MB/IC
S.A.S. SEFIA
C/
[R] [T]
[H] [J]
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D’APPEL DE DIJON
2ème chambre civile
ARRÊT DU 11 MAI 2023
N° RG 21/00870 – N° Portalis DBVF-V-B7F-FXP3
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : au fond du 31 décembre 2020,
rendue par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chalon sur Saône
RG : 11-20-557
APPELANTE :
S.A.S. SEFIA agissant poursuites et diligences de son mandataire CONCILIAN, société en nom collectif au capital de 15 000 euros, inscrite au RCS de LILLE METROPOLE dûment habilité à cet effet en vertu d’un mandat de recouvrement en date du 02 janvier 2007 dont le siège social est
sis :
[Adresse 5]
[Localité 4]
représentée par Me Claire LANCELIN, membre de la SCP LANCELIN ET LAMBERT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 62
INTIMÉS :
Madame [R] [T]
née le [Date naissance 2] 1978 à [Localité 8] (71)
domiciliée :
[Adresse 3]
[Localité 6]
Monsieur [H] [J]
né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 9]
domicilié :
[Adresse 3]
[Localité 6]
non représentés
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 mars 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Michèle BRUGERE, Conseiller, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :
Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre,
Michèle BRUGERE, Conseiller,
Leslie CHARBONNIER, Conseiller,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Lydie LAMBERT, adjointe administrative faisant fonction de greffier,
DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 11 Mai 2023,
ARRÊT : réputé contradictoire,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et par Maud DETANG, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le 5 juin 2018, M. [H] [J] et Mme [R] [T] ont conclu avec la société Sefia un contrat de location de longue durée portant sur un véhicule de tourisme neuf de marque Hyundai Tucson d’une durée de 49 mois, moyennant le paiement des loyers sans prestations d’assurance soit : un loyer de 3 774,13 euros et 48 loyers de 264,77 euros, ou avec prestations facultatives d’assurance : soit un loyer de 3 800 euros et 48 loyers de 290,64 euros.
Le véhicule a été livré le 8 juin 2018.
M. [J] et Mme [T] ayant cessé d’honorer le paiement des loyers à compter du 15 décembre 2018, la CGL les a mis en demeure par lettre recommandée avec accusé réception du 9 avril 2019 de payer la somme totale de 1 253,46 euros sous peine de résiliation du contrat, à défaut de régularisation des impayés dans les 8 jours suivant la réception du courrier.
Cette mise en demeure étant restée infructueuse, la CGL à notifié à M. [J] et Mme [T] par courrier recommandé avec accusé réception du 16 avril 2019, la résiliation irrévocable du contrat et réclamé la somme de 9 509,79 euros, avec intérêt au taux légal outre les frais de procédure.
A la requête de la société Sefia, le juge de l’exécution a ordonné à M. [J] et Mme [T] par décision du 4 juillet 2019, de remettre à cette dernière, à leurs frais ou à tout huissier de justice dûment mandaté par celle-ci, le véhicule objet du contrat de location.
La société Sefia a fait citer M. [J] et Mme [T] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chalon sur Saône par acte d’huissier du 24 août 2020, aux fins :
– de les voir condamner solidairement à lui payer la somme de 9 510,73 euros avec intérêt au taux contractuel de 5,86 % à compter du 16 avril 2019,
– de voir ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l’article 1343-2 du code civil,
– de voir ordonner la restitution du véhicule de marque Hyundai modèle Tucson immatriculé [Immatriculation 7] Numéro de série TMAJ 3815AJJ679563 sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
– de dire n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
– de les voir condamner solidairement à lui payer une somme de 150 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
M. [J] et Mme [T] n’ont pas comparu en première instance.
Le juge des contentieux et de la protection a relevé d’office toutes les causes de déchéance du droit aux intérêts conformément à l’article R 632-1 du code de la consommation et aux principes dégagés par la Cour de justice de l’Union européenne et par jugement réputé contradictoire du 31 décembre 2020 a :
– prononcé la déchéance du droit aux intérêts stipulés dans le contrat de location longue durée souscrit le 5 juin 2018, entre M. [J], Mme [T] et la société Sefia,
– condamné M. [J] à payer à la société Sefia la somme de 2 468 euros, avec en sus les intérêts non majorés de 5 points et les intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 5 avril 2020,
– condamné Mme [T] à payer à la société Sefia la somme de 2 468 euros, avec en sus les intérêts non majorés de 5 points et les intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 5 avril 2020,
– dit et ordonné que ces sommes ne porteront pas intérêts au taux légal majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice comme énoncé à l’article L 313-3 du code monétaire et financier, et ce afin d’assurer le caractère effectif et dissuasif de la déchéance du droit aux intérêts, conformément à l’arrêt CJUE du 27 mars 2014 C-565/12,
– ordonné en fait que l’article L 313-3 du code monétaire et financier ne reçoive aucune application sur les deux sommes de 2468 euros,
– débouté la SAS Sefia de ses autres prétentions,
– condamné in solidum M. [J] et Mme [T] aux dépens.
– rappelé que la décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
Par déclaration au greffe du 30 juin 2021, la SAS Sefia a relevé appel de cette décision indiquant que l’appel porte sur tous les chefs de jugement.
Au terme de ses conclusions transmises par voie électronique le 28 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens au soutien de ses prétentions, la société Sefia demande à la cour :
– de réformer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chalon sur Saône le 31 décembre 2020,
Statuant à nouveau :
– de voir condamner solidairement M. [J] et Mme [T] à lui payer la somme de 9 510,73 euros avec intérêt au taux contractuel de 5,86 % à compter du 16 avril 2019,
– d’ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l’article 1343-2 du code civil,
– d’ordonner la restitution du véhicule de marque Hyundai modèle Tucson immatriculé [Immatriculation 7] Numéro de série TMAJ 3815AJJ679563 à son profit, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
– de dire n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
– de condamner solidairement M. [J] et Mme [T] à lui payer une somme de 150 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, de première instance et d’appel.
La société Sefia a fait signifier aux intimés sa déclaration d’appel et ses conclusions avec assignation, par acte du 6 octobre 2021 qui a été délivré à leurs personnes.
M. [J] et Mme [T] n’ont pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 février 2023.
SUR CE
La société Sefia produit le contrat de location, l’historique de compte, les mises en demeure délivrées avant la déchéance du terme le 5 avril 2019 et après la résiliation le 16 avril 2019, un décompte de créance, ainsi que la convention d’assurance , et en application des articles 5 et 11 du contrat de location, après résiliation du contrat de prêt intervenue le 16 avril 2019 sollicite le paiement des sommes suivantes :
– 5 loyers impayés du 15 décembre 2018 au 15 avril 2019 : 1 453,20 euros
– intérêts de retard sur les échéances impayées : 14,33 euros
– indemnités sur impayées de 10 % : 145,32 euros
– acompte sur arriéré à déduire : 290,64 euros
– indemnité de résiliation :
– ajustement article 9a : 3 469,25 ours
– indemnité de 40 % article 11b : 3 353,73 euros
– montant TVA : 1 364,60 euros,
– intérêts calculés du 16 avril 2019 au 16 avril 2019 : 0.94 euros
Total : 9509,749 euros,
Sur la déchéance du droit aux intérêts
La société Sefia fait grief au premier juge d’avoir prononcé la déchéance du droit aux intérêts, par application de l’article L 311-6 devenu l’article L 312-12 du code de la consommation, alors que le contrat en cause n’est ni un contrat de crédit, ni un contrat de crédit-bail mais un contrat de location de longue durée, qui n’est pas soumis aux dispositions du code de la consommation.
Elle conclut en conséquence que la déchéance du droit aux intérêts qui été prononcée par le tribunal pour de prétendus manquements aux dispositions du code de la consommation, l’a été à tort.
A toutes fins, elle indique que la consultation du FICP de M. [J] a fait ressortir une fiche au nom de [O] [N] [E] et en déduit qu’il n’existait pas de fiche au nom de [J].
Il résulte des dispositions des articles L. 312-1 et L. 311-1, 6° du code de la consommation en vigueur au 5 juin 2018 que n’entrent pas dans le champ d’application des dispositions de ce code relatives aux crédits à la consommation, les contrats conclus en vue de la fourniture d’une prestation continue ou à exécution successive de services ou de biens de même nature et aux termes desquels l’emprunteur en règle le coût par paiements échelonnés pendant toute la durée de la fourniture.
Par conséquent, la société Sefia n’était pas tenue de fournir aux locataires la fiche d’informations pré contractuelles visée à l’article L 312-12 du code de la consommation applicable à la date du contrat, ou de consulter le FICP avant de consentir la location, de sorte que la sanction de la déchéance du terme prévue aux articles L 341-1 et suivants du code de la consommation ne pouvait être prononcée par le premier juge, le jugement étant infirmé de ce chef.
Sur la déchéance du droit à l’assurance
La SAS Sefia reproche en outre au premier juge d’avoir prononcé la déchéance de son droit à l’assurance portant sur la somme de 1 267,63 euros, aux motifs d’une part que les offres relatives à l’assurance ont été intégrées au contrat, sans aucune faculté de refus, ce qui est d’évidence une infraction au code de la consommation et d’autre part que la SAS Sefia ne peut exercer pour le compte de l’assureur, les droits que cette dernière pourrait faire valoir.
La société Sefia a qualité pour recouvrer le montant des primes qui sont incluses dans celui des loyers.
Par ailleurs, compte tenu de la nature du contrat litigieux, la référence au code de la consommation sans plus de précision pour déchoir la société Sefia de son droit à l’assurance est inopérante.
Au surplus, il ressort des pièces produites que les conditions financières de la location sont clairement énoncées dans le contrat faisant apparaître le montant du loyer sans prestation d’assurance et avec prestation d’assurance, qui renvoie pour la souscription de l’assurance à une convention distincte. Seul M. [J] a souscrit par acte distinct une assurance protection pécuniaire et a attesté avec Mme [T] en signant le contrat de location, avoir pu exercer utilement l’ensemble des choix et notamment celui de la souscription ou non d’une assurance.
Il apparaît ainsi que les informations fournies aux locataires, les ont mis en situation de décider ou non de l’utilité de souscrire une assurance.
Le jugement sera par conséquent infirmé en ce qu’il a déchu la société Sefia du droit à l’assurance.
Sur l’indemnité prévue à l’article 11 b du contrat de location
Le tribunal a considéré que l’indemnité de 3 353,73 euros sollicitée par la société Sefia constituait une clause pénale et en a réduit le montant à néant.
Le société Sefia soutient au contraire que cette indemnité de 3 353,73 euros sollicitée au titre des stipulations contractuelles ne s’analyse pas en une clause pénale dont le montant peut être modéré ou augmenté par le juge.
Le contrat prévoit en son article 11 b que le locataire versera au bailleur ‘à titre de sanction de l’inexécution de ses obligations contractuelles’, une indemnité de 40 % des loyers postérieurs à la résiliation, outre l’ajustement du montant du loyer prévu à l’article 9.
Cette indemnité stipulée à la fois pour contraindre à l’exécution du contrat et comme évaluation forfaitaire du préjudice subi par le bailleur constitue une clause pénale dont le montant est susceptible d’être modéré par le juge, s’il est manifestement excessif.
En l’espèce, dès lors que la société Sefia est en mesure de récupérer le véhicule loué, et bénéficiera de l’application d’un taux d’intérêt de retard majoré de 5 points par rapport au taux légal depuis la déchéance du terme, il y a lieu de considérer que cette clause qui représente plus de la moitié du montant de la créance majore de manière manifestement excessive les charges financières résultant du contrat.
Son montant doit être réduit à 10 % du montant des loyers HT restant à courir, soit 838,43 euros, cette somme permettant à la société Sefia d’être dédommagée du préjudice lié à la rupture anticipée du contrat.
Par conséquent, le montant de l’indemnité de résiliation est ramené à 4307,68 euros (3 469,25 euros + 838,43 euros), somme à laquelle il convient d’ajouter la TVA soit 861,53 euros.
Le montant total de la créance de la société Sefia s’établit donc à 6 477,09 euros.
Sur la solidarité
La société Sefia soutient à bon droit que la solidarité entre les co-locataires, est stipulée dans le contrat de location longue durée et qu’il n’y avait pas lieu pour le premier juge de l’écarter.
Par conséquent, M. [J] et Mme [T] sont condamnés solidairement à payer à la société Sefia la somme de 6 477,09 euros, avec intérêts au taux de 5,86 % à compter du 16 avril 2019, le jugement étant infirmé de ce chef.
Sur la capitalisation des intérêts
L’article 1343-2 du code civil dispose que Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l’a prévu ou si une décision de justice le précise.
En l’espèce, le contrat ne prévoit pas la capitalisation des intérêts moratoires.
Compte tenu d’une part des modalités de calcul du principal de la créance et du fait que les intérêts moratoires sont d’emblée calculés au taux légal majoré de 5 points, il n’y a pas lieu d’ordonner la capitalisation annuelle des intérêts.
Sur la restitution du véhicule
La société Sefia est fondée à solliciter la restitution du véhicule conformément à l’article 12 du contrat de location.
Par conséquent, le jugement est infirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.
La restitution du véhicule est donc ordonnée, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, débutant à l’expiration de délai d’un mois à compter de la signification du présent arrêt et pendant une durée de trois mois.
Sur les frais de procès
Parties perdantes, M.[J] et Mme [T] sont condamnés solidairement aux dépens de la procédure de première instance et d’appel.
Si les conditions d’application de l’article 700 du code de procédure civile sont réunies en faveur de la société Sefia, l’équité commande dans les circonstances de l’espèce de laisser à sa charge l’ensemble des frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés tant en première instance qu’en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau, et y ajoutant,
Condamne solidairement M. [H] [J] et Mme [R] [T] à payer à la SAS Sefia la somme de 6 477,09 euros, avec intérêts au taux de 5,86 % à compter du 16 avril 2019,
Ordonne à M. [H] [J] et Mme [R] [T] de restituer à la SAS Sefia, le véhicule de marque Hyundai Modèle TUCSON immatriculé EY 480 AK numéro de série TMAJ3815AJJ679563,
Assortit cette injonction d’une astreinte de 100 euros par jour de retard, qui courra à l’expiration du délai d’un mois à compter de la signification du présent arrêt et pendant trois mois,
Condamne solidairement M.[J] et de Mme [T] aux dépens de la procédure de première instance et d’appel,
Déboute la SAS Sefia du surplus de ses demandes.
Le Greffier, Le Président,