Saisie-attribution : décision du 30 novembre 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 22/01799

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Saisie-attribution : décision du 30 novembre 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 22/01799

30 novembre 2023
Cour d’appel de Pau
RG n°
22/01799

PhD/CS

Numéro 23/4013

COUR D’APPEL DE PAU

2ème CH – Section 1

ARRÊT DU 30/11/2023

Dossier : N° RG 22/01799 – N° Portalis DBVV-V-B7G-IIAE

Nature affaire :

Demande d’ouverture ou contestation d’une procédure de saisie des rémunérations

Affaire :

[X] [B] NÉE [R]

C/

S.A.S.U. EOS FRANCE

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 30 Novembre 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 12 octobre 2023, devant :

Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,

assisté de Mme DENIS, greffier présent à l’appel des causes,

Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

Madame [X] [B] NÉE [R]

née le [Date naissance 2] 1947 à [Localité 6] ([Localité 6])

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/3054 du 29/07/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Pau)

Représentée par Me Francois DUFFAU, avocat au barreau de Pau

INTIMEE :

S.A.S.U. EOS FRANCE SASU EOS FRANCE, dont le siège social est [Adresse 4] ‘ [Localité 5], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Guillaume FRANCOIS de la SELARL SELARL AQUI’LEX, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN

sur appel de la décision

en date du 03 FEVRIER 2022

rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE PAU

FAITS-PROCEDURE -PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES

Par ordonnance du 28 avril 2016, le président du tribunal d’instance de Bordeaux a enjoint à Mme [X] [R], épouse [B], de payer à la société Banque accord la somme de 1.117,72 euros en principal, majorée des intérêts au taux légal à compter du 13 février 2016, outre 1 euro au titre de la clause pénale et celle de 4,77 euros au titre des frais et accessoires.

Cette ordonnance a été signifiée à la débitrice le 2 juin 2016.

La formule exécutoire a été apposée sur l’ordonnance le 11 juillet 2016.

Le 20 juillet 2016, le créancier a fait signifier l’ordonnance ainsi qu’un commandement de payer aux fins de saisie-vente.

Par acte sous seing privé du 9 avril 2019, le créancier a cédé sa créance sur Mme [R] à la société par actions simplifiée Eos France.

Le 16 janvier 2020, celle-ci a fait signifier à la débitrice cédée un nouveau commandement de payer aux fins de saisie-vente en exécution de l’ordonnance d’injonction de payer du 28 avril 2016.

Le 29 janvier 2020, elle a fait pratiquer une saisie-attribution tendant aux mêmes fins.

Le 28 mai 2020, elle a fait pratiquer une seconde saisie-attribution tendant toujours aux mêmes fins.

Les saisies-attribution sont demeurées infructueuses.

Le 25 août 2020, la société Eos France a saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Pau d’une requête, par voie d’intervention, aux fins de saisie des rémunérations de Mme [R] pour avoir le paiement des sommes mises à sa charge par l’ordonnance d’injonction de payer, majorée des intérêts de retard d’un montant de 248,82 euros à compter du 13 février 2016, outre les frais d’exécution, et déduction à faire des versements directs de 390 euros, soit une créance totale de 1.411,40 euros.

Mme [R] a soulevé la prescription des intérêts de retard antérieurs au 20 juillet 2018.

Par jugement du 3 février 2022, le juge des contentieux de la protection a :

– débouté Mme [R] de ses demandes

– dit que la saisie des rémunérations pouvait être réalisée à hauteur de 1.411,40 euros

– condamné Mme [R] aux dépens et à payer à la requérante la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

– débouté les parties de toutes autres demandes non satisfaites.

Par déclaration faite au greffe de la cour le 27 juin 2022, Mme [R], épouse [B], a relevé appel de ce jugement.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 13 septembre 2023.

***

Vu les dernières conclusions notifiées le 22 septembre 2022 par Mme [R] qui a demandé à la cour d’infirmer le jugement entrepris, et, statuant à nouveau, de :

– déclarer prescrits les intérêts échus sur la créance EOS France antérieurement au 20 juillet 2018

– ordonner la mainlevée partielle de l’intervention de la société Eos France sur la saisie des rémunérations de Mme [R]

– fixer la créance à hauteur de 824,48 euros et non 1.411,40 euros

– condamner la société Eos France à lui restituer « l’indûment » perçu de la caisse d’assurance retraite et de santé au travail d’Aquitaine.

Vu les dernières conclusions notifiées le 28 novembre 2022 par la société Eos France qui a demandé à la cour de confirmer le jugement entrepris et, y ajoutant, de condamner Mme [R] à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

L’appelante fait grief au jugement d’avoir rejeté sa fin de non-recevoir tirée de la prescription partielle des intérêts de retard au motif que la signification de l’ordonnance d’injonction de payer faite le 2 juin 2016 avait interrompu la prescription, alors que, le délai d’exécution prévu à l’article L111-4 du code des procédures civiles d’exécution n’est pas applicables aux créances périodiques nées en application de ce titre, lesquelles, en l’espèce, sont soumises à la prescription biennale de l’article L137-2, devenu L218-2 du code de la consommation, et, d’autre part, qu’aucun acte interruptif de la prescription n’est intervenu dans les deux ans du commandement de payer aux fins de saisie-vente signifié le 20 juillet 2016, de sorte que les intérêts antérieurs au 20 juillet 2018 sont prescrits, seuls demeurant exigibles les intérêts courus à compter du 21 juillet 2018 jusqu’au jour de la requête aux fins de saisie des rémunérations. L’appelante en déduit que la créance d’intérêts doit être ramenée à la somme de 20,38 euros au lieu de 248,62 euros.

Selon l’intimée, la prescription biennale de l’action en recouvrement des intérêts de retard a été interrompue par la signification de l’ordonnance d’injonction de payer en date du 2 juin 2016, puis par la signification du commandement de payer aux fins de saisie-vente du 20 juillet 2016, puis par les procès-verbaux de saisie-attribution, puis par la requête aux fins de saisie des rémunérations, de sorte que la prescription n’atteint pas les intérêts antérieurs au 21 juillet 2018.

Cela posé, si en application de l’article L111-4 du code de la consommation, le créancier peut poursuivre pendant dix ans l’exécution du jugement portant condamnation au paiement d’une somme payable à termes périodiques, ces dispositions ne s’appliquent pas aux créances périodiques nées du titre exécutoire, lesquelles sont soumises au délai de la prescription en raison de la nature de la demande.

Il s’ensuit que sont soumis au délai de la prescription en raison de la nature de la créance, les intérêts nés du titre exécutoire, non encore exigibles à la date à laquelle le jugement a été rendu.

A cet égard, il est de jurisprudence constante que les créances périodiques nées d’une créance en principal fixée par un titre exécutoire à la suite de la fourniture d’un bien ou d’un service à un consommateur, tel que le crédit à la consommation souscrit par Mme [R], sont soumises au délai de prescription biennale prévu à l’article L137-2, devenu L218-2 du code de la consommation.

En l’espèce, l’ordonnance d’injonction de payer a été rendue le 28 avril 2016 en mentionnant que les intérêts de retard au taux légal sont dus sur le principal à compter du 13 février 2016.

Cette ordonnance est passée en force de chose après avoir été signifiée le 2 juin 2016.

Cette signification, qui vaut demande en justice, a également interrompu la prescription du recouvrement des causes de l’ordonnance.

Par conséquent, d’une part, l’action en recouvrement des intérêts de retard échus entre le 13 février 2016 et le 28 avril 2016 est soumise, comme la créance principale, à la prescription décennale de l’article L111-4 du code des procédures civiles d’exécution.

Et, l’action en recouvrement des intérêts de retard postérieurs au 28 avril 2016 est soumise à la prescription biennale.

A la date de la demande en paiement formée par requête du 25 août 2020, la première action n’est pas prescrite.

Concernant les intérêts postérieurs, la signification en date du 20 juillet 2016 du commandement de payer aux fins de saisie-vente a interrompu le délai de prescription des intérêts échus entre le 29 avril 2016 et le 20 juillet 2016.

L’intimée se prévaut ensuite de l’effet interruptif attaché à la signification du 16 janvier 2020 du second commandement de payer aux fins de saisie-vente.

Cependant, cet acte a seulement interrompu le délai de la prescription de l’action en paiement des intérêts échus entre le 16 janvier 2018 et le 16 janvier 2020 et fait courir, sur l’ensemble de ceux-ci un nouveau délai biennal, tandis que les intérêts postérieurs ont fait courir le délai de prescription à leur date d’échéance respective.

Par conséquent, d’une part, les intérêts échus entre le 29 avril 2016 et le 15 janvier 2018 sont prescrits.

Et, d’autre part, à la date la requête du 25 Août 2020, les intérêts échus à compter du 16 janvier 2018 ne sont pas prescrits.

Infirmant partiellement le jugement entrepris en ce sens, il convient de déclarer prescrite l’action en recouvrement des seuls intérêts de retard échus du 29 avril 2016 au 15 janvier 2018 inclus et de confirmer le rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription pour le surplus.

Il sera dit que la saisie des rémunérations pourra être pratiquée pour la somme de 1.411,40 euros dont à déduire les intérêts de retard prescrits.

Mme [R] sera déboutée du surplus de ses demandes, étant précisé que la succombance sur les dépens de l’instance en saisie des rémunération est étrangère aux frais et accessoires de la créance fixée dans l’ordonnance d’injonction de payer, ainsi qu’aux frais de recouvrement que le créancier a dû engager pour recouvrer sa créance.

En revanche, il est exact que la contestation de Mme [R] tirée de la prescription d’une fraction des intérêts de retard étant fondée, il y a lieu de mettre les dépens de première instance et d’appel à la charge de la société Eos France.

Les parties seront déboutées de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu’en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME partiellement le jugement entrepris,

et, statuant à nouveau,

DECLARE prescrite l’action en recouvrement des intérêts de retard échus du 29 avril 2016 au 15 janvier 2018,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription pour le surplus de la créance,

AUTORISE la saisie des rémunérations de Mme [R] pour la somme de 1.411,40 euros dont à déduire les intérêts de retard prescrits,

DEBOUTE Mme [R] du surplus de ses demandes,

CONDAMNE la société Eos France aux dépens de première instance et d’appel,

DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Madame PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Catherine SAYOUS, greffier suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.

Le Greffier Le Président

 


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