l’intégralité des sommes allouées à M. [G] produiront intérêts de droit à compter de la demande en justice avec capitalisation des articles 1153-1 et 1154 du code civil,
– condamner la société Casino France au paiement d’une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre le paiement des entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de la Selarl Vincent Arnaud sous affirmation d’en avoir fait l’avance.
M. [G] fait valoir en substance :
– à titre principal, que la résiliation judiciaire de son contrat de travail doit être prononcée la société Distribution Casino France ayant gravement manqué à certaines de ses obligations en n’ayant pas respecté les dispositions applicables en matière de convention de forfait hebdomadaire en heures en l’absence de l’accord individuel écrit du salarié et de contrôle effectif du temps de travail et des temps de repos et en s’étant ainsi abstenue de lui payer ses heures supplémentaires et de protéger sa santé en lui imposant une cadence de travail excessive ayant entraîné la dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé,
– à titre subsidiaire que son inaptitude découle du comportement fautif de l’employeur lequel a manqué à son obligation de reclassement.
Par conclusions récapitulatives n°3 d’intimée notifiées par voie électronique le 7 février 2023 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens soutenus, la société Distribution Casino France a demandé à la cour de :
Vu la décision de refus de prise en charge notifiée par la CPAM le 28 mars 2014,
Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail:
– déclarer recevable la société Distribution Casino France en sa fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action en nullité de la convention de forfait en cause d’appel,
– déclarer prescrite l’action en nullité de la convention de forfait depuis le 29 août 2012 soit antérieurement à la saisine du 11 avril 2013,
– déclarer M. [G] irrecevable en son action en nullité de la convention de forfait,
– l’en débouter,
Subsidiairement
– déclarer que [G] agent de maîtrise niveau 5 était valablement soumis à une convention de forfait en jours résultant des accords d’entreprise et notamment l’Accord Ombrelle du 17 juin 1999 et de son avenant du 19 avril 2001,
– déclarer que la convention de forfait de l’appelant est valable et lui est opposable,
– le débouter de son action en nullité de sa convention de forfait et de sa demande de paiement d’heures supplémentaires,
A titre infiniment subsidiaire:
– déclarer que M. [G] qui reconnaît n’avoir jamais dépassé son forfait hebdomadaire n’est pas fondé à prétendre à la violation de sa convention de forfait.
Réformer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Distribution Casino France à payer à M. [G] un rappel au titre d’heures supplémentaires à hauteur de 1.278,65€ outre les congés payés afférents pour la période comprise entre février 2012 et le 10 février 2013.
– débouter M. [G] de sa demande de rappel au titre des heures supplémentaires.
En tout état de cause:
Vu la régularisation de 137 € effectuée en mars 2013 au titre des heures supplémentaires exécutées entre décembre 2012 au 13 février 2013 avant sa saisine et son licenciement,
– déclarer que M. [G], en charge de la preuve, ne démontre pas une cadence excessive de travail,
– le débouter de sa demande indemnitaire fondée sur l’article L.6321-1 du code du travail,
– déclarer que la société Distribution Casino France n’a pas manqué à son obligation de sécurité ni commis un manquement suffisamment grave de nature à justifier le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts exclusifs,
Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [G] de son action en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société concluante et de ses demandes.
Le débouter de l’ensemble de ses demandes.
A titre subsidiaire, dans l’hypothèse d’une condamnation au titre des heures supplémentaires,
A titre reconventionnel, condamner M. [G] à rembourser la somme de 1.091,91 € bruts correspondant aux RJTT pris entre le 2 février 2012 et le 13 février 2013 date de l’arrêt de travail et de l’indemnité compensatrice de RJTT payées dans le cadre du solde de tout compte en octobre 2014.
Ordonner la compensation entre la créance arrêtée de M. [G] et la créance de la société Distribution Casino France au titre des RJTT pris entre le 2 février 2012 et le 13 février 2013 date de l’arrêt de travail et de l’indemnité compensatrice de RJTT payée dans le cadre du solde de tout compte en octobre 2014 soit la somme de 1.091,91 € en application de l’article 1347 du code civil.
Sur le licenciement :
– déclarer que la société Distribution Casino France a régulièrement satisfait à son obligation de recherche de reclassement de M.[G] au regard des préconisations de la médecine du travail et de la décision de l’Inspection du travail,
– déclarer que l’appelant a refusé sans explications trois propositions de poste de reclassement validées par la médecine du travail,
– déclarer que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement repose sur une cause réelle et sérieuse,
Confirmer le jugement en ce qu’il a jugé que le licenciement de M.[G] reposait sur une cause réelle et sérieuse.
Débouter M.[G] de l’ensemble de ses demandes.
Le condamner à payer à la société Distribution Casino France la somme de 2500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Subsidiairement:
– faire une stricte application de l’article L.1235-3 du code du travail,
– limiter l’indemnité compensatrice de préavis à la somme de 4.155,50 € bruts,
En tout état de cause,
– déclarer que M. [G] a été intégralement rempli de ses droits au titre de la prime de performance de 2013,
Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [G] de sa demande de paiement de la somme de 2.091,86 € indue au titre de la prime de performance,
– débouter en conséquence, M. [G] de sa demande de paiement de la prime de performance de 2013,
– déclarer que la société Casino Distribution France n’a pas manqué à son obligation de sécurité,
– rejeter sa demande indemnitaire formulée au titre d’un manquement à l’obligation de sécurité,
– déclarer que M. [G] ne justifie pas de l’existence d’un préjudice distinct de celui résultant de la rupture de son contrat de travail qui ne serait pas indemnisé,
– déclarer que l’appelant n’établit pas une exécution fautive de son contrat de travail,
Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [G] de sa demande de condamnation au titre du travail dissimulé de sa demande de condamnation au titre du préjudice moral, de l’exécution fautive du contrat de travail.
– le débouter de ses demandes indemnitaires émises au titre du travail dissimulé, au titre du préjudice moral et de l’exécution fautive du contrat de travail,
– statuer ce que de droit sur les dépens.
La société Distribution Casino France soutient :
– qu’elle n’a pas commis de manquements à ses obligations fondant la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail alors que l’action en nullité de la convention individuelle de forfait hebdomadaire en heures est prescrite et qu’à défaut la convention litigieuse est valide ayant été expressément acceptée par le salarié et lui étant opposable de sorte qu’il doit être débouté de sa demande au titre des heures supplémentaires, injustifiée pour la période antérieure au 1er février 2012 et sans objet pour la période comprise entre février 2012 et le 10 février 2013, date de son arrêt de travail, une somme de 137 € lui ayant été versée en mars 2013 et qu’à défaut de rejet de cette demande il devra lui rembourser l’indemnité perçue au titre de ses jours de réduction de temps de travail, qu’elle ne lui a pas imposé de cadences excessives, le salarié ayant seulement exécuté le forfait hebdomadaire qu’il avait accepté,
– que l’inaptitude de M. [G] n’est pas d’origine professionnelle et qu’elle a parfaitement respecté son obligation de reclassement au regard des conclusions de la médecine du travail s’étant trouvée dans l’impossibilité de reclasser le salarié après des tentatives concrètes de reclassement en interne ainsi qu’au sein du groupe après son refus de trois propositions de reclassement.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 13 février 2023, l’audience de plaidoiries étant fixée au 15 mars 2023.
SUR CE :
Sur l’exécution du contrat de travail et le rappel de la prime de performance :
Par application de l’article 1-3.1.4 du recueil d’accords d’entreprise organisant le statut des salariés de l’entreprise et prévoyant le versement d’une rémunération variable, M. [G] sollicite la condamnation de l’intimée à lui payer une somme de 2.091,86 € correspondant au solde de la prime de performance de l’année 2014, n’ayant perçu qu’une somme de 69 €.
L’employeur s’oppose à cette demande en indiquant que cette prime n’est pas une prime contractuelle, qu’elle résulte de la politique de la branche supermarchés, qu’elle est revue annuellement et dépend non d’objectifs contractuellement prévus mais de performances qualitatives et quantitatives appréciés au niveau de l’ensemble des supermarchés et qu’elle ne présente aucun caractère de fixité, que sa valeur est calculée au prorata du temps de présence en magasin sur l’année, que M. [G] présent en 2013 uniquement au mois de janvier 2013 a été rempli de ses droits en percevant la somme de 69 €.
Le contrat de travail de M. [G] prévoit que celui-ci est ‘rémunéré par un salaire brut de base forfaitaire initialement fixé à 23.600 €base réglé suivant 13 mensualités identiques de 1.820 € et qu’à ce salaire se rajoutent un certain nombre d’avantages notamment financiers détaillés dans la convention collective de la société et dans les divers avenants et accords qui la complètent.’
Par ailleurs, les bulletins de paie des mois d’avril 2012, d’avril 2013 et d’avril 2014 mentionnent respectivement le versement d’une prime performance de 918 €, de 209 € et de 69 € et la notice d’information Rémunération variable 2013 (pièce n°35 de l’employeur) fait état de l’existence ‘d’une rémunération variable annuelle dont l’existence pour l’année en cours ne constitue pas un avantage acquis pour les années ultérieures qui est versée aux membre d’encadrement magasin en poste (statut cadre et agent de maîtrise) qui est calculée au prorata du temps de présence en magasin sur l’année et en fonction des résultats obtenus par rapport aux objectifs collectifs du groupe mais également d’objectifs individuels correspondant aux missions prioritaires de l’année’.
Contrairement aux affirmations de M. [G] la ‘prime performance’ n’est pas contractuellement prévue, ne présente aucun caractère de constance et de fixité dépendant notamment de la présence du salarié au sein du magasin de sorte que c’est à juste titre par des dispositions qui sont confirmées que le salarié a été débouté de ce chef de demande.
Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :
Le salarié peut demander au Conseil de Prud’hommes la résiliation judiciaire de son contrat de travail s’il estime que l’employeur manque à ses obligations.
L’action en résiliation judiciaire du contrat de travail implique la poursuite des relations contractuelles dans l’attente de la décision du juge du fond. Si le salarié est licencié avant cette décision, les juges doivent en premier lieu rechercher si la demande en résiliation était justifiée. C’est seulement dans le cas où la demande de résiliation judiciaire n’est pas justifiée qu’ils se prononcent sur le licenciement notifié par l’employeur.
Si les manquements de l’employeur invoqués par le salarié sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, le juge prononce la rupture de celui-ci au jour de la décision sauf si celui-ci a déjà été interrompu. Cette rupture produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit au bénéfice pour le salarié de dommages et intérêts
pour licenciement abusif, d’une indemnité légale ou conventionnelle de licenciement et d’une indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés sur préavis.
1°) Sur la validité de la convention de forfait hebdomadaire en heures :
– sur la prescription de l’action en nullité de la convention individuelle de forfait :
Ainsi que l’indique exactement l’intimée, par application des dispositions des articles 122 et 565 du code de procédure civile, les fins de non-recevoir peuvent être opposées en tout état de cause et pour la première fois en cause d’appel de sorte que la fin de non-recevoir opposée par la société Distribution Casino France tirée de la prescription de l’action en nullité de la convention individuelle de forfait hebdomadaire en heures est recevable.
Si depuis le 16 juin 2013, le délai de prescription de l’action fondée sur la nullité ou l’inopposabilité d’une convention de forfait, laquelle se rattachant à l’action en paiement d’heures supplémentaires relève des dispositions de l’article L.3245-1 du code du travail, a été ramené de cinq à trois années à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, le délai de prescription applicable en l’espèce est celui de cinq années, la juridiction prud’homale ayant été saisie 11 avril 2013.
Par ailleurs, c’est à tort que la société Distribution Casino France retient comme point de départ de la prescription la signature par M.[G] du contrat de travail du 29 août 2007 pour en conclure que l’action en nullité de la convention de forfait est prescrite depuis le 29 août 2012 alors qu’il est constant que cette première relation de travail s’étant achevée par la démission du salarié le 1er avril 2008, le point de départ de l’action litigieuse est nécessairement la date de signature du second contrat de travail, soit le 29 septembre 2009, de sorte qu’au 11 avril 2013, date de la saisine de la juridiction prud’homale, cette action n’était pas prescrite.
– Sur la validité de la convention de forfait hebdomadaire en heures :
La validité d’une convention de forfait hebdomadaire en heures est soumise aux conditions cumulatives suivantes:
– être proposée aux cadres ou salariés non cadres disposant d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps,
– faire l’objet d’un accord individuel signé par le salarié précisant le nombre d’heures supplémentaires correspondant au forfait devant y figurer,
– prévoir une rémunération au moins égale à la rémunération minimale applicable dans l’entreprise pour le nombre d’heures correspondant au forfait augmenté le cas échéant si le forfait inclut des heures supplémentaires des majorations prévues,
– respecter les durées maximales de travail quotidien et hebdomadaire et les temps de repos obligatoires.
Par application d’un avenant de l’accord Ombrelle du 19 avril 2001, les agents de maîtrise de la société Casino Distribution France ont été assujettis à un forfait hebdomadaire prévoyant 43 heures 44 de présence par semaine soit 41 heures 44 de travail effectif avec 19 jours de repos supplémentaires décomptés ainsi qu’il suit:
35 heures correspondant à la durée légale du travail
+ 3 heures supplémentaires majorées au taux légal de 25%
= 38 heures de travail effectif
+ 2heures de temps de pause
= 40 heures de présence
+ 19 jours de repos sur l’année correspondant à 3h44 comprises entre la 38ème h et la 41 h 44.
Le contrat de travail du 28 septembre 2009 adressé au salarié sous la forme d’une lettre d’engagement (pièce n°4 de l’employeur) mentionne :
– qu’il est engagé par la société Groupe Casino à compter du 28 septembre 2009 en qualité de Chef Rayon en position d’agent de maîtrise niveau 5, ce niveau figurera sur sa fiche de paie,
– que son salaire brut de base est initialement fixé à 23.660 € pour une année complète, il est forfaitaire conformément aux dispositions légales et conventionnelles, il sera réglé en 13 mensualités identiqués de 1.820 € sauf éventuellement la première année où la gratification annuelle équivalente au 13ème mois dans la convention collective n’est versée au prorata temporas qu’à l’issue d’une période d’ancienneté de 6 mois, à ce salaire se rajoutent un certain nombre d’avantages notamment financiers détaillés dans la convention collective de la société et dans les divers avenants et accords qui la complètent et dont vous bénéficiez. Ces documents sont tenus à votre disposition, sur votre demande, dans votre établissement..(…)’
Il se déduit de ce document qu’aucune clause de ce contrat de travail ne précise la durée hebdomadaire de travail de M. [G] alors que la seule fixation d’une rémunération forfaitaire sans préciser le nombre d’heures supplémentaires qu’elle inclut ne suffit pas à caractériser l’existence d’une convention de forfait et qu’en l’espèce aucune remise de l’avenant à l’accord d’entreprise du 19 avril 2001 venant modifier les dispositions de l’accord d’entreprise du 17 juin 1999 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dit ‘Ombrelle’ prévoyant le forfait hedomadaire en heures auquel le salarié a été soumis n’est intervenue la date de celui-ci n’étant pas même précisée dans les dispositions contractuelles.
De surcroît ainsi que cela résulte du courrier du 5 décembre 2013 des contrôleurs du travail (pièce n°1 du salarié) , aucun décompte du temps de travail du salarié ne leur a été présenté sur la période d’affectation de M. [G] à [Localité 5] entre le 02/12/2012 et le 09/12/2012, et les décomptes produits pour la période suivante du 10/12/2012 au 10/02/2013 se présentant sous la forme de décomptes auto-déclaratifs établis par le salarié et validés hebdomadairement ou mensuellement par le chef d’équipe ne leur ont pas permis de contrôler le temps de travail effectif réalisé, l’employeur n’ayant d’ailleurs pas respecté les dispositions de l’article L.3171-2 du code du travail lui imposant un décompte quotidien et hebdomadaire du temps de travail avec établissement et remise au salarié d’un décompte mensuel annexé au bulletin de salaire.
Dès lors, contrairement à l’appréciation de la juridiction prud’homale, en l’absence d’accord écrit de M. [G] à la mise en oeuvre de la convention de forfait hebdomadaire en heures comportant le nombre d’heures supplémentaires inclus dans cette rémunération à laquelle il a été soumis et de contrôle effectif par la société Distribution Casino France du temps de travail et des temps de repos le concernant bien que celui-ci ait pris les 19 jours de RTT compensant nécessairement des heures supplémentaires , la convention de forfait individuelle en heures est illicite et n’est pas opposable à Monsieur [G].
2°) Sur les heures supplémentaires et le travail dissimulé:
– sur les heures supplémentaires :
Lorsqu’une convention de forfait en heures est déclarée inopposable, le décompte et le paiement des heures supplémentaires doit s’effectuer selon le droit commun, au regard de la durée légale de 35 heures hebdomadaires ou de la durée considérée comme équivalente.
Cependant, lorsqu’il a été rémunéré sur la base du nombre d’heures stipulé dans la convention de forfait en heures reconnue irrégulière, le salarié ne peut prétendre entre la 35ème et la dernière heure de ce forfait, au paiement du salaire de base une deuxième fois mais seulement aux majorations afférentes aux heures supplémentaires, effectuées au-delà de la durée légale, dont le juge doit vérifier l’existence et le nombre.
M. [G] sollicite la condamnation de la société Casino Distribution France à lui payer une somme de 42.945,84 € outre les congés payés afférents correspondant à un rappel d’heures supplémentaires sur la base de 44 heures hebdomadaires correspondant à 9 heures supplémentaires par semaine (8 h au taux majoré de 25% et 1 h au taux majoré de 50%) pendant 63 mois calculée ainsi qu’il suit:
‘- majoration fixée à 25% = 17,11 €
– rappel de 8 heures de travail : 8×17,11 = 136,90 €
– rappel d’heures supplémentaires sur un mois = 4,33 x 136,9 = 592,77 €
– majoration fixée à 50% est de 20,53 €
– soit sur un mois 4 x 20,53 € = 88,91 €
– calcul de rappel d’heures supplémentaires sur un mois : 592,77 +88,91=681,68 €
– calcul sur la période de prescription 63 mois x 681,68 € = 42.945,84 € outre 4.294,58€ de congés payés.’
Cependant, ainsi que l’a exactement relevé le juge départiteur, la demande de M.[G] relative aux heures effectuées avant le 11 avril 2008 soit plus de cinq années avant sa saisine de la juridiction prud’homale est prescrite alors que ce dernier n’a pas travaillé pour la société Distribution Casino France entre le 29 avril 2008 et le 28 septembre 2009 suite à sa démission, qu’il s’est trouvé en arrêt de travail sans jamais reprendre son poste à compter du 13 février 2013 et qu’il n’a versé aux débats strictement aucun élément relatif à la période antérieure au 1er février 2012 ne contestant ainsi ses conditions d’emploi auprès de l’inspection du travail en matière de durée du travail que pour la période de travail comprise entre le 1er février 2012 et le 13 février 2013.
C’est à juste titre par des dispositions qui sont confirmées que les demandes de M. [G] au titre d’heures supplémentaires antérieures au 1er février 2012 ont donc été rejetées.
Il résulte des pièces versées aux débats par M. [G] ( pièces n°3 et 36) que celui-ci a réclamé le paiement d’heures supplémentaires réalisés en sus de 36 heures:
– auprès du directeur du supermarché de [Localité 5] estimant avoir réalisé 193 heures supplémentaires du 02 février 2012 au 31 août 2012, dont 78h15 majorées à 25% et 104h45 majorées à 50%
‘- Février 2012 – 10h dont 3 majorées à 25% et 7 à 50%
– mars 2012 – 30 h dont 9 majorées à 25% et 21 à 50 %
– avril 2012 – 20h dont 6 majorées à 25% et 14 à 50%
– mai 2012 – 41h dont 22 majorées à 25% et 19 à 50%
– juin 2012 – 30h dont 9 majorées à 25% et 21 à 50%
– juillet 2012 – 20h dont 6 majorées à 25% et 14h à 50%
– août 2012 – 32h dont 23h15 majorées à 25% et 10h45 à 50%’
– auprès du directeur du supermarché de [Localité 3] réclamant 43,50 heures supplémentaires pour la période du 10 décembre 2012 (22h30 au taux majoré de 14,72 €) au 31 janvier 2013 (21h20 au taux majoré de 14,72€).
Par courrier du 4 mars 2013 (pièce n°37), l’employeur lui a répondu qu’il émettait des réserves sur ses demandes, lui a rappelé que sa rémunération était forfaitaire, qu’en sa qualité d’agent de maîtrise, il bénéficiait d’un forfait hebdomadaire prévoyant 43h44 de présence par semaine et non 36 heures, qu’il procéderait à des vérifications sur les ‘auto-déclaratifs’ du salarié, ce qu’il a fait, ayant procédé à un rappel de salaire de 137 € sur la période du 10/12/2012 au 10 février 2013.
Cependant, il résulte de ces différents éléments dont les bulletins de salaire mentionnant tous un horaire mensuel forfaitaire payé de 174,00 heures pour un salaire de 2.050€, soit 40 heures par semaines auxquels s’ajoutent 19 jours de RTT correspondant aux heures supplémentaires effectuées entre la 38ème heure et la 41h44 de travail effectif ainsi que les documents intitulés ‘traçabilité temps de travail agent de maîtrise’ que malgré l’absence de production par le salarié d’une partie des documents de décompte de temps de travail hebdomadaires, dits de ‘traçabilité Temps de travail agent de maîtrise’ l’employeur ne conteste pas l’accomplissement par le salarié d’une durée hebdomadaire de travail de 43,44 heures par semaine de sorte que cette rémunération de base ayant été payée à M. [G] celui-ci peut seulement prétendre au paiement des majorations applicables aux heures supplémentaires effectuées au delà de la durée légale du travail.
A l’instar des premiers juges, la cour constate que le salarié a reçu un rappel de salaire de 137€ après déduction des heures de RTT allouées en compensation correspondant aux heures effectuées au delà des 43h44 hebdomadaires durant les semaines 51 de 2012 ainsi que 2, 3, 4 et 5 de 2013.
Il lui reste cependant dûe une somme de 65,67 € au titre des majorations non effectuées.
De même s’agissant des 193 heures supplémentaires dont il n’est pas contesté qu’elles aient été effectuées par M. [G] à [Localité 5] entre le 1er février 2012 et le 31 août 2012, alors que la lecture des bulletins de paie des mois d’avril 2012 à août 2012 met en évidence que 12 à 15 heures supplémentaires par mois ont été réglées au salarié au taux majoré de 14,45 €, il lui reste dû :
– au titre d’une majoration au taux de 14,725 € pour 76 heures rémunérées au taux de 11,78€ = 223,82 €
– au titre d’une majoration au taux de 17,67 € pour 51 heures rémunérées au taux de 11,78€ = 901,17 €,
– au titre d’une majoration au taux de 17,67 € pour 66 heures rémunérées au taux de 14,45€ = 212,52 €
soit un total de 1.403,18 € outre 140,31 € de congés payés afférents.
Les dispositions du jugement entrepris ayant condamné la société Distribution Casino France à payer à M. [G] une somme de 1.278,65 € au titre des heures supplémentaires outre 127,86 € de congés payés afférents sont ainsi infirmées.
Par ailleurs, en raison de la privation d’effet de la convention de forfait, le paiement des jours de réduction du temps de travail en exécution de celle-ci devient indû et l’employeur est bien fondé à en réclamer le remboursement.
En conséquence, il convient de condamner M. [G] à rembourser à la société Distribution Casino France l’indemnité perçue au titre des jours de réduction de temps de travail pris entre le 2 février 2012 et le 13 février 2013, date de l’arrêt de travail, soit la somme de 1091,91 € dont le montant n’a pas été contesté à titre subsidiaire et d’ordonner la compensation entre les deux créances.
– sur le travail dissimulé :
La dissimulation d’emploi salarié prévue par l’article L. 8221-5 du code du travail est caractérisée lorsqu’il est établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
En l’espèce, l’inopposabilité au salarié de la convention de forfait hebdomadaire en heures ne caractérise pas à elle seule la volonté de la société Distribution Casino France de dissimuler le nombre d’heures supplémentaires effectuées par le salarié alors qu’il est constant que celles-ci ont été rémunérées sur le taux de base et partiellement au taux majoré de 25% ainsi que le met en évidence la lecture des bulletins de paie de sorte qu’il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande du salarié de condamnation de l’employeur au titre du travail dissimulé celui-ci ne démontrant pas la mauvaise foi ou l’intention frauduleuse de l’employeur.
3) Sur le manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité et l’exécution fautive du contrat de travail:
Par application de l’article L.4121-1 du code du travail, l’employeur a l’obligation de prendre toutes mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
M.[G] reproche à la société Distribution Casino France de n’avoir pris aucune mesure protectrice de ses intérêts et de lui avoir imposé une cadence de travail excessive entraînant une dégradation grave de ses conditions de santé.
L’employeur répond que le salarié n’a pas accompli d’heures supplémentaires mais a seulement exécuté le forfait hebdomadaire qu’il avait accepté, que l’inspecteur du travail n’a réalisé aucune enquête administrative en janvier 2014 dans le cadre de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle et n’a stigmatisé aucune cadence de travail excessive à la charge du salarié du fait de ses horaires de travail n’ayant dressé aucun procès-verbal à la suite du contrôle réalisé en juillet 2013, que la CPAM des Bouches du Rhône a rejeté après enquête le caractère professionnel de la maladie du salarié, le salarié n’ayant formé aucun recours, le lien de causalité entre l’existence d’un état de stress et les conditions de travail n’étant pas démontré alors que le salarié a toujours été déclaré apte à son poste de travail, qu’il ne justifie pas de l’existence de cadences infernales n’ayant d’ailleurs pas alerté la médecine du travail d’une détérioration de son état de santé.
M. [G] verse aux débats :
– un certificat médical établi le 16/10/2012 par le Dr [I], psychiatre, indiquant avoir reçu M. [G] à la demande de son médecin traitant pour un ‘trouble anxio-dépressif…. d’allure réactionnel’
– un courrier adressé le 30 octobre 2012 (pièce n°2) à M. [C], directeur du Casino de [Localité 5] lui indiquant qu’il effectuait 60 heures de travail par semaine et qu’il n’était rémunéré que 39 heures par semaine dans lequel il s’est plaint de sa charge de travail et lui a reproché de lui crier dessus lui précisant qu’il saisissait l’inspection du travail,
– un courrier adressé à la CPAM des Bouches du Rhône le 25/01/2014 (pièce n°5) afin de voir reconnaître le caractère professionnel de sa maladie dans lequel il affirme que ses conditions de travail se sont dégradées ‘s’étant trouvé à effectuer jusqu’à 60 heures de travail par semaine, subissant des pressions quotidienne de la part de l’employeur ce qui a entraîné un premier arrêt de travail le 1er septembre 2012 qui s’est prolongé jusqu’au 30 novembre 2012,’ les agissements de son employeur n’ayant eu, selon lui, de cesse de s’intensifier après sa mutation à partir du 10 décembre 2012 sur le supermarché Casino de [Localité 3], ayant été tenu responsable d’un incident à la station service,
– une enquête réalisée en janvier et février 2014 par la CPAM des Bouches du Rhône (pièce n°7) durant laquelle M. [G] de même que les directeurs des magasin de [Localité 5] et de [Localité 3] ont été entendus, les deux derniers contestant formellement les accusations du salarié relatives à sa charge de travail et aux pressions alléguées.
– un courrier de l’inspection du travail du 5 décembre 2013 indiquant avoir demandé à l’employeur de procéder à des régularisations concernant des décomptes du temps de travail de M. [G] et relevant des irrégularités dans les conditions d’application de la convention de forfait hebdomadaire ou mensuel ( pas d’indication du nombre d’heures supplémentaires effectuées, pas d’indications du nombre d’heures de travail effectuées au-delà de 38 heures de travail effectif, pas d’indication de paiement ou du repos compensateur équivalent à ces heures supplémentaires dans les bulletins de salaire, pas de précision des heures d’arrivée et de départ du salarié).
M. [G] du fait de son poste d’agent de maîtrise, coefficient 5 a effectivement réalisé de nombreuses heures supplémentaires au-delà de la durée légale du travail par application de la convention de forfait hebdomadaire en heures déclarée illicite.
Cependant alors que toutes les heures effectuées lui ont été rémunérées au minimum au taux de base, celui-ci en s’abstenant de verser aux débats les documents auto-déclaratifs hebdomadaires de la période février 2012 à août 2012, ou tout autre élément, courriel, attestations, ne démontre pas avoir effectué ainsi qu’il le prétend 60 heures par semaine qu’il qualifie de ‘cadences infernales’.
Par ailleurs, l’employeur sur lequel repose la charge de la preuve en matière de respect de l’obligation de sécurité démontre avoir pris en compte le courrier que lui a adressé le salarié le 30 octobre 2012 dénonçant une charge excessive de travail au sein du magasin Casino de [Localité 5] durant son premier arrêt maladie du 1er/09/2012 au 1er/12/2012 en l’affectant avec son accord exprès dès le 10 décembre 2012, soit dans la semaine qui a suivi son retour d’arrêt maladie, en tant que Manager PGC sur le magasin Casino de [Localité 3] (pièce n°8), M. [G] ayant demandé à son nouveau supérieur hiérarchique le 9/01/2013, soit à peine un mois plus tard, à changer de poste de travail pour revenir sur le poste de Chef de rayon fruits et légumes (pièce n°11) sans indiquer ni justifier par aucun élément des raisons de cette demande , laquelle a pourtant été acceptée en son principe dès le 30/01/2013.
Dans ce contexte, le salarié n’établit pas de lien de causalité entre le trouble anxio-dépressif présenté et ses conditions de travail, la CPAM des Bouches du Rhône n’ayant d’ailleurs pas reconnu le caractère professionnel de l’affection le 28 mars 2014 à l’issue d’une enquête réalisée contradictoirement durant laquelle les supérieurs hiérarchiques successifs de M. [G] au sein des établissements Casino de [Localité 5] et [Localité 3] ont été entendus.
L’origine professionnelle de l’inaptitude physique ayant donné lieu au licenciement de M. [G] n’est donc nullement établie.
Cependant, il résulte de ces développements que le salarié a été soumis à une convention de forfait hebdomadaire en heures illicite, qu’il n’a pas été entièrement rémunéré de ses heures supplémentaires, celles-ci lui ayant été réglées pour la plupart d’entre elles au taux de base et non aux taux majorés de 25% et de 50% , que la société Distribution Casino France, qui est une grande entreprise, n’a pas été en mesure de justifier auprès de l’inspection du travail d’un décompte précis des temps de travail et de repos du salarié dont certaines périodes n’ont pu être contrôlées par l’inspection du travail et n’a d’ailleurs produit aucun élément, tels que les entretiens annuels professionnels comportant une rubrique évaluation de la charge de travail du salarié, à l’exception de quelques documents auto-déclaratifs du salarié démontrant qu’elle a pris des mesures lui permettant de contrôler effectivement la charge de travail du salarié soumis à une convention de forfait hebdomadaire en heures, qu’il s’agit là incontestablement d’une exécution fautive du contrat de travail ayant causé un préjudice au salarié.
Par infirmation du jugement entrepris, il convient de condamner la société Distribution Casino France à lui payer une somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail.
Au surplus, contrairement à l’appréciation du juge départiteur, ces différents manquements de l’employeur en charge du contrôle du temps de travail, des temps de repos, de l’évaluation de la charge de travail sont suffisament graves pour rendre impossible la poursuite de la relation de travail et justifier la demande de résiliation judiciaire de M. [G] aux torts de la société Distribution Casino France, celle-ci produisant à la date du 23 octobre 2014 les effets d’un
licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En conséquence, les dispositions contraires du jugement entrepris sont infirmées et le salarié est bien fondé à obtenir la condamnation de l’employeur à lui payer une indemnité de préavis et les congés payés afférents ainsi que des dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Il n’est pas contesté qu’au dernier état de la relation de travail, le salarié occupait le poste de manager commercial PGC et percevait un revenu mensuel moyen de 2.077,75 €.
Contrairement aux affirmations de l’intimée, par application de l’article 1-6.1 du recueil des accords constituant le statut des salariés de Distribution Casino France, la durée du préavis des agents de maîtrise et des cadres d’un niveau inférieur au coefficient 400 est de trois mois et non de deux mois de sorte qu’il y a lieu, par infirmation des dispositions du jugement entrepris de condamner l’employeur à payer à M. [G] une somme de 7.335 € outre 733,50 € de congés payés afférents.
Par application des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige, tenant compte d’une ancienneté de 7 années dans une entreprise comportant plus de 11 salariés, d’un âge de 42 ans, de ce que le salarié justifie d’une période d’intérim entre janvier et mai 2015 en alternance avec des périodes de chômage durant lesquelles il percevait l’allocation d’aide au retour à l’emploi sans verser aux débats aucun élément postérieur à l’année 2015 relatifs à ses démarches d’insertion sur le marché de l’emploi, il convient par infirmation du jugement entrepris de condamner la société Distribution Casino France à payer à M. [G] une somme de 16.600 € à titre de dommages-intérêts pour la perte injustifiée de son emploi.
En revanche, le salarié ne versant aux débats aucun élément justifiant du principe et de l’étendue du préjudice moral dont il réclame également réparation au titre de la perte de son emploi sera être débouté de cette demande ce qu’a exactement décidé la judiction prud’homale dont les dispositions sont confirmées.
Sur la demande de remise sous astreinte des bulletins de salaire et des documents de fin de contrat:
Le sens du présent arrêt conduit à infirmer les dispositions du jugement entrepris ayant rejeté la demande du salarié de remise des bulletins de salaire et des documents de fins de contrat rectifiés (attestation pôle emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte) sauf à confirmer le rejet de la demande d’astreinte dont le prononcé n’est pas nécessaire et de la demande tendant à se réserver la liquidation de celle-ci.
Sur le remboursement des indemnités chômage à Pôle emploi :
En application de l’article L 1235-4 alinéa 1 et 2 du code du travail, le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout au partie des allocations de chômage versées au salarié licencié ayant deux années d’ancienneté au sein de l’entreprise lorsque celle-ci emploie habituellement au moins onze salariés du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, peut être ordonné dans la limite de six mois d’indemnités de chômage.
Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.
Il y a lieu de condamner la société Distribution Casino France à rembourser à l’organisme Pôle Emploi concerné six mois d’indemnités de chômage versés à M. [G].
Sur les intérêts et leur capitalisation :
Les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires à partir de la décision qui les prononce en l’espèce à compter du présent arrêt.
Les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil.
Le jugement déféré, qui a rejeté ces demandes, sera infirmé.
Sur la demande au titre des frais futurs d’exécution:
La présente juridiction ne peut pas se prononcer sur le sort des frais de l’exécution forcée, lesquels sont régis par l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution et soumis, en cas de contestation, au juge de l’exécution. La demande formée de ce chef sera en conséquence rejetée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Les dispositions du jugement entrepris ayant condamné la société Distribution Casino France aux entiers dépens sont confirmées sauf à ajouter que les dépens d’appel seront distraits au profit de la Selarl Vincent Arnaud, sur son affirmation d’en avoir fait l’avance.
En revanche, il convient d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [G] de sa demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner de ce chef la société Distribution Casino France à lui payer une somme de 1.500 €
PAR CES MOTIFS:
La cour:
Statuant publiquement, contradictoirement en dernier ressort:
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté les demandes de M. [G]:
– de rappel de prime de performance,
– d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
– de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de sécurité de résultat,
– de dommages-intérêts pour préjudice moral distinct du préjudice économique résultant de la perte injustifiée de son emploi,
– d’astreinte et de liquidation d’astreinte,
L’infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Déclare recevable la fin de non-recevoir de la Société Distribution Casino France opposée en cause d’appel tirée de la prescription de l’action en nullité de la convention de forfait.
Rejette la fin de non recevoir de la Société Distribution Casino France tirée de la prescription de l’action en nullité de la convention de forfait.
Déclare illicite la convention de forfait hebdomadaire en heures figurant dans le contrat de travail de M. [G] signé le 28 septembre 2009.
Condamne la société Distribution Casino France à payer à M. [G] une somme de 1.403,18 € brut de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires pour la période de février 2012 à Février 2013 outre 140,31 € de congés payés afférents.
Condamne M. [G] à rembourser à la société Distribution Casino France une somme de 1.091,91 € brut correspondant aux RJTT pris entre le 2/02/2012 et le 10/02/2013 date de l’arrêt de travail et à ceux payés dans le solde de tout compte.
Ordonne la compensation entre les deux créances.
Condamne la société Distribution Casino France à payer à M. [G] une somme de 5.000 € de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail.
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société Distribution Casino France produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 23 octobre 2014.
Condamne la Société Distribution Casino France à payer à M. [G] les sommes suivantes :
– 7.335 € à titre d’indemnité de préavis outre 733,50 € de congés payés afférents.
– 16.600 € à titre de dommages-intérêts pour la perte injustifiée de son emploi.
Rappelle que les créances de nature salariale allouées portent intérêts à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires à partir de la décision qui les prononce en l’espèce à compter du présent arrêt.
Dit que les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil.
Rejette la demande de M. [G] de condamnation de l’intimée aux frais de l’exécution forcée.
Condamne la société Distribution Casino France à rembourser à l’organisme Pôle Emploi concerné six mois d’indemnités de chômage versés à M. [G].
Condamne la société Distribution Casino France aux entiers dépens ceux d’appel étant distraits au profit de la Selarl Vincent Arnaud, sur son affirmation d’en avoir fait l’avance et à payer à M. [G] une somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier Le président