COUR D’APPEL D’ORLÉANS
CHAMBRE DES URGENCES
COPIES EXECUTOIRES + EXPÉDITIONS :
SCP LAVISSE BOUAMRIRENE GAFTONIUC
SCP DERUBAY – KROVNIKOFF
ARRÊT du 10 MAI 2023
n° : 159/23 RG 22/02298
n° Portalis DBVN-V-B7G-GU5Z
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Jugement, Juge de l’exécution, Tribunal Judiciaire d’ORLÉANS en date du 9 septembre 2022, RG 22/00342, n° Portalis DBYV-W-B7G-F5KV, minute n° 77/22 ;
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE : timbre fiscal dématérialisé n°: 1265 2912 7051 5826
SASU LIMPA NETTOYAGES, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège
[Adresse 2]
reprtésentée par Me Pascal LAVISSE de la SCP LAVISSE BOUAMRIRENE GAFTONIUC, avocats au barreau d’ORLÉANS
INTIMÉE : timbre fiscal dématérialisé n°: 1265 2790 2499 8564
Madame [K] [Y]
[Adresse 1]
représentée par Me Helene KROVNIKOFF de la SCP DERUBAY-KROVNIKOFF, avocats au barreau d’ORLÉANS
‘ Déclaration d’appel en date du 4 octobre 2022
‘ Ordonnance de clôture du 14 mars 2023
Lors des débats, à l’audience publique du 29 mars 2023, Monsieur Michel Louis BLANC, Président de Chambre, a entendu les avocats des parties, avec leur accord, par application des articles 786 et 910 du code de procédure civile ;
Lors du délibéré :
Monsieur Michel BLANC, président de chambre,
Monsieur Yannick GRESSOT, conseiller
Madame Laure Aimée GRUA, conseiller
Greffier : Madame Mireille LAVRUT, faisant fonction de greffier lors des débats et du prononcé par mise à disposition au greffe ;
Arrêt : prononcé le 3 mai 2023 et prorogé au 10 mai 2023 par mise à la disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Par acte en date du 20 janvier 2022, la société Limpa Nettoyages assignait devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Orléans [K] [Y] aux fins, dans le dernier état de ses conclusions, qu’il soit pris acte de ce que [K] [Y] renonce à sa demande au titre de l’irrecevabilité de son action, qu’il soit dit qu’elle était fondée à effectuer un prélèvement à la source sur le rappel de salaire portant sur les années 2014, 2015 et 2016, aux fins de voir prononcer la nullité de la mainlevée de saisie attribution pratiquée les 16 et 31 décembre 2021 et 4 janvier 2022, aux frais de [K] [Y], et de condamnation de cette dernière au paiement de la somme de 10’000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Par jugement en date du 9 septembre 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Orléans déclarait recevables les contestations formées par la société Limpa Nettoyages, déboutait la société Limpa Nettoyages de sa demande de mainlevée des actes de saisie attribution des 16 et 31 décembre 2021 et du 4 janvier 2022, validait lesdites saisies attribution à hauteur de la somme totale de 96’083,51 € en principal et du montant des frais tels que détaillés dans ces actes à l’exception des autres sommes concernées dont les intérêts, déboutait [K] [Y] de ses demandes de régularisation du montant net des sommes dues au titre des rappels de salaire et d’établissement des bulletins de paie, déboutait les deux parties de leurs demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et condamnait la société Limpa Nettoyages à payer à [K] [Y] la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par une déclaration déposée au greffe le 4 octobre 2022, [K] [Y] interjetait appel de ce jugement.
Par une déclaration déposée au greffe le 4 octobre 2022, la société Limpa Nettoyages interjetait également appel de cette décision.
Par une ordonnance du 3 janvier 2023, était prononcée la jonction des deux procédures.
Par ses dernières conclusions en date du 8 mars 2023, [K] [Y] sollicite l’infirmation du jugement du 9 septembre 2022 en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes de régularisation du montant des sommes dues au titre des rappels de salaire et d’établissement des bulletins de paie conforme à ces régularisations, et en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et du surplus de ses prétentions, demandant à la cour, statuant à nouveau, de condamner la société Limpa Nettoyages à régulariser le montant des sommes dues au titre des rappels de salaire pour tenir compte des taux de cotisation et des plafonds en vigueur pour les années concernées par ces rappels avec un prélèvement à la source au taux de 0 %, de valider en conséquence les saisies attribution pour les condamnations prononcées au titre des rappels de salaire en net après régularisation des taux de cotisation augmentées des intérêts au taux légal, d’ordonner à la société Limpa Nettoyages d’établir sous astreinte de 50 € par jour de retard, des bulletins de paie conformes à ces régularisations par année pour les rappels de salaire des années 2014, 2015 et 2016 et de télétransmettre ses bulletins aux organismes sociaux concernés.
À défaut de régularisation et de détermination du montant net des rappels de salaire, elle demande la validation des saisies attribution pour les condamnations prononcées à ce titre à ce jour en la somme brute de 43’450 € outre intérêts au taux légal sur cette somme. En tout état de cause, elle demande l’allocation de la somme de 2000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive. Elle sollicite la confirmation du jugement pour le surplus et réclame le paiement de la somme de 2500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions, la société Limpa Nettoyages sollicite l’infirmation du jugement du 9 septembre 2022, sauf en ce qu’il a débouté [K] Limpa Nettoyages de sa demande de dommages-intérêts et de sa demande de régularisation du montant net des sommes dues au titre des rappels de salaire et d’ établissement de bulletins de paie, demandant à la cour, statuant à nouveau, de prononcer la nullité des trois saisies attribution pratiquées les 16 décembre 2021, 31 décembre 2021 et le 4 janvier 2022 pour décompte érroné, et à défaut d’en prononcer la nullité et d’en ordonner en conséquence la mainlevée. Elle réclame le paiement de la somme de 10’000 € en réparation de son préjudice subi pour procédure abusive, et, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, le paiement de la somme de 4000 € en cause d’appel et de la somme de 2500 € en cause de première instance.
L’ordonnance de clôture était rendue le 14 mars 2023.
SUR QUOI :
Attendu que la recevabilité de la contestation ne fait plus l’objet d’aucune critique ;
Attendu que le juge de l’exécution a rejeté le moyen qui avait été invoqué par la société Limpa Nettoyages aux fins de voir prononcer l’annulation des trois actes de saisie attribution du fait de l’absence de décompte conforme ;
Que le premier juge a en effet motivé sa décision en considérant que le reproche de l’absence de décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus au sens de l’article R.211’1 du code des procédures civiles d’exécution ne peut concerner que les sommes soumises à cotisations et contributions sociales, dont il est constant qu’elles doivent être payées en net et non en brut, ce qui n’était pas ignoré au moment du courrier du 15 décembre 2021, et que, compte tenu de cette imprécision, et alors qu’un chèque d’un montant de 103’492,17 € en date du 1er décembre 2021 avait déjà été adressé le 6 décembre 2021, mais également alors que le bulletin de salaire afférent à l’arrêt du 26 octobre 2021 avait déjà été sollicité par courrier du 15 décembre 2021, il ne peut y avoir de nullité des actes de saisie attribution ;
Attendu que la société Limpa Nettoyages reproche à la juridiction du premier degré de n’avoir pas tiré les conséquences de ses propres constatations, puisque, après avoir relevé que les décomptes transmis par [K] [Y], qui concernent les sommes soumises à cotisations et contributions sociales, ont été intégrées en brut et non en net, et surtout qu’antérieurement à la première saisie attribution du 16 décembre 2021, [K] [Y] n’ignorait pas que ces sommes devaient être payées en net, même si elles avaient été prononcées en brut ;
Que c’est à juste titre que la société Limpa Nettoyages invoque la loi et la jurisprudence qui imposent un décompte détaillé, juste et vérifiable, alors que le décompte fourni par [K] [Y] n’était pas juste puisqu’il intègre des sommes dues en brut, sur lesquelles avait été calculés des intérêts et des
accessoires, alors que les condamnations de nature salariale, ainsi que les indemnités compensatrices
prévues à l’article L.1226’14 du code du travail, sont prononcées en brut, mais payées par l’employeur en net, puisque celui-ci doit en soustraire les cotisations patronales et les cotisations salariales, ainsi que les prélèvements à la source ;
Que [K] [Y], ayant exercé au sein de la société Limpa Nettoyages en qualité de responsable administratif et financier, ne peut invoquer son ignorance de ce détail primordial, s’agissant d’une obligation légale et comptable ;
Que non seulement le calcul réclamé à titre principal n’est pas exact, mais encore se trouve de nature à fausser le calcul des intérêts et des accessoires si un droit proportionnel est applicable ;
Qu’il est indéniable que cette situation cause grief au débiteur ;
Attendu qu’il y a lieu de faire droit à la demande de la société Limpa Nettoyages et de prononcer l’annulation des trois saisies litigieuses, réformant sur ces points la décision querellée ;
Attendu, c’est à juste titre, que le juge de l’exécution a considéré qu’il ne pouvait être faire droit aux demandes formées par [K] [Y] de condamnation à régularisation du montant net des sommes dues au titre des rappels de salaire en l’absence de compétence du juge de l’exécution, qui ne peut même implicitement fixer et déterminer des condamnations non prévues par les titres exécutoires ;
Attendu qu’il est exact comme le soutient [K] [Y] que lorsque la décision qui sert de fondement aux poursuites condamne au paiement de salaires, elle entraîne nécessairement l’obligation de procéder à la délivrance des bulletins de paie correspondants ;
Que cette obligation suppose que soit prononcée par ladite décision une condamnation au paiement desdites sommes, de sorte que le juge de l’exécution, qui ne peut les déterminer, ainsi qu’il l’a été indiqué supra, n’a donc pas compétence pour ordonner l’exécution de l’obligation de remise desdits bulletins qui constitue un accessoire de cette condamnation ;
Attendu que la demande au titre des taux de cotisation et du prélèvement à la source a été rejetée à juste titre par le premier juge, étant ajouté que [K] [Y] ne démontre pas en quoi les taux appliqués seraient autres que ceux qui devraient l’être, et que la société Limpa Nettoyages devait appliquer des prélèvements à la source concernant les rappels de salaire relatifs aux années 2014, 2015 et 2016, même si la règle du prélèvement à la source n’était alors pas encore en vigueur, puisque le prélèvement à la source vise au paiement des revenus de l’année au cours de laquelle ils sont perçus par le salarié ;
Attendu que les conditions requises pour l’allocation de dommages-intérêts au profit de l’une ou l’autre des parties ne sont pas réunies ;
Que le jugement entrepris devra également être confirmé en ce qu’il a rejeté de telles demandes ;
Attendu qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Limpa Nettoyages l’intégralité des sommes qu’elle a dû exposer du fait de la présente procédure ;
Qu’il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de lui allouer à ce titre, pour l’ensemble de la procédure, la somme de 2000 € ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société Limpa Nettoyages de sa demande de mainlevée des actes de saisie attribution des 16 et 31 décembre 2021 et du 4 janvier 2022, en ce qu’il a validé lesdites saisies attribution, en ce qu’il a condamné la société Limpa Nettoyages à payer à [K] [Y] la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en ce qu’il a condamné la société Limpa Nettoyages aux dépens,
Confirme ledit jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau sur les points infirmés,
Prononce la nullité des saisies-attribution pratiquées le 16 décembre 2021, le 31 décembre 2021 et le 4 janvier 2022, et ordonne en conséquence la mainlevée desdites saisies-attribution pratiquées :
– sur les comptes bancaires de la société Limpa Nettoyages auprès de la banque CIC Est pour un montant de 86’789,52 €,
– auprès de la banque Crédit Agricole Loire pour un montant de 37’010,92 €,
– auprès de la banque CIC Ouest pour un montant saisi de 20’844,28 €,
Condamne [K] [Y] à prendre en charge l’ensemble des frais entraînés par lesdites saisies, et à payer à la société Limpa Nettoyages la somme de 2000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne [K] [Y] aux dépens de première instance et d’appel.
Arrêt signé par Monsieur Michel Louis BLANC, président de chambre, et Madame Mireille LAVRUT, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire ;
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,