Saisine du juge de l’exécution : 11 mai 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/04003

·

·

Saisine du juge de l’exécution : 11 mai 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/04003

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

————————–

ARRÊT DU : 11 MAI 2023

N° RG 20/04003 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LX4X

[B] [P]

c/

[O] [J]

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL CHARENTE-MARITIME-DEUX SEVRES

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :11 mai 2023

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 15 septembre 2020 par le Tribunal judiciaire de PERIGUEUX (RG : 18/00535) suivant déclaration d’appel du 23 octobre 2020

APPELANT :

[B] [P]

né le [Date naissance 3] 1978 à [Localité 8] ([Localité 4])

de nationalité Française

demeurant [Adresse 6]

Représenté par Me Vincent MARIS de la SELARL PLUMANCY, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉES :

[O] [J]

née le [Date naissance 5] 1980 à [Localité 7] ([Localité 4])

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

Non représentée, assignée à étude d’huissier

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL CHARENTE-MARITIME – DEUX-SEVRES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 2]

Représentée par Me Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistée par Me Pierre BOISSEAU de la SCP ROUDET BOISSEAU LEROY DEVAINE MOLLE BOURDEAU, avocat au barreau de SAINTES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 30 mars 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Sylvie HERAS DE PEDRO, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Sylvie HERAS DE PEDRO, conseiller,

Greffier lors des débats : Séléna BONNET

ARRÊT :

– par défaut

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Suivant acte reçu par Maître [I], notaire associée à Saint Jean d’Angély le 9 mai 2006, la SCI Pas du Lièvre, constituée par M. [B] [P] et son épouse Mme [O] [J], a souscrit auprès de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres un prêt de 208 000 euros destiné à financer un immeuble à usage locatif.

Ce prêt était stipulé remboursable sur 20 ans au taux nominal annuel de 3,85% par mensualités de 1.244,06 euros.

Les mensualités ont cessé d’être honorées à compter du 15 mars 2011.

Une sommation de payer a été signifiée le 22 août 2011, laquelle est demeurée infructueuse et a entraîné la déchéance du terme.

La société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres a diligenté une procédure de saisie immobilière du dernier lot de copropriété du bien financé, les autres lots ayant été vendus à l’amiable.

Selon jugement d’orientation du 15 juillet 2015, le juge de l’exécution a fixé la créance de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres à la somme de 84.887,81 euros et a ordonné la vente forcée du bien.

Lors de l’audience du 13 novembre 2015, le bien a fait l’objet d’une adjudication pour un prix de 26.000 euros sur lequel la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-deux Sèvres a reçu une somme de 24 161,59 euros à l’issue de la distribution.

La société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres a mis en demeure le 9 mars 2017 Mme [J] de payer la somme de 58 576,04 euros correspondant à hauteur de 55 935,96 euros au solde du prêt en capital et intérêts et à hauteur de 2 640,08 euros au solde débiteur d’un compte courant de la SCI Pas du lièvre.

Le 11 avril 2017, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres a signifié une sommation interpellative à Mme [J] en qualité de gérante de la SCI Pas du Lièvre, à laquelle cette dernière a répondu en indiquant qu’elle n’était pas la gérante.

La consultation du Registre du commerce et des Sociétés a révélé que M. [P] était le seul gérant déclaré.

Une sommation interpellative a été signifiée à ce dernier le 24 novembre 2017, lequel a répondu qu’il n’était plus le gérant depuis le 5 septembre 2009 en joignant la copie de son jugement de divorce du 15 février 2011 dont il résultait qu’il avait cédé ses parts dans la SCI Pas du Lièvre au terme d’un acte du 5 septembre 2009.

Par actes d’huissier des 21 et 28 février 2018, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres a assigné Mme [J] et M. [P] devant le tribunal de grande instance de Périgueux aux fins de les voir condamner à lui payer le solde du prêt à hauteur des sommes de:

* 49 090,19 euros augmentée des intérêts au taux de 3,85% sur 42 945,08 euros à compter du 28 septembre 2017 et au taux légal sur le solde à compter de l’assignation concernant M. [P],

* 16 363,39 euros, augmentée des intérêts au taux de 3,85% sur 14 315,02 euros à compter du 28 septembre 2017 et au taux légal sur le solde à compter de l’assignation.

Par jugement du 15 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Périgueux a :

– déclaré recevable l’action en paiement engagée par la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres à l’encontre de M. [P] et Mme [J],

– condamné M. [P] à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres la somme de 49 090,19 euros augmentée des intérêts au taux de 3,85% sur la somme de 42 945,08 euros à compter du 28 septembre 2017 et au taux légal sur le solde à compter de l’assignation,

– condamné Mme [J] à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres la somme de 16 363,39 euros augmentée des intérêts au taux de 3,85% sur la somme de 14 315,02 euros à compter du 28 septembre 2017 et au taux légal sur le solde à compter de l’assignation,

– ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil,

– débouté Mme [J] et M. [P] de l’ensemble de leurs prétentions,

– condamné in solidum M. [P] et Mme [J] à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné in solidum M. [P] et Mme [J] aux dépens de l’instance dont distraction au profit de Maître Moustrou, avocat aux offres de droit,

– ordonné l’exécution provisoire du jugement.

M. [P] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 23 octobre 2020.

Par conclusions déposées le 19 janvier 2021, M. [P] demande à la cour de :

– juger M. [P] recevable et bien fondé en son appel, et partant en l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre principal, infirmant en l’ensemble de ses dispositions le jugement rendu le 15 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Périgueux :

– débouter la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres de toutes prétentions à l’encontre de M. [P],

– condamner la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres à verser à M. [P] la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

– condamner Mme [J] à verser à M. [P] la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

A titre subsidiaire,

– condamner Mme [J] à supporter l’intégralité de la créance de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres et la condamner à verser à M. [P], en tout état de cause, la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, et sous la même condamnation aux frais irrépétibles,

A titre encore plus subsidiaire,

– condamner Mme [J] à verser à M. [P] à titre de dommages et intérêts, en cas de condamnation de ce dernier, le montant précis que la cour retiendrait en principal, frais et intérêts de toutes sortes, en ce compris les frais irrépétibles et les dépens et la condamner à verser à M. [P], en tout état de cause, la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

Et à titre infiniment subsidiaire,

– juger que Mme [J] sera tenue à garantir M. [P] de toutes condamnations en principal, frais et intérêts de toutes sortes, en ce compris tous frais de justice et dépens,

– condamner Mme [J] à verser à M. [P] la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre entiers dépens.

Par conclusions déposées le 16 mars 2021, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres demande à la cour de :

– déclarer M. [P] mal fondé en son appel et l’en débouter,

– confirmer en conséquence le jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Périgueux le 15 septembre 2020 en toutes ses dispositions,

– A titre infiniment subsidiaire, et dans l’hypothèse où la cession des parts sociales de M. [P] et Mme [J] serait déclarée opposable à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres malgré son défaut de publication, réformer et condamner Mme [J] à payer la somme de 65 453,58 euros augmentée des intérêts au taux de 3,85% sur 62.813,50 euros à compter du 28 septembre 2017 et au taux légal sur le solde à compter de l’assignation,

– condamner M. [P] ou, à titre infiniment subsidiaire Mme [J], à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime-Deux Sèvres une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [P] ou, à titre infiniment subsidiaire Mme [J], aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Taillard, avocat aux offres de droit.

Mme [J] n’a pas constitué avocat. Elle a été assignée par remise de l’acte à l’étude.

L’affaire a été fixée à l’audience rapporteur du 30 mars 2023.

L’ordonnance de clôture a été fixée au 16 mars 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’action de la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres à l’encontre des associés de la Sci

M. [B] [P] fait valoir qu’il n’est pas démontré par la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime -Deux-Sèvres de vaines poursuites à l’encontre de la Sci, débiteur principal, et qu’elle s’est dispensée d’attraire la Sci en redressement judiciaire.

La Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres réplique qu’elle a exercé toutes les poursuites possibles à l’encontre de la Sci et que la loi n’exige pas que la société, débitrice principale, soit en liquidation.

C’est par une analyse pertinente des pièces qui lui étaient soumises que le premier juge a dit que la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres justifiait de vaines poursuites pour le solde de sa créance auprès de la société civile immobilière et était dès lors légitime à poursuivre ses associés.

En effet, après deux ventes amiables de lots composant l’ensemble immobilier appartenant à la société civile immobilière, la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres a diligenté une procédure de saisie immobilière.

Entre-temps, d’autres lots faisaient l’objet de ventes amiables.

Une saisie-attribution de loyers était pratiquée le 12 janvier 2015 entre les mains d’un locataire commercial qui a cessé de produire ses effets avec l’adjudication.

Au terme de la procédure de saisie immobilière, un projet de distribution a été homologué par le juge de l’exécution le 29 septembre 2016 et la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres a reçu la somme de 24.161,59 euros par chèque du 16 décembre 2016.

L’ensemble des biens immobiliers appartenant à la société civile immobilière a donc été vendu.

Le compte ouvert au nom de la société civile immobilière présente un solde débiteur.

La Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres justifie ainsi avoir entrepris toutes les poursuites possibles à l’encontre de la société et les avoir épuisées, de sorte qu’elle est bien fondée à agir contre les associés en paiement du solde de sa créance, conformément aux dispositions de l’article 1858 du code civil.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur l’opposabilité de la cession de parts sociales

M. [B] [P] fait valoir que si Mme [O] [J] n’a pas procédé aux formalités de publicité foncière de cette cession, la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres savait à la suite de la publication de l’acte de vente d’un lot le 19 janvier 2012 qu’il n’était plus associé de la société civile immobilière.

La Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres réplique que cette cession ne lui est pas opposable faute d’avoir été publiée.

Seule la publication au Registre du Commerce et des sociétés de l’acte de cession du 5 septembre 2009, enregistré au Service des Impôts des Entreprises de Lesparre le 10 septembre 2009, cession de toutes ses parts sociales par M. [B] [P] à Mme [O] [J], l’aurait rendu opposable à la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres, conformément à l’article 1865 du code civil dans sa version applicable au litige, et à l’article 52 du décret N° 78-704 du 3 juillet 1978.

Force est de constater que M. [B] [P] ne justifie pas de cette publication.

Il ne justifie pas non plus que la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres a été partie à un acte auquel aurait été joint les statuts modifiés de la société suite à cette cession, l’acte de 2012 concernant exclusivement la société civile immobilière, vendeur, et l’acquéreur.

Dès lors, c’est à bon droit que le premier juge a dit que M. [B] [P] ne peut opposer ce moyen pour voir écarter son obligation à paiement et le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de M. [B] [P] de voir Mme [J] seule condamnée ou de la voir le relever indemne

M. [B] [P] ne peut non plus arguer de l’incurie de Mme [O] [J] qui n’a pas procédé aux formalités de publication de la cession pour la voir seule prendre en charge la dette résultant de l’emprunt contracté par la société civile immobilière.

En effet, la publication de la cession n’incombait pas spécialement à l’acquéreur des parts mais autant au vendeur qu’à l’acquéreur.

La créance de la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres s’élève, de manière incontestable, au vu de la décision du juge de l’exécution qui a homologué le projet de distribution, à la somme de 65453,58 euros.

Ainsi, le jugement déféré qui a condamné M. [B] [P] à payer à la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres la somme de 49090,19 euros et Mme [O] [J] celle de 16363,39 euros à concurrence des parts sociales détenues par chacun d’eux avant la cession, soit 375 pour M. [B] [P] et 125 par Mme [O] [J], sera confirmé.

Sur les autres demandes

En application de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

M. [B] [P] qui succombe en son appel en supportera donc la charge.

Ces dépens seront recouvrés par Me Taillard, pour les frais avancés par elle, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

M. [B] [P] qui succombe, sera condamné à payer à la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime – Deux-Sèvres la somme de 1000 euros sur ce fondement.

L’équité ne commande pas de condamner Mme [J] à une indemnité sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [B] [P] à payer à la Société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Charente Maritime -Deux-Sèvres la somme de 1000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [B] [P] aux entiers dépens d’appel et autorise Me Taillard à recouvrer les dépens, pour les frais qu’elle a avancés.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x