COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 78H
16e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 11 MAI 2023
N° RG 22/06219 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VOVX
AFFAIRE :
[P] [W]
C/
S.A. HSBC FACTORING (FRANCE)
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Septembre 2022 par le Juge de l’exécution de RAMBOUILLET
N° RG : 11-22-57
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 11.05.2023
à :
Me Valérie LEGER de la SELARL CABINET DE L’ORANGERIE, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE ONZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [P] [W]
né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 6] ([Localité 6])
de nationalité Française
chez Madame [N] [Y]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentant : Me Valérie LEGER de la SELARL CABINET DE L’ORANGERIE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 404 – N° du dossier 210294 substituée par Me Charlotte HUBAU, Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 505
APPELANT
****************
S.A. HSBC FACTORING (FRANCE)
N° Siret : 414 141 846 (RCS Paris)
[Adresse 2]
[Localité 4]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 – N° du dossier 20220425 – Représentant : Me Damien WAMBERGUE de la SELARL CHATEL ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 Avril 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Fabienne PAGES, Président,
Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,
Madame Florence MICHON, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 6 février 2008, la société HSBC Factoring France, a conclu un contrat d’affacturage avec la société Européenne Impression Services (EIS) représentée par son gérant et associé principal, M [P] [W], qui en raison des difficultés rencontrées par la société, s’est porté caution solidaire des sommes dues par la société EIS à la société HSBC Factoring France à hauteur de 370 000 euros sur une durée de cinq ans, par acte sous seing privé du 13 avril 2016.
Selon un protocole d’accord signé le 25 janvier 2017, la société EIS s’est engagée à régler à la société HSBC Factoring France la somme de 333 201,56 euros outre intérêts, en plusieurs versements. Mais par jugement rendu le 24 août 2017, le tribunal de commerce de Versailles a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société EIS, de sorte que la banque a mis en ‘uvre le cautionnement souscrit par M [W].
Elle a obtenu par jugement du tribunal de commerce de Versailles du 3 juillet 2020, la condamnation de M [W] à lui payer la somme de 182 614,27 euros en principal majoré des intérêts de retard au taux d’intérêt légal à compter du 19 août 2016, avec capitalisation à compter de l’assignation, outre 3000 euros au titre des frais irrépétibles et rejet de la demande de délais de paiement. Ce jugement a été confirmé par arrêt de la cour d’appel de Versailles du 11 janvier 2022, dûment signifié le 28 avril 2022.
Sur le fondement de ce titre exécutoire, la société HSBC Factoring France a déposé le 9 août 2021 une requête aux fins de saisie des rémunérations de M. [W] pour avoir paiement de la somme de 199 775,54 euros dont 182 614,27 euros en principal.
Le juge de l’exécution siégeant au tribunal de proximité de Rambouillet a, par jugement contradictoire du 12 septembre 2022, au vu du dernier décompte de la créance actualisée le 10 juin 2022 à la somme de 165 321,49 euros :
déclaré recevable la demande aux fins de saisie des rémunérations présentée par la société HSBC Factoring France à l’encontre de M. [W] ;
débouté M. [W] de sa demande de sursis à statuer ;
rejeté la contestation soulevée par M. [W] ;
rejeté la demande de report de paiement présentée par M. [W] ;
autorisé au profit de la société HSBC Factoring France la saisie sur les rémunérations de M. [W] à concurrence de la somme de 161 416,78 euros, en deniers ou quittance, se décomposant comme suit :
principal : 185 614,27 euros,
frais retenus : 1 178,51 euros,
intérêts : 20 077,56 du 19 août 2016 au 10 juin 2022,
sous déduction des versements de la société EIS : 45 653,56 euros ;
réduit durant toute la période où la saisie sera effective, le taux d’intérêt au taux légal et dit que les sommes retenues dans le cadre de la saisie s’imputeront d’abord sur le capital ;
rappelé que les sommes dues à titre des rémunérations de M. [W] ne sont saisissables que dans des proportions et selon des seuils de rémunération affectés d’un correctif pour toute personne à charge ;
rappelé qu’il appartient à l’employeur de calculer la fraction saisissable en reportant d’une part la rémunération mensuelle net du débiteur sur le barème des saisies, sans déduction préalable des charges de ce dernier telles que les pensions alimentaires dont il est redevable, et en reprenant d’autre part la fraction saisissable applicable en fonction du nombre de personnes à sa charge ;
rappelé qu’en application de l’article R.3252-21 alinéa 2 du code du travail « si l’audience de conciliation a donné lieu à un jugement, le greffier procède à la saisie dans les huit jours suivant la notification du jugement s’il est exécutoire et, à défaut, suivant l’expiration des délais de recours contre ce jugement » ;
rejeté la demande d’indemnité formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamné M. [W] aux dépens ;
rappelé que la présente décision est immédiatement exécutoire ;
débouté les parties de toutes autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent dispositif ;
dit que le présent jugement sera notifié par lettres recommandées avec accusé de réception par application des dispositions de l’article R.121-15 du code des procédures civiles d’exécution ;
dit que le présent jugement sera communiqué au service des saisies sur rémunérations.
Le 12 octobre 2022, M [W] a interjeté appel du jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe le 23 novembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, l’appelant demande à la cour de :
infirmer le jugement [entrepris en toutes ses dispositions] ;
reporter au 31 décembre 2023 le paiement des sommes dues par M. [W] à HSBC Factoring France ;
reporter en conséquence au 31 décembre 2023 les effets de la saisie des rémunérations ;
débouter la société HSBC Factoring France de l’ensemble de ses prétentions ;
condamner la société HSBC Factoring France au paiement de la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens dont distraction au profit du Cabinet de l’Orangerie.
Au soutien de ses demandes, M. [W] fait valoir que sa situation personnelle est particulièrement obérée et que la saisie de sa pension de retraite le conduirait à ne plus pouvoir faire face à ses obligations alors que ses prêts arriveront à échéance fin 2023, ce qui améliorera sa trésorerie, tandis que de son côté la société HSBC n’a pas besoin d’un paiement immédiat.
Par dernières conclusions transmises au greffe le 21 décembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société HSBC Factoring France, intimée, demande à la cour de :
déclarer M. [W] mal fondé en son appel et l’en débouter ;
confirmer le jugement rendu le 12 septembre 2022 par le tribunal de proximité de Rambouillet en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il réduit le montant des frais des actes d’huissier à la somme de 1 178,51 euros et limite donc la saisie à concurrence de la somme de 161 416,78 euros ;
infirmer le jugement en ce qu’il limite la saisie à concurrence de la somme de 161 416,78 euros ;
autoriser la saisie sur rémunérations à l’encontre de M. [W] pour paiement de la créance d’un montant actualisé au 10 juin 2022 de 165 321,49 euros ;
débouter M. [W] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
condamner M. [W] au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamner M. [W] au paiement des entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl Minault Teriitehau agissant par Maître Teriitehau, avocat, et ce conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, la société HSBC Factoring France fait valoir :
que M. [W] doit être débouté de sa demande de délais de paiement ; qu’il s’est déjà accordé plus de six années de délais de paiement, la première mise en demeure datant du 19 août 2016 ; que, par ailleurs, il dispose des facultés financières pour régler l’intégralité de sa dette ; que si sa situation paraît obérée c’est parce qu’il a choisi de contracter plusieurs prêts à la consommation plutôt que de s’acquitter de sa dette auprès de la société HSBC Factoring France ;
qu’il y a lieu de réformer le jugement en ce qu’il a déduit de la créance le montant des frais d’huissier correspondant à des saisies-attribution pratiquées par la société HSBC Factoring France ; qu’en effet, compte tenu de l’absence de tout règlement spontané de la créance, elle n’a eu d’autre choix que de poursuivre l’exécution forcée à l’encontre de M. [W].
La clôture de l’instruction a été prononcée le 7 mars 2023.
L’audience de plaidoirie a été fixée au 5 avril 2023 et le prononcé de l’arrêt au 11 mai 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, pour autant qu’elles sont soutenues par des moyens développés dans la discussion et ne répond aux moyens que pour autant qu’ils donnent lieu à une prétention correspondante figurant au dispositif des conclusions.
A cet égard, la cour note qu’alors que la déclaration d’appel a dévolu à la cour l’entier litige, et que l’appelant a, au dispositif de ses conclusions, demandé l’infirmation du jugement en tous ses chefs qui lui font grief, sa seule prétention au sens de l’article 4 du code de procédure civile, porte sur l’octroi d’un report du paiement de sa dette qui lui a été refusé par le jugement dont appel.
Seule l’intimée au titre de son appel incident conteste le montant de sa créance retenu comme assiette de la saisie des rémunérations autorisée, en ce que le montant des frais d’exécution n’a été retenu qu’à hauteur de 1178,51 euros.
Le cour approuve cependant le premier juge d’avoir rejeté les frais d’exécution résultant de saisies-attribution ayant porté sur des comptes débiteurs ou clôturés, comme l’y autorise l’article L111-8 du code des procédures civiles d’exécution. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a fixé la créance à la somme de 161 416,78 euros, en deniers ou quittance, arrêtée au 10 juin 2022.
Sur la demande de délais ou de « report de paiement », l’article 1343-5 du code civil ne permet de reporter l’exigibilité de la créance dans un délai maximum de 2 années que pour permettre le règlement intégral de la dette dans ce délai. En l’espèce, M [W] ne propose pas de se libérer de sa dette pour le 31 décembre 2023, et sa motivation suggère qu’il ne le peut pas puisqu’il expose qu’il ne dispose que de l’usufruit sur l’immeuble qui lui reste dont il a donné la nue-propriété à ses enfants ce qui l’empêche d’en disposer. Son seul objectif est de décaler la date de mise en ‘uvre de la saisie des rémunérations dans le temps, pour lui permettre de finir de rembourser d’autres charges, issues de crédits à la consommation, ce qui n’entre pas dans les prévisions de la disposition susvisée.
Le jugement sera donc également confirmé en ce qu’il a rejeté sa demande de délai.
M [W] supportera les dépens d’appel et l’équité commande de mettre à sa charge une indemnité de 1000 euros au profit de l’intimée par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort,
CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions ;
Déboute M [P] [W] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M [P] [W] à payer à la société HSBC Factoring France la somme de 1000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M [P] [W] aux dépens d’appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions posées par l’article 699 alinéa 2 du code de procédure civile.
Arrêt prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,