Saisie-attribution : décision du 4 avril 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/03934

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Saisie-attribution : décision du 4 avril 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/03934

4 avril 2023
Cour d’appel de Grenoble
RG n°
22/03934

N° RG 22/03934 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LSGT

C3

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SELARL GABARRA GUIEU PRUD’HOMME – AVOCATS

la SCP MAISONOBE – OLLIVIER

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 04 AVRIL 2023

Appel d’une décision (N° RG 22/03445)

rendue par le Juge de l’exécution de GRENOBLE

en date du 18 octobre 2022

suivant déclaration d’appel du 02 Novembre 2022

APPELANTE :

Mme [W] [X]

née le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Valérie GABARRA de la SELARL GABARRA GUIEU PRUD’HOMME – AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIME :

M. [D] [F]

né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 4] (TUNISIE)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté par Me Elise OLLIVIER de la SCP MAISONOBE – OLLIVIER, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Catherine Clerc, président de chambre,

Mme Joëlle Blatry, conseiller,

Mme Véronique Lamoine, conseiller

DÉBATS :

A l’audience publique du 21 février 2023, Mme Clerc président de chambre chargé du rapport, assistée de Mme Anne Burel, greffier, a entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu ce jour.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

A la suite du divorce de M. [D] [F] et Mme [W] [X] prononcé par jugement du 24 mars 1999 ayant sursis sur la prestation compensatoire et qui a donné lieu à la délivrance d’un certificat de non appel le 29 octobre 1999 après sa signification du 7 avril 1999, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Grenoble, par jugement du 21 octobre 1999 a condamné M. [F] à payer à son ex-épouse une prestation compensatoire sous la forme d’une rente mensuelle de 4.000 francs (609,80€) durant 75 mois et d’un capital de 800.000 francs (121.959,21€) ce dernier étant dit payable dans les deux mois après la signification du jugement.

M. [F] s’est acquitté des rentes mensuelles.

Le 8 février 2011, les ex-époux ont signé un protocole d’accord par devant notaire, sous condition suspensive de réitération de l’acte authentique de liquidation et partage dans les 45 jours de ce protocole faute de quoi ces accords seraient nuls et non avenus, aux termes duquel il était prévu’notamment «’l’attribution à Mme [X] de la maison de [Localité 5] et par confusion sur elle-même, du montant de l’indemnité d’occupation qu’elle pourrait devoir, et ce pour solde de tout compte entre les ex-époux , et notamment pour paiement de la prestation compnesatoire tant en capital qu’en intérêts (‘)’».

La condition suspensive ne s’est pas été réalisée.

Le 5 février 2021, Mme [X] a fait pratiquer une saisie attribution sur le compte de M. [F] ouvert dans le livres du Crédit Mutuel d’Echirolles pour paiement de la somme de 328.932€ correspondant à la prestation compensatoire en capital outre intérêts.

Cette saisie a été dénoncée le même jour au débiteur qui a régularisé à la même date, un acquiescement à saisie attribution à hauteur de 30.000€.

Le 18 novembre 2021, Mme [X] a fait pratiquer une saisie attribution le 18 novembre 2021 entre les mains du notaire dépositaire du prix de vente d’un bien dépendant de la liquidation de la communauté pour paiement de la somme de 300.451,19€ au titre de la prestation compensatoire en capital, intérêts et frais, déduction faite de l’acompte de 30.000€.

Cette saisie, fructueuse à hauteur de 101.931,50€, a été dénoncée à M. [F] le 19 novembre 2021.

Suivant acte extrajudiciaire du 8 décembre 2021, M. [F] a assigné son ex-épouse devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Grenoble aux fins de mainlevée de cette saisie.

L’affaire a été radiée par ordonnance du 17 mai 2022 à défaut de communication de la signification du jugement fondant la saisie attribution’; elle a été remise au rôle à la demande de M. [F] le 8 juillet 2022.

Par jugement contradictoire du 18 octobre 2022, le juge de l’exécution a’:

ordonné la mainlevée de la saisie attribution diligentée le 18 novembre 2021 par Mme [X] entre les mains de la SCP [Z] [O] Associé à l’encontre de M. [F] en exécution du jugement rendu le 21 octobre 1999,

rejeté les autres demandes,

condamné Mme [X] aux entiers dépens,

débouté les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration déposée le 2 novembre 2022, Mme [X] a relevé appel.

L’affaire a été fixée à bref délai.

Dans ses uniques conclusions déposées le 17 décembre 2022 sur le fondement des articles 1113 et suivants, 2240 et suivants du code civil, R.211-1 du code des procédures civiles d’exécution, Mme [X] demande à la cour de’:

juger qu’elle dispose bien d’un titre exécutoire dont elle est recevable à solliciter l’exécution,

infirmer sur ce point la décision déférée,

en conséquence :

juger que le protocole transactionnel du 8 février 2011 matérialise la rencontre de volontés concordantes des parties en cause,

juger en conséquence que cet acte a interrompu le délai de prescription applicable au recouvrement de sa créance de prestation compensatoire,

juger que la saisie attribution qu’elle a fait délivrer le 5 février 2021 a de nouveau valablement interrompu la prescription applicable au recouvrement de sa créance de prestation compensatoire,

juger que M. [F] a admis l’effectivité de sa dette de prestation compensatoire par acte d’acquiescement à saisie du 5 février 2021, comme au travers des paiements exécutés durant 6 ans à compter et en exécution du jugement du 21 octobre 1999,

juger valable et fondée la saisie attribution délivrée par elle entre les mains de Me [O] en date du 18 novembre 2021 ici contestée par M. [F],

à ces différents visas,

condamner M. [F] à lui payer la somme de 121.959,21€ en capital outre intérêts au taux légal depuis le jugement du 21octobre 1999,

juger qu’il conviendra de déduire du capital restant dû, la somme de 30.000€ saisie sur les comptes bancaires de M. [F] par saisie attribution du 5 février 2021, à laquelle il fut acquiescé par celui-ci à même date,

débouter purement et simplement M. [F] de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions contraires ou complémentaires,

condamner M. [F] au paiement d’une somme de 5.000€ au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

le condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par uniques conclusions déposées le 30 janvier 2023 sur le fondement des articles 409, 501 du code de procédure civile, R.211-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, 2224 et 2240 du code civil, M. [F] entend voir la cour’:

confirmer le jugement déféré en ce qu’il a ordonné la mainlevée de la saisie attribution diligentée le 18 novembre 2021 en exécution du jugement rendu le 21 octobre 1999,

juger que Mme [X] n’est pas fondée à agir en exécution forcée à défaut de caractère exécutoire du jugement rendu le 21 octobre 1999,

juger que la créance de Mme [X] est prescrite,

infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a débouté de sa demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et condamner Mme [X] à lui verser la somme de 1.800€ au titre des frais de première instance,

condamner Mme [X] à lui régler la somme de 1.800€ au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

condamner la même aux dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 7 février 2023.

MOTIFS

Sur le titre exécutoire fondant la saisie attribution

Il résulte de l’article 503 du code de procédure civile que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu’après leur avoir été notifiés, à moins que l’exécution n’en soit volontaire.

L’article 504 du même code précise que la preuve du caractère exécutoire ressort du jugement lorsque celui-ci n’est susceptible d’aucun recours suspensif ou qu’il bénéficie de l’exécution provisoire’; dans les autres cas, cette preuve résulte soit de l’acquiescement de la partie condamnée, soit de la notification de la décision et d’un certificat permettant d’établir par rapprochement avec cette notification, l’absence dans le délai, d’une opposition, d’un appel, ou d’un pourvoi en cassation lorsque le pourvoi est suspensif.

Si l’exécution volontaire par l’une des parties de l’un des chefs d’un jugement non exécutoire n’entraîne de sa part aucun acquiescement relativement à d’autres chefs de la même décision, c’est à la condition que ceux-ci soient distincts et indépendants du ou des chefs volontairement exécutés.

En l’espèce, le jugement fixant le quantum de la prestation compensatoire dont Mme [X] poursuit l’exécution en ses dispositions lui ayant alloué un capital, n’a pas été assorti de l’exécution provisoire qui est par principe exclue conformément à l’article 1079 du code de procédure civile.

Il n’a pas été signifié à M. [F], et aucun certificat de non appel a été délivré à son égard.

La preuve de son caractère exécutoire ne peut donc résulter que d’un acquiescement tacite ou exprès de M. [F] à ce jugement.

Or, il n’est pas contesté que M. [F] s’est acquitté volontairement du paiement de la prestation compensatoire allouée sous forme de rente mensuelle durant 74 mois, laquelle n’est qu’une modalité de paiement de la prestation compensatoire mise à sa charge, l’autre modalité consistant dans le versement d’un capital dans les deux mois suivant la signification du jugement’; il y a donc bien indivisibilité et connexité entre les deux chefs du jugement concernant les modalités de paiement d’une seule et unique prestation compensatoire.

Il en résulte qu’en s’acquittant du paiement des rentes mensuelles de prestation compensatoire, M. [F] a acquiescé au jugement non exécutoire du 21octobre 1999.

Le jugelent déféré est donc infirmé en ce qu’il a dit que Mme [X] ne disposait pas d’un titre exécutoire pour fonder la saisie attribution litigieuse, faute de l’avoir fait signifié.

Sur la recevabilité de l’action en exécution du jugement du 21 octobre 1999

Conformément à l’article L.110-1 du code des procédures civiles d’exécution, l’exécution des jugements se prescrit par dix ans et non plus par trente ans depuis la loi 2008-561 du 17 juin 2008 entrée en vigueur le 19 juin suivant.

Compte tenu des dispositions du second alinéa de l’article 2222 du code de procédure civile, Mme [X] disposait d’un délai jusqu’au 19 juin 2018 pour faire exécuter le jugement rendu le 21 octobre 1999, ce point ne faisant d’ailleurs pas débat entre les parties, celles-ci s’opposant uniquement sur l’interruption ou non de ce délai de prescription.

Il est rappelé que tout délai de prescription ne peut être interrompu que par une citation/ assignation en justice, un commandement ou la reconnaissance que le débiteur fait du doit de celui contre lequel il prescrit’; aucun effet interruptif n’est attaché au protocole transactionnel du 8 février 2011, lequel de plus fort est devenu non avenu en l’absence de la réalisation de la condition suspensive qui y était prévue.

Il est vain pour Mme [X] d’exciper de la saisie attribution du 5 février 2021 et de l’acquiescement à cette saisie donné le même jour par M. [F], ces deux événements ne pouvant pas interrompre le cours de cette prescription décennale qui était déjà acquise à leur date.

En définitive, si le jugement du 21 octobre 1999 constituait un titre exécutoire de nature à fonder une mesure d’exécution forcée, Mme [X] n’était plus recevable s’en prévaloir pour initier la saisie attribution du 18 novembre 2021, son action étant prescrite.

Le jugement est en conséquence confirmé par motifs ajoutés et substitués en ce qu’il a ordonné la mainlevée de la saisie attribution en cause.

Sur les mesures accessoires

Succombant dans son recours, Mme [X] est condamnée aux dépens d’appel et conserve ses frais de procédure exposés devant la cour’; elle est dispensée en équité de verser une indemnité complémentaire à M. [F] pour la procédure d’appel.

Le jugement déféré est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Disant le caractère exécutoire du jugement rendu le 21 octobre 1999 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Grenoble mais l’irrecevabilité de l’action en exécution dudit jugement comme étant prescrite,

Confirme le jugement déféré,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en appel,

Condamne Mme [W] [X] aux dépens d’appel.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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