Saisine du juge de l’exécution : 10 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/00826

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Saisine du juge de l’exécution : 10 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/00826

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 10 MAI 2023

N° RG 21/00826

N° Portalis: DBV3-V-B7F-UL6N

AFFAIRE :

[C] [P]

C/

Société EMERSON AUTOMATION SOLUTIONS FINAL CONTROL FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 février 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CERGY-PONTOISE

Section : E

N° RG : F 17/00256

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Nathalie CAMPAGNOLO

Me Martine DUPUIS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX-NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, dont la mise à disposition de la décision a été fixée au 12 avril 2023, puis prorogée au 19 avril 2023, puis prorogée au 10 mai 2023, dans l’affaire entre :

Monsieur [C] [P]

né le 30 décembre 1975 à [Localité 6]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Nathalie CAMPAGNOLO de la SELARL NCAMPAGNOLO, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de MARSEILLE

APPELANT

****************

Société EMERSON AUTOMATION SOLUTIONS FINAL CONTROL FRANCE venant aux droits de la société PENTAIR VALVES CONTROLS France

N° SIRET : 558 201 620

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 et Me Déborah ATTALI du PARTNERSHIPS EVERSHEDS Sutherland (France) LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J014, substituée à l’audience par Me Audrey TOMASZEWSKI, avocat au barreau de Paris

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 8 février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Aurélie PRACHE, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Aurélie PRACHE, Président,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Marine MOURET

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [P] a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 3 septembre 2012, par la société Pentair Valves Controls. Il y occupait en dernier lieu le poste d’ingénieur technico-commercial.

Cette société, spécialisée dans la conception, fabrication et vente de produits et équipements de robinetterie industrielle, applique la convention collective nationale métallurgie des ingénieurs et cadres. Son effectif était, au jour de la rupture, de plus de 50 salariés.

A l’époque des faits, le groupe Pentair était un groupe industriel composé de 4 divisions : Valves Controls, Flow & Filtration Solutions, Water Quality Systems et Technical Solutions. En France, la division Valves Controls était elle-même constituée des quatre entités juridiques : la société Pentair Valves Controls France, la société FCT, la société GRISS et la société CRT Contrôle.

Le 17 décembre 2015, le comité d’entreprise (le CE) de la société Pentair Valves Controls France a été informé et consulté sur un projet de réorganisation de la division Valves et Controls en France, et s’est vu remettre un document unilatéral fixant le contenu d’un plan de sauvegarde de l’emploi (le PSE) portant sur 42 suppressions de postes, sur un effectif de 109 salariés.

Les 14 janvier et 9 février 2016, le CE a été de nouveau informé et consulté et a désigné le cabinet d’expertise-comptable Diagoris afin de l’assister. Ce dernier a rendu son rapport le 23 mars 2016.

Les 7 et 18 avril 2016, le CE a été de nouveau informé et consulté et a rendu un avis défavorable à ce projet de restructuration.

Le 25 avril 2016, la Direccte a été saisie d’une demande d’homologation du PSE et, le 17 mai 2016, a homologué le document unilatéral portant PSE de la société Pentair Valves Controls France.

Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a été saisi par des salariés aux fins d’annulation de la décision d’homologation du PSE. Par jugement du 10 octobre 2016, le tribunal administratif a débouté les salariés de leur recours. Par arrêt du 22 février 2017, la cour administrative d’appel de Versailles a annulé ce jugement, sans se prononcer sur le moyen des salariés tiré de l’insuffisance du PSE.

Le 7 février 2018, faisant droit au moyen d’irrégularité des catégories professionnelles, le Conseil d’État a annulé l’arrêt, le jugement et la décision d’homologation, écartant en revanche le moyen tiré de l’insuffisance du PSE, par adoption des motifs du jugement du tribunal administratif.

Entre-temps, le 21 juillet 2016, des offres de reclassement ont été proposées au salarié qui, après les avoir refusées, a été licencié par lettre du 29 novembre 2016 pour motif économique dans les termes suivants :

« Objet: Notification de licenciement économique et proposition de congé de reclassement

Cher Monsieur,

Dans le cadre du projet de réorganisation de notre société (ci-après « PVCF ») afin de sauvegarder la compétitivité de la division Valves & Controls, ayant donné lieu à consultation du CE et du CHSCT, ainsi qu’à l’établissement d’un Plan de Sauvegarde de l’Emploi homologué par la DIRECCTE en date du 17 mai 2016, nous sommes conduits à vous notifier votre licenciement pour motif économique.

La présente lettre vise à vous informer du motif de ce licenciement (I) et des droits qui en découlent, notamment la possibilité de bénéficier d’un congé de reclassement (II).

I. MOTIFS DE LICENCIEMENT

Votre licenciement économique est prononcé en raison d’une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de la division Valves & Controls à laquelle appartient la société.

En effet, la division Valves & Controls du Groupe Pentair est confrontée à un changement extrêmement important sur son marché. Elle rencontre non seulement un ralentissement économique d’ensemble, mais également d’importants changements structurels :

– Chute de plus de moitié du prix du baril de pétrole brut entre le deuxième semestre 2014 et la fin 2015, avec des records de plus faible valeur historique encore au premier trimestre 2016 ce qui a pour conséquence des annulations ou reports de projets de la part des donneurs d’ordre,

– Forte exposition (60%) au secteur de l’Energie, qui subit aujourd’hui un ralentissement mondial (recul d’investissements de 20% en 2015 et estimé à 25% pour 2016),

– Dégradation durable des marchés cibles sans perspective d’amélioration dans un avenir proche,

Concurrence accrue dans des marchés en déclin (Oil & Gas, Mines, Energie),

– Évolution des attentes des clients.

La division Valves & Controls doit par conséquent faire face à de nombreux défis organisationnels et structurels, prendre des décisions rapidement en vue de ne pas laisser la situation se dégrader et adapter sa structure au contexte économique. Or, cette division est confrontée aujourd’hui aux carences suivantes:

– Une organisation commerciale qui ne répond malheureusement plus aux attentes des clients et qui nécessite une refonte en profondeur,

– Des gammes de produits redondantes,

– De trop nombreuses marques, d’où une difficulté pour les clients à comprendre l’offre globale du Groupe,

– Une évolution des produits trop lente pour répondre aux besoins des marchés globaux, Des bureaux d’études qui n’ont pas toujours ni les compétences ni les ressources disponibles pour concevoir de nouvelles gammes mieux adaptées aux besoins des clients,

– La difficulté à développer des conceptions les plus communes possibles aux différentes marques,

– Des gammes de produits dont les coûts de production ne sont pas optimisés (et donc non compétitives) et des parts de marché qui progressivement s’érodent par le manque d’une véritable stratégie de gestion de gammes, de leur industrialisation et de leur mise sur le marché,

– Un nombre trop important de centres de distribution et de sites de production, notamment en Europe, un réseau de distribution donc malheureusement sous-optimisé,

– Une structure de coûts calibrée pour un chiffre d’affaires de 2,5 milliards de Dollars mais totalement inadaptée au niveau d’activité de 2015 (chiffre d’affaires de 1,84 milliards de Dollars) et aux prévisions de chiffre d’affaires pour 2016 (1,65 milliard de Dollars).

Les conséquences sur l’activité actuelle et les résultats mondiaux de la division Valves & Controls sont significatives:

– Chute des commandes et des ventes en 2015 de 23% par rapport à 2014, et la tendance baissière s’affirme encore davantage pour 2016. Le résultat opérationnel sur l’exercice 2015 est en chute de 35% par rapport à 2014. Les résultats prévisionnels pour 2016 de la Division en Europe suivent la même tendance,

– Risque de perte d’indépendance (fusion ou acquisition par une autre société) en cas de
dégradation de compétitivité par rapport à ses concurrents.

En ce qui concerne la société Pentair Valves & Controls France SCA, le constat est le suivant :

– Une organisation commerciale qui ne répond malheureusement plus aux attentes des clients et qui nécessite une refonte en profondeur,

– Une approche de type ‘centre d’excellence’ qui n’a pas pu empêcher une érosion de la base clients,

– Des hausses de prix difficiles voire impossibles à faire passer,

– Une structure de coût trop élevée (bureau d’études),

– Un nombre de centres de distribution en Europe trop important et une augmentation des stocks, combinée avec la redondance et l’obsolescence des stocks répartis sur trop de sites qui ne sont pas coordonnés entre eux.

Devant une situation économique dégradée et qui évolue rapidement, la division Valves & Controls se doit de prendre des mesures pour sauvegarder sa compétitivité et assurer sa survie.

Cette division doit, pour rebondir et retrouver de la croissance, engager les actions suivantes :

– Adapter son organisation commerciale pour répondre aux besoins des clients,

– Simplifier ses gammes de produits de manière à les rendre plus lisibles et à accélérer leur évolution future et ainsi répondre pleinement aux besoins des marchés,

– Adopter une organisation moins coûteuse afin de préserver sa compétitivité,

– Optimiser l’utilisation de ses implantations de distribution et de production en tirant le meilleur parti de leur localisation géographique,

– Simplifier les flux de produits afin d’améliorer les conditions de livraison.

Les mesures définies par la division Valves & Controls doivent en outre être rapidement mises en application au niveau de ses sites afin de préserver son activité.

Pour la société Pentair Valves & Controls France SCA, ces mesures se traduisent par la réorganisation de l’équipe commerciale, d’une part, et par le transfert des activités opérationnelles de stockage et de distribution vers le site Pentair de Mönchengladbach en Allemagne, d’autre part.

Ces mesures entrainent notamment la suppression de deux postes appartenant à la catégorie professionnelle « Vendeur Terrain/Soupapes», catégorie professionnelle comprenant deux postes et notamment le poste d’Outside Sales Engineer que vous occupez au sein de notre société. En conséquence, il n’y a pas de critère d’ordre de licenciement à appliquer.

Eu égard à vos qualifications et compétences, nous avons effectué une recherche approfondie des possibilités de reclassement pouvant exister au sein de notre société Pentair Valves & Controls France SCA mais aussi des sociétés du groupe Pentair en France dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation permettent d’effectuer une permutation de personnel.

Nous avons ainsi pu vous faire la proposition suivante :

1) Ingénieur TC Itinérant « High Touch » (Vendeur Terrain)

Secteur: Ile de france

Départements: 60 (Oise), 95 (Val d’Oise), 93 (Seine Saint Denis), 94 (Val de Marne)

Objectif Bookings 2016 : 1,1 Meuros

Potentiel (SOW) : 24Meuros

Nombre de clients « High Touch » : 81 Clients

Nature du contrat : CDI

Durée du travail : Forfait 217 jours

Localisation : Home office – Rattaché à la société PVCF à [Adresse 8]

Rémunération proposée : Rémunération actuelle avec maintien de l’ancienneté acquise

Classification : Cadre

Date de prise de poste : 1er septembre 2016

Durée de la période d’adaptation (ne pouvant être rompue qu’à la seule initiative du salarié) : 1 mois

2) Ingénieur TC Itinérant « High Touch » (Vendeur Terrain)

[Adresse 9]

25 ([Localité 7]), du 70 Haute Saône, du 90 (Territoire de [Localité 5]), du 67 (Bas Rhin), du 68 (Haut Rhin), du 54 (Meurthe et Moselle), du 57 (Moselle) et du 88 (Vosges)

Objectif Bookings 2016 : 1,924 Meuros

Potentiel (SOW) : 41,636 ME

Nombre de clients « High Touch » : 46 Comptes, 58 sites

Nature du contrat : CDI

Durée du travail : Forfait 217 jours

Localisation : Home office – Rattaché à la société PVCF à [Adresse 8]

Rémunération proposée : Rémunération actuelle avec maintien de l’ancienneté acquise

Classification : Cadre

Date de prise de poste : 1er septembre 2016

Durée de la période d’adaptation (ne pouvant être rompue qu’à la seule initiative du salarié) : 1 mois

3) Ingénieur TC Itinérant « High Touch » (Vendeur Terrain)

Secteur: Sud Ouest

Départements: 17 (Charente Maritime), du 16 (Charente), du 33 (Gironde), du 24 (Dordogne), du 47 (Lot et Garonne), du 46 (Lot), du 82 (Tarn et Garonne), du 12 (Aveyron), du 81 (Tarn), du 34 (Hérault), du 40 (Les landes), du 32 (Gers), du 64 (Pyrénées Atlantiques), du 65 (Hautes Pyrénées), du 31 (Haute Garonne), du 09 (Ariège), du 11 (Aude), et du 66 (Pyrénées Orientales).

Objectif Bookings 2016 : 1,186 ME

Potentiel (SOW) : 13,83 Meuros

Nombre de clients « High Touch » : 51 Comptes, 66 sites

Nature du contrat : CDI

Durée du travail : Forfait 217 jours

Localisation : Home office – Rattaché à la société PVCF à [Adresse 8]

Rémunération proposée : Rémunération actuelle avec maintien de l’ancienneté acquise

Classification : Cadre

Date de prise de poste : 1er septembre 2016

Durée de la période d’adaptation (ne pouvant être rompue qu’à la seule initiative du salarié) : 1 mois

Toutefois, en date du 2 août 2016, vous nous avez fait part de votre refus de bénéficier de cette offre de reclassement. En outre, malgré nos efforts nous ne sommes pas en mesure de vous faire de nouvelles propositions de reclassement interne en France.

Par ailleurs, le groupe Pentair ayant des implantations qui se situent en dehors du territoire français, nous vous avons envoyé par courrier recommandé avec AR en date du 8 juillet, distribué en date du 11 juillet 2016, le questionnaire prévu par l’article L. 1233-4-1 du Code du travail. Toutefois, en l’absence de retour positif de votre part dans les délais impartis, nous avons dû considérer que vous n’étiez pas intéressé par une recherche de reclassement interne hors de France.

Compte tenu de ce qui précède, nous nous voyons donc contraints de vous notifier votre licenciement pour motif économique qui sera effectif à la date de première présentation de cette lettre à votre domicile par les services postaux.

De même, nous vous informons que nous renonçons expressément à l’application de la clause de non-concurrence prévue dans votre contrat de travail. En conséquence, aucune contrepartie financière ne vous est due du fait de cette renonciation.

Nous vous rappelons que l’ensemble des mesures sociales applicables Inhérentes au Plan de Sauvegarde de l’Emploi homologué par la DIRECCTE en date du 17 mal 2016, vous ont été adressées par mail en date du 20 Mai 2016 et sont disponibles sur notre intranet « SharePoint PVCF » dans la rubrique Plan de Sauvegarde de l’Emploi.

Vous trouverez ci-après quelques éléments d’information extraits du Plan de Sauvegarde de l’Emploi afin de vous Informer des droits découlant de votre licenciement.

II. DROITS DECOULANT DE VOTRE LICENCIEMENT

a) Congé de reclassement et préavis

Nous vous informons que, conformément aux dispositions de l’article L.1233-71 du Code du travail, vous avez la possibilité de bénéficier d’un congé de reclassement, dont les conditions sont rappelées en pièce jointe.

En cas d’acceptation du congé de reclassement

En application du PSE, votre congé de reclassement, qui inclut le préavis, est d’une durée de 18 mois.

Si vous acceptez ce congé, vous pourrez bénéficier d’actions de formation et de recherche d’emploi destinées à favoriser votre reclassement. Votre préavis vous sera normalement rémunéré et vous bénéficierez, au-delà de la période du préavis, d’une allocation d’un montant brut égal à 80% de votre rémunération moyenne.

Vous devez impérativement nous faire connaître votre souhait de bénéficier du congé de reclassement, le cas échéant, dans les huit jours calendaires à compter de la première présentation de cette lettre à votre domicile, en nous faisant parvenir le coupon-réponse dûment complété. L’absence de réponse dans le délai indiqué sera assimilée à un refus de votre part.

Votre préavis, d’une durée de 3 mois, que nous vous dispensons d’effectuer, débutera à la date de première présentation de cette lettre à votre domicile par les services postaux.

En cas d’acceptation de votre part, votre congé de reclassement débutera au terme du délai de réflexion de huit jours.

En cas de refus du congé de reclassement:

En cas de refus de votre part, vous ne bénéficierez pas du congé de reclassement et vous demeurerez dans les effectifs de la société pendant la durée de votre préavis, d’une durée de 3 mois, qui débutera à la date de première présentation de la présente lettre à votre domicile, mais que nous vous dispensons d’effectuer.

Vous pourrez bénéficier des mesures d’accompagnement prévues par Pôle Emploi dès le terme de votre préavis, aux conditions habituelles de l’assurance chômage. »

Le 7 décembre 2016, le salarié a accepté un congé de reclassement.

Le 28 avril 2017, la division Valves & Controls a été cédée au groupe Emerson.

Le 6 juin 2017, M. [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Cergy-Pontoise aux fins de requalification de son licenciement pour motif économique en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de diverses sommes de nature indemnitaire.

Par jugement du 11 février 2021, le conseil de prud’hommes de Cergy-Pontoise (section encadrement) a :

– débouté M. [P] de l’ensemble de ses demandes,

– débouté la société Emerson Automation Solutions Final Control France venant aux droits de la société Pentair Valves Controls France de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– mis les éventuels dépens de l’instance à la charge de M. [P].

Par déclaration adressée au greffe le 11 mars 2021, M. [P] a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 24 janvier 2023.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 17 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles M. [P] demande à la cour de :

– dire et juger recevable et bien fondé son appel,

– infirmer dans son intégralité le jugement du conseil de prud’hommes de Cergy-Pontoise rendu le 11 février 2021,

statuant à nouveau et y ajoutant,

– dire et juger son action régulière et bien fondée et, en conséquence :

– condamner la société Emerson Automation Solutions Final Control France venant aux droits de la société Pentair Valves Controls France à lui verser :

. 57 690 euros de dommages et intérêts au titre de l’indemnité prévue par l’article L.1235-16 du code du travail,

. 92 304 euros de dommages et intérêts au titre de l’indemnité prévue par l’article L.1235-3 du code du travail pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et subsidiairement pour violation de l’ordre des licenciements et donc perte injustifiée de son emploi,

. 10 000 euros au titre de l’inexécution de bonne foi du PSE,

– fixer le salaire de référence à la somme brute de 3 846 euros,

– condamner la société Emerson Automation Solutions Final Control France venant aux droits de la société Pentair Valves Controls France à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens pour les frais exposés en cause d’appel,

– dire et juger que ces sommes porteront intérêts légaux depuis la saisine du conseil de prud’hommes et outre la capitalisation des intérêts,

– dire qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement à intervenir et en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par société Emerson Automation Solutions Final Control France venant aux droits de la société Pentair Valves Controls France en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouter la société Emerson Automation Solutions Final Control France venant aux droits de la société Pentair Valves Controls France de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 18 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société Emerson Automation Solutions Final Control France venant aux droits de la société Pentair Valves Controls France demande à la cour de :

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Cergy-Pontoise du 11 février 2021 (RG N° 17/00256) en toutes ses dispositions,

en conséquence,

– débouter M. [P] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

– débouter M. [P] de sa demande de 57 690 euros de dommages et intérêts pour illégalité du PSE,

– débouter M. [P] de sa demande de 92 304 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, subsidiairement, pour violation de l’ordre des licenciements et donc perte injustifiée de son emploi,

– débouter M. [P] de sa demande de 10 000 euros au titre de l’inexécution de bonne foi du PSE,

– débouter M. [P] de sa demande de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

à titre subsidiaire,

– réduire à de plus justes proportions le montant des dommages et intérêts réclamés par M. [P] en tenant compte et en déduisant les indemnités supra légales déjà versées,

en tout état de cause,

– condamner M. [P] à verser à la société intimée de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens d’instance.

MOTIFS

A titre liminaire, le salarié expose que la discussion porte sur la liquidation de son préjudice résultant de l’annulation de la décision d’homologation du PSE, et sur l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement compte tenu de l’absence de motif économique valable et de l’insuffisance des efforts de reclassement entrepris pour éviter son licenciement.

Sur les dommages-intérêts au titre de l’indemnité prévue par l’article L.1235-16 du code du travail

Le salarié expose que contre toute attente, les premiers juges ont rejeté la demande d’indemnisation du préjudice afférent à l’annulation de la décision administrative homologuant le document unilatéral fixant le contenu du PSE au motif que l’annulation de la décision d’homologation serait intervenue pour un motif autre que l’absence ou l’insuffisance de PSE et qu’au moment de la notification de la rupture du contrat de travail, le plan de sauvegarde de l’emploi n’était pas illégal, le salarié ne justifiant pas de son préjudice, alors qu’une telle analyse est contraire au texte légal qui prévoit bien le principe absolu d’une indemnisation.

Il fait valoir qu’il entend uniquement que son indemnisation intervienne en considération de la portée de l’irrégularité constatée par le juge administratif, que l’indemnisation est de droit au visa de l’annulation par le juge administratif de la décision d’homologation du PSE, et que cette indemnisation ne peut être inférieure aux 6 derniers mois de salaire, la démonstration préalable d’un préjudice ne faisant pas partie des conditions fixées par la loi.

L’employeur rappelle que la décision d’homologation n’a pas été annulée pour absence ou insuffisance du PSE, mais pour un autre motif, et que par renvoi aux motifs du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, le Conseil d’Etat a considéré qu’il y avait lieu d’écarter le moyen des salariés tiré de l’insuffisance du PSE (pièce adverse n° C-44), ‘que l’annulation de la décision d’homologation intervenant pour un autre motif que l’absence ou l’insuffisance de PSE, le salarié ne serait donc éligible qu’à la réparation prévue par l’article (ancien) L. 1235-16 du code du travail, à savoir une indemnité au moins égale aux salaires des 6 derniers mois, sans préjudice de l’indemnité de licenciement, et non, contrairement à ce que soutient la partie adverse, à la réparation prévue par les articles (anciens) L. 1235-10 et L. 1235-11 du Code du travail.’

**

Dans sa version en vigueur depuis le 01 juillet 2013, l’article L. 1235-10 du code du travail prévoit que :

‘Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, le licenciement intervenu en l’absence de toute décision relative à la validation ou à l’homologation ou alors qu’une décision négative a été rendue est nul.

En cas d’annulation d’une décision de validation mentionnée à l’article L. 1233-57-2 ou d’homologation mentionnée à l’article L. 1233-57-3 en raison d’une absence ou d’une insuffisance de plan de sauvegarde de l’emploi mentionné à l’article L. 1233-61, la procédure de licenciement est nulle.

Les deux premiers alinéas ne sont pas applicables aux entreprises en redressement ou liquidation judiciaires.’

Selon l’article L. 1235-16 du code du travail, dans sa version applicable au litige, issue de la loi du 8 août 2015, l’annulation de la décision de validation mentionnée à l’article L. 1233-57-2 ou d’ homologation mentionnée à l’article L. 1233-57-3 pour un motif autre que celui mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 1235-10 donne lieu, sous réserve de l’accord des parties, à la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. A défaut, le salarié a droit à une indemnité à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9.

Au cas présent, la cour relève d’abord que, contrairement à ce que soutient l’employeur, le salarié forme une demande d’indemnisation au visa de l’article L. 1235-16 et non une demande de ‘réparation prévue par les articles (anciens) L. 1235-10 et L. 1235-11 du Code du travail’

Ensuite, elle rappelle que le salarié a fait l’objet d’un licenciement dans le cadre d’un projet de licenciement collectif ayant donné lieu à l’élaboration du document unilatéral portant PSE, dont la décision d’homologation a été annulée par le juge administratif.

En effet, la décision de l’autorité administrative homologuant le document unilatéral de l’employeur fixant le PSE a été annulée par un arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles du 22 février 2017, puis par arrêt du Conseil d’Etat du 7 février 2018, pour un motif autre que l’insuffisance du PSE.

Le juge administratif a retenu que ‘la définition des catégories professionnelles visées par les licenciements, sur des considérations [(…) tenant] seulement à l’organisation de l’entreprise, ne sont pas propres à regrouper les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune’, de sorte que les salariés ‘sont fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande d’annulation de la décision du 17 mai 2016 homologuant le plan de sauvegarde de l’emploi de la société Pentair Valves et Controls France’.

Le licenciement du salarié, intervenu alors que la décision d’homologation du document unilatéral fixant le PSE a été annulée pour un motif autre que l’insuffisance du PSE, en l’occurrence en raison de l’irrégularité de la définition des critères d’ordre, entre dans les prévisions de l’article L. 1235-16 du code du travail et ouvre droit à une indemnité au moins égale aux six derniers mois de salaire.

Le salarié qui a été privé illégitimement de son emploi subit un préjudice dont il appartient au juge d’apprécier l’étendue, dans les limites de l’article L. 1235-16 du code du travail.

L’indemnité prévue par l’article L. 1235-16 du code du travail se cumule avec l’indemnité conventionnelle de licenciement. En effet, cette indemnité, qui, contrairement à la première, n’a pas pour objet de réparer les conséquences du caractère illégitime de la rupture du contrat de travail, se trouve due, sous condition d’ancienneté, dans toutes les hypothèses de licenciement, sauf faute grave ou lourde.

En l’espèce, le salarié expose (p.32 de ses écritures, dans le cadre de sa demande de dommages-intérêts au visa de l’article L. 1235-3) qu’il a été en congé de reclassement du 7/12/2016 au 27/02/2017, est sorti du congé de reclassement compte tenu du caractère très volontaire etpertinent de ses démarches actives et personnelles pour créer le 9/04/2017 une entreprise qui n’a pas généré de ressources pendant 18 mois, que le 30 septembre 2020 il a été contraint de procéder à la dissolution de cette société, qu’il a perçu en conséquence des indemnités Pôle emploi à compter du 22/06/2017 à raison de 2 319 euros brut par mois, que le 18/02/2019 il a retrouvé un emploi pour une rémunération de 3 062 euros, sans véhicule de fonction, qu’il a décidé en octobre 2020 de créer une nouvelle société avec un autre associé, qu’il a de nouveau été indemnisé par Pôle emploi d’octobre 2020 à avril 2022 compte tenu de ses droits restants et de l’impossibilité de la société de lui générer un revenu, que depuis mai 2022, il perçoit une rémunération de son mandat social de 3 300 euros, sans retrouver le niveau de rémunération qui était le sien.

Eu égard à l’ancienneté du salarié (4 années), qui pouvait bénéficier d’un congé de reclassement de dix-huit mois, à sa rémunération moyenne mensuelle brute (3 846 euros, ce calcul n’étant pas critiqué utilement par l’employeur), à son âge (41 ans) lors du licenciement, aux circonstances de celui-ci, à son aptitude à retrouver un emploi, au fait qu’il a créé une entreprise en février 2017, soit avant même la fin du congé de reclassement, il est justifié que le préjudice subi est supérieur aux six derniers mois de salaire.

Infirmant le jugement, l’indemnité due en application de l’article L. 1235-16 du code du travail doit en conséquence être arrêtée à la somme de 25 000 euros, au paiement de laquelle la société sera donc condamnée.

Sur les dommages-intérêts au titre de l’indemnité prévue par l’article L.1235-3 du code du travail pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et subsidiairement pour violation de l’ordre des licenciements et donc perte injustifiée de son emploi

A l’appui de cette demande, le salarié invoque sa situation financière et personnelle, précédemment rappelée par la cour.

L’employeur objecte que le salarié ne saurait se prévaloir du préjudice de la perte de son emploi, puisqu’il sollicite déjà au titre de ce préjudice une indemnisation, qu’il ne justifie pas du montant exorbitant de sa demande, ne produisant aucun document permettant d’évaluer son préjudice financier.

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L’indemnité prévue par l’article L. 1235-16 du code du travail , dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, qui répare le préjudice résultant pour le salarié du caractère illicite de son licenciement, ne se cumule pas avec l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui répare le même préjudice lié à la perte injustifiée de l’emploi (Soc., 16 février 2022, pourvois n° 19-21.140 et s., publié).

En second lieu, l’inobservation des règles de l’ordre des licenciements, qui n’a pas pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse, constitue une illégalité qui entraîne pour le salarié un préjudice, pouvant aller jusqu’à la perte de son emploi, sans cumul possible avec l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou avec l’indemnité prévue par l’article L. 1235-16 précité.

En l’espèce, la cour relève qu’elle n’est pas saisie d’une demande tendant à voir dire et juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, qui ne figure pas dans le dispositif des écritures du salarié, mais seulement d’une demande de condamnation de l’employeur au paiement de ‘dommages et intérêts au titre de l’indemnité prévue par l’article L.1235-3 du code du travail pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’. Dès lors, en application de l’article 954 du code de procédure civile, selon lequel la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, et en l’absence d’appel incident de l’employeur, la cour ne peut trancher la question du bien-fondé du licenciement.

En outre, et en tout état de cause, dans la mesure où l’indemnité allouée par la cour sur le fondement de l’article L. 1235-16 du code du travail, qui répare, pour le salarié, la perte injustifiée de son emploi, ne se cumule pas avec l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévue par l’article L. 1235-3, la demande du salarié au titre du manquement de l’employeur à son obligation de reclassement ne saurait prospérer, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’examiner si le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse.

Il en est de même s’agissant de la demande subsidiaire de dommages-intérêts au titre de la violation des critères d’ordre, dans la mesure où le préjudice résultant de la perte injustifiée de l’emploi a déjà été réparé par l’octroi de dommages-intérêts en application de l’article L. 1235-16 précité.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande subsidiaire de dommages-intérêts au titre de la violation des critères d’ordre.

Sur les dommages-intérêts au titre de l’inexécution de bonne foi du PSE

Le salarié expose que non seulement les engagements de la cellule de reclassement n’étaient pas significatifs mais ils n’ont pas été respectés, les salariés n’ayant pas été destinataires des 2 ou 3 offres valables d’emploi (OVE) annoncées, que c’est en soit un préjudice distinct de la rupture abusive du contrat, qu’il n’a pas davantage été justifié depuis la saisine du Conseil de la mise en ‘uvre des autres « solutions identifiées » listées dans le PSE, qu’en l’espèce, le concluant n’a jamais été rendu destinataire des 2 OVE, et qu’au final, l’accompagnement par l’Antenne Emploi a été inexistant.

L’employeur objecte que la « solution identifiée » du salarié était la création d’une entreprise, que dès le 16 décembre 2016, lors du bilan d’évaluation, il a indiqué être intéressé par une opportunité de reprise d’entreprise (pièce n° J), opportunité qui était identifiée avec clarté dès le mois de janvier 2017 (pièce n° K), que ce projet correspondait au souhait affiché du salarié, et a d’ailleurs donné lieu à un accompagnement de la part de l’Antenne Emploi et à un accompagnement financier de la part de la société, puisqu’il a reçu une indemnité d’aide à la création d’une entreprise d’un montant de 15 000 euros (pièce n° E), que l’Antenne Emploi a ainsi accompagné le salarié (pièce n° K) avec succès puisqu’une société a été immatriculée.

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La méconnaissance par l’employeur des engagements pris dans le plan de sauvegarde de l’emploi en vue de favoriser le reclassement externe des salariés licenciés n’a pas pour effet de priver les licenciements prononcés de cause réelle et sérieuse, mais peut donner lieu au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par les salariés  (Soc. 21 novembre 2006, n°05-40.656, Bull. V, n°349 ; Soc. 12 février 2008, n°06-45.737 ; Soc. 12 juin 2008, n°07-41.199 ; Soc. 19 janvier 2010, n°08-44.305 et n°08-44.315).

L’engagement de l’employeur de présenter aux salariés un chiffre déterminé d’offres valables d’emplois (OVE) s’analyse en une obligation de résultat : la seule constatation de la soumission d’un chiffre d’emplois nul ou inférieur à celui prévu par le plan est suffisante pour que le juge prud’homal entre en voie de condamnation (Soc. 12 juin 2008 n°07-41.199 ; Soc., 14 décembre 2017, pourvoi n° 16-21.313 et s, diffusé).

En cas de contentieux, l’employeur, débiteur de l’obligation, doit justifier avoir accompli les diligences mises à sa charge par le PSE ou qu’il en a été empêché, notamment en raison du comportement des salariés destinataires des offres (Soc., 17 mai 2017, n°15-29.441).

Au cas présent, le PSE prévoit que tous les salariés ayant adhéré au congé de reclassement peuvent bénéficier de l’accompagnement de l’Antenne Emploi, tel que défini dans le cadre du PSE, à condition d’avoir signé la fiche d’adhésion et d’engagement réciproque avec l’Antenne Emploi (pièce n°2 de l’employeur, page 38 et suivantes), la mission de l’Antenne Emploi se déroulant en 3 phases : d’abord un bilan et une préparation à la recherche d’emploi, puis un plan d’action individualisé, dans l’objectif d’aboutir à une « solution identifiée » pour chaque candidat.

La notion de « solution identifiée » est définie dans le cadre du PSE comme constituée, alternativement de (p. 39 du PSE) :

– un reclassement effectif en CDI ou en CDD / CTT de plus de 6 mois ;

– un projet finalisé de création d’entreprise ou de reprise d’entreprise avec dépôt des statuts ;

– une formation qualifiante ou diplômante de longue durée (plus de 300 heures) ;

– la proposition d’au moins 2 OVE pour les salariés de moins de 50 ans et 3 OVE pour les salariés de plus de 50 ans, correspondants à ses aptitudes ou projet professionnel validé par le consultant ;

– un projet de retraite dans les deux ans maximum, en accord avec le salarié.

Le PSE précise que constitue une OVE :

– un CDI ou un CDD / CTT de plus de 6 mois,

– un poste en adéquation avec les aptitudes, compétences et projets du salarié,

– dans un périmètre inférieur à 50 km et / ou 45 minutes de trajet aller.

En l’espèce, il n’est pas contesté que M. [P], avec l’aide de l’Antenne emploi confiée au cabinet Anthéa, a créé son entreprise, la société Robinetterie Lyon 8, immatriculée le 29 mars 2017, soit moins de six mois après la notification du licenciement, ce choix d’une reprise d’entreprise ayant été évoqué par le salarié dès le bilan d’évaluation /orientation effectué par le cabinet Anthéa, en décembre 2016.

Il en résulte que l’employeur n’a pas méconnu les engagements pris dans le PSE et n’a donc pas manqué à son obligation d’exécution dudit PSE . Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande à ce titre.

Sur les intérêts

Les intérêts au taux légal sur les créances indemnitaires courront à compter du prononcé de la présente décision.

Les intérêts échus des capitaux porteront eux- mêmes intérêts au taux légal dès lors qu’ils seront dus pour une année entière à compter de la demande qui en a été faite.

Sur les demandes annexes

La présente juridiction ne peut pas se prononcer sur le sort des frais de l’exécution forcée, lesquels sont régis par l’article L. 111-8 au code des procédures civiles d’exécution et soumis, en cas de contestation, au juge de l’exécution.

Le salarié sera donc débouté de sa demande sollicitant qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement à intervenir et en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par société Emerson Automation Solutions Final Control France venant aux droits de la société Pentair Valves Controls France en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

L’employeur succombant en appel, par voie d’infirmation, il convient de le condamner aux dépens de première instance et d’appel.

Il convient également de le condamner à payer au salarié la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de rejeter sa demande fondée sur ce texte.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

INFIRME le jugement, mais seulement en ce qu’il déboute M. [P] de sa demande de dommages-intérêts au titre de l’indemnité prévue par l’article L.1235-16 du code du travail, et en ce qu’il met les éventuels dépens de l’instance à la charge de M. [C] [P],

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la société Emerson Automation Solutions Final Control France, venant aux droits de la société Pentair Valves Controls France, à payer à M. [P] la somme de 25 000 euros au titre de l’indemnité prévue par l’article L. 1235-16 du code du travail, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente décision,

ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la société Emerson Automation Solutions Final Control France, venant aux droits de la société Pentair Valves Controls France, à payer à M. [P] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Emerson Automation Solutions Final Control France, venant aux droits de la société Pentair Valves Controls France, aux dépens de première instance et d’appel.

. prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Aurélie Prache, Président et par Madame Dorothée Marcinek, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

 


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